La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2003 | SUISSE | N°C.208/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 octobre 2003, C.208/02


{T 7}
C 208/02

Arrêt du 27 octobre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme von
Zwehl

X.________, recourant, représenté par Me Pierre Heinis, avocat, rue de
l'Hôpital 11, 2000 Neuchâtel,

contre

Caisse cantonale neuchâteloise d'assurance-chômage, rue du Château
19, 2000
Neuchâtel, intimée

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

(Jugement du 25 juin 2002)

Faits:

A.
A.a L'entrepr

ise X.________ a bénéficié, durant la période de juin
1992 à
juin 1995, d'indemnités en cas de réduction de l'horaire de travail.
Sur...

{T 7}
C 208/02

Arrêt du 27 octobre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme von
Zwehl

X.________, recourant, représenté par Me Pierre Heinis, avocat, rue de
l'Hôpital 11, 2000 Neuchâtel,

contre

Caisse cantonale neuchâteloise d'assurance-chômage, rue du Château
19, 2000
Neuchâtel, intimée

Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, Neuchâtel

(Jugement du 25 juin 2002)

Faits:

A.
A.a L'entreprise X.________ a bénéficié, durant la période de juin
1992 à
juin 1995, d'indemnités en cas de réduction de l'horaire de travail.
Sur la
base des rapports établis les 12 septembre et 16 novembre 1995, à la
suite
d'un contrôle, par l'Office fédéral de l'industrie, des arts et
métiers et du
travail (à partir du 1er janvier 1998 : Office fédéral du
développement
économique et de l'emploi [OFDE]; actuellement : Secrétariat d'Etat à
l'économie), la Caisse cantonale neuchâteloise d'assurance-chômage
(ci-après
: la caisse) a, par décision du 23 novembre 1995, réclamé à
l'entreprise
précitée la restitution de la somme de 345'242 fr. 75 au titre
d'indemnités
perçues indûment d'avril 1993 à juin 1995.

Saisi d'un recours, le Département de l'économie publique du canton de
Neuchâtel (ci-après : le DEP) l'a rejeté, par décision du 15 novembre
1996.
Par jugement du 8 janvier 1998, le Tribunal administratif du canton de
Neuchâtel a admis le recours formé par X.________ contre cette
décision,
annulé les décisions de la caisse et du DEP, et renvoyé la cause à
l'administration pour nouvelle décision de restitution concernant les
seules
indemnités perçues pour un travailleur aux mois de mai et juillet
1994. Par
arrêt du 15 décembre 1998, le Tribunal fédéral des assurances a admis
le
recours interjeté par l'OFDE contre le jugement cantonal, et l'a
annulé.

A.b Parallèlement à cette procédure de restitution, l'entreprise
X.________ a
sollicité, le 21 décembre 1995, la remise de l'obligation de
restituer le
montant réclamé par la caisse, en alléguant sa bonne foi ainsi que sa
situation précaire.

Par ordonnance du 5 février 1996, l'Office du chômage du canton de
Neuchâtel
(ci-après : l'office ) a suspendu l'examen de cette demande jusqu'à
droit
connu sur la question de la restitution. Après avoir pris
connaissance de
l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances, il a repris l'instruction
de la
cause et rejeté la demande (décision du 25 janvier 1999). X.________ a
recouru devant le DEP, qui l'a débouté par décision du 25 janvier
2002.

B.
Par jugement du 25 juin 2002, le Tribunal administratif du canton de
Neuchâtel a rejeté le recours formé par X.________ contre cette
dernière
décision.

C.
Le prénommé interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
il requiert l'annulation, en concluant, sous suite de frais et
dépens, à ce
que sa demande de remise de l'obligation de restituer soit acceptée.

La caisse s'en remet à justice, tandis que le Secrétariat d'Etat à
l'économie
a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1 La question de l'obligation de restituer les prestations indûment
perçues
a été tranchée de manière définitive par l'arrêt du 15 décembre 1998
du
Tribunal fédéral des assurances. Le litige porte donc uniquement sur
les
conditions d'une remise de l'obligation de restituer au sens de
l'art. 95 al.
2 LACI (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002,
applicable en
l'espèce [cf. ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b ]).

1.2 Le litige n'ayant pas pour objet l'octroi ou le refus de
prestations
d'assurance, le Tribunal fédéral des assurances doit se borner à
examiner si
les premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par l'excès
ou par
l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si les faits pertinents ont
été
constatés d'une manière manifestement inexacte ou incomplète, ou
s'ils ont
été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en
corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

2.
Selon l'art. 95 al. 2 LACI, si le bénéficiaire était de bonne foi en
acceptant des prestations indues et si leur restitution devait
entraîner des
rigueurs particulières, on y renoncera, sur demande, en tout ou
partie. En ce
qui concerne la notion de bonne foi, la jurisprudence développée à
propos de
l'art. 47 al. 1 LAVS (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre
2002,
applicable en l'espèce; cf. arrêts cités au consid. 1.1 supra) vaut
par
analogie en matière d'assurance-chômage (DTA 2001 no 18 p. 162
consid. 3a).
Ainsi, l'ignorance, par le bénéficiaire, du fait qu'il n'avait pas
droit aux
prestations ne suffit pas pour admettre qu'il était de bonne foi. Il
faut
bien plutôt qu'il ne se soit rendu coupable, non seulement d'aucune
intention
malicieuse, mais aussi d'aucune négligence grave (ATF 112 V 103
consid. 2c et
les références; DTA 2002 no 38 p. 258 consid. 2a, 2001, no 18 p. 162
consid.
3a).

3.
Les premiers juges ont retenu, en substance, que le recourant avait
commis
une négligence grave en se séparant sciemment des rapports de
chantier qui
auraient pu prouver la perte de travail indemnisée par
l'assurance-chômage.

Pour sa part, le recourant soutient qu'il ignorait que les rapports de
chantier étaient susceptibles de servir comme pièces justificatives.
A ses
yeux, du moment que la caisse lui octroyait les indemnités, il était
en droit
de penser, de bonne foi, qu'il satisfaisait à son obligation
d'établir la
perte de travail et qu'il pouvait donc se débarrasser de ces
documents; par
ailleurs, la caisse n'avait jamais formulé la moindre remarque à
réception
des décomptes des heures chômées qu'il lui faisait parvenir.

4.
4.1Dans la mesure où le recourant a précisé, au cours de la procédure
portant
sur la restitution des indemnités (cause C 42/98), que les rapports de
chantiers n'auraient de toute manière pas permis de déterminer les
heures
effectives de travail de ses employés, la destruction de ces pièces
ne joue,
il est vrai, qu'un rôle secondaire. Ce qui est déterminant, en
revanche,
c'est le fait que le recourant n'a mis en place aucun système de
contrôle
interne dans son entreprise qui eût permis de déterminer quelle était
la
perte de travail journalière ou hebdomadaire pour chaque ouvrier. Peu
importe
à cet égard qu'il avait l'habitude de payer ses employés selon un
salaire
mensuel fixe. Au vu des précisions contenues dans les brochures
explicatives
qui lui avaient été remises par l'administration, il pouvait et
devait se
rendre compte que l'établissement de la perte de travail indemnisable
à
teneur des conditions légales était impossible. Une déclaration
signée après
coup par ses employés, selon laquelle la réduction des heures de
travail
annoncée à la caisse aurait été respectée, ne saurait, pour des motifs
évidents, pallier au manque de contrôle des horaires de la part du
recourant.
Dès lors que ce dernier n'a pas pris les dispositions idoines que
l'on était
en droit d'attendre de lui, sa négligence doit être qualifiée de
grave.

4.2 Il n'y a pas lieu de reprocher à la caisse de n'avoir pas
effectué de
contrôles pendant la période où elle versait les indemnités en cas de
réduction de l'horaire de travail. L'administration n'est en effet pas
obligée de procéder pour chaque entreprise concernée à des contrôles
réguliers et systématiques. Afin d'éviter tout retard dans le
versement des
prestations au détriment des travailleurs et des employeurs
intéressés, il a
été renoncé, dans la loi, à donner à l'autorité cantonale compétente
le
pouvoir de mener des enquêtes dans l'entreprise déjà au moment du
dépôt du
préavis de réduction de l'horaire de travail et de l'examen des
conditions
dont dépend le droit à l'indemnité (ATF 124 V 384 consid. 2c). Il est
ainsi
tout à fait admissible que l'administration n'effectue que des
contrôles
ponctuels ou par sondages, que ce soit en cours d'indemnisation ou
seulement
après coup.

4.3 Enfin, le recourant ne saurait rien déduire en sa faveur du fait
que la
caisse lui a alloué les indemnités sans lui indiquer en cours de
versement
que les décomptes produits n'étaient pas suffisants au regard des
conditions
légales du droit à l'indemnité. En effet, la caisse n'a pas à
vérifier de
manière approfondie, au moment du dépôt du préavis ou en cours
d'indemnisation, si toutes les conditions du droit à l'indemnité sont
remplies. Elle ne dispose pas forcément alors de toutes les
informations
nécessaires sur la méthode de contrôle instaurée par l'employeur,
puisque
celui-ci ne doit pas remettre les documents y relatifs au moment du
préavis
de réduction de l'horaire de travail, mais les conserver en vue
d'éventuels
contrôles subséquents. C'est à l'employeur qu'il incombe de
communiquer à
l'administration, à sa demande, tous les documents et informations
nécessaires à un examen approfondi du droit à l'indemnité lorsque des
doutes
apparaissent et qu'un tel examen se révèle nécessaire. En ce sens,
c'est lui
qui supporte le fardeau de la preuve (ATF 124 V 384 consid. 2c; DTA
1998 n°
35 p. 200 consid. 4).

4.4 Vu la négligence grave commise par le recourant, celui-ci ne
remplit pas
la condition de la bonne foi prévue à l'art. 95 al. 2 LACI (dans sa
teneur en
vigueur jusqu'au 31 décembre 2002). Partant, c'est à bon droit que la
juridiction cantonale a confirmé le rejet de sa demande tendant à la
remise
de l'obligation de restituer.

5.
Le recourant, qui succombe, ne peut prétendre de dépens (art. 159 et
135 OJ)
et supportera les frais de justice (art. 134 OJ a contrario; art. 156
al. 1
et 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, d'un montant de 8'000 fr., sont mis à la
charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif du
canton de Neuchâtel et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 27 octobre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.208/02
Date de la décision : 27/10/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-10-27;c.208.02 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award