La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/09/2003 | SUISSE | N°C.166/03

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 septembre 2003, C.166/03


{T 7}
C 166/03

Arrêt du 2 septembre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme
Gehring

K.________, recourant,

contre

Office cantonal de l'emploi, groupe réclamations, rue des
Glacis-de-Rive 4-6,
1207 Genève, intimé

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-chômage

(Décision du 20 mars 2003)

Faits:

A.
Licencié pour des motifs économiques avec effet au 28 février 2001,
K.________, resso

rtissant américain, a déposé, le 27 septembre 2002,
une
demande de prestations de l'assurance-chômage. Contestant le montant
des
...

{T 7}
C 166/03

Arrêt du 2 septembre 2003
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffière :
Mme
Gehring

K.________, recourant,

contre

Office cantonal de l'emploi, groupe réclamations, rue des
Glacis-de-Rive 4-6,
1207 Genève, intimé

Commission cantonale de recours en matière d'assurance-chômage

(Décision du 20 mars 2003)

Faits:

A.
Licencié pour des motifs économiques avec effet au 28 février 2001,
K.________, ressortissant américain, a déposé, le 27 septembre 2002,
une
demande de prestations de l'assurance-chômage. Contestant le montant
des
indemnités fixé par l'Office cantonal de l'emploi, il a déposé, le 22
novembre 2002, une réclamation rédigée en anglais. Par courrier du 26
novembre 2002, l'Office cantonal de l'emploi a invité K.________ à
lui faire
parvenir dans un délai échéant le 9 décembre suivant, une traduction
française de l'acte, sous peine d'irrecevabilité de celui-ci.
K.________ n'a
pas répondu à ce courrier. Par rappel du 12 décembre 2002, l'Office
cantonal
de l'emploi en a prolongé le délai jusqu'au 19 décembre 2002 et il a
une
nouvelle fois souligné que faute d'être produite en français dans le
délai
prévu à cet effet, la réclamation serait déclarée irrecevable.
K.________ ne
s'est pas exécuté et, par décision du 24 janvier 2003, l'Office
cantonal de
l'emploi a déclaré irrecevable, la réclamation du 22 novembre 2002.

B.
Par jugement du 20 mars 2003, la Commission cantonale de recours en
matière
d'assurance-chômage (aujourd'hui : Tribunal cantonal des assurances
sociales)
a rejeté le recours formé contre cette décision par K.________.

C.
Ce dernier interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
il requiert l'annulation, en concluant à l'augmentation du montant des
indemnités de chômage qui lui sont allouées.

L'Office cantonal de l'emploi conclut implicitement au rejet du
recours,
tandis que le seco a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
A défaut de convention internationale applicable en l'espèce, il y a
lieu de
se fonder sur le droit interne.

2.
Selon la jurisprudence rendue sous l'empire de la Constitution de
1874, la
liberté de la langue faisait partie des libertés non écrites de la
Constitution fédérale. Elle garantit l'usage de la langue maternelle,
ou
d'une autre langue proche, voire de toute langue de son choix.
Lorsque cette
langue est en même temps une langue nationale, son emploi était en
outre
protégé par l'art. 116 al. 1 aCst. Dans les rapports avec les
autorités
toutefois, la liberté de la langue est limitée par le principe de la
langue
officielle. En effet, sous réserve de dispositions particulières (par
exemple
les art. 5 par. 2 et 6 par. 3 let. a CEDH), il n'existe en principe
aucun
droit à communiquer avec les autorités dans une autre langue que la
langue
officielle. Celle-ci est elle-même liée au principe de la
territorialité, au
sens où elle correspond normalement à la langue qui est parlée dans le
territoire concerné. Ces principes ont été formalisés dans la
Constitution de
1999, notamment aux art. 18 et 70 (ATF 128 V 37 consid. 2b/aa et les
références citées).

2.1 Le principe de la territorialité des langues a pour conséquence
que les
parties doivent s'adresser aux autorités judiciaires cantonales dans
la
langue officielle du canton (ATF 128 V 38 consid. 2b/bb; RDAT 1993 II
78 215;
Marco Borghi, Langues nationales et langues officielles, in : Daniel
Thürer/Jean-François Aubert/Jörg-Paul Müller [éd.], Droit
constitutionnel
suisse, Zurich 2001, § 37 ch. 39). Selon la jurisprudence, dans les
relations
avec leurs autorités, les cantons peuvent imposer leur langue
officielle
comme langue judiciaire et exiger la traduction des actes de procédure
rédigés dans une autre langue, fût-elle l'une des langues officielles
de la
Confédération (ATF 128 V 38 consid. 2b/bb; voir également SJ 1998 p.
312
consid. 3 et les références).

S'agissant du canton de Genève, l'art. 9 de la loi de procédure civile
prévoit explicitement que "les parties procèdent en langue française".
L'interprétation de cette disposition ne souffre aucune ambiguïté :
L'emploi
de la langue française est à la fois un droit et un devoir, tant pour
le
magistrat que pour les plaideurs, pour tous les actes, écrits ou
oraux, de la
procédure. Cette règle s'impose à l'évidence pour tous les écrits
émanant du
juge ou des parties elles-mêmes, sans exception possible; il n'est pas
concevable qu'une requête, un mémoire, un procès-verbal ou un
jugement soient
rédigés dans une autre langue que le français. Le juge doit veiller
d'office
à ce que les écritures des parties soient rédigées dans cette langue
(Bertossa/Gaillard/Guyet, Commentaire de la loi de procédure civile
genevoise, nos 2 et 3 ad art. 9; Bauer/Lévy, L'exception de
traduction de
pièces, in : SJ 1982 p. 50; voir aussi l'art. 9 de la loi genevoise de
procédure civile du 10 avril 1987 [LPC/GE; RSGE E 3 05]).

2.2 De jurisprudence constante, un recours qui n'est pas rédigé dans
la
langue du canton peut donc être déclaré irrecevable, pour autant que
la
possibilité ait été donnée à l'intéressé de produire un acte rédigé
dans la
langue dudit canton (ATF 102 Ia 37; arrêts du Tribunal fédéral
publiés in :
RDAT 2002 I 41 296 et 1993 II 78 215 et, pour Genève, in : SJ 1998,
311; dans
le même sens, Décision d'irrecevabilité de la Commission européenne
des
droits de l'homme in : JAAC 1997, 105 950).

2.3 Par écriture du 22 novembre 2002, le recourant a déposé devant
l'intimé,
une réclamation rédigée en langue anglaise. Par courriers des 26
novembre et
12 décembre 2002, il a été invité à en produire une traduction
française, ce
qu'il n'a pas fait. Il a été clairement informé des conséquences
qu'entraînerait l'inexécution de cette injonction. L'argument selon
lequel il
aurait été pénalisé au cours de la procédure cantonale en raison de sa
mauvaise compréhension de la langue française ne justifie pas de
s'écarter du
principe, indiscutable, selon lequel les parties doivent s'adresser
aux
autorités dans la langue officielle du canton. Dans ces circonstances,
l'intimé était fondé à déclarer irrecevable, la réclamation du 22
novembre
2002.

2.4 Le jugement entrepris n'est pas critiquable et le recours se
révèle mal
fondé.

3.
La procédure n'est pas gratuite, étant donné que le litige ne porte
pas sur
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance (art. 134 OJ a
contrario). Le
recourant qui succombe supporte par conséquent les frais de la cause
(art.
156 al. 1 OJ en liaison avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à Syna-Genève, au
Tribunal
cantonal des assurances sociales de Genève et au Secrétariat d'Etat à
l'économie.

Lucerne, le 2 septembre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.166/03
Date de la décision : 02/09/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-09-02;c.166.03 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award