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25/09/2003 | SUISSE | N°6S.221/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 septembre 2003, 6S.221/2003


{T 0/2}
6S.221/2003 /pai

Arrêt du 25 septembre 2003
Cour de cassation pénale

MM. et Mme les Juges Schneider, Président,
Kolly et Brahier Franchetti, Juge suppléante.
Greffière: Mme Bendani.

X. ________,
recourant, représenté par Me Albert J. Graf, avocat, avenue
Alfred-Cortot 5,
1260 Nyon,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne.

Escroquerie; fixation de la peine; sursis,

pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribu

nal cantonal vaudois, Cour
de
cassation pénale, du 21 octobre 2002.

Faits:

A.
Par jugement du 20 juin 2002, ...

{T 0/2}
6S.221/2003 /pai

Arrêt du 25 septembre 2003
Cour de cassation pénale

MM. et Mme les Juges Schneider, Président,
Kolly et Brahier Franchetti, Juge suppléante.
Greffière: Mme Bendani.

X. ________,
recourant, représenté par Me Albert J. Graf, avocat, avenue
Alfred-Cortot 5,
1260 Nyon,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne.

Escroquerie; fixation de la peine; sursis,

pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois, Cour
de
cassation pénale, du 21 octobre 2002.

Faits:

A.
Par jugement du 20 juin 2002, le Tribunal correctionnel de
l'arrondissement
de La Côte a condamné X.________, pour escroquerie, à dix mois
d'emprisonnement, cette peine étant complémentaire à celle de deux
mois
d'emprisonnement avec sursis prononcée le 29 mai 2001 par le Procureur
général de Genève pour violation de l'obligation de tenir une
comptabilité,
détournement de valeurs patrimoniales mises sous main de justice et
inobservation des règles sur la procédure de faillite. Il l'a libéré
des
accusations d'abus de confiance, d'appropriation illégitime, de
dommages à la
propriété et de fausse déclaration d'une partie en justice.

B.
Par arrêt du 21 octobre 2002, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois a rejeté le recours d'X.________ et confirmé le
jugement
attaqué.

Il en ressort, en résumé, les éléments suivants.

B.a Né à Genève en 1933, X.________ a suivi une formation
commerciale. De
1965 à 1991, il a vécu en France, où il était salarié et gagnait bien
sa vie.
Après un premier divorce, il s'est remarié avec A.________, née en
1943. Le
couple est venu en Suisse en 1991 et s'est établi à Bougy-Villars,
puis à
Dully. X.________ travaillait alors comme consultant indépendant en
marketing
et son épouse disposait de quelques biens. Ils menaient un train de
vie d'un
niveau certain - villa au loyer élevé, véhicule coûteux et séjours en
hôtels
de luxe - qu'ils ont conservé dans les années suivantes, alors que
leurs
moyens diminuaient. Entre 1993 et 1996, X.________ s'est consacré au
développement d'un projet d'usine d'embouteillage d'eau minérale. Il
a pour
cela emprunté des sommes importantes qu'il a investies à perte
puisque le
projet n'a jamais abouti. Sans revenus durant toute cette période, il
s'est
retrouvé dans une situation financière complètement obérée.
Actuellement, le
couple X.________ est quasiment ruiné, ne disposant plus que de ses
rentes
AVS et du salaire modeste de l'épouse qui travaille à temps partiel
comme
secrétaire.

B.b Le 30 août 1997, se présentant toujours comme un "expert en
commerce
international et administrateur de sociétés au revenu brut annuel
d'environ
300'000 francs", X.________ a acheté à la société B.________ SA et
consorts
un appartement et un garage à Crans-sur-Sierre pour le prix de 575'000
francs. Les conditions de paiement fixées dans l'acte de vente
comprenaient
la reprise d'une dette de 380'000 francs, l'obtention d'un nouveau
crédit
bancaire de 100'000 francs auprès du Crédit Suisse et trois
versements en
espèces pour le solde; de plus, l'acheteur devait payer directement à
l'entreprise C.________, à Sion, chargée des travaux de rénovation, un
montant de 106'000 francs. Ces travaux ont été effectués dans le
délai prévu,
soit avant le 1er janvier 1998, et les époux X.________ ont alors pris
possession de l'appartement et du garage. X.________ a encore
commandé à
l'entreprise précitée des travaux supplémentaires pour quelques 37'455
francs.

Par la suite, X.________ n'a rempli aucune des conditions de paiement
prévues
dans l'acte de vente, ni versé le moindre centime à l'entreprise
C.________.
Il a finalement quitté Crans-sur-Sierre avec son épouse, laissant
encore
impayées et dues à B.________ SA des charges de copropriété s'élevant
à plus
de 10'700 francs au 30 juin 1999.

C.
Invoquant une violation des art. 146, 63, 64 et 41 CP, X.________ se
pourvoit
en nullité au Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de l'arrêt
attaqué.

Le Ministère public du canton de Vaud conclut au rejet du pourvoi.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Saisie d'un pourvoi en nullité, qui ne peut être formé que pour
violation du
droit fédéral (art. 269 PPF), la Cour de cassation contrôle
l'application de
ce droit sur la base d'un état de fait définitivement arrêté par
l'autorité
cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF). Le raisonnement
juridique doit donc être mené sur la base des faits retenus dans la
décision
attaquée, dont le recourant est irrecevable à s'écarter (ATF 126 IV 65
consid. 1 p. 66 et les arrêts cités).

2.
Le recourant met en cause sa condamnation pour escroquerie au
préjudice de la
société B.________ SA et de l'entreprise C.________.

2.1 Sur le plan objectif, l'escroquerie (art. 146 CP) suppose que
l'auteur
ait usé de tromperie, que celle-ci ait été astucieuse, que l'auteur
ait ainsi
induit la victime en erreur (sous réserve de l'erreur préexistante),
que
cette erreur ait déterminé la personne trompée à des actes
préjudiciables à
ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers et que la victime ait
subi un
préjudice patrimonial. Sur le plan subjectif, l'auteur doit avoir agi
intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement illégitime
(ATF 122 IV
246 consid. 3a p. 247 s. et les arrêts cités).

2.2 Le recourant conteste avoir commis une tromperie au préjudice du
vendeur
et de l'entrepreneur. Il relève qu'il n'y a pas eu de transfert de
propriété
et qu'il n'était pas insolvable au mois d'août 1997.

2.2.1 La tromperie que suppose l'escroquerie peut consister soit à
induire la
victime en erreur, par des affirmations fallacieuses ou par la
dissimulation
de faits vrais, soit à conforter la victime dans son erreur. Pour
qu'il y ait
tromperie par affirmations fallacieuses, il faut que l'auteur ait
affirmé un
fait dont il connaissait la fausseté; l'affirmation peut résulter de
n'importe quel acte concluant; il n'est donc pas nécessaire que
l'auteur ait
fait une déclaration; il suffit qu'il ait adopté un comportement dont
on
déduit qu'il affirme un fait. La tromperie par dissimulation de faits
vrais
est réalisée lorsque l'auteur s'emploie, par ses propos ou par ses
actes, à
cacher la réalité; s'il se borne à se taire, à ne pas révéler un
fait, une
tromperie ne peut lui être reprochée que s'il se trouvait dans une
position
de garant, à savoir s'il avait, en vertu de la loi, d'un contrat ou
d'un
rapport de confiance spécial, une obligation de parler. Quant au
troisième
comportement prévu par la loi, consistant à conforter la victime dans
son
erreur, il ne suffit pas que l'auteur, en restant purement passif,
bénéficie
de l'erreur d'autrui; il faut que, par un comportement actif,
c'est-à-dire
par ses paroles ou par ses actes, il ait confirmé la dupe dans son
erreur;
cette hypothèse se distingue des deux précédentes en ce sens que
l'erreur est
préexistante (cf. ATF 128 IV 255 consid. non publié 2b/aa; cf.
Corboz, Les
infractions en droit suisse, volume I, Berne 2002, p. 300 ss. et les
références citées).

2.2.2Selon les constatations cantonales qui lient l'autorité de céans
et que
le recourant est donc irrecevable à contester dans un pourvoi en
nullité (cf.
supra, consid. 1), ce dernier s'est toujours présenté comme un expert
en
commerce international et administrateur de sociétés réalisant un
revenu brut
annuel d'environ 300'000 francs, alors que sa situation financière
était
totalement obérée et qu'il était insolvable. Dans ces circonstances,
il a
acheté à la société B.________ SA un appartement à Crans-sur-Sierre
pour le
prix de 575'000 francs et a commandé des travaux de rénovation à
l'entreprise
C.________ pour des montants de 106'000 et 37'455 francs. De plus,
avant la
passation de l'acte notarié au mois d'août 1997, le recourant avait
aussi
rencontré avec le dirigeant de la société vendeuse un responsable des
crédits
de la succursale du Crédit Suisse à Crans-sur-Sierre sans évoquer ses
problèmes avec la même banque à Genève.

Ainsi, le recourant a fait croire à ses victimes qu'au regard de sa
situation
professionnelle et des revenus ainsi acquis, il pouvait honorer ses
engagements financiers, à savoir payer le prix de l'immeuble et celui
des
travaux effectués. Il ne s'est pas contenté de dissimuler des faits
vrais en
taisant son insolvabilité, mais a affirmé des faits faux en se
présentant
comme étant un expert en commerce international et administrateur de
sociétés
au revenu conséquent et suffisant pour régler ses dettes. Dans ces
conditions, la tromperie est réalisée, non seulement par
dissimulation de
faits vrais qui suppose la réalisation de conditions particulières,
mais
aussi par affirmations fallacieuses. Enfin, le fait que le recourant
n'est
pas devenu propriétaire de l'immeuble est sans pertinence dans
l'examen de la
tromperie laquelle était déjà réalisée lors de la signature de l'acte
d'achat
de l'appartement comprenant également un engagement pour les travaux
de
rénovation.

2.3 Le recourant conteste que l'astuce soit réalisée dès lors que les
victimes n'ont pas pris les mesures élémentaires de prudence en ne
requérant
aucune information à son sujet et en ne procédant à aucune
vérification.

2.3.1 L'astuce est réalisée lorsque l'auteur recourt à un édifice de
mensonges, à des manoeuvres frauduleuses ou à une mise en scène. Il y
a
cependant également astuce, en l'absence de tels actes, lorsque
l'auteur
donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est
pas
possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être
exigée,
de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en
fonction
des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un
rapport de
confiance particulier. L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la
dupe
pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur
avec le
minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle. Il n'est pas
nécessaire, pour qu'il y ait escroquerie, que la dupe ait fait preuve
de la
plus grande diligence et qu'elle ait recouru à toutes les mesures de
prudence
possibles; la question n'est donc pas de savoir si elle a fait tout ce
qu'elle pouvait pour éviter d'être trompée. L'astuce n'est exclue que
lorsque
la dupe est coresponsable du dommage parce qu'elle n'a pas observé les
mesures de prudence élémentaires qui s'imposaient (ATF 128 IV 18
consid. 3a
p. 20; 126 IV 165 consid. 2a p. 171; 119 IV 28 consid. 3f p. 38).

Une tromperie portant sur la volonté d'exécuter une prestation n'est
pas
astucieuse dans tous les cas, mais uniquement lorsque la vérification
de la
capacité d'exécution n'est pas possible, ne l'est que difficilement
ou ne
peut être raisonnablement exigée. Il y a également astuce si l'auteur
conclut
un contrat en ayant d'emblée l'intention de ne pas fournir sa
prestation,
alors que cette intention n'est pas décelable (ATF 125 IV 124 consid.
3a p.
128; 118 IV 359 consid. 2 p. 360 ss).

2.3.2 Selon l'arrêt attaqué, le recourant a toujours fréquenté
Crans-sur-Sierre; il a profité du fait qu'il était un habitué de cette
station touristique prestigieuse où sa famille était également
connue; il n'a
jamais cessé de fréquenter cet endroit, même quand il était
complètement
désargenté et a toujours conservé un train de vie d'un niveau
certain, alors
que ses moyens diminuaient. Selon les constatations cantonales, le
recourant,
qui était insolvable, s'est toujours présenté comme un expert
commercial et
un administrateur de sociétés jouissant de revenus importants; ce
faisant, il
n'a pas seulement caché sa réelle situation financière, mais a en
plus donné
et entretenu l'illusion d'être aisé, de sorte qu'il était évident,
pour ses
victimes, que sa situation financière ne pouvait être que bonne.
Concernant
l'achat de l'appartement, la cour cantonale a relevé que le recourant
avait
rencontré, avec l'un des vendeurs, un responsable des crédits de la
succursale du Crédit Suisse à Crans, donnant ainsi l'impression qu'il
lui
était tout à fait possible de contracter un emprunt auprès de cette
banque,
alors qu'en réalité, ses difficultés avec l'établissement genevois du
Crédit
Suisse, qu'il avait tues, tout comme son expulsion judiciaire de la
villa de
Dully, empêchaient l'obtention d'un prêt. Concernant les travaux de
rénovation, la cour cantonale a retenu que le recourant avait pris de
haut
une demande d'acompte de l'entrepreneur, ne laissant aucun doute
qu'il allait
payer ses dettes.

Ainsi, le recourant a induit et conforté ses victimes dans l'erreur
qu'il
avait les moyens de régler ses dettes et les a ainsi conduites à
conclure des
contrats, tout en sachant que, de son côté, il ne pouvait remplir ses
engagements en raison de son insolvabilité. Quant aux cocontractants,
ils
n'avaient pas de motifs impératifs de contrôler la situation
financière du
recourant au regard du passé, du comportement, des affirmations et des
assurances données par ce dernier. Dans ces conditions, l'astuce est
bien
réalisée.

2.4 Le recourant conteste l'existence d'une erreur ayant déterminé les
personnes trompées à des actes préjudiciables à leurs intérêts
pécuniaires et
celle du dommage au motif qu'il n'a été ni propriétaire, ni locataire
de

l'appartement qu'il a occupé du 1er janvier 1998 au 15 décembre 1999.

2.4.1 L'escroquerie implique que l'erreur ait déterminé la dupe à
disposer de
son patrimoine. Il faut ainsi un acte de disposition effectué par la
dupe et
un lien de motivation entre cet acte et l'erreur. L'acte de
disposition est
constitué par tout acte ou omission qui entraîne directement un
préjudice au
patrimoine. L'exigence d'une telle immédiateté résulte de la
définition même
de l'escroquerie, qui implique notamment que le dommage soit causé
par un
acte de disposition du lésé lui-même. Le préjudice est occasionné
directement
lorsqu'il est provoqué exclusivement par le comportement de la dupe,
sans
qu'une intervention supplémentaire de l'auteur ne soit nécessaire. En
ce
sens, il n'y a pas d'acte de disposition entraînant directement un
préjudice
lorsque le dommage n'est réalisé qu'en vertu d'un acte subséquent,
effectué
par l'auteur de son propre chef. En particulier, on ne se trouve pas
en
présence d'une escroquerie lorsque la dupe ne fait qu'ouvrir à
l'auteur la
possibilité de lui causer un dommage par un acte postérieur: il
s'agit alors
uniquement d'une certaine mise en danger du patrimoine, qui ne suffit
en
principe pas à constituer un dommage (ATF 128 IV 255 consid. 2e/aa p.
256 s.
et les références citées).

Le dommage est réalisé lorsque l'on se trouve en présence d'une
lésion du
patrimoine sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une
augmentation du
passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du
passif.
Un dommage temporaire ou provisoire est suffisant, de même qu'une
mise en
danger entraînant une diminution de valeur d'un point de vue
économique (ATF
122 IV 279 consid. 2a p. 281; 121 IV 104 consid. 2c p. 107 s.).
2.4.2 En l'espèce, les victimes ont été dans l'erreur dans la mesure
où elles
se sont faites une fausse idée de la situation financière du
recourant et
pensaient que celui-ci avait les moyens de respecter ses engagements.
De
plus, la tromperie les a amenées à accomplir des actes préjudiciables
à leurs
intérêts pécuniaires, la première en signant un acte de vente et en
laissant
la possession de l'appartement et du garage au recourant et la
seconde en
effectuant des travaux dans ledit appartement. Pour les vendeurs, le
dommage
a ainsi été réalisé dans l'occupation sans contrepartie de
l'appartement
pendant deux ans, le non paiement des charges de copropriété
s'élevant à près
de 10'800 francs et le fait de ne pas avoir pu disposer de
l'immeuble, par
exemple en le louant ou en le vendant à une personne solvable; pour
l'entrepreneur, le dommage a consisté en des travaux non payés pour
une
valeur de plus de 140'000 francs. Que le recourant ne soit jamais
devenu
propriétaire de l'immeuble ou qu'il n'ait signé aucun contrat de
location
n'est pas pertinent, le dommage étant manifestement réalisé.

2.5 Le recourant déclare ne pas remplir les conditions subjectives de
l'escroquerie.

2.5.1 Déterminer ce que l'auteur sait, envisage ou ignore, ce qu'il
veut,
accepte ou refuse relève des constatations de faits qui lient la Cour
de
cassation et ne peuvent être réexaminées dans un pourvoi en nullité
(ATF 125
IV 242 consid. 3c; 123 IV 155 consid. 1a). En conséquence, est seul
recevable
le moyen tiré d'une interprétation ou d'une application erronée des
notions
d'intention et d'enrichissement illégitime.

2.5.2 La cour cantonale a constaté que le recourant avait agi
intentionnellement et dans le dessein d'enrichissement illégitime,
consistant
notamment dans l'usage gratuit d'un appartement. Autant que le
recourant le
conteste dans son pourvoi, sa critique relève du fait et est
irrecevable (cf.
supra, consid. 1); on ne discerne aucune méconnaissance des notions
juridiques précitées.

3.
Le recourant invoque une violation des art. 63 et 64 al. 8 CP.

3.1 Pour fixer la peine, le juge dispose d'un large pouvoir
d'appréciation.
Un pourvoi en nullité portant sur la quotité de la peine ne peut donc
être
admis que si la sanction a été fixée en dehors du cadre légal, si
elle est
fondée sur des critères étrangers à l'art. 63 CP, si les éléments
d'appréciation prévus par cette disposition n'ont pas été pris en
compte ou
enfin si la peine apparaît exagérément sévère ou clémente au point
que l'on
doive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 129 IV 6
consid. 6.1 p.
21 et les arrêts cités).

Les éléments pertinents pour la fixation de la peine ont été récemment
rappelés dans l'ATF 129 IV 6 consid. 6.1 p. 20 s. et les exigences
relatives
à la motivation de la peine dans l'ATF 127 IV 101 consid. 2c p. 104
s.,
auxquels on peut se référer.

Aux termes de l'art. 64 al. 8 CP, le juge pourra atténuer la peine
lorsqu'un
temps relativement long se sera écoulé depuis l'infraction et que le
délinquant se sera bien comporté pendant ce temps. Selon la
jurisprudence, on
ne peut considérer qu'un temps relativement long s'est écoulé que si
la
prescription de l'action pénale est près d'être acquise, c'est-à-dire
si le
jugement a été rendu à une date proche de celle où la prescription
ordinaire
serait intervenue (ATF 102 IV 198 consid. 5 p. 209; 92 IV 201 consid.
I p.
202 s.). En effet, cette circonstance atténuante est liée à la
prescription;
l'effet guérisseur du temps écoulé, qui rend moindre la nécessité de
punir,
doit aussi pouvoir être pris en considération lorsque la prescription
n'est
pas encore acquise mais qu'elle est près de l'être et que le
délinquant s'est
bien comporté dans l'intervalle (ATF 92 IV 201 consid. I p. 202 s.).
Pour
déterminer si l'action pénale est proche de la prescription, il faut
se
référer à la date à laquelle les faits ont été souverainement établis
(ATF
115 IV 95 consid. 3; 102 IV 198 consid. 5 p. 209), sans qu'il y ait
lieu de
tenir compte d'interruptions de la prescription qui auraient pu
intervenir
entre-temps conformément à l'art. 72 CP (ATF 92 IV 201 consid. I p.
203).

3.1.1 Le recourant considère que la peine est arbitrairement sévère.

Celui-ci encourrait une peine de réclusion de cinq ans au plus ou
l'emprisonnement (cf. art. 146 al. 1 CP). Il a été condamné à dix mois
d'emprisonnement, cette peine étant complémentaire à celle prononcée
le 29
mai 2001 par le Procureur général de Genève. Le recourant n'ayant pas
expressément invoqué une violation de l'art. 63 CP dans son recours
déposé
auprès de la cour cantonale, cette dernière s'est référée à la
motivation du
Tribunal correctionnel, considérant que la peine était adéquate, fixée
conformément au critères posés par l'art. 63 CP et en tout cas pas
arbitrairement sévère. L'autorité de première instance a retenu que le
recourant, né en 1933, marié et ne disposant plus que de rentes AVS
et du
salaire modeste de son épouse, avait commis des escroqueries au
préjudice de
deux plaignants à Crans-sur-Sierre pour des montants élevés. Elle a
relevé
qu'elle ne voyait guère d'éléments à sa décharge en raison de sa
personnalité, que, peut-être prisonnier de son personnage, il ne
saisissait
ni la gravité, ni l'illicéité de son comportement et que sa mentalité
était
celle d'un escroc ayant érigé ce système en mode de vie.

L'autorité cantonale a suivi les critères posés par l'art. 63 CP et
ne s'est
pas laissée guider par des considérations étrangères à cette
disposition.
Elle n'a omis aucun élément pertinent pour fixer la peine et le
recourant ne
le prétend d'ailleurs pas. Certes, la motivation du jugement est
brève. On
comprend toutefois que l'autorité s'est en particulier fondée sur la
gravité
des actes et sur la personnalité de l'auteur. Ce dernier a commis des
escroqueries au préjudice des vendeurs de l'appartement qu'il a
occupé sans
contre-partie durant deux ans, et encore, de manière plus crasse, au
détriment de l'entrepreneur auquel il a commandé des travaux
somptuaires et
de grande ampleur pour des montants élevés, soit 106'000 francs et
37'000
francs. La faute du recourant est donc loin d'être légère. Enfin, il
n'a pas
saisi la gravité de ses actes. Ainsi, la peine de 10 mois
d'emprisonnement
n'est pas excessive au point de constituer un abus du pouvoir
d'appréciation
reconnu à l'autorité cantonale en ce domaine. En outre, le pourvoi en
nullité
ne saurait être admis simplement pour améliorer la motivation
cantonale,
aussi brève soit-elle, dès lors que l'argumentation du recourant ne
pourrait
pas conduire à une modification du dispositif de la décision
attaquée. Le
grief est donc infondé.

3.1.2 Le recourant soutient qu'il s'est bien comporté durant un temps
relativement long, les faits s'étant déroulés en août 1997.

Selon l'arrêt attaqué, les faits constitutifs des escroqueries
commises par
le recourant datent au plus tôt du 30 août 1997, jour de la
conclusion de
l'acte de vente, étant précisé que celui-ci a, par la suite, encore
commandé
des travaux supplémentaires à l'entrepreneur. Ces faits ont été
souverainement constatés à la date du jugement de première instance,
qui a
été rendu le 20 juin 2002, soit moins de cinq ans après. A cette
date, la
prescription ordinaire de dix ans (cf. art. 146 al. 1 CP et 70 aCP)
était
ainsi loin d'être acquise. Le Tribunal fédéral a par ailleurs déjà
estimé que
l'art. 64 ch. 8 CP n'était pas applicable à des accusés ayant été
jugés entre
six (cf. ATF 126 IV 84 consid. 3 c non publié) et sept ans (arrêt
6S.783/1997
du 13 janvier 1998) après la commission d'infractions pour lesquelles
la
prescription était également de dix ans. Le grief du recourant doit
par
conséquent être rejeté.

4.
Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP.

4.1 La cour cantonale a estimé que le fait que le recourant ait eu des
perspectives de revenus et qu'il soit malade et ruiné n'était pas
propre à
fonder un pronostic favorable. Elle a jugé que les motifs pour
lesquels
l'autorité de première instance avait refusé le sursis étaient
adéquats et
qu'elle n'avait pas excédé son large pouvoir d'appréciation en la
matière en
retenant que le recourant n'avait pris aucune conscience de
l'illicéité de
ses actes et persisté tout au long de ses explications dans son déni.
Elle a
aussi ajouté que le recourant n'avait rien entrepris pour dédommager
ses
victimes.

4.2 Le sursis à l'exécution d'une peine privative de liberté peut être
octroyé si la durée de la peine n'excède pas dix-huit mois, si les
antécédents et le caractère du condamné font prévoir que cette mesure
le
détournera de commettre d'autres crimes ou délits et s'il a réparé,
autant
qu'on pouvait l'attendre de lui, le dommage fixé judiciairement (art.
41 ch.
1 al. 1 CP).

Une peine de dix mois d'emprisonnement, par sa nature et sa durée,
peut
objectivement être assortie du sursis. Partant, les questions
litigieuses
sont de savoir si le recourant a réparé, dans la mesure de ses
possibilités,
le dommage fixé judiciairement (cf. infra consid. 4.2.1) et si la
condition
dite subjective est réalisée, c'est-à-dire si l'on peut prévoir, en
fonction
des antécédents et du caractère du condamné, que cette mesure sera de
nature
à le détourner de commettre d'autres crimes ou délits (cf. infra
consid.
4.2.2; ATF 119 IV 195 consid. 3b p. 197 et les arrêts cités).

4.2.1 Le Tribunal fédéral a admis que lorsque le dommage - comme en
l'espèce
- n'était pas établi judiciairement ou par accord avec le lésé avant
la
condamnation pénale, l'absence de réparation ne représentait pas un
obstacle
à l'octroi du sursis (cf. ATF 105 IV 234, consid. 2a p. 235s.; 79 IV
105; 77
IV 140; 70 IV 104). En pratique, il est rare que le dommage soit fixé
judiciairement avant le jugement pénal et cette exigence est
d'ailleurs
abandonnée dans le nouvel art. 42 al. 3 du code pénal modifié du 13
décembre
2002 dont la teneur est la suivante: "L'octroi du sursis peut
également être
refusé lorsque l'auteur a omis de réparer le dommage comme on pouvait
raisonnablement l'attendre de lui" (arrêt non publié du Tribunal
fédéral du
12 mars 2003, 6S.477/2002).

En l'espèce, le dommage subi par les victimes n'a pas été établi
judiciairement ou par accord avec ces dernières. En outre, selon les
constatations cantonales, le recourant est quasiment ruiné et ne
dispose que
de sa rente AVS et du modeste salaire de son épouse pour vivre. Au vu
de sa
situation financière, ses possibilités de réparer les dommages causés
sont
donc fortement limitées. Dans ces conditions, l'absence de réparation
ne
saurait représenter un obstacle à l'octroi du sursis, contrairement à
ce que
soutient la cour cantonale.

4.2.2 Concernant la condition subjective de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP,
il
s'agit de faire un pronostic quant au comportement futur du condamné
(ATF 123
IV 107 consid. 4a p. 111s). Pour poser ce pronostic, le juge de
répression
dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Il n'y a violation du droit
fédéral que si la décision attaquée repose sur des considérations
étrangères
à la disposition applicable, si elle ne prend pas en compte les
critères
découlant de celle-ci ou si le juge s'est montré à ce point sévère ou
clément
que l'on doive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 119 IV
195
consid. 3b p. 198; 118 IV 97 consid. 2b p. 101; 115 IV 81 consid. 2b
p. 82s).
Pour décider si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de
commettre
de nouvelles infractions, le juge doit se livrer à une appréciation
d'ensemble (ATF
119 IV 195 consid. 3b p. 198 et les arrêts cités). Il
doit
tenir compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de
l'auteur,
de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement,
notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être
posé sur
la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du
caractère de
l'accusé et ses chances d'amendement (ATF 123 IV 107 consid. 4a p.
111s; 118
IV 97 consid. 2b p. 100s). Pour l'évaluation du risque de récidive,
un examen
global de la personnalité de l'auteur est indispensable. De vagues
espoirs
quant à la conduite future du délinquant ne suffisent pas pour
émettre un
pronostic favorable (ATF 115 IV 81 consid. 2a p. 82).

Il est contraire au droit fédéral d'accorder un poids particulier à
certaines
circonstances visées par l'art. 41 CP et de négliger ou d'omettre
d'autres
critères pertinents (ATF 123 IV 107 consid. 4a p. 111s; 118 IV 97
consid. 2b
p. 100). S'agissant de la motivation, le juge doit exposer les
éléments
essentiels relatifs à l'acte ou à l'auteur qu'il prend en compte, de
manière
à ce que l'on puisse constater que tous les aspects pertinents ont
été pris
en considération et comprendre comment ils ont été appréciés (ATF 117
IV 112
consid. 3b p. 118).

Le sursis est considéré comme une mesure d'encouragement à l'égard de
celui
qui semble avoir compris la signification de son acte et être prêt,
pour
échapper à l'exécution de la peine, à ne plus commettre d'infractions
à
l'avenir. Le fait que l'auteur n'ait pas pris conscience du caractère
répréhensible de ses actes justifie un pronostic défavorable; seul
celui qui
se repent mérite qu'on lui fasse confiance. Toutefois, l'absence de
repentir
ne peut pas être déduite des seules dénégations du prévenu ou de son
silence,
car un tel comportement peut avoir des motifs divers (ATF 101 IV 257
consid.
2 p. 258s.; 94 IV 51).

S'il est vrai qu'un défaut de caractère, le manque de scrupules ou
l'absence
de prise de conscience de l'illicéité des actes commis peuvent
justifier un
pronostic défavorable, le juge n'est toutefois pas dispensé de
procéder à une
appréciation de tous les critères pertinents pour déterminer
l'adéquation
d'une peine assortie du sursis. Partant, il confrontera toutes les
circonstances permettant de tirer des conclusions sur le caractère de
l'auteur avec les renseignements recueillis sur ses antécédents, sa
réputation, sa situation personnelle et son comportement après
l'infraction.
C'est seulement après l'examen de tous ces éléments que le juge pourra
valablement décider si un pronostic favorable est possible ou non
(cf. arrêts
non publiés du Tribunal fédéral du 12 mars 2003, 6S.477/2002 et du 19
janvier
2000, 6S.762/1999; ATF 115 IV 85, consid. 3b/c p. 86s.; 94 IV 51; 82
IV 5).

En l'espèce, la cour cantonale a retenu que le recourant n'avait pas
pris
conscience de l'illicéité de ses actes et qu'il avait persisté,
durant la
procédure, dans son déni. Il s'agit d'éléments négatifs dans l'examen
du
pronostic quant au comportement futur du recourant. Toutefois, le
juge doit
procéder à une appréciation globale de tous les critères pertinents
pour
justifier un pronostic défavorable. Or, dans le cas particulier, la
cour
cantonale n'a pas effectué un tel examen. Elle n'a pas pris en
considération
sa situation personnelle, son comportement après l'infraction, son
caractère,
l'absence d'antécédents judiciaires, ni les circonstances
particulières des
infractions. Elle n'a pas davantage discuté des motifs de ses
dénégations
durant la procédure, ni constaté que celles-ci dénotaient un défaut de
caractère tel qu'une peine avec sursis ne pouvait suffire à
l'amender. Enfin,
la cour cantonale n'a pas examiné, à la lumière de l'ensemble des
éléments
précités, l'effet d'un sursis avec un long délai d'épreuve ou
d'éventuelles
règles de conduite (cf. art. 41 ch. 2 al. 1 CP).

4.2.3 En conclusion, la cour cantonale a violé le droit fédéral. Le
pourvoi
est donc admis en ce qui concerne la question du sursis et la cause
renvoyée
à l'autorité cantonale pour nouvelle décision, conformément à l'art.
277 PPF.

5.
Le recourant n'obtient que très partiellement gain de cause. Il
supporte donc
un émolument judiciaire réduit (art. 278 al. 1 PPF) et la Caisse du
Tribunal
fédéral lui versera une indemnité réduite à titre de dépens (art. 278
al. 3
PPF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est partiellement admis et l'arrêt attaqué est annulé en
ce qui
concerne le sursis; pour le surplus, il est rejeté dans la mesure où
il est
recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 1'000 francs est mis à la charge du
recourant.

3.
La Caisse du Tribunal fédéral versera au recourant une indemnité de
1'000
francs à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois,
Cour de
cassation pénale.

Lausanne, le 25 septembre 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.221/2003
Date de la décision : 25/09/2003
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-09-25;6s.221.2003 ?
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