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24/10/2003 | SUISSE | N°I.35/03

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 24 octobre 2003, I.35/03


{T 7}
I 35/03

Arrêt du 24 octobre 2003
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard. Greffière : Mme
Berset

G.________, recourant, représenté par Me Jean-Marie Agier, avocat,
FSIH,
place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 19 novembre 2002)

Faits:

A.
G. _______

_, peintre en bâtiment, a déposé, le 23 décembre 1996, une
demande
de prestations de l'assurance-invalidité tendant à l'octroi de...

{T 7}
I 35/03

Arrêt du 24 octobre 2003
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard. Greffière : Mme
Berset

G.________, recourant, représenté par Me Jean-Marie Agier, avocat,
FSIH,
place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 19 novembre 2002)

Faits:

A.
G. ________, peintre en bâtiment, a déposé, le 23 décembre 1996, une
demande
de prestations de l'assurance-invalidité tendant à l'octroi de mesures
professionnelles, subsidiairement d'une rente.

L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (OAI) l'a
soumis à
une expertise réalisée par la Clinique X.________ agissant à titre de
Centre
médical d'observation de l'assurance-invalidité (COMAI). Dans un
rapport du 4
mai 1998, les experts ont diagnostiqué, notamment, des lombalgies
chroniques
et une spondylarthrose lombaire susceptibles de diminuer la capacité
de
travail de l'assuré, dans une activité adaptée (sans port de charges
de plus
de 30 kg, sans mouvements en porte-à-faux et sans travaux physiquement
lourds) de 50 % dans un premier temps, celle-ci pouvant passer à 80
%, voire
à 100 %, après une période de réentraînement. Des professions telles
que
pompiste, surveillant ou magasinier semblaient convenir. L'exercice de
l'ancienne profession de peintre, à mi-temps, était également
envisageable,
dans les limites précitées.

A l'issue d'un stage accompli du 26 avril au 25 juillet 1999 au Centre
professionnel d'observation de l'assurance-invalidité (COPAI, les
responsables ont conclu que la capacité de travail de l'assuré
n'était pas
exploitable dans le circuit économique traditionnel (rapport des 16
août / 23
juillet 1999).

Par décision du 22 janvier 2001, l'OAI a mis l'assuré au bénéfice
d'une
demi-rente d'invalidité, avec effet rétroactif au 1er janvier 1999.

B.
G.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des
assurances
du canton de Vaud en concluant à l'octroi d'une rente entière
d'invalidité.
Le 23 octobre 2001, il s'est prévalu d'une aggravation de son état de
santé,
attestée par son médecin traitant, le docteur B.________ (rapport du
19
octobre 2001).

Statuant comme juge unique le 19 novembre 2002, la Présidente du
Tribunal des
assurances a rejeté le recours le considérant comme d'emblée mal
fondé, tout
en renvoyant le dossier à l'OAI pour qu'il entre en matière sur
l'écriture de
l'assuré du 23 octobre 2001 qu'elle a assimilée à une demande de
révision.

C.
G.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
il demande, principalement, la réforme en concluant à l'octroi d'une
rente
entière d'invalidité, dès le 1er janvier 1999. Subsidiairement, il
sollicite
le renvoi de la cause au Tribunal des assurances pour qu'il statue
dans sa
composition habituelle de trois juges, le tout sous suite de dépens.

L'OAI déclare ne pas avoir de remarque à formuler. Le premier juge a
présenté
des observations. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé
à se
déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le recourant reproche au Tribunal des assurances d'avoir statué dans
une
composition incorrecte soit par sa juge unique en lieu et place de
trois
juges. Ce grief, susceptible d'amener la cour de céans à annuler le
jugement
cantonal (RDAT 2002 I no 11 p. 190; arrêt K. du 20 février 2003 [I
791/02] et
citations) et à renvoyer la cause à l'autorité cantonale sans examen
du
litige sur le fond doit être examiné en premier lieu (ATF 127 V 437
consid.
3d/aa). A cet égard, le tribunal n'est pas lié par l'ordre des
conclusions du
recourant.

2.
L'art. 104 let. a OJ dispose que le recours de droit administratif
peut être
formé pour violation du droit fédéral, notion qui comprend aussi le
droit
constitutionnel fédéral et les principes généraux du droit tels que
les
principes d'égalité de traitement et de proportionnalité (ATF 121 V
288
consid. 3 et les arrêts cités).

Il en résulte que ce recours assume le rôle du recours de droit
public à
l'égard de violations des droits constitutionnels commises par une
autorité
cantonale dans les matières soumises au contrôle du Tribunal fédéral
des
assurances en tant que juge administratif (ATF 121 V 288 consid. 3 et
les
références). En raison de la subsidiarité absolue du recours de droit
public,
le recours de droit administratif remplace donc ce dernier dans sa
fonction
de protection des droits constitutionnels des citoyens (ATF 118 Ib 62
consid.
1b, 132 consid. 1a, 112 Ia 358 consid. 4a, 110 Ib 257, 110 V 363
consid. 1c,
108 Ib 73 consid. 1a, 104 Ib 120-121; Auer, La juridiction
constitutionnelle
en Suisse, p. 122 no 212; Grisel, Traité de droit administratif, tome
II, p.
908-909; Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd., p. 92 ss et
235).

3.
3.1Le droit des parties à une composition régulière du tribunal
découle des
art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH (ATF 129 V 198 consid. 4.1, 339
consid.
1.3.1 et les arrêts cités).

3.2 C'est en premier lieu à la lumière des règles cantonales topiques
d'organisation et de procédure qu'il convient d'examiner si une
autorité
judiciaire ou administrative a statué dans une composition conforme à
la loi.

4.
4.1La procédure applicable devant le Tribunal des assurances du
canton de
Vaud est régie, pour l'essentiel, par la Loi vaudoise du 2 décembre
1959 sur
le Tribunal des assurances (RSV 2.02 A; ci-après: LTAss), dont les
art. 3, 10
et 11 ont la teneur suivante:

Art. 3

Les décisions dans la compétence du juge unique sont prises par le
président,
par l'un des deux vice-présidents ou par l'un des juges des
assurances ou,
exceptionnellement, par un assesseur désigné par le président.

Les décisions dans la compétence du tribunal sont prises par une cour
composée de trois magistrats.

Art. 10

Si le recours est tardif ou irrecevable à la forme ou s'il apparaît
d'emblée
comme manifestement mal fondé ou bien fondé, le juge instructeur
statue comme
juge unique sur le vu du dossier et après avoir provoqué, le cas
échéant, des
explications complémentaires des parties.

Art. 11

Les procès dont le capital litigieux est inférieur à 8'000 francs
sont de la
compétence du juge instructeur. Si la solution qui doit être donnée au
recours pose des questions de principe ou présente des difficultés
particulières, le juge instructeur peut soumettre la cause au
tribunal.

Le tribunal est compétent si le capital litigieux est de 8'000 francs
ou plus
ou si la valeur litigieuse ne peut être déterminée ou encore si la
contestation ne porte pas sur un droit de nature pécuniaire.

4.2 En l'espèce, le litige ayant trait au droit du recourant à une
rente
entière d'invalidité, la valeur litigieuse n'était, en tous les cas,
pas
inférieure à 8'000 fr. Aussi convient-il d'examiner, en premier lieu,
si la
juge unique a interprété ou appliqué arbitrairement l'art. 10 LTAss
sur
lequel elle a fondé sa compétence. Il s'agit, en particulier - la
juge unique
ayant rejeté le recours sur le fond - d'examiner si elle pouvait
considérer
sans tomber dans l'arbitraire, sur la base d'un examen préalable
sommaire du
dossier de la cause - mais portant néanmoins sur l'ensemble des
questions de
fait et de droit déterminantes, indépendamment des griefs soulevés et
des
conclusions prises par les parties, que le recours apparaissait
d'emblée
manifestement mal fondé.

4.3 Le premier juge a rejeté le recours en se fondant sur le rapport
du COMAI
(du 4 mai 1998), selon lequel le recourant présente une incapacité de
travail
de 50 % dans une activité légère adaptée, ou dans son ancienne
occupation de
peintre, à condition que l'activité tienne compte d'un certain nombre
de
limitations. Or, dans son recours cantonal, l'assuré invoquait le
rapport du
COPAI (des 16 août/23juillet 1999), dont il ressort qu'il n'est en
mesure
d'exercer normalement aucune des activités jugées appropriées par les
experts
du COMAI, ni celles de fonctionnaire postal en uniforme et d'employé
effectuant des métrés dans des entreprises de peinture ou des travaux
d'entretien et de conciergerie, en dépit du fait qu'il ne rechignait
pas à la
tâche. Cette appréciation émane d'une institution de l'AI dont la
fonction
est de compléter les données médicales en examinant concrètement dans
quelle
mesure l'assuré est à même de mettre en valeur une capacité de
travail et de
gain sur le marché du travail (voir au surplus, à propos du rôle des
COPAI
pour l'évaluation de l'invalidité : L'instruction des possibilités de
gain
des personnes prétendant une rente, compte-rendu d'une séance du 10
novembre
1989 consacrée aux problèmes de l'expertise médicale et
professionnelle, RCC
1990 p. 59 ss; Karl Abegg, Coup d'oeil sur l'activité des centres
d'observation professionnelle de l'AI [COPAI]). Dans la mesure où
l'appréciation du COPAI divergeait sensiblement de celle du COMAI, il
s'agissait pour le tribunal - comme le premier juge l'a d'ailleurs
fait -, de
confronter les deux rapports (comme par exemple dans l'arrêt P. du 23
août
2001, [I 699/00]), au besoin en requérant un complément d'instruction
de la
part du COPAI ou du COMAI. La nécessité d'une telle discussion exclut
que
l'on puisse qualifier d'emblée le recours cantonal de mal fondé.

Il s'ensuit que la juge unique, qui ne pouvait, de la sorte, sans
tomber dans
l'arbitraire, considérer le recours d'emblée comme manifestement mal
fondé,
n'était ainsi pas compétente pour connaître du litige, qui devait être
tranché par le Tribunal des assurances dans sa composition ordinaire
de trois
juges (art. 3 al. 2 LTAss). Le droit constitutionnel du recourant à
voir sa
cause jugée par un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant
et
impartial au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. a, dans cette mesure, été
violé.

5.
Le recourant, qui s'est fait assister d'un représentant de la
Fédération
suisse pour l'intégration des handicapés, obtient gain de cause et
peut, en
conséquence, prétendre une indemnité de dépens (art. 159 al. 1 en
corrélation
avec l'art. 135 OJ).

Les motifs du présent arrêt constituent, par ailleurs, des
circonstances
justifiant que ces dépens soient mis à la charge de l'Etat de Vaud et
non de
l'office intimé (arrêt non publié F. du 6 juillet 1994 [I 56/94]).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal des
assurances du
canton de Vaud, du 19 novembre 2002 est annulé, la cause étant
renvoyée à
l'autorité judiciaire de première instance pour qu'elle statue à
nouveau en
procédant conformément aux considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Etat de Vaud versera à la recourante la somme de 2'000 fr. (y
compris la
taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud, à l'Etat de Vaud et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 24 octobre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.35/03
Date de la décision : 24/10/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-10-24;i.35.03 ?
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