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18/09/2003 | SUISSE | N°5P.211/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 septembre 2003, 5P.211/2003


{T 0/2}
5P.211/2003 /frs

Arrêt du 18 septembre 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffier: M. Fellay.

A. X.________,
recourante, représentée par Me Philippe Mercier, avocat,

contre

B.X.________,
représentée par Me Philippe Reymond, avocat,
C.X.________,
représenté par Me Jacques Haldy, avocat,
D.X.________,
représentée par Me Jean-Emmanuel Rossel, avocat,
Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du
Si

gnal
8, 1014 Lausanne.

art. 9 Cst. (constatation de la filiation),

recours de droit public contre l'arrêt de la...

{T 0/2}
5P.211/2003 /frs

Arrêt du 18 septembre 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffier: M. Fellay.

A. X.________,
recourante, représentée par Me Philippe Mercier, avocat,

contre

B.X.________,
représentée par Me Philippe Reymond, avocat,
C.X.________,
représenté par Me Jacques Haldy, avocat,
D.X.________,
représentée par Me Jean-Emmanuel Rossel, avocat,
Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du
Signal
8, 1014 Lausanne.

art. 9 Cst. (constatation de la filiation),

recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre des recours du
Tribunal
cantonal du canton de Vaud des 27 décembre 2002/2 mai 2003.

Faits:

A.
Feu E.X.________, né à Milan en 1913, devenu suisse en 1971 et décédé
le 21
avril 1992 à Lonay, a eu deux enfants de son premier mariage (avec
M.X.________), soit D.X.________, née le 5 février 1946, et
C.X.________, né
le 16 avril 1949. Alors qu'il était encore marié, il a eu deux autres
enfants
de sa liaison avec B.P.________, soit F.X.________, né le 12 juin
1960 à New
York, et A.X.________ née le 10 mai 1962 à New York. En 1980,
E.X.________
s'est marié avec B.X.________.

B.
Le 6 janvier 1995, F.X.________ et A.X.________, ont introduit devant
les
tribunaux vaudois une action en constatation de leur filiation avec
feu
E.X.________, dirigée contre la seconde épouse et les deux enfants
légitimes
de celui-ci. Outre la constatation de leur filiation avec le défunt,
ils ont
requis leur inscription comme ses enfants dans tous les registres
publics.
Par jugement du 4 février 2002, le Tribunal civil de l'arrondissement
de la
Côte a considéré que la résidence habituelle des demandeurs au moment
de leur
naissance se situait en Suisse et, appliquant le droit suisse (art.
68 al. 1
et 69 al. 1 LDIP), il a rejeté leur action. En tant qu'elle était
dirigée
contre l'épouse, il l'a rejetée pour défaut de légitimation, celle-ci
n'étant
pas héritière du défunt; en tant qu'elle était dirigée contre les
enfants
légitimes, il l'a rejetée parce que les demandeurs ne remplissaient
pas les
conditions légales permettant d'ouvrir une action en paternité, dès
lors
qu'ils avaient plus de 10 ans au moment de l'entrée en vigueur du
nouveau
droit de la filiation (art. 13a al. 1 Tit. fin. CC).
Saisie d'un recours des demandeurs, la Chambre des recours du Tribunal
cantonal vaudois l'a rejeté et a confirmé le jugement de première
instance
par arrêt du 27 décembre 2002, dont les considérants ont été notifiés
le 2
mai 2003.

C.
Contre cet arrêt, seule la demanderesse A.X.________ a interjeté un
recours
de droit public au Tribunal fédéral, par acte du 28 mai 2003,
concluant à son
annulation et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour
nouvelle
décision dans le sens des considérants. La recourante reproche à la
cour
cantonale d'avoir commis arbitraire dans l'établissement des faits et
l'appréciation des preuves concernant sa résidence habituelle au
moment de sa
naissance.
Parallèlement, la demanderesse a interjeté un recours en réforme.
Les intimés n'ont pas été invités à se déterminer.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Conformément au principe général posé à l'art. 57 al. 5 OJ (ATF
122 I 81
consid. 1 p. 82/83 et les arrêts cités), il convient d'examiner en
premier
lieu le recours de droit public.

1.2 Déposé en temps utile, contre une décision finale rendue en
dernière
instance cantonale (cf. ATF 126 I 257), le présent recours est
recevable du
chef des art. 86 al. 1, 87 (a contrario) et 89 al. 1 OJ.

1.3 Bien que la recourante le mentionne comme partie, F.X.________
n'a plus
cette qualité, puisqu'il n'a pas recouru contre le rejet de son
action par
l'arrêt de la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois.

2.
2.1Aux termes de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit
contenir
un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes
juridiques
violés, précisant en quoi consiste la violation. Les griefs doivent
être
exprimés de manière claire et détaillée (ATF 125 I 71 consid. 1c p.
76, 492
consid. 1b), ce qui suppose la désignation exacte des passages du
jugement
qui sont visés, ainsi que des pièces du dossier sur lesquelles repose
la
critique. S'il soulève en particulier une violation de l'art. 9 Cst.,
le
recourant ne peut se contenter de formuler des remarques générales, ni
d'opposer sa thèse à celle de la cour cantonale; il doit au contraire
démontrer, par une argumentation précise, en quoi la décision déférée
repose
sur une application de la loi ou une appréciation des preuves
manifestement
insoutenables (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495; 117 Ia 10 consid. 4b
p. 12);
à cet effet, il ne peut invoquer de nouveaux moyens de fait et de
droit (ATF
118 Ia 20 consid. 5a; 118 III 37 consid. 2a p. 39 et les références).

2.2 Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle
est
manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un
principe
juridique clair et incontesté, ou encore heurte de manière choquante
le
sentiment de la justice et de l'équité (ATF 126 III 438 consid. 3 p.
440; 125
I 166 consid. 2a; 120 Ia 369 consid. 3a). La violation doit être
manifeste et
reconnaissable d'emblée (ATF 102 Ia 1 consid. 2a p. 4). Il n'y a pas
arbitraire du seul fait qu'une solution différente est concevable,
voire
préférable (ATF 126 III 438 consid. 3 p. 440; 125 II 129 consid. 5b;
118 Ia
20 consid. 5a). En outre, pour que la décision soit annulée, il ne
suffit pas
que sa motivation soit insoutenable; encore faut-il que la décision
apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 125 II 129 consid. 5b;
118 Ia
118 consid. 1c p. 124 et les arrêts cités).

Le Tribunal fédéral se montre réservé dans le domaine de
l'appréciation des
preuves et la constatation des faits, vu le large pouvoir qu'il
reconnaît en
la matière à l'autorité cantonale (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40;
118 Ia 28
consid. 1b p. 30 et les arrêts cités). Il n'intervient, pour
violation de
l'art. 9 Cst., que si le juge du fait a abusé de ce pouvoir, en
particulier
lorsqu'il a méconnu des preuves pertinentes ou n'en a arbitrairement
pas tenu
compte, lorsque ses constatations de fait sont manifestement fausses
ou son
appréciation des preuves tout à fait insoutenable (ATF 128 I 81
consid. 2 p.
86; 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4a p. 211).

3.
D'après la cour cantonale, la résidence habituelle de la recourante
au moment
de sa naissance, le 10 mai 1962, était en Suisse. La recourante se
plaint
d'arbitraire (art. 9 Cst.) et soutient que sa résidence se trouvait
alors à
Rome.

3.1 La résidence habituelle d'une personne physique, telle que la
définit
l'art. 20 al. 1 let. b LDIP, est le lieu dans lequel cette personne
vit
pendant une certaine durée, même si cette durée est de prime abord
limitée.
Selon la jurisprudence, elle correspond à l'endroit où la personne
intéressée
a le centre de ses relations personnelles et se déduit, non de sa
volonté
subjective, mais de circonstances de fait extérieurement
reconnaissables
attestant de sa présence en un lieu donné. Normalement, la résidence
habituelle de l'enfant se trouve au centre de vie de l'un de ses
parents.
Pour le nouveau-né, ce sont ses relations avec la personne qui en
assume la
garde qui sont déterminantes; en règle générale, le centre de vie de
sa mère
dans un certain pays sera également le sien (ATF 129 III 288 consid.
4.1 et
les références citées).
Les circonstances relatives au lieu où la personne réside et où elle
a le
centre de ses relations personnelles relèvent du fait, alors que les
conclusions qui en sont tirées pour admettre la résidence habituelle
constituent une question de droit (ATF 120 III 7 consid. 2a et les
références).

3.2 Selon l'arrêt attaqué, le tribunal de première instance a
constaté, par
appréciation des indices, qu'une résidence habituelle en Suisse aux
époques
de naissance des enfants avait été prouvée et que ceux-ci n'avaient
pas
établi que leurs parents auraient eu une résidence habituelle à Rome.

Examinant sur recours en nullité, sous l'angle restreint de
l'arbitraire, les
témoignages et sur recours en réforme, avec une cognition libre, les
autres
éléments de fait (art. 452 al. 2 CPC/VD), la cour cantonale a retenu
que la
résidence de la recourante au moment de sa naissance, le 10 mai 1962,
était
en Suisse, et non à Rome.

3.3 A l'appui de son grief d'arbitraire, la recourante reproche à
l'autorité
cantonale de s'être basée sur des éléments de fait qui concernaient
uniquement son frère et d'avoir fait ainsi un amalgame insoutenable
entre la
situation de celui-ci né en 1960 et la sienne. La recourante avait
déjà fait
valoir ce même grief dans son recours cantonal. La Chambre des
recours l'a
traité dans son arrêt (consid. 3 p. 15) et a examiné spécialement la
situation de la seule recourante (p. 16). Le grief tombe dès lors à
faux.

3.4 La cour cantonale a retenu que la recourante n'avait pas établi
avoir
résidé habituellement à Rome au moment de sa naissance.
Elle a tout d'abord conclu de l'attestation de départ de la commune
de Rome
des 3 juin et 8 juillet 1993 que, contrairement à ce qu'alléguait la
recourante, on ne pouvait pas en déduire un domicile de la mère à
Rome après
le 16 mars 1960. Elle n'en a pas déduit, comme le laisse entendre la
recourante, que la mère aurait été domiciliée à Lausanne. Le grief
d'appréciation arbitraire soulevé sur ce point est donc irrecevable.
La cour cantonale a ensuite estimé que les déclarations d'un témoin
(R.Z.________) ne permettaient pas de retenir que la mère aurait été
domiciliée à Rome.
Au sujet de ce témoignage, la cour cantonale relève qu'il est nuancé
et pas
clairement affirmatif sur le point litigieux. La personne entendue a
déclaré
croire que la mère des demandeurs était résidente à Rome lors de leur
naissance et qu'ils y avaient vécu jusqu'en 1966, et n'être pas
certaine
qu'elle résidait en Italie au moment de la naissance de la
recourante. En
outre, son affirmation selon laquelle les demandeurs auraient vécu
avec leur
mère d'abord en Italie, puis en Suisse était nuancée par une autre
réponse où
le témoin déclarait croire que la décision de déménagement remontait
autour
de 1966. Le témoin avait déclaré par ailleurs avoir connu les parties
en
1976. La cour cantonale en a déduit que le témoin n'avait pas fait de
constatations directes et que ses déclarations n'avaient pas une force
probante plus importante que les indices retenus par les premiers
juges. Ce
témoignage n'était par conséquent pas déterminant à ses yeux. Il
n'était du
reste pas corroboré par d'autres témoignages.
La recourante déplore que la partie "Faits" de l'arrêt attaqué ne
contienne
rien de la déposition dudit témoin qui, estime-t-elle, aurait énoncé
sans
équivoque qu'elle avait résidé à Rome à l'époque de sa naissance. Sa
critique
se résume toutefois à affirmer qu'il y a arbitraire dans la manière
dont le
Tribunal cantonal a apprécié le témoignage en question, qui est clair
et non
équivoque. Une telle critique, qui ne contient pas l'embryon d'une
démonstration de l'arbitraire de la motivation de l'autorité intimée,
est
irrecevable.

3.5 La cour cantonale a examiné trois éléments de fait pour admettre
que la
recourante avait son centre de vie en Suisse au moment de sa
naissance le 10
mai 1962, à savoir: premièrement, la demande dans l'action en
réduction
intentée le 4 octobre 1993 par la recourante et son frère contre les
deux
enfants légitimes; deuxièmement, la convention d'entretien de la
demanderesse
conclue le 26 mars 1964 avec son père naturel; troisièmement, la
réponse du
père du 4 mars 1968 à la demande alimentaire de la mère du 18
novembre 1967.
Les deux premiers éléments ont permis à l'autorité cantonale de
retenir un
centre de vie en Suisse; en revanche, le troisième ne pouvait, à son
avis,
constituer un indice déterminant, puisque les allégués du père
étaient en
contradiction avec ceux de la mère.
La recourante ne conteste ni le fait qu'elle et son frère ont
eux-mêmes
allégué que leur mère avait résidé dès l'été 1960 et jusqu'en 1962 à
Lausanne
(Hôtel Palace) et à Verbier, ni le fait que la convention d'entretien
mentionnait que sa mère vivait dans cette dernière localité. Elle se
limite à
reprocher à la cour cantonale de n'avoir pas reproduit dans la partie
"Faits"
de son arrêt les allégués de la réponse de son père selon lesquels la
mère et
la fille ne s'étaient installées à Lausanne qu'en 1964, d'avoir
balayé d'un
revers de main cette réponse et déduit arbitrairement des allégués de
la
demande de sa mère une résidence en Suisse. Elle ne reproduit même
pas les
allégués de sa mère pour les comparer à ceux de son père qu'elle
mentionne
dans son recours. Elle ne démontre pas en quoi l'appréciation de la
cour
cantonale, fondée sur les deux éléments susmentionnés, serait
insoutenable,
ni pourquoi les allégués de la réponse de son père auraient dû
prévaloir sur
ceux de la demande de sa mère. Partant, son grief est irrecevable.
Contrairement à ce que prétend par ailleurs la recourante, la cour
cantonale
a examiné le fait que sa mère n'avait pas d'autorisation de séjour en
Suisse
et qu'elle n'y avait pas payé d'impôts, jugeant ces éléments à juste
titre
non pertinents
(cf. Catherine Christen-Westenberg, Commentaire
bâlois, n. 25
ad art. 20 LDIP). Quant au message adressé par leur père à ses
enfants, que
la recourante reproche à l'autorité cantonale de n'avoir pas
reproduit dans
la partie "Faits" de son arrêt, on ne voit pas en quoi il influerait
sur le
centre de ses intérêts au moment de sa naissance.

4.
En conclusion, le recours doit être déclaré irrecevable, aux frais de
son
auteur (art. 156 al. 1 OJ). Les intimés n'ayant pas été invités à se
déterminer, il ne leur est pas alloué de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 18 septembre 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.211/2003
Date de la décision : 18/09/2003
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-09-18;5p.211.2003 ?
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