La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/09/2003 | SUISSE | N°I.407/03

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 septembre 2003, I.407/03


{T 7}
I 407/03

Arrêt du 15 septembre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme
Piquerez

P.________, recourante, représentée par X.________,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue
Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimé

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes
résidant à l'étranger, Lausanne

(Jugement du 7 avril 2003)

Faits:

A.
P. ________,

née en 1945, a séjourné et travaillé en Suisse de 1971 à
1990,
année à la fin de laquelle elle est partie s'établir en Espagne. Elle
n'...

{T 7}
I 407/03

Arrêt du 15 septembre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme
Piquerez

P.________, recourante, représentée par X.________,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue
Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimé

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes
résidant à l'étranger, Lausanne

(Jugement du 7 avril 2003)

Faits:

A.
P. ________, née en 1945, a séjourné et travaillé en Suisse de 1971 à
1990,
année à la fin de laquelle elle est partie s'établir en Espagne. Elle
n'a
plus repris d'activité professionnelle depuis lors. En mars 1997,
elle a
déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité auprès de
l'Office AI pour les assurés résidant à l'étranger (l'office), qui l'a
rejetée par décision du 5 juin 1998. L'office y relevait qu'aucune
invalidité
justifiant le droit à une rente n'était survenue jusqu'au départ de
l'intéressée de Suisse et qu'aucune prestation ne pourrait être
accordée pour
une invalidité survenue postérieurement, les conditions d'assurance
n'étant
plus remplies.

Le 26 juillet 2001, P.________ a déposé une nouvelle demande de
prestations
auprès de l'organe de liaison de la sécurité sociale espagnole, à
Y.________.

Procédant à l'instruction de la cause, l'office a requis de l'assurée
qu'elle
remplisse un questionnaire pour les personnes travaillant dans le
ménage.
L'intéressée y a affirmé n'être que très partiellement en mesure
d'effectuer
quelques activités légères, l'essentiel du travail domestique étant
réalisé
par son époux, sa fille et une personne extérieure. Dans un rapport
du 30
octobre 2001, la doctoresse A.________ a posé les diagnostics
d'obésité, de
dysthymie, d'arthrose cervicale et lombaire sans déficit fonctionnel
et
radiculaire significatif, de gonalgie mécanique, de gonarthrose sans
déficit
fonctionnel et de varices sans complications des deux membres
inférieurs.
Elle a estimé que l'état de santé pouvait être amélioré par la
poursuite du
traitement médicamenteux et une prise en charge physiothérapeutique
et qu'il
n'existait aucune incapacité permanente de travail. Dans son
appréciation de
la situation médicale, la doctoresse B.________, médecin-conseil de
l'office,
a exposé que l'assurée avait surestimé ses limitations dans la tenue
du
ménage. Elle a considéré que cette dernière ne souffrait pas de
pathologie
grave, l'obésité et éventuellement la dysthymie étant déterminantes en
l'espèce. Elle a évalué l'incapacité dans les travaux ménagers à 24,7
% et à
30 % maximum dans une activité lucrative (rapport du 22 février 2002).

Dans un courrier du 25 avril 2002, P.________ a allégué être
totalement
incapable de travailler. Elle a requis la mise en oeuvre d'une
expertise
médicale à effectuer en Suisse et elle a produit divers documents
d'ordre
médical, dont les rapports des docteurs C.________ du 14 mars 1997,
D.________ du 2 février 1999, I.________ du 1er décembre 1999, ainsi
qu'un
rapport d'électromyogramme et électroneurogramme réalisé en juillet
2000.
Appelée à se prononcer sur les documents médicaux produits, la
doctoresse
B.________ a conclu à une incapacité de travail de 80 % dans une
activité
professionnelle et de 25 % dans les travaux ménagers depuis février
1999.

Par décision du 17 juin 2002, l'office a rejeté la demande de
l'assurée.

B.
P.________ a formé recours contre cette décision devant la Commission
fédérale de recours en matière d'assurance-vieillesse, survivants et
invalidité pour les personnes résidant à l'étranger (la commission).
L'office
a alors soumis l'appréciation du cas à son médecin-conseil, le docteur
E.________. Celui-ci ayant confirmé l'évaluation de la capacité
résiduelle de
travail dans les activités ménagères précédemment effectuée par la
doctoresse
B.________, l'office a conclu au rejet du recours. Par jugement du 7
avril
2003, la commission a débouté l'assurée, motifs pris que
l'appréciation de sa
capacité de travail dans l'exécution des tâches ménagères effectuée
par
l'office ne prêtait pas le flanc à la critique et que la mise en
oeuvre d'une
expertise en Suisse n'apporterait pas d'élément nouveau.

C.
P.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, dont
elle requiert l'annulation, concluant à la mise en oeuvre d'une
expertise
médicale en Suisse.

L'office conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales (LPGA)
du 6
octobre 2000, entrée en vigueur au 1er janvier 2003, n'est pas
applicable au
présent litige, dès lors que le juge des assurances sociales n'a pas à
prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de
fait
postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du 17
juin 2002
(ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

Les premiers juges ont correctement exposé les dispositions légales
et les
principes jurisprudentiels applicables au cas d'espèce, à savoir,
d'une part,
les règles figurant dans l'Accord du 21 juin 1999 entre la
Confédération
suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre
circulation des personnes (ALCP) et, d'autre part, celles relevant de
la
législation interne (suppression de la clause d'assurance [art. 6
LAI] et
évaluation de l'invalidité [art. 4 et 28 LAI], en particulier
s'agissant
d'assurés qui se consacrent entièrement à l'exécution de leurs travaux
habituels [art. 27bis RAI]). Il peut donc être renvoyé, sur ce point,
à leur
jugement.

On ajoutera que lorsque la rente a été refusée parce que le degré
d'invalidité était insuffisant, la nouvelle demande ne peut être
examinée que
si l'assuré rend plausible que son invalidité s'est modifiée de
manière à
influencer ses droits (art. 87 al. 3 et 4 RAI). Lorsque
l'administration
constate que les allégations de l'assuré ne sont pas plausibles, elle
liquide
l'affaire par un refus d'entrée en matière, sans autres
investigations. En
revanche, si elle entre en matière sur la nouvelle demande, elle doit
examiner l'affaire au fond et vérifier que la modification de
l'invalidité
rendue plausible par l'assuré est réellement intervenue; elle doit
donc
procéder de la même manière qu'en cas de révision au sens de l'art.
41 LAI.
Si elle arrive à la conclusion que l'invalidité ne s'est pas modifiée
depuis
sa précédente décision, entrée en force, elle rejette la demande.
Dans le cas
contraire, elle doit encore examiner si la modification constatée
suffit à
fonder une invalidité donnant droit à prestations, et statuer en
conséquence.
En cas de recours, le même devoir de contrôle quant au fond incombe
au juge
(ATF 117 V 198 consid. 3a, 10 V 114 consid. 2a et b).
Selon l'art. 41 LAI, si l'invalidité d'un bénéficiaire de rente se
modifie de
manière à influencer le droit à la rente, celle-ci est, pour l'avenir,
augmentée, réduite ou supprimée. Tout changement important des
circonstances,
propre à influencer le degré d'invalidité, donc le droit à la rente,
peut
donner lieu à une révision de celle-ci. Le point de savoir si un tel
changement s'est produit doit être tranché en comparant les faits
tels qu'ils
se présentaient au moment de la décision initiale de rente et les
circonstances régnant à l'époque de la décision litigieuse (ATF 125 V
369
consid. 2 et la référence; voir également ATF 112 V 372 consid. 2b et
390
consid. 1b).

2.
En l'espèce, l'office intimé est entré en matière sur la nouvelle
demande de
la recourante. Il convient dès lors d'examiner si un changement
important des
circonstances, propre à influencer le degré d'invalidité de cette
dernière,
donc son éventuel droit aux prestations de l'assurance-invalidité,
s'est
produit, en comparant les faits tels qu'ils se présentaient en 1990
(l'invalidité de la recourante pour la période subséquente n'ayant
pas été
examinée par l'office, dans sa décision du 5 juin 1998, en raison du
défaut
des conditions d'assurance) et les circonstances régnant à l'époque
de la
décision litigieuse (le 17 juin 2002).

3.
En l'espèce, la recourante a cessé toute activité lucrative à fin
décembre
1990. Dans sa lettre de résiliation, elle précisait quitter son
emploi pour
des motifs d'ordre familial et ne pas envisager reprendre une activité
lucrative. Depuis son retour en Espagne, elle n'a plus exercé
d'activité
salariée et s'est entièrement consacrée à son ménage. Ainsi
l'évaluation de
l'invalidité, selon la méthode spécifique retenue par l'office,
apparaît
justifiée.

4.
4.1Dans son rapport du 15 avril 1998, la doctoresse F.________,
médecin-conseil de l'office, a estimé, en se basant notamment sur un
certificat du 30 avril 1991 du docteur G.________, que la situation
prévalant
en 1998, était superposable à celle existant en 1990, soit avant le
départ de
l'intéressée de Suisse. L'assurée présentait un syndrome chronique
lombaire
et cervical avec protrusion discale L4-L5 et scoliose
thoraco-lombaire, une
légère gonarthrose, des pieds plats, des varices, une obésité de
grade II et
une humeur dépressive récidivante. En raison de ces affections, tant
le
médecin de l'organe de coordination de la sécurité sociale espagnole
(rapport
du 29 avril 1997 de la doctoresse H.________) que le médecin-conseil
de
l'office retenaient une incapacité de travail de 20 %.

4.2 Selon les avis des médecins-conseils de l'intimé, l'état de santé
physique et psychique de la recourante n'avait pas évolué de manière à
influencer son degré d'incapacité de travail. Ainsi, aux termes du
rapport du
22 février 2002 de la doctoresse B.________, la recourante ne souffre
pas de
maladie grave, seules l'obésité et éventuellement la dysthymie
pouvant être
considérées comme déterminantes. Dans un rapport subséquent (29 mai
2002),
elle relève que la recourante a de la peine à marcher et que les
problèmes
liés à l'appareil locomoteur pourraient justifier une incapacité de
travail
relativement importante dans une activité lucrative, mais n'ont qu'une
influence limitée dans la tenue du ménage; dans ces tâches, la
doctoresse
B.________ fixe l'incapacité à 25 %. Selon le rapport du 18 septembre
2002 du
docteur E.________, l'hypertonie peut être traitée avec des
médicaments et
les problèmes veineux des deux jambes avec le port de bas
compressifs. Quant
à la perte de force alléguée dans la main droite, elle ne peut être
retenue
eu égard aux résultats de l'électromyogramme. Considérant l'ensemble
des
affections, tant psychiques qu'organiques, il estime que l'incapacité
est
nettement inférieure à 40 % dans la tenue du ménage et confirme sur
ce point
l'évaluation effectuée par la doctoresse B.________. Il relève en
outre
l'influence modérée que joue la charge psychique dans la tenue du
ménage par
rapport à une occupation à l'extérieur et le caractère manifestement
surestimé et largement incompréhensible de l'auto-évaluation
effectuée par
l'assurée.

4.3 D'un avis contraire, les docteurs C.________ (rapport du 14 mars
1997) et
I.________ (rapport du 1er décembre 1999) considèrent que la
recourante est
totalement incapable de travailler.

Pour autant, ces avis ne sauraient prévaloir sur ceux des
médecins-conseils
de l'intimé. En effet, les diagnostics posés par les médecins
traitants de la
recourante sont identiques à ceux retenus par les médecins-conseils de
l'office; seules divergent leurs appréciations respectives de la
capacité
résiduelle de travail. Or, il y a lieu de constater que les docteurs
C.________ et I.________ ne se prononcent que sur la capacité de
travail dans
une activité lucrative, alors qu'est déterminante, en l'espèce,
l'aptitude de
l'intéressée à effectuer ses travaux ménagers. Par ailleurs, les
conclusions
de ces médecins ne reposent sur aucune motivation, le contenu de leurs
rapports étant limité à l'énumération des diagnostics et au constat de
l'incapacité de travail. Quant au rapport médical émanant du docteur
I.________, produit devant la commission par la recourante, il
n'apporte rien
de plus que celui rédigé par ce même médecin figurant déjà au
dossier. Enfin,
relativement à la valeur probante des rapports établis par les
médecins
traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon
l'expérience,
le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à
prendre parti
pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce
dernier (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les
références).

En conséquence, il n'y a pas lieu de s'écarter des conclusions des
médecins-conseils de l'office (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160
consid.
1c et les références), ce d'autant plus que leur opinion est partagée
par la
doctoresse A.________, médecin de la sécurité sociale espagnole, qui
a rendu
un rapport complet concernant la recourante.

On ajoutera encore que le questionnaire sur les empêchements dans les
activités ménagères rempli par la recourante ne peut être assimilé à
un
rapport d'enquête sur les activités ménagères effectué par un
enquêteur
habilité auquel la jurisprudence reconnaît, en principe, valeur
probante. Ce
document ne peut donc, à lui seul, justifier que l'on s'écarte des
conclusions retenues par les médecins-conseils de l'office. Au

demeurant, un
rapport d'enquête économique ne constituerait pas un moyen de preuve
approprié en présence de troubles psychiques (VSI 2001 p. 155 consid.
3d et
les références).

4.4 Vu ce qui précède, force est de constater que l'état de santé
physique et
psychique de la recourante, ainsi que sa capacité de travail dans les
activités ménagères ont été établis de manière suffisante pour qu'il
puisse
être statué en connaissance de cause sur les prétentions de la
recourante.
C'est donc à juste titre que les premiers juges ont rejeté la
conclusion de
l'intéressée tendant à la mise en oeuvre d'une expertise médicale en
Suisse.
En outre, eu égard aux conclusions de l'instruction de la cause,
c'est à bon
droit que la commission a considéré qu'il ne s'était pas produit de
changement important des circonstances propres à influencer le degré
d'invalidité de l'assurée et a rejeté le recours.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission
fédérale de
recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger
et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 15 septembre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.407/03
Date de la décision : 15/09/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-09-15;i.407.03 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award