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29/08/2003 | SUISSE | N°1P.458/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 août 2003, 1P.458/2003


{T 0/2}
1P.458/2003 /mks

Arrêt du 29 août 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Juge présidant,
Reeb et Fonjallaz;
Greffier: M. Kurz.

A. ________,
recourant, représenté par Me Robert Fox, avocat, Cheneau-de-Bourg 3,
case
postale 3393, 1002 Lausanne,

contre

B.________,
intimée, représentée par Me Marcel Heider, avocat, avenue Nestlé 8,
case
postale 319, 1820 Montreux,
Procureur général du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case
postale,
1014 Lau

sanne,
Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route
du Signal
8, 1014 Lausanne.

détention préve...

{T 0/2}
1P.458/2003 /mks

Arrêt du 29 août 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Juge présidant,
Reeb et Fonjallaz;
Greffier: M. Kurz.

A. ________,
recourant, représenté par Me Robert Fox, avocat, Cheneau-de-Bourg 3,
case
postale 3393, 1002 Lausanne,

contre

B.________,
intimée, représentée par Me Marcel Heider, avocat, avenue Nestlé 8,
case
postale 319, 1820 Montreux,
Procureur général du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case
postale,
1014 Lausanne,
Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route
du Signal
8, 1014 Lausanne.

détention préventive,

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du
Tribunal
cantonal du canton de Vaud du 8 juillet 2003.

Faits:

A.
A. ________ se trouve en détention préventive depuis le 26 septembre
2002,
sous l'inculpation, notamment, de mise en danger de la vie d'autrui,
menace,
contrainte, contrainte sexuelle, séquestration et enlèvement. Il lui
est
reproché d'avoir, le 24 septembre 2002, forcé son ex-amie B.________
à monter
dans son véhicule, sous la menace d'une arme chargée, et de l'avoir
conduite
dans un chalet où, après l'avoir menottée, il l'aurait fouettée et
contrainte
à des actes d'ordre sexuel. Une expertise psychiatrique a été
ordonnée afin
de déterminer le degré de responsabilité de l'inculpé, le risque de
récidive,
ainsi que les éventuelles mesures à ordonner.
La détention a été maintenue par ordonnances du juge d'instruction de
l'arrondissement de l'est vaudois des 3 octobre, 8 novembre 2002 et
10 mars
2003, notamment en raison du risque de récidive: le prévenu avait
admis avoir
eu des intentions meurtrières à l'égard de la plaignante, et de
nombreuses
condamnations antérieures ne l'avaient pas empêché de commettre de
nouveaux
actes délictueux. Ces décisions ont été confirmées par le Tribunal
d'accusation vaudois (arrêts des 15 octobre et 5 décembre 2002 et du
11 avril
2003), en raison de la dangerosité de l'inculpé.

B.
Par ordonnance du 5 juin 2003, le juge d'instruction a rejeté une
nouvelle
demande de mise en liberté. Les experts avaient déposé leur rapport
le 7 mai
précédent. Par décision du 28 mai 2003, le juge d'instruction avait
refusé
d'ordonner un complément, ce rapport lui apparaissant clair et
complet. Il en
résultait que le risque de récidive ne pouvait être exclu, "en raison
du
trouble dyssocial dont souffre l'expertisé".
Par arrêt du 8 juillet 2003, le Tribunal d'accusation a rejeté les
recours
dirigés, d'une part, contre le refus d'ordonner un complément
d'expertise,
et, d'autre part, contre le refus de mise en liberté. Le rapport
d'expertise
était convainquant et les parties auraient l'occasion d'obtenir des
précisions lors de l'audience de jugement. Les experts avaient retenu
un
risque de récidive, l'incarcération n'ayant que peu d'impact sur la
personnalité du prévenu. Le trouble dont souffrait le prévenu n'était
pas
"accessible à un traitement", de sorte qu'un suivi médical
n'apparaissait pas
comme une alternative envisageable.

C.
A.________ forme un recours de droit public contre ce dernier arrêt.
Il en
demande l'annulation, ainsi que sa mise en liberté immédiate. Il
requiert
l'assistance judiciaire.

Le Tribunal cantonal se réfère aux considérants de son arrêt. Le
Procureur
général et la plaignante B.________ concluent au rejet du recours.

Invité à répliquer, le recourant ne s'est pas déterminé.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit public est formé en temps utile contre un arrêt
rendu en
dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ). Le
recourant,
personnellement touché par l'arrêt attaqué qui refuse notamment sa
mise en
liberté provisoire, a qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ. Par
exception
à la nature cassatoire du recours de droit public, les conclusions
tendant à
la mise en liberté immédiate, le cas échéant sous conditions, sont
recevables
(ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p. 333). L'arrêt attaqué ne statue
cependant pas
seulement sur la demande de mise en liberté, mais aussi sur la
demande de
l'inculpé tendant à un complément d'expertise. Sur ce point, l'arrêt
attaqué
est incident puisqu'il se rapporte à l'administration des preuves
(ATF 123 I
325 consid. 3b p. 327; 122 I 39 consid. 1a/aa p. 41; 120 Ia 369
consid. 1b p.
372, 120 III 143 consid. 1a p. 144 et les arrêts cités), et ne cause
pas,
selon la jurisprudence constante, de dommage irréparable au recourant
(cf.
art. 87 al. 3 OJ; ATF 122 I 37 consid. 1a/aa p. 42; 117 Ia 247
consid. 3 p.
249, 396 consid. 1 p. 398, 115 Ia 311 consid. 2c). Celui-ci peut
toutefois,
dans son recours relatif à la détention, faire valoir que le refus
d'ordonner
un complément d'expertise viole son droit d'être entendu.

2.
Tel est le premier grief du recourant. Celui-ci considère que
l'expertise a
été ordonnée dans le cadre de l'art. 13 CP et qu'il conviendrait,
dans le
cadre de la détention préventive, de demander aux experts s'il existe
encore
un risque de commission de nouvelles infractions du même genre contre
la
plaignante, si l'engagement de se faire suivre par un médecin est
crédible,
et si la sécurité de la plaignante peut ainsi être assurée. Selon
l'expertise, le recourant aurait agi dans des circonstances
particulières de
crise et de tension dues à la rupture avec son ancienne amie, de
sorte qu'il
y aurait lieu de se demander si de telles circonstances peuvent
encore se
reproduire onze mois plus tard.

2.1 Garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. (et, en matière de détention
préventive,
par les art. 31 Cst., 5 par. 4 et 6 CEDH), le droit d'être entendu
permet au
justiciable de proposer des preuves et de participer à leur
administration.
Ce droit ne concerne que les éléments qui sont déterminants pour
l'issue du
litige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de
certaines
preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter
l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, que les
preuves
résultent déjà de constatations versées au dossier, et lorsque le juge
parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la
solution du
litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF
126 I
15 consid. 2a/aa p. 16; 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p. 135).

2.2 En l'occurrence, l'expertise a été mise en oeuvre non seulement
pour
déterminer le degré de responsabilité de l'accusé et l'opportunité
d'une
mesure au sens des art. 43 et 44 CP, mais aussi pour apprécier le
risque de
récidive. Les experts relèvent ainsi que le recourant aurait agi
après avoir
été rejeté par son ex-amie, pris par la nécessité impérieuse de
recouvrer son
intégrité narcissique. Le recourant souffrirait d'un trouble
dyssocial se
manifestant par "un refus de l'autorité, un mépris des lois, un
sentiment que
le monde doit être soumis à la loi intérieure de la personne, une
absence de
culpabilité et un refus de toute responsabilité dans les faits qui
lui sont
reprochés". Ce trouble exposerait le recourant à reproduire des
comportements
identiques et le risque de récidive ne pourrait être exclu. Il serait
douteux
que les six mois passés en détention aient eu un impact sur sa
personnalité,
le recourant n'ayant pas "tiré d'enseignement particulier" des
précédents qui
l'ont déjà amené en milieu carcéral. Au sujet de l'application de
l'art. 43
CP, les experts relèvent que le trouble dyssocial n'est pas
accessible à un
traitement psychiatrique et/ou psychologique, et qu'un traitement
imposé
n'aurait guère de chance d'aboutir.

Ces indications sont manifestement suffisantes pour juger de
l'existence d'un
risque de récidive. Les experts ont en particulier tenu compte du
temps
écoulé, et se sont clairement prononcés sur les chances de succès d'un
traitement, imposé ou non. La cour cantonale pouvait dès lors
s'estimer, à
juste titre, suffisamment renseignée, et considérer qu'un complément
d'expertise ne l'amènerait pas à une conclusion différente. En outre,
un tel
complément pouvait compromettre le droit du recourant à obtenir une
décision
à brève échéance sur la légalité de sa détention, tel qu'il découle
des art.
31 al. 4 Cst. et 5 par. 4 CEDH.

3.
Le recourant considère qu'en se soumettant spontanément à un contrôle
périodique auprès d'un médecin psychiatre, il pourrait éviter les
situations
de tension, de sorte qu'il n'y aurait plus aucun risque pour la
plaignante.

3.1 Le maintien en détention préventive n'est admissible que si le
pronostic
de récidive est très défavorable. La simple possibilité,
hypothétique, de
commission de nouvelles infractions de même nature, ou la
vraisemblance que
soient commises des infractions mineures, sont des motifs
insuffisants (ATF
125 I 60 consid. 3a p. 62). Autant que possible, l'autorité doit
tenter de
substituer à la détention toute autre mesure moins incisive propre à
atteindre le même résultat (ATF 123 I 268 consid. 2c et e p. 270/271
et les
arrêts cités).

3.2 Le recourant ne saurait contester l'existence d'un risque de
réitération.
L'expertise affirme clairement l'existence d'un tel risque; la
blessure
narcissique serait encore vivace, le recourant n'éprouvant pas de
sentiment
de culpabilité, et n'ayant tiré aucun enseignement de sa détention.
L'idée de
vengeance peut être encore présente, le recourant ayant manifesté des
intentions meurtrières à l'égard de son ex-compagne. Quant aux
mesures de
substitution proposées, les experts affirment qu'un traitement
psychiatrique
et/ou psychologique serait sans effet, qu'il soit ou non imposé. Les
distinctions que tente d'opérer le recourant entre le traitement
imposé et
celui qu'il propose spontanément de suivre, sont par conséquent sans
pertinence. On ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir suivi
les
conclusions des experts, en l'absence de tout élément permettant de
s'en
écarter (cf. ATF 122 V 157 consid. 1c p. 160-161, 118 Ia 144 consid.
1c p.
145-146). A défaut d'un traitement dont l'efficacité serait immédiate
au
point de faire cesser le risque de récidive, l'arrêt attaqué ne viole
ni la
liberté personnelle, ni le principe de la proportionnalité.

4.
Le recours de droit public doit par conséquent être rejeté, dans la
mesure où
il est recevable. Le recourant demande l'assistance judiciaire et,
sur le vu
des renseignements fournis, les conditions en paraissent réalisées.
Me Fox
est désigné comme avocat d'office, rétribué par la caisse du Tribunal
fédéral, et il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. Cela ne
dispense
toutefois pas le recourant de payer à l'intimée B.________ une
indemnité de
dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Robert Fox est
désigné
comme avocat d'office, et une indemnité de 1000 fr. lui est allouée à
titre
d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral; il n'est pas
perçu
d'émolument judiciaire.

3.
Une indemnité de dépens de 800 fr. est allouée à l'intimée
B.________, à
titre de dépens, à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties, au Procureur
général et
au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 29 août 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le juge présidant: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.458/2003
Date de la décision : 29/08/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-08-29;1p.458.2003 ?
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