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03/11/2003 | SUISSE | N°4P.135/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 novembre 2003, 4P.135/2003


{T 0/2}
4P.135/2003 /ech

Arrêt du 3 novembre 2003
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, Président, Favre et Chaix, Juge suppléant.
Greffier: M. Carruzzo.

A. ________, recourant, représenté par Me Stéphane Coudray, avocat,
case
postale 244, 1920 Martigny 1,

contre

X.________ SA,
intimée, représentée par Me Antoine Zen Ruffinen, avocat, avenue Ritz
33,
case postale 2135, 1950 Sion 2,
Cour de cassation civile du Tribunal cantonal du canton du Valais,
Palais de
Justice, 1950 Sion

2.

art. 8 et 9 Cst.; procédure civile valaisanne; honoraires d'avocat,

recours de droit public contre le juge...

{T 0/2}
4P.135/2003 /ech

Arrêt du 3 novembre 2003
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, Président, Favre et Chaix, Juge suppléant.
Greffier: M. Carruzzo.

A. ________, recourant, représenté par Me Stéphane Coudray, avocat,
case
postale 244, 1920 Martigny 1,

contre

X.________ SA,
intimée, représentée par Me Antoine Zen Ruffinen, avocat, avenue Ritz
33,
case postale 2135, 1950 Sion 2,
Cour de cassation civile du Tribunal cantonal du canton du Valais,
Palais de
Justice, 1950 Sion 2.

art. 8 et 9 Cst.; procédure civile valaisanne; honoraires d'avocat,

recours de droit public contre le jugement de la Cour de cassation
civile du
Tribunal cantonal du canton du Valais du 13 mai 2003.

Faits:

A.
A. ________, avocat et notaire à Y.________, a défendu les intérêts de
X.________ SA devant les tribunaux valaisans du 18 juillet 1997 au 11
mai
2001, date à laquelle il a résilié son mandat. Dans le cadre de cette
activité, il a déposé une requête de preuve à futur afin de déterminer
l'origine des défauts affectant deux ouvrages; il a ensuite ouvert
action
contre quatre sociétés, concluant à ce que celles-ci soient condamnées
solidairement à payer à X.________ SA le montant de 237'871 fr. 30.

Le 28 mai 2001, A.________ a adressé à X.________ SA une note
d'honoraires
s'élevant à 29'148 fr. Ce montant comprenait notamment des honoraires
judiciaires pour la procédure principale (17'900 fr.) et pour la
procédure de
preuve à futur (3'500 fr.) ainsi qu'un honoraire extrajudiciaire de
1'500 fr.

B.
Le 18 décembre 2001, X.________ SA a saisi le juge des districts de
Martigny
et St-Maurice (ci-après: le juge de district) d'une requête en
fixation
d'honoraires visant à la réduction des honoraires judiciaires et à la
suppression de l'honoraire extrajudiciaire. A.________ a conclu au
rejet de
la requête.

Par décision du 8 juillet 2002, le juge de district a partiellement
admis la
requête. Appliquant les dispositions cantonales topiques, il a
considéré que
les honoraires judiciaires et extrajudiciaires pour la procédure
principale
(19'400 fr.) n'étaient pas excessifs; en revanche, les honoraires
pour la
procédure de preuve à futur devaient être réduits à 1'600 fr.

Contre cette décision, X.________ SA a déposé auprès du Tribunal
cantonal du
canton du Valais une écriture intitulée "pourvoi en nullité valant au
besoin
déclaration d'appel". Cet acte, à la motivation unique, comportait des
conclusions distinctes pour le cas où il serait traité comme un
pourvoi en
nullité et pour celui où il serait traité comme un appel. Le Tribunal
cantonal n'a pas émis de réserve quant à sa recevabilité. Dans sa
détermination, A.________ a conclu à l'irrecevabilité du pourvoi en
nullité,
subsidiairement à son rejet.
Par jugement du 13 mai 2003, la Cour de cassation civile du Tribunal
cantonal
a admis le pourvoi en nullité et modifié la décision du juge de
district au
détriment de l'intimé. Sur le plan de la recevabilité, elle a
considéré que
seule la voie du pourvoi en nullité était ouverte contre la décision
entreprise; dès lors qu'un seul grief était invoqué pour les deux
recours, la
Cour de cassation civile a estimé qu'il serait excessivement
formaliste de
reprocher à la recourante de ne pas avoir énoncé deux fois son unique
grief.

C.
A.________ a formé un recours de droit public contre le jugement du
13 mai
2003 dont il demande l'annulation.

L'intimée conclut au rejet du recours. La cour cantonale se réfère
aux motifs
indiqués dans son jugement.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 129 III 415 consid. 2.1).

Formé en temps utile contre une décision finale rendue en dernière
instance
cantonale, le recours répond aux exigences des art. 86 al. 1, 87 et
89 al. 1
OJ. II est à cet égard recevable.

Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que
les
griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans
l'acte
de recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 127 I 38 consid. 3c).

2.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir rendu une décision
arbitraire.

2.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst.,
ne
résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en
considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral
ne
s'écarte de la décision attaquée que lorsque celle-ci est
manifestement
insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la
situation de
fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique
indiscuté,
ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la
justice
et de l'équité. Pour qu'une décision soit annulée pour cause
d'arbitraire, il
ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable; il faut
encore
que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 8
consid.
2.1).

En matière d'application du droit cantonal, arbitraire et violation
de la loi
ne sauraient être confondus; une violation de la loi doit être
manifeste et
reconnue d'emblée pour être considérée comme arbitraire. Le Tribunal
fédéral
n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que
l'autorité
cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit
uniquement
examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable (ATF 128
II 259
consid. 5).

2.2
2.2.1Le recourant soutient que la cour cantonale a violé la
jurisprudence
constante qu'elle a elle-même établie en matière de recevabilité et
selon
laquelle la réunion dans un seul et même mémoire d'une déclaration
d'appel et
d'un pourvoi en nullité constitue un procédé abusif, propre à rendre
irrecevables l'une et l'autre voies de droit (Cour de cassation
civile du 18
septembre 1992, RVJ 1992 p. 319 consid. 1a; Michel Ducrot, Le droit
judiciaire privé valaisan, p. 483). Comme cela ressort du jugement
précité,
cette jurisprudence s'inspire directement des décisions du Tribunal
fédéral
sur l'irrecevabilité des recours en réforme et de droit public,
déposés dans
des écritures distinctes, mais dont la motivation est identique et se
caractérise par le fait que les griefs propres à un moyen de droit
sont
mélangés avec ceux propres à un autre recours (ATF 115 II 396 consid.
2b).

La jurisprudence fédérale a cependant été précisée, en ce sens que
deux
recours ne sont pas irrecevables du seul fait qu'ils ont la même
motivation;
il ne peut être refusé d'entrer en matière que si, en raison du
mélange des
griefs soulevés, la motivation des recours n'apparaît pas
suffisamment claire
et, partant, ne respecte pas les exigences légales (ATF 116 II 745
consid.
2). En présence de deux recours dont la motivation est similaire, il
convient
ainsi d'examiner si, pour chaque acte de recours, les moyens invoqués
sont
recevables dans le cadre de cette voie de droit et satisfont aux
exigences de
motivation qui lui sont propres (ATF 118 IV 293 consid. 2a).

2.2.2 En l'espèce, la cour cantonale a été saisie d'un seul recours à
la
motivation unique. Par l'intitulé de son acte ("pourvoi en nullité
valant au
besoin déclaration d'appel"), la recourante a signifié qu'elle ne
voulait pas
être privée de la possibilité de voir son pourvoi en nullité traité,
le cas
échéant, comme un appel. La cour cantonale n'y a décelé aucun abus de
procédure, du moment que la motivation que la recourante aurait dû
développer
tant dans son pourvoi en nullité que dans sa déclaration d'appel était
identique: en l'occurrence, une violation de l'art. 16 du Code de
procédure
civile valaisan du 24 mars 1998 (ci-après CPC). Au surplus, l'acte
respectait
les règles de forme des deux recours: le pourvoi en nullité, en
effet, doit
indiquer quelles règles de procédure sont violées et préciser en quoi
consiste la violation (art. 229 al. 2 let. b CPC); quant au mémoire
d'appel,
il doit indiquer dans quelle mesure le jugement est attaqué et
contenir
l'énoncé précis des principes de droit sur lesquels il se fonde (art.
217 al.
2 CPC).

Ainsi, la motivation du recours était suffisamment claire et il
n'existait
pas de mélange de griefs susceptible de créer la confusion entre
plusieurs
voies de droit ou de consacrer un abus de procédure. En admettant la
recevabilité du recours litigieux, la cour cantonale a privilégié le
but
poursuivi par sa jurisprudence (l'interdiction des abus de procédure)
plutôt
que le respect absolu des prescriptions de forme qui doivent en
dernier lieu
servir cette fin. Une telle solution n'est en tout cas pas
arbitraire. Le
premier grief soulevé par le recourant n'est donc pas fondé.

3.
A suivre le recourant, l'admission du recours litigieux consacrerait
encore
une inégalité de traitement tombant sous le coup de l'art. 8 Cst. Cela
reviendrait à admettre - contrairement à la jurisprudence cantonale -
la
recevabilité d'un recours dans une situation identique à d'autres où
la même
autorité n'était pas entrée en matière.

Dans la mesure où ce grief peut se distinguer de celui tiré de
l'application
arbitraire du droit cantonal, il est dénué de fondement. En effet, la
décision querellée consacre une solution qui est conforme aux buts
poursuivis
par la jurisprudence relative à la recevabilité des actes de recours.
Le
simple fait que le recourant, à titre de conseil dans d'autres
litiges, ait
vu ses recours déclarés irrecevables pour des motifs de procédure ne
suffit
pas à fonder une inégalité de traitement. Les situations dont il se
prévaut
sont différentes de celle qui caractérise la présente espèce, ce qui
exclut
toute inégalité de traitement (ATF 129 I 113 consid. 5.1).

4.
Sous couvert de la violation du principe de la bonne foi, ancré à
l'art. 9
Cst., le recourant reproche derechef à la cour cantonale de ne pas
avoir
respecté sa propre jurisprudence. Cet argument tombe à faux pour le
simple
motif qu'on ne discerne pas de contradiction entre la présente
affaire - qui
ne consacre pas d'abus de procédure - et les jurisprudences tendant à
éviter
que les plaideurs abusent des voies que leur offre la procédure.

Mal fondé dans tous ses griefs, le recours ne peut qu'être rejeté.

5.
Le recourant, qui succombe, supportera l'émolument judiciaire et
versera à
l'intimée une indemnité à titre de dépens (art. 156 al. 1 et 159 al.
1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 2'500 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Cour de cassation civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 3 novembre 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.135/2003
Date de la décision : 03/11/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-11-03;4p.135.2003 ?
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