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05/09/2003 | SUISSE | N°4C.78/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 septembre 2003, 4C.78/2003


{T 0/2}
4C.78/2003 /svc

Arrêt du 5 septembre 2003
Ire Cour civile

Mme et MM. les Juges Corboz, président, Walter, Rottenberg
Liatowitsch,
Nyffeler et Favre.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

A. ________,
demanderesse et recourante principale, représentée
par Me Thierry Thonney, avocat, case postale 3309, 1002 Lausanne,

contre

X.________ AG,
défenderesse, intimée et recourante par voie de jonction, représentée
par Me
Daniel Peregrina, avocat, Baker et McKenzie, chemin des Vergers 4, 12

08
Genève.

contrat de travail; salaire afférent aux vacances

(recours en réforme et recours joint contre...

{T 0/2}
4C.78/2003 /svc

Arrêt du 5 septembre 2003
Ire Cour civile

Mme et MM. les Juges Corboz, président, Walter, Rottenberg
Liatowitsch,
Nyffeler et Favre.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

A. ________,
demanderesse et recourante principale, représentée
par Me Thierry Thonney, avocat, case postale 3309, 1002 Lausanne,

contre

X.________ AG,
défenderesse, intimée et recourante par voie de jonction, représentée
par Me
Daniel Peregrina, avocat, Baker et McKenzie, chemin des Vergers 4, 1208
Genève.

contrat de travail; salaire afférent aux vacances

(recours en réforme et recours joint contre le jugement de la Cour
civile du
Tribunal cantonal vaudois
du 12 mars 2002).

Faits:

A.
X. ________ AG (ci-après : X.________) est une société active dans le
domaine
du conseil économique, plus particulièrement dans le secteur du
placement de
capitaux et de patrimoines privés.

X. ________ comprend un service externe et un service interne. Les
collaborateurs du service externe sont engagés par un contrat intitulé
"contrat d'agence". L'organisation de ce service est pyramidale. Le
collaborateur commence son activité au bas de l'échelle et il y
progresse en
fonction de ses résultats.

A. ________, qui souhaitait avoir une occupation professionnelle lui
permettant d'être indépendante, a débuté son activité au sein du
service
externe de X.________ le 27 mars 1993. D'abord rattaché à Y.________,
le
centre de ses activités a ensuite été déplacé à Z.________.

Le 8 avril 1993, X.________ et A.________ ont signé un contrat rédigé
en
langue allemande et intitulé contrat d'agence, selon lequel cette
dernière
était engagée en tant que collaboratrice du service externe de
X.________ en
qualité d'agent négociateur indépendant à titre principal ou
accessoire au
sens des articles 418a ss CO. Il a été retenu que A.________ pensait
souscrire un contrat d'agence et non pas un contrat de travail.

Ce contrat prévoyait en substance que l'agent organisait son activité
librement, mais qu'il ne pouvait recevoir des clients pour entretien
ou
conseil à son propre domicile. Il devait respecter les directives de
X.________, qui visaient à contrôler la production des
collaborateurs, la
qualité de leurs prestations et à promouvoir les produits les plus
rémunérateurs. L'agent ne pouvait engager des sous-agents sans
l'accord de
X.________ ni travailler avec un tiers n'ayant pas lui-même un
contrat avec
X.________. Il n'avait pas le pouvoir de représenter X.________.
Conclu pour
une durée indéterminée et résiliable dans un délai de trois mois pour
la fin
d'un trimestre, le contrat prenait fin sans résiliation lorsque
l'agent avait
atteint l'âge de 65 ans. La rémunération était exclusivement basée
sur les
commissions découlant de la conclusion de contrats. Les frais
personnels et
matériels liés à l'activité de l'agent étaient assumés en totalité par
celui-ci. Il devait également s'acquitter des cotisations sociales et
conclure une assurance perte de gain en cas de maladie ou d'accident.
Enfin,
l'agent devait suivre les cours de formation continue dispensés par
X.________.

Le 29 décembre 1993, A.________ a été promue cadre-chef de groupe par
X.________.

Le 12 février 1994, A.________ a loué un bureau à X.________, qui
exigeait de
ses cadres qu'ils participent financièrement au coût des locaux et de
leur
fonctionnement. Dans ces locaux devaient impérativement avoir lieu la
formation des agents, le travail d'encadrement et, d'une manière
générale,
les tâches administratives. Les activités d'acquisition de la
clientèle se
faisaient à l'extérieur ou dans les bureaux de X.________, mais en
aucun cas
au domicile des agents.

Conformément à des directives de X.________ communiquées le 31 août
1994,
A.________ devait, en qualité de chef de groupe, contrôler les
propositions
de contrats établies par les agents appartenant à sa structure. Les
projets
de contrats de A.________ subissaient un même contrôle de la part de
son
supérieur hiérarchique.

Le 1er mai 1995, les parties ont signé un contrat complétant leur
accord du 8
avril 1993. Il était notamment prévu que les agents directeurs
exerçaient
leurs activités à plein temps en tant qu'indépendants et qu'ils
devaient
s'inscrire au Registre du commerce. X.________ se réservait le droit
de
muter, pour de justes motifs, un agent directeur en conseiller
économique.
S'agissant de la rémunération, l'agent directeur était payé
uniquement sur la
base de commissions pour les affaires réalisées par lui-même et par
les
agents qui lui étaient directement subordonnés. S'il était empêché de
travailler sans faute de sa part ou s'il décédait, une indemnité lui
était
versée ou à ses héritiers. L'agent directeur avait pour obligation de
visiter
au moins une fois par an les clients de son groupe, de recruter de
nouveaux
agents, ainsi que d'instruire, veiller à la formation et contrôler
l'activité
de ses agents subordonnés.

A. ________ ne s'est pas inscrite au registre du commerce.

En ce qui concerne l'organisation du temps de travail, les
collaborateurs
étaient libres de déterminer l'horaire qu'ils décidaient d'accomplir,
sous
réserve des jours où ils devaient se rendre dans les bureaux de
X.________.
Les cadres travaillaient toutefois à plein temps.
Les absences d'un collaborateur ou la diminution de son rendement
pouvaient
aboutir à une lettre d'avertissement et même aller jusqu'à la
résiliation de
son contrat.

Pour maintenir sa position dans la structure, le collaborateur-cadre
devait
réaliser des minima de production, tant au niveau de son groupe qu'à
son
niveau personnel. Les performances des collaborateurs étaient
comparées.
Celles de A.________ étaient moyennes; en Suisse romande, elle était
plutôt
bien placée.

A Z.________, les agents négociateurs avaient en outre l'obligation
d'établir
des plans de semaine qu'ils devaient remettre par avance à leur
supérieur
hiérarchique.

A. ________ avait également pour tâche de traduire en français les
documents
marketing et les supports de cours en allemand qui lui étaient remis
par la
direction de X.________. Elle était de plus chargée d'assurer les
cours de
formation pour les agents négociateurs, de tenir les listes de
présence et de
suivre des séminaires obligatoires. Enfin, en tant que chef de groupe
du
service externe, elle devait recruter des agents, assurer le suivi des
nouveaux collaborateurs et assister à diverses séances. Il a été
retenu que
les activités dépendant de la structure de X.________ lui prenaient
près de
30 heures par semaine.

En juillet 1995, X.________ a octroyé à A.________ un prêt de 15'000
fr.
remboursable au 1er août 1997 au plus tard. En cas de résiliation du
contrat
d'agence par l'une des parties, il était convenu que la somme remise
en prêt
était immédiatement exigible. Ce prêt n'a pas été remboursé.

A. ________ a dû assumer seule l'intégralité des frais professionnels
liés à
l'acquisition de son revenu.

Le 25 septembre 1996, A.________ a informé X.________ qu'elle
renonçait à sa
position de cadre-chef de groupe avec effet au 30 septembre 1996, pour
occuper celle de conseiller économique à mi-temps et qu'en
conséquence, elle
ne sous-louerait plus de bureau et reprendrait le mobilier s'y
trouvant.

X. ________ a accepté ce changement de statut le 23 octobre 1996. Il
ressort
d'un document du 4 novembre 1996 que la société envisageait de se
séparer
définitivement de A.________, qui ne "recrutait" plus depuis très
longtemps
déjà.
Le 20 décembre 1996, A.________ a signifié à X.________ sa démission
pour le
31 mars suivant. X.________ lui a confirmé que son contrat d'agence
prendrait
fin à cette date.

Le 26 février 1997, X.________ a établi un certificat de travail en
faveur de
A.________ duquel il ressort qu'elle avait travaillé en qualité de
collaboratrice économique et de chef de groupe.

Le 25 mars 1997, A.________ a déclaré résilier son contrat de travail
avec
effet immédiat et pour de justes motifs.

Selon les décomptes de X.________, A.________ a réalisé un salaire
brut de
183'897 fr. du 27 mars 1993 au 25 mars 1997.

Le 9 juin 1997, X.________ a adressé un décompte final à A.________
présentant un solde total en sa faveur de 19'500 fr.

Le 18 juin 1997, A.________ a écrit à X.________ pour indiquer
qu'elle avait
été soumise à un contrat de travail déguisé et que la rémunération
touchée
n'était pas convenable, compte tenu du nombre d'heures effectuées et
de ses
responsabilités. Elle a en outre invoqué la compensation s'agissant
du prêt
de 15'000 fr.

Le 4 juillet 1997, X.________ a indiqué que leurs relations
reposaient sur un
contrat d'agence et que A.________ lui devait 31'957 fr. 90.

B.
Par demande en justice du 30 septembre 1997, A.________ a conclu à ce
que
X.________ soit déclarée sa débitrice de 216'103 fr., avec intérêt à
5 % l'an
dès le 1er septembre 1997, sous déduction des charges sociales et d'un
montant de 15'000 fr. Elle a également requis le versement, par
X.________,
de 9'449 fr. 55 avec intérêt à 5 % dès le 1er avril 1997, et de
92'849 fr. 55
avec intérêt à 5 % dès le 1er septembre 1997. Ces conclusions ont par
la
suite été réduites, A.________ ne requérant plus que 165'502 fr. 40 à
titre
de rémunération, sous déduction des charges sociales et du prêt de
15'000
fr., ainsi que 91'907 fr. 20 à titre de remboursement de frais
professionnels, les deux montants portant intérêt à 5 % l'an dès le
1er
septembre 1997.

Par jugement du 12 mars 2002, la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois a
condamné X.________ à payer à A.________ la somme de 29'436 fr. 95
avec
intérêt à 5 % l'an dès le 24 octobre 1997 à titre de remboursement de
ses
frais professionnels.

C.
Contre ce jugement, A.________ (la demanderesse) interjette un
recours en
réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut à la réforme du jugement
attaqué en
ce sens que X.________ est tenue de lui payer la somme supplémentaire
de
165'504 fr. 40 avec intérêt à 5 % l'an dès le 24 octobre 1997, sous
déduction
des charges sociales, avec suite de frais et dépens, le jugement
attaqué
étant confirmé pour le surplus.

Parallèlement à ses conclusions tendant au rejet du recours principal
dans la
mesure de sa recevabilité, X.________ (la défenderesse) forme un
recours
joint dans lequel elle requiert, sous suite de frais et dépens,
l'annulation
du jugement entrepris et la condamnation de A.________ à lui payer
15'000 fr.
plus intérêt à 5 % l'an dès le 28 octobre 1995.

A. ________ conclut au rejet du recours joint.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Le jugement rendu par la cour civile cantonale revêt le caractère
d'une
décision finale qui ne peut faire l'objet d'un recours ordinaire de
droit
cantonal (cf. art. 451a LPC vaud.), soit d'un recours ayant effet
suspensif
et dévolutif (ATF 120 II 93 consid. 1b p. 94 s.), de sorte que la
voie du
recours en réforme au Tribunal fédéral est ouverte (art. 48 al. 1 OJ).

Interjeté par la demanderesse qui a été déboutée de la plupart de ses
conclusions en paiement, le recours principal porte sur une
contestation
civile dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art.
46 OJ).
Il a été déposé en temps utile (art. 32 et 54 OJ; art. 1 de la loi
fédérale
du 21 juin 1963 sur la supputation des délais comprenant un samedi)
et dans
les formes requises (art. 55 OJ), de sorte qu'il est en principe
recevable.
Il en va de même du recours joint (art. 59 al. 2 et 3 OJ).

1.2 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire
son
raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve
n'aient
été violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant
sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter
les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte
de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127
III 248
consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). Dans la mesure où une partie
recourante
présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la
décision
attaquée sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui
viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte
(ATF 127
III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté de griefs contre les
constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux
(art. 55
al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est pas ouvert pour
remettre en
cause l'appréciation des preuves et les constatations de fait qui en
découlent (ATF 127 III 543 consid. 2c p. 547; 126 III 189 consid. 2a).

Il ne sera par conséquent pas tenu compte de l'argumentation des
parties qui
s'écarte de ces principes et leurs griefs seront exclusivement
examinés à la
lumière des faits constatés par la cour cantonale.

2.
Dans son recours principal, la demanderesse ne remet pas en cause la
qualification du contrat en tant que contrat d'engagement des
voyageurs de
commerce retenue par la cour cantonale ni le montant qui lui a été
alloué en
remboursement de ses frais professionnels. En revanche, invoquant une
violation des art. 329d et 349a CO, elle reproche à la cour cantonale
d'avoir
considéré
qu'elle avait perçu une rémunération convenable et d'avoir
refusé
de lui allouer le salaire afférent aux vacances. Dans son recours
joint, la
défenderesse critique le jugement entrepris, dans la mesure où il a
admis que
les parties étaient liées par un contrat de travail et non par un
contrat
d'agence. Elle remet également en cause le dies a quo de l'intérêt
portant
sur le remboursement des 15'000 fr. remis en prêt.

Dans ces circonstances, il convient d'examiner en premier lieu le
recours
joint, car, si les critiques de la défenderesse relatives à la
qualification
du contrat s'avéraient fondées, les prétentions de la demanderesse,
qui
reposent sur l'existence d'un contrat de travail, plus
particulièrement d'un
contrat d'engagement des voyageurs de commerce, devraient être
rejetées.

3.
La défenderesse s'en prend à l'interprétation du contrat à laquelle
s'est
livrée la cour cantonale pour parvenir à la conclusion que les parties
étaient liées par un contrat d'engagement des voyageurs de commerce.
Elle
soutient en substance que celle-ci a fait abstraction des règles
contractuelles prévues, de la dénomination du contrat utilisée et de
la
volonté réelle des parties.

3.1 La dénomination d'un contrat n'est pas déterminante pour évaluer
sa
nature juridique (ATF 99 II 313). Pour qualifier un contrat comme pour
l'interpréter, le juge doit tout d'abord s'efforcer de rechercher la
réelle
et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou
dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur,
soit
pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1
CO). Si le
juge y parvient, il s'agit d'une question de fait qui ne peut être
remise en
cause dans un recours en réforme (ATF 129 III 118 consid. 2.5; 126
III 25
consid. 3cp. 29). Si la volonté réelle des parties ne peut pas être
établie
ou si elle est divergente, le juge doit interpréter les comportements
et les
déclarations selon la théorie de la confiance (ATF 128 III 265
consid. 3a,
419 consid. 2.2 p. 422). Cette interprétation relève du droit, de
sorte que
le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, peut l'examiner
librement
(ATF 129 III 118 consid. 2.5 p. 123 et les arrêts cités).

En l'occurrence, la cour cantonale, ne s'arrêtant pas à la
dénomination de
contrat d'agence utilisée à plusieurs reprises par les parties, a
analysé de
façon détaillée la manière de travailler de la demanderesse et elle
est
parvenue à la conclusion que cette dernière exerçait une activité
subordonnée
et dépendante, incompatible avec un contrat d'agence (cf. art. 418a
al. 1
CO). Comme la tâche prépondérante de la demanderesse résidait dans
l'acquisition de clients pour le compte de la défenderesse, les juges
ont
estimé que le contrat en cause correspondait à un contrat
d'engagement des
voyageurs de commerce au sens des art. 347 ss CO.

3.2 Il s'agit ainsi de vérifier si la cour cantonale pouvait, compte
tenu des
éléments constatés, considérer que les parties étaient liées par un
contrat
d'engagement des voyageurs de commerce.

La distinction entre un contrat d'engagement des voyageurs de
commerce (art.
347 ss CO), qui n'est autre qu'un contrat individuel de travail de
caractère
spécial, et un contrat d'agence (art. 418a ss CO) peut s'avérer
délicate
(Streiff/von Kaenel, Leitfaden zum Arbeitsvertragsrecht, 5e éd.,
Zurich 1992,
n. 3 ad art. 347/347a CO; Staehelin, Commentaire zurichois, n. 9 ad
art. 347
CO). En effet, l'agent et le voyageur de commerce exercent une
fonction
économique identique : tous deux sont des représentants qui doivent
établir
ou maintenir la liaison entre l'entreprise qu'ils représentent et la
clientèle. Seule leur situation juridique diffère. Le critère
essentiel de
distinction réside dans le fait que l'agent exerce sa profession à
titre
indépendant, tandis que le voyageur de commerce se trouve dans un
rapport
juridique de subordination à l'égard de son employeur (ATF 99 II 313
s. et
les références citées). Parmi les éléments impliquant un lien de
subordination, on peut mentionner les limitations imposées au
voyageur de
commerce d'organiser son travail comme il l'entend et de disposer de
son
temps à sa guise, alors que l'agent jouit d'une grande liberté à cet
égard; à
la différence de l'agent, le voyageur de commerce est lié aux
instructions et
directives de son employeur; l'obligation d'adresser des rapports
périodiques
à la maison représentée est aussi caractéristique du lien de
subordination
dans lequel se trouve le voyageur de commerce (cf. ATF 99 II 314; cf.
également Staehelin, op. cit., n. 9 s. ad art. 347 CO; Thomas Hirt,
Zum
Begriff des Handelsreisendenvertrags, ArbR 1991 p. 63 ss, 84 ss). Le
fait de
devoir visiter un certain nombre de clients ou celui d'avoir à
justifier un
chiffre d'affaires minimum sont aussi des indices permettent d'en
déduire
l'existence d'un contrat d'engagement des voyageurs de commerce (cf.
Favre/Munoz/Tobler, Le contrat de travail annoté, Lausanne 2001, n.
1.2 ad
art. 347 CO). En tous les cas, il convient de tenir compte de
l'ensemble des
circonstances du cas particulier (cf. ATF 112 II 41 consid. 1a/aa p.
46 et
les références citées) et de ne pas s'arrêter à une éventuelle
désignation
erronée des parties (Streiff/von Kaenel, op. cit., n. 3 ad art.
347/347a CO
p. 498). En ce domaine en effet, la dénomination utilisée par les
parties
pour qualifier leurs relations contractuelles a d'autant moins
d'importance
qu'il peut être particulièrement tentant de déguiser la nature
véritable de
la convention pour éluder certaines dispositions légales impératives
(ATF 99
II 313).

En l'espèce, la cour cantonale a constaté en fait, d'une manière qui
lie le
Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2 OJ), que la
défenderesse donnait des directives à la demanderesse sur la façon
d'exécuter
sa tâche et fixait les limites dans lesquelles son activité devait
s'exercer.
Ainsi, la demanderesse, en tant que cadre, avait l'obligation de
consacrer
son activité à plein temps pour la défenderesse; elle devait réaliser
un
chiffre d'affaires minimal et effectuer un nombre de rendez-vous
déterminé;
l'usage de certains locaux lui était interdit pour des activités
données. La
demanderesse louait un bureau à la défenderesse qui en fixait le
prix, de
sorte qu'elle n'avait aucune liberté de ce point de vue. La
défenderesse
pouvait décider unilatéralement de changer le plan de carrière d'un
cadre et
la demanderesse devait obtenir l'aval de son supérieur hiérarchique
pour
transférer ou recevoir des dossiers, engager des sous-agents ou
signer un
contrat avec un nouveau collaborateur. Les juges ont également mis en
évidence la structure hiérarchisée de la société défenderesse, qui
atteste
d'un rapport de subordination entre les collaborateurs. Quant au
risque de
l'entreprise, il était assumé par le supérieur hiérarchique. Examinant
l'attitude de la demanderesse, les juges ont relevé qu'elle ne
s'était jamais
comportée en indépendante, qu'elle n'avait pas sollicité son
inscription au
registre du commerce et qu'elle ne disposait pas de sa propre
infrastructure.
Enfin, parallèlement aux tâches liées au démarchage de la clientèle,
le
cahier des charges de la demanderesse comportait également la
réalisation de
traductions et de divers documents de marketing pour le compte de la
défenderesse, la surveillance de nouveaux collaborateurs et le suivi
d'une
formation continue.

En pareilles circonstances, on ne voit pas que la cour cantonale ait
procédé
à une interprétation contraire à l'art. 18 al. 1 CO en déduisant de
tels
éléments un lien de subordination de la demanderesse envers la
défenderesse.
Les critiques de cette dernière quant à la pertinence des critères
pris en
compte sont infondées. En outre, on ne peut reprocher à la cour
cantonale,
après avoir retenu l'existence d'un rapport de subordination, d'en
avoir tiré
la conclusion juridique qui s'imposait, à savoir que les parties
étaient
liées par un contrat d'engagement des voyageurs de commerce, même si,
dans
leurs contrats, elles s'étaient toujours référées à un contrat
d'agence.

3.3 Lorsque la défenderesse tente de démontrer le caractère
indépendant des
activités exercées par la demanderesse en se fondant sur les
déclarations
d'autres agents décrivant leur propre activité et sur des jugements de
tribunaux inférieurs ayant considéré qu'il s'agissait d'indépendants,
elle
perd de vue que seule la situation concrète de la demanderesse au
sein de la
société doit être analysée en l'espèce, ce qui exclut toute
comparaison
d'ordre général.

De même, la qualification d'agents indépendants retenue par les
autorités
fiscales, dont cherche à se prévaloir la défenderesse, n'est pas
pertinente,
dès lors que la nature juridique des rapports de droit civil n'est pas
véritablement déterminante sous l'angle du droit fiscal (ATF 121 I 259
consid. 3c p. 263).

Enfin, peu importe si, au moment de la signature du contrat en avril
1993, la
demanderesse pensait conclure un contrat d'agence. Ce qui compte,
c'est la
réalité des relations contractuelles finalement nouées par les
parties, dont
on a vu qu'elles relèvent du contrat d'engagement des voyageurs de
commerce.

4.
La défenderesse soutient encore que l'intérêt moratoire relatif au
prêt de
15'000 fr. que la demanderesse est condamnée à lui rembourser - ce
qui n'est
du reste pas contesté - devrait courir dès le 28 octobre 1995, soit
dès la
date d'octroi du prêt, et non dès le 24 octobre 1997 qui correspond au
lendemain de la réception de la demande en justice, comme retenu par
la cour
cantonale. Elle ne mentionne cependant aucune disposition légale à
l'appui de
son affirmation, pas plus qu'elle n'indique en quoi la cour cantonale
aurait
violé le droit fédéral sur ce point. Faute de motivation suffisante
(cf. art.
55 al. 1 let. c OJ), un tel grief n'est pas recevable.

Il en découle que le recours joint doit être rejeté dans la mesure où
il est
recevable, de sorte qu'il convient d'entrer en matière sur le recours
principal (cf. supra consid. 2).

5.
La demanderesse ne remet pas en cause le montant que lui a alloué la
cour
cantonale à titre de remboursement de ses frais professionnels. Non
contesté,
ce poste sera donc considéré comme acquis (art. 55 al. 1 let. b et c
OJ).

6.
En premier lieu, la demanderesse soutient que le jugement attaqué
viole
l'art. 349a al. 2 CO, dans la mesure où il a été admis que la
rémunération
perçue durant les 48 mois de son activité auprès de la défenderesse
pouvait
être qualifiée de convenable au sens de cette disposition.

6.1 L'art. 349a al. 2 CO dispose qu'un accord écrit prévoyant que le
salaire
consiste exclusivement ou principalement en une provision n'est
valable que
si cette dernière constitue une rémunération convenable des services
du
voyageur de commerce. Le caractère "convenable" d'une rétribution est
en
principe une notion de droit, susceptible d'être revue par le Tribunal
fédéral s'agissant du choix des critères selon lesquels il en est
décidé;
l'application de ces critères dépend de questions de fait qui doivent
être
examinées par l'autorité cantonale (arrêt du Tribunal fédéral
4C.81/2001 du
13 juillet 2001 consid. 5a; cf. ATF 74 II 62 consid. 3 in fine). Il
convient
de contrôler de cas en cas si la rémunération du voyageur de commerce
peut
être qualifiée de convenable (Rehbinder, Commentaire bernois, n. 6 ad
art.
349a CO). Le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité
cantonale a
abusé de son pouvoir d'appréciation (art. 4 CC; arrêt du Tribunal
fédéral du
12 novembre 1986, publié in JAR 1987 p. 307 s., 308), c'est-à-dire si
elle a
retenu des critères inappropriés (ATF 129 III 400 consid. 3.1), si la
décision rendue aboutit à un résultat manifestement injuste ou à une
iniquité
choquante (ATF 128 III 390 consid. 4.5, 428 consid. 4; 127 III 300
consid.
6b).

L'idée à la base de l'art. 349a al. 2 CO est d'éviter que l'employeur
n'exploite le voyageur en lui promettant exclusivement ou
principalement des
commissions qui se révèlent par la suite insuffisantes (ATF 83 II 78;
Engel,
Contrats de droit suisse, 2e éd., Berne 2000, p. 413). Une provision
est
convenable si elle assure au voyageur un gain qui lui permette de
vivre
décemment, compte tenu de son engagement au travail (Arbeitseinsatz),
de sa
formation, de ses années de service, de son âge et de ses obligations
sociales (Staehelin, op. cit., n. 4 ad art. 349a CO). La rémunération
du
voyageur dépend très étroitement des conditions que l'employeur lui
fixe pour
pouvoir négocier ou conclure des affaires (Brunner/Bühler/Waeber,
Commentaire
du contrat de travail, 2e éd., Lausanne 1996, n. 3 ad art. 347 à 350a
CO). On
doit aussi tenir compte, comme ligne directrice, des usages de la
branche
(arrêt du 13 juillet 2001 précité, consid. 5a et arrêt du 12 novembre
1986
précité, publié in JAR 1987 p. 307 s.).
6.2 En l'espèce, la cour cantonale a retenu que le revenu net moyen
de la
demanderesse, de l'ordre de 3'830 fr. par mois, apparaissait comme
convenable
au sens de l'art. 349a al. 2 CO. Pour parvenir à cette conclusion,
elle a
d'une part souligné qu'il n'était pas possible d'établir une
rémunération
usuelle dans le domaine concerné et, d'autre part, elle a tenu compte
de
l'inexpérience de la demanderesse lorsqu'elle
a commencé ses
activités auprès
de la défenderesse, du fait qu'il n'était pas allégué que celle-ci
ait eu des
obligations sociales particulières ou qu'elle ait souffert de cette
situation
sur le plan économique. On ne voit pas que ces critères soient
inaptes à
établir le caractère convenable de la rémunération versée, compte
tenu de la
jurisprudence précitée. En outre, eu égard au montant touché par la
demanderesse, la conclusion figurant dans le jugement entrepris, selon
laquelle l'employeur avait versé une rémunération remplissant les
exigences
de l'art. 349a al. 2 CO, n'apparaît pas manifestement injuste. Aucun
élément
ne permet donc de retenir que la cour cantonale aurait abusé du
pouvoir
d'appréciation dont elle dispose en la matière.

6.3 Dans son argumentation, la demanderesse remet en cause pour
l'essentiel
la portée et la signification des critères pris en compte par la cour
cantonale. De telles critiques relèvent de l'appréciation des preuves
et ne
sont pas admissibles dans un recours en réforme (cf. supra consid.
1.2), de
sorte qu'il ne sera pas entré en matière. Quant à la comparaison dont
elle se
prévaut avec une rémunération inférieure à 2'000 fr. par mois qui
n'avait pas
été jugée convenable par un tribunal cantonal en 1982 pour un vendeur
d'aspirateurs (cf. Aubert, Quatre cents arrêts sur le contrat de
travail,
Lausanne 1984, n. 325 p. 188), il convient de souligner que le
Tribunal
fédéral n'est pas lié par des précédents dont il n'a pas eu à
connaître (cf.
ATF 129 III 225 consid. 5.4 et les arrêts cités). Quoi qu'il en soit,
il a
été souligné que l'examen du caractère convenable de la rémunération
dépend
étroitement des circonstances du cas d'espèce, de sorte que toute
comparaison
s'avère délicate, voire impossible.

On ne discerne donc aucune violation de l'art. 349a al. 2 CO.

7.
En second lieu, la demanderesse reproche à la cour cantonale d'avoir
violé
l'art. 329d CO en rejetant ses prétentions salariales afférentes aux
vacances.

7.1 Comme on vient de le voir, la cour cantonale n'a pas abusé de son
pouvoir
d'appréciation en estimant que la rémunération allouée à la
demanderesse et
calculée exclusivement sur la base de commissions constituait une
rémunération convenable au sens de l'art. 349a al. 2 CO (cf. supra
consid.
6). On ne peut en conclure, comme le soutient la défenderesse, que ce
montant, parce qu'il correspond aux exigences de l'art. 349a al. 2 CO,
comprend de ce seul fait le salaire afférent aux vacances. On ne se
trouve
pas dans l'hypothèse selon laquelle le juge aurait lui-même fixé une
rémunération convenable et où l'on pourrait alors effectivement se
demander
si le montant établi par l'autorité n'inclut pas, par définition, la
rémunération des vacances.

7.2 L'employeur accorde au travailleur, chaque année de service quatre
semaines de vacances au moins (art. 329a al. 1 CO), pendant
lesquelles il
doit verser à son employé le salaire total y afférent (cf. art. 329d
al. 1
CO). A teneur de l'art. 329d al. 2 CO, tant que durent les rapports de
travail, les vacances ne peuvent pas être remplacées par des
prestations en
argent ou d'autres avantages. Ces principes sont également
applicables aux
voyageurs de commerce (cf. Beat Meyer, Das Anstellungsverhältnis des
Handelsreisenden, thèse Zurich 1978, p. 102 et 106).

En règle générale, le salaire relatif aux vacances doit être versé au
moment
où celles-ci sont prises. L'inclusion de l'indemnité de vacances dans
le
salaire total a toutefois été admise à titre exceptionnel par la
jurisprudence, en particulier lors d'occupation très irrégulière de
travailleurs à temps partiel (cf. ATF 118 II 136 consid. 3b; 116 II
515
consid. 4a; 107 II 430 consid. 3a). Le Tribunal fédéral, prenant en
considération les critiques de la doctrine, s'est récemment demandé
s'il se
justifiait de maintenir une telle dérogation, mais il a laissé la
question
ouverte, en relevant qu'il fallait en tous les cas que la part du
salaire
global destinée à l'indemnisation des vacances fasse l'objet d'une
mention
expresse dans le contrat de travail, lorsque celui-ci était conclu
par écrit
(cf. ATF 129 III 493 consid. 3.2 et les références citées, ainsi que
consid.
3.3). Dès lors que la loi impose la forme écrite pour les clauses du
contrat
d'engagement des voyageurs de commerce qui dérogent aux prescriptions
légales
(cf. art. 347a CO; Streiff/von Kaenel, op. cit., n. 5 ss ad art.
347/347a
CO), on peut en déduire que si les parties entendent s'écarter de
l'art. 329d
al. 2 CO, elles doivent le prévoir par écrit.

En l'espèce, la rémunération de la demanderesse était uniquement
basée sur
des commissions. La cour cantonale a souligné qu'il n'était pas
établi que la
demanderesse aurait demandé ou bénéficié de vacances rémunérées
durant son
activité. Elle a au contraire constaté que la demanderesse ne
percevait
aucune rémunération en cas d'absence ou d'inactivité. La
défenderesse, qui
considérait ses agents comme des indépendants, a du reste admis
qu'elle ne se
préoccupait pas de leurs vacances. Il ressort de ces éléments que la
demanderesse pouvait prendre des vacances si elle le souhaitait, mais
qu'elle
ne touchait alors pas de rémunération, ce qui est contraire à l'art.
329d al.
2 CO (cf. Aubert, Le droit des vacances: quelques problèmes
pratiques, in
Journée 1990 de droit du travail et de la sécurité sociale, Zurich
1990, p.
111 ss, 120 s.).

Par ailleurs, il n'apparaît pas que le contrat écrit conclu par les
parties
ait contenu la moindre clause stipulant que la rémunération versée à
la
demanderesse était complétée par une indemnité correspondant au
salaire
afférent aux vacances. La défenderesse indique du reste expressément
dans son
écriture que le contrat signé avec la demanderesse était conçu comme
un
contrat d'agence et la question des vacances ne se posait donc pas.
On ne
saurait ainsi admettre qu'en dérogation à l'art. 329d al. 2 CO,
l'indemnité
de vacances était incluse dans la rémunération totale.

Il en découle que la demanderesse a en principe droit au salaire
afférent à
ses vacances, peu importe que celles-ci aient été prises ou non (cf.
ATF 129
III 493 consid. 5.2; 116 II 515 consid. 4b). La cour cantonale ne
pouvait
donc rejeter les prétentions de la demanderesse, au motif que celle-ci
n'avait ni établi ni allégué qu'elle n'avait pas été en mesure de
prendre ses
vacances. Quant aux critiques de la défenderesse, qui soutient que les
prétentions de la recourante sont abusives, car elle a toujours pu
prendre
ses vacances comme elle l'entendait, elles sont dépourvues de
pertinence,
puisqu'elles n'enlèvent rien au fait que la demanderesse ne touchait
aucune
rémunération afférente à ses vacances.

7.3 Il reste à déterminer quel montant allouer à la demanderesse à ce
titre,
attendu que celle-ci était exclusivement payée à la commission,
qu'elle a
travaillé 48 mois pour le compte de la défenderesse et que, durant
cette
période, elle avait droit à 4 semaines de vacances par an (art. 329a
al. 1
CO).

On peut tirer de l'art. 329d al. 1 CO le principe selon lequel le
travailleur
ne doit pas être traité différemment du point de vue salarial
lorsqu'il est
en vacances que s'il travaillait. Il ne doit donc subir ni une perte
(cf. ATF
129 III 493 consid. 3.1; ATF 118 II 136 consid. 3b) ni un
accroissement de
revenu (Schönenberger/Staehelin, op. cit., n. 1 ad art. 329d CO).

Lorsque le salarié est payé en fonction du temps de travail, le
salaire
afférent aux vacances est calculé au prorata de ce temps (cf.
Favre/Munoz/Tobler, op. cit., n. 1.1 et 1.2 ad art. 329d CO). Si le
salarié
est payé exclusivement à la commission ou aux pièces, la
détermination du
critère servant de base au calcul du salaire afférent aux vacances
est moins
évidente. La loi ne prévoit rien. Deux approches sont envisageables.
La
première consiste à verser au salarié l'équivalent des commissions
qu'il
aurait effectivement perçues s'il avait travaillé (méthode de calcul
individuelle). La seconde se fonde sur une période de référence. Elle
prend
comme critère le revenu effectivement réalisé durant une certaine
période de
travail et consiste à verser au salarié le pourcentage de ce revenu
correspondant à une indemnité de vacances (méthode de calcul
forfaitaire)
(Rehbinder, op. cit., n. 5 ad art. 329d CO). Cette proportion est de
8.33 %
pour quatre semaines de vacances par an (cf. Aubert, Le droit des
vacances,
op. cit., p. 114). Les deux méthodes comportant des inconvénients et
des
risques d'erreur, il y a lieu d'opter, avec la doctrine majoritaire,
pour un
certain schématisme reposant sur la vraisemblance et de calculer en
principe
le salaire afférent aux vacances des travailleurs payés à la
commission ou
aux pièces selon la méthode de calcul forfaitaire, soit en fonction
de la
moyenne des revenus réalisés durant les derniers mois de travail ou
au cours
d'une autre période appropriée (Rehbinder, op. cit., n. 7 ad art.
329d CO;
Favre/Munoz/Tobler, op. cit., n. 1.3 ad art. 329d CO; Streiff/von
Kaenel, op.
cit., n. 3 ad art. 329d CO p. 244; Meyer, op. cit., p. 106; Aubert,
Le droit
des vacances, op. cit., p. 121; Eric Cerottini, Le droit aux
vacances, thèse
Lausanne 2001, p. 199 s.). Ce n'est que si les circonstances du cas
d'espèce
laissent apparaître clairement que l'utilisation de la méthode
forfaitaire ne
permet pas d'établir un salaire afférent aux vacances correspondant à
la
réalité qu'il faut alors préférer la méthode individuelle. Tel peut
être par
exemple le cas s'il s'avère que le salaire des vacances est compensé
par le
fait que le salarié peut grouper ses commandes ou les contrats qu'il
conclut
avant ou après les vacances (cf. Streiff/von Kaenel, op. cit., n. 3
ad art.
329d CO p. 244; Aubert, op. cit., p. 121; Cerottini, op. cit., p.
200). Il
convient de préciser que, plus la période de référence est longue,
plus la
méthode de calcul forfaitaire s'avère en règle générale appropriée.

En l'occurrence, il ne ressort pas des faits constatés que le calcul
du
salaire afférent aux vacances de la demanderesse, en fonction de sa
rémunération moyenne durant les 48 mois de son activité pour la
défenderesse,
ne correspondrait à l'évidence pas à ce que l'employeur aurait dû
concrètement lui allouer. Par conséquent, il n'y a pas lieu de
s'écarter de
la méthode de calcul forfaitaire. La défenderesse doit ainsi verser à
la
demanderesse l'équivalent de 8.33 % de 183'897 fr. correspondant à sa
rémunération brute durant les 48 mois de son activité, ce qui
équivaut à
15'318 fr. sous déduction des charges sociales.

7.4 La demanderesse conclut à un intérêt de 5 % l'an sur cette somme
à partir
du 24 octobre 1997, date qui correspond au lendemain de la réception
de la
demande en justice, ce que ne remet pas en cause la défenderesse.
C'est ainsi
cette date qui sera retenue, sans qu'il y ait lieu de se demander si,
s'agissant d'une créance relevant du droit du travail dont
l'exigibilité est
régie par la loi (art. 339 al. 1 CO), on ne pourrait pas considérer
que
l'intérêt moratoire court dès la fin du contrat, sans qu'il soit
nécessaire
d'interpeller le créancier (recte: débiteur) (art. 102 al. 2 et 104
al. 1 CO;
cf. en ce sens: Brunner/Bühler/Waeber, op. cit., n. 1 ad art. 339 CO;
Rehbinder, op. cit., n. 24 s. ad art. 323 CO ).

Le recours principal sera donc partiellement admis s'agissant du
salaire
afférent aux vacances et le jugement attaqué réformé en ce sens que la
défenderesse sera condamnée à verser à la demanderesse 15'318 fr.
brut sous
déduction des charges sociales avec intérêt à 5 % l'an dès le 24
octobre
1997. Il sera confirmé pour le surplus, sous réserve de la question
des frais
et dépens.

8.
Comme la valeur litigieuse, selon les prétentions de la demanderesse à
l'ouverture de l'action (ATF 115 II 30 consid. 5b; 100 II 358 consid.
a)
dépasse 30'000 fr., la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2
et 3 CO).

La demanderesse n'obtient que partiellement gain de cause, alors que
le
recours par voie de jonction s'avère infondé, dans la mesure de sa
recevabilité. Il y a donc lieu de répartir les frais à raison de deux
tiers à
la charge de la défenderesse et d'un tiers à la charge de la
demanderesse
(art. 156 al. 3 OJ).

Les dépens alloués à la demanderesse seront réduits dans la même
proportion
(art. 159 al. 3 OJ).

Enfin, il convient de renvoyer le dossier à la cour cantonale pour
qu'elle
statue à nouveau sur les frais et dépens de la procédure accomplie
devant
elle (art. 157 et 159 al. 6 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours joint est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Le recours principal est partiellement admis.

3.
Le jugement attaqué est réformé dans le sens où la défenderesse est
condamnée
à verser en sus à la demanderesse un montant de 15'318 fr. brut sous
déduction des charges sociales, avec intérêt à 5 % l'an dès le 24
octobre
1997. Il est confirmé pour le surplus.

4.
Un émolument judiciaire de 7'500 fr. est mis à raison de 2'500 fr. à
la
charge de la demanderesse et de 5'000 fr. à la charge de la
défenderesse.

5.
La défenderesse versera une indemnité de 3'000 fr. à la demanderesse
à titre
de dépens réduits.

6.
La cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur
les
frais et dépens de la procédure
cantonale.

7.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Cour
civile du
Tribunal cantonal vaudois.

Lausanne, le 5 septembre 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.78/2003
Date de la décision : 05/09/2003
1re cour civile

Analyses

Art. 329d, 347, 349a al. 2 et 418a CO; voyageur de commerce ou agent; rémunération convenable; salaire afférent aux vacances. Critères permettant de faire la distinction entre un contrat d'engagement des voyageurs de commerce et un contrat d'agence (consid. 3). Caractère convenable de la rémunération des services du voyageur de commerce au sens de l'art. 349a al. 2 CO (consid. 6). Une rémunération qui correspond aux exigences de l'art. 349a al. 2 CO ne comprend pas automatiquement le salaire afférent aux vacances (consid. 7.1). Lorsque, dans le cadre d'un contrat d'engagement des voyageurs de commerce, les parties entendent déroger à l'art. 329d al. 2 CO, elles doivent le prévoir par écrit (consid. 7.2). Méthode de calcul permettant d'établir le salaire afférent aux vacances des travailleurs payés à la commission ou aux pièces (consid. 7.3). Dies a quo de l'intérêt moratoire pour les créances de droit du travail (question laissée ouverte; consid. 7.4).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-09-05;4c.78.2003 ?
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