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17/11/2003 | SUISSE | N°I.707/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 novembre 2003, I.707/02


{T 7}
I 707/02

Arrêt du 17 novembre 2003
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard. Greffier : M.
Wagner

H.________, recourant, représenté par Me Alexandre Curchod, avocat,
rue
Saint-Pierre 2, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 20 juin 2002)

Faits:

A.
H. ________ est venu travaill

er en Suisse dès 1981. Sans formation
professionnelle, il a exercé des emplois de maçon. Le 16 janvier
1996, il a
été victime ...

{T 7}
I 707/02

Arrêt du 17 novembre 2003
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard. Greffier : M.
Wagner

H.________, recourant, représenté par Me Alexandre Curchod, avocat,
rue
Saint-Pierre 2, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 20 juin 2002)

Faits:

A.
H. ________ est venu travailler en Suisse dès 1981. Sans formation
professionnelle, il a exercé des emplois de maçon. Le 16 janvier
1996, il a
été victime d'un accident avec fracture du cubitus droit traitée de
manière
conservative dans un premier temps puis par ostéosynthèse avec une
greffe
osseuse trois mois plus tard. Le cas a été pris en charge par la
Caisse
nationale suisse d'assurance en cas d'accidents.
Le 13 mai 1997, H.________ a présenté une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Du 12 octobre au 6 novembre 1998, il a
effectué un
stage d'observation professionnelle auprès du COPAI du Centre
d'Intégration
Professionnelle (CIP) de Genève. Dans leur rapport final du 13
novembre 1998,
les maîtres de réadaptation ont proposé que la capacité théorique de
travail
de l'assuré soit estimée à 40 % dans un emploi permettant de réaliser
un gain
annuel de 39'741 fr. (base 40 h. par semaine, convention UIG-FTMH,
Genève
1997), de sorte qu'avec une capacité résiduelle de gain de 40 % le
revenu
d'invalide était de 15'896 fr. (39'741 fr. x 40 : 100).
Dans un rapport médical du 18 avril 2000, le docteur A.________,
généraliste
à X.________ et médecin traitant de H.________, a posé les
diagnostics de
status post-fracture de l'avant-bras droit, ostéosynthèse secondaire
pour
non-consolidation, et d'ankylose hyperalgique type épaule main, sans
signe
clinique objectivable. Il indiquait que le patient présentait depuis
le 16
janvier 1996 une incapacité totale de travail dans son métier de
maçon. Etant
droitier, celui-ci devrait pouvoir effectuer tous travaux ne
nécessitant pas
d'utilisation de la force et la mobilité du membre supérieur droit.
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud est arrivé
à la
conclusion que l'assuré serait à même d'exploiter une aptitude au
travail
entière dans de nombreux secteurs de l'économie, que l'éventail des
activités
pouvant être considérées comme « adaptées » pourrait être
relativement large,
tout au moins s'agissant d'un individu positivement orienté à l'égard
du
travail, et que dans ces conditions, le taux exigible serait
probablement de
100 % (rapport intermédiaire du 22 mai 2000).
Dans un projet de décision du 3 octobre 2000, l'office AI a avisé
H.________
qu'il présentait une pleine capacité de travail dans une activité
adaptée à
son état de santé (par exemple un emploi dans une station service,
dans le
domaine de la mécanique légère, dans le montage industriel et les
travaux de
conditionnement) et qu'il pourrait ainsi réaliser un revenu mensuel
brut
moyen de 3'700 fr., soit un revenu annuel brut de 48'100 fr. (3'700
fr. x
13). Sans l'atteinte à la santé, il percevrait dans son ancienne
activité de
maçon un revenu annuel de 57'773 fr. Il résultait de la comparaison
des
revenus une invalidité de 16,74 %.
Par décision du 8 décembre 2000, l'office AI a rejeté la demande.

B.
H.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des
assurances
du canton de Vaud, en concluant, sous suite de frais et dépens, à la
réforme
de celle-ci en ce sens qu'il a droit à une rente entière d'invalidité
avec
effet au 1er janvier 1997.
Par jugement du 20 juin 2002, la juridiction cantonale a admis très
partiellement le recours et réformé la décision attaquée dans le sens
des
considérants, H.________ ayant droit à une aide au placement de
l'assurance-invalidité. Pour le surplus, elle a confirmé celle-ci, au
motif
que l'assuré présentait une invalidité de 31,15 %, taux qui ne
donnait pas
droit à une rente d'invalidité.

C.
H.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, en
concluant, sous suite de dépens, à la réforme de celui-ci en ce sens
qu'il
est dit qu'il a droit à une rente entière d'invalidité, la cause étant
renvoyée à l'intimé pour qu'il fixe la date du début du droit à la
rente.
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud conclut au
rejet du
recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se
déterminer.

Considérant en droit:

1.
D'après la jurisprudence, la législation applicable en cas de
changement de
règles de droit reste celle qui était en vigueur lors de la
réalisation de
l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des
conséquences
juridiques (ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 166 consid. 4b), les faits
sur
lesquels le Tribunal fédéral des assurances peut être amené à se
prononcer
dans le cadre d'une procédure de recours de droit administratif étant
par
ailleurs ceux qui se sont produits jusqu'au moment de la décision
administrative litigieuse (ATF 121 V 366 consid. 1b). Partant, la loi
fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
(LPGA), du 6
octobre 2000, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2003 et qui a
entraîné
des modifications des dispositions dans le domaine de l'AI notamment,
n'est
pas applicable en l'espèce.

2.
Le litige porte sur le droit éventuel à une rente de
l'assurance-invalidité,
singulièrement sur la capacité résiduelle de travail et de gain du
recourant
et sur le taux de son invalidité.
Les premiers juges ont considéré que l'intimé était fondé à retenir
que, du
point de vue somatique, une capacité entière de travail était
exigible de
l'assuré dans une activité légère et adaptée.
Contestant ce qui précède, le recourant, qui se réfère au rapport
final du
COPAI du 13 novembre 1998, fait valoir qu'il présente une capacité
résiduelle
de travail et de gain de 40 %, ce dont il y a lieu de tenir compte
dans
l'évaluation de son invalidité en fixant le revenu d'invalide à
15'896 fr.
par an.

2.1 Selon l'art. 28 al. 2 LAI (en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002),
pour
l'évaluation de l'invalidité, le revenu du travail que l'invalide
pourrait
obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement attendre de
lui,
après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et compte tenu
d'une
situation équilibrée du marché du travail, est comparé au revenu
qu'il aurait
pu obtenir s'il n'était pas invalide.

2.2 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie,
l'accident,
l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité
physique ou
mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour
pouvoir
établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou
le juge a
besoin de documents que le médecin doit lui fournir. L'appréciation
des
données médicales revêt ainsi une importance d'autant plus grande
dans ce
contexte. La jurisprudence a donc précisé les tâches du médecin, par
exemple
lors de l'évaluation de l'invalidité ou de l'atteinte à l'intégrité,
ou lors
de l'examen du lien de causalité naturelle entre l'événement
accidentel et la
survenance du dommage (ATF 122 V 158 consid. 1b et les références;
Spira, La
preuve en droit des assurances sociales, in : Mélanges en l'honneur de
Henri-Robert Schüpbach - Bâle, 2000, p. 268).
Dans l'assurance-invalidité, l'instruction des faits d'ordre médical
se fonde
sur le rapport du médecin traitant destiné à l'Office AI, les
expertises de
médecins indépendants de l'institution d'assurance, les examens
pratiqués par
les Centres d'observation médicale de l'AI (ATF 123 V 175), les
expertises
produites par une partie ainsi que les expertises médicales ordonnées
par le
juge de première ou de dernière instance (VSI 1997, p. 318 consid. 3b;
Stéphane Blanc, La procédure administrative en assurance-invalidité,
thèse
Fribourg 1999, p. 142). Lors de l'évaluation de l'invalidité, la
tâche du
médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à
indiquer dans
quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de
travailler.
En outre, les données médicales constituent un élément utile pour
déterminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré
(ATF 115 V
134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 s. consid. 1 in fine).

2.3 Dans son appréciation des données médicales effectuée le 22 mai
2000,
l'intimé, se référant aux observations professionnelles effectuées en
1998 au
COPAI de Genève, a considéré que si l'on faisait abstraction de
certains
éléments ne se fondant pas sur l'atteinte à la santé proprement dite,
le
recourant serait à même d'exploiter une aptitude au travail entière
dans de
nombreux secteurs de l'économie, où l'éventail des activités «
adaptées »
pourrait être relativement large puisque l'assuré était positivement
orienté
à l'égard du travail, et que dans ces conditions le taux exigible
serait
probablement de 100 %.

2.4 Ce n'est pas dans ce sens, toutefois, que le docteur B.________,
spécialiste FMH en médecine interne à Y.________ et médecin-conseil
du CIP,
s'est exprimé à l'issue du stage d'observation professionnelle. Dans
un
rapport du 19 novembre 1998, il a indiqué que l'évolution se
caractérisait
par l'apparition d'un syndrome douloureux de tout le membre supérieur
droit,
concernant surtout l'épaule, pour lequel aucune explication médicale
satisfaisante n'avait pu être trouvée. Les timides utilisations du
bras droit
n'étaient pas du tout exploitables, et, quelles qu'en soient les
raisons et
les composantes physiques ou psychiques, il fallait considérer que
l'assuré
était et resterait monomanuel. En tenant compte de ce qui précède, il
était
vraisemblable que celui-ci pouvait travailler, mais avec un rendement
très
réduit, ce qui ne serait sans doute exploitable pratiquement qu'en
milieu
protégé.
Les conclusions du docteur B.________ sont du reste corroborées par
les
constatations faites par le COPAI au terme du stage suivi par
l'assuré, dont
les informations recueillies à cette occasion complètent en
l'occurrence
utilement les données médicales (à propos du rôle du COPAI pour
l'évaluation
de l'invalidité : L'instruction des possibilités de gain des personnes
prétendant une rente, compte-tenu d'une séance du 10 novembre 1989
consacrée
aux problèmes de l'expertise médicale et professionnelle, RCC 1990 p.
59 s.;
Karl Abegg, Coup d'oeil sur l'activité des centres d'observation
professionnelle de l'AI [COPAI], RCC 1985 p. 246 s.). En effet, la
synthèse
du 23 novembre 1998 montre que l'inaptitude au travail est
définitive. Par
ailleurs, d'après le rapport final du 13 novembre 1998, le recourant
pourrait
travailler selon un horaire de 40 heures par semaine, mais le
rendement
serait d'environ 40 % dans un emploi de servant de machine (simple et
répétitif) pouvant convenir à une personne quasi monomanuelle et sous
réserve
d'un avis médical contraire.

2.5 Il subsiste des divergences, spécialement quant aux conséquences
sur la
capacité de travail du recourant. Dans son rapport du 19 novembre
1998, le
docteur B.________ a conclu à un rendement très réduit, dont on peut
se
demander s'il est susceptible d'intéresser le monde du travail. De
son côté,
l'intimé, dans un rapport intermédiaire du 22 mai 2000, a retenu un
taux de
capacité de travail de 100 % dans une activité adaptée aux capacités
physiques de l'assuré. Pourtant, ce taux ne figure ni dans la prise de
position du 11 janvier 2000 du docteur C.________, médecin-conseil de
l'assurance-invalidité, ni dans le rapport du docteur A.________ du
18 avril
2000.
On ne saurait donc, sans autres preuves, confirmer ni infirmer le
taux de
capacité de travail de 100 % retenu par les premiers juges.
Contrairement à
l'avis de l'intimé, on ignore, en l'état du dossier, quel facteur
inhérent à
la personne de l'assuré - et étranger à l'invalidité - prédominerait
dans le
cas d'espèce. Sur ce point, une instruction complémentaire est
nécessaire,
afin que l'on sache si les éléments mis en évidence par le docteur
C.________
dans sa prise de position du 11 janvier 2000 sont secondaires par
rapport aux
autres causes indiquées dans le rapport final du COPAI du 13 novembre
1998 et
qui sont directement liées aux capacités physiques du recourant
(arrêt P. du
23 août 2001 [I 699/00]). Pour cette raison, il n'est pas non plus
possible
de confirmer ni d'infirmer le taux de 40 % retenu par le COPAI.
Dès lors il est nécessaire d'annuler le jugement attaqué et la
décision
administrative litigieuse et de renvoyer la cause à l'intimé pour
qu'il
procède, dans le sens de ce qui précède, à une instruction
complémentaire sur
le point de savoir si et dans quelle mesure le recourant subit une
diminution
de sa capacité de travail en raison de ses problèmes physiques. Il
importera
également de déterminer à nouveau si et, cas échéant, dans quelles
activités
le recourant pourrait être incapable de travailler, subsidiairement
quelles
sont les activités exigibles. Quant à la question d'une aide
éventuelle au
placement, elle ne se posera qu'une fois ces questions élucidées.

3.
Le recourant a droit à une indemnité de dépens pour l'instance
fédérale (art.
159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ; SVR 1997 IV n° 110 p. 341
consid. 3; voir
aussi ATF 122 V 278).
Le tribunal cantonal des assurances statuera à nouveau sur les dépens
de
l'instance cantonale (art. 85 al. 2 let. f LAVS, applicable en
l'espèce en
liaison avec l'art. 69 LAI [teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre
2002]), le
jugement attaqué ayant été rendu avant l'entrée en vigueur, le 1er
janvier
2003, de l'art. 61 let. g LPGA (ATF 129 V 114 s. consid. 2).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal des
assurances du
canton de Vaud, du 20 juin 2002, et la décision administrative
litigieuse du
8 décembre 2000 sont annulés, la cause étant renvoyée à l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud pour instruction
complémentaire
au sens des considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud versera au
recourant la somme de 2'000 fr. (y compris la taxe sur la valeur
ajoutée) à
titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera à nouveau sur
les
dépens de l'instance cantonale, au regard de l'issue du procès.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud, à Me Agier, FSIH, et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 17 novembre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.707/02
Date de la décision : 17/11/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-11-17;i.707.02 ?
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