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27/08/2003 | SUISSE | N°4P.85/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 août 2003, 4P.85/2003


{T 0/2}
4P.85/2003 /ech

Arrêt du 27 août 2003
Ire Cour civile

Mme et MM. les Juges Corboz, président, Rottenberg Liatowitsch et
Favre.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

X. ________ S.A.,
p.a. Comptoir Genevois Immobilier, cours de Rive 7, case postale
3753, 1211
Genève 3,
recourante, représentée par Me Christian Buonomo, avocat, quai
Gustave-Ador
26, case postale 6253,
1211 Genève 6,

contre

A.________,
intimé,

Procureur général du canton de Genève, place du Bou

rg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

art. 9 et 26 al. 1 Cst.; évacuation d'un locataire; exécution forcée

...

{T 0/2}
4P.85/2003 /ech

Arrêt du 27 août 2003
Ire Cour civile

Mme et MM. les Juges Corboz, président, Rottenberg Liatowitsch et
Favre.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

X. ________ S.A.,
p.a. Comptoir Genevois Immobilier, cours de Rive 7, case postale
3753, 1211
Genève 3,
recourante, représentée par Me Christian Buonomo, avocat, quai
Gustave-Ador
26, case postale 6253,
1211 Genève 6,

contre

A.________,
intimé,

Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

art. 9 et 26 al. 1 Cst.; évacuation d'un locataire; exécution forcée

(recours de droit public contre la décision du Procureur général du
canton de
Genève du 10 avril 2003).

Faits:

A.
Par jugement du 26 août 2002, le Tribunal des baux et loyers du
canton de
Genève a condamné A.________ à évacuer immédiatement l'appartement de
trois
pièces qu'il occupait au premier étage d'un immeuble situé à Genève,
propriété de X.________ S.A. (ci-après : la Société). Cette
évacuation était
consécutive à une résiliation de bail en raison de la demeure du
locataire
dans le versement de son loyer.

Prononcé par défaut, ce jugement n'a pas été contesté par A.________.

Le 7 février 2003, celui-ci a été sommé, par huissier judiciaire, de
se
soumettre sans délai au jugement d'évacuation du 26 août 2002.

A. ________ n'ayant pas obtempéré, la procédure a été transmise au
Procureur
général du canton de Genève.

Faisant suite à une audience qui s'est tenue le 10 avril 2003, le
Procureur
Général a confirmé aux parties, par décision du même jour, que la
requête
d'exécution forcée avait été "suspendue à la condition du paiement
régulier
de l'indemnité courante le 10 de chaque mois au plus tard".

B.
Contre la décision du 10 avril 2003, la Société interjette un recours
de
droit public au Tribunal fédéral. Invoquant une application
arbitraire du
droit cantonal et une violation de la garantie de la propriété, elle
conclut
à l'annulation de la décision de suspension de la procédure
d'exécution
forcée et à ce qu'il soit enjoint au Procureur général de procéder
sans délai
à l'exécution forcée requise, sous suite de frais et dépens.

A. ________ n'a présenté aucune observation.

Le Procureur général a déclaré pour sa part s'en remettre à justice,
tout en
précisant que la décision du 10 avril 2003 avait été exclusivement
dictée par
l'impossibilité matérielle de reloger A.________ dans l'immédiat et
qu'il
avait en particulier été tenu compte de l'intérêt de celui-ci à
conserver
très temporairement son logement actuel.
Invitée à déposer un mémoire complétif, la Société a persisté dans ses
conclusions.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours de droit public qui lui sont soumis (ATF 129
I 173
consid. 1, 185 consid. 1).

1.1 La décision attaquée suspend l'exécution forcée du jugement
d'évacuation
en soumettant cette suspension à la condition du paiement régulier,
par
l'ancien locataire, d'une indemnité pour occupation illicite. Une
telle
décision ne met pas fin à la procédure d'exécution, de sorte qu'elle
revêt un
caractère incident au sens de l'art. 87 OJ (ATF 117 Ia 336 consid.
1a; 116 Ia
154 consid. 2a).

1.2 Selon l'art. 87 al. 2 OJ, le recours de droit public n'est
recevable
contre les décisions préjudicielles et incidentes autres que celles
énoncées
à l'alinéa 1 que si celles-ci causent à l'intéressé un préjudice
irréparable,
par quoi il faut entendre un dommage de nature juridique qui ne peut
pas être
réparé ultérieurement, même par une une décision finale favorable
(ATF 127 I
92 consid. 1c p. 94; 126 I 207 consid. 2). En revanche, il n'y a pas
lieu de
prendre en considération un dommage de pur fait, tel que celui lié à
la
longueur ou au coût de la procédure (ATF 127 I 92 consid. 1c p. 94;
122 I 39
consid. 1a/bb p. 42). Cette exigence est désormais valable pour tous
les
recours de droit public dirigés contre des décisions préjudicielles ou
incidentes au sens de l'art. 87 al. 2 OJ, et non plus seulement pour
ceux
formés au titre de la violation de l'interdiction de l'arbitraire ou
d'autres
droits constitutionnels n'ayant pas de portée propre par rapport à ce
grief
(cf. Message du Conseil fédéral du 11 août 1999 concernant la mise en
vigueur
de la nouvelle Constitution fédérale et les adaptations législatives
consécutives, FF 1999 p. 7145 ss, 7160 s.).

Il appartient au recourant non seulement d'alléguer, mais aussi
d'établir la
possibilité que la décision incidente lui cause un dommage
irréparable, à
moins que celui-ci ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 116 II 80
consid. 2c in
fine p. 84).
La jurisprudence renonce à l'exigence du préjudice irréparable
lorsqu'un
retard injustifié ou un refus de statuer constitutif d'un déni de
justice
formel est allégué dans le recours (ATF 120 III 143 consid. 1b p.
144; 117 Ia
336 consid. 1a p. 337 s.). Cette jurisprudence, développée sous
l'angle de
l'art. 87 OJ dans son ancienne teneur, s'applique également au
nouveau droit
(arrêts du Tribunal fédéral non publiés 1P.623/2002 du 6 mars 2003
consid. 1
et 1P.267/2000 du 29 juin 2000 consid. 2). Les décisions ordonnant la
suspension de la procédure font parties des décisions qui peuvent
faire
l'objet d'un recours de droit public pour déni de justice formel
indépendamment de l'exigence de l'art. 87 al. 2 OJ. En effet,
lorsqu'un
jugement est formellement reporté, les parties se trouvent dans la
même
situation que si l'autorité était demeurée inactive, sans avoir rendu
de
décision de suspension (cf. ATF 120 III 143 consid. 1b p. 144 s.;
arrêts du
Tribunal fédéral non publiés 1P.99/2002 du 25 mars 2002 consid. 2.2;
5P.389/1993 du 2 mars 1994 consid. 1c; 1P.9/1992 du 1er mars 1993
consid.
1b).

1.3 En l'espèce, la recourante invoque une application arbitraire de
la
procédure civile genevoise et une atteinte à son droit de propriété,
mais
elle n'indique nulle part que la décision de suspension de la
procédure
équivaudrait à un déni de justice formel contraire à l'art. 29 al. 1
Cst.
Comme seul ce dernier grief aurait permis de déroger à l'art. 87 al.
2 OJ, la
recevabilité du présent recours est soumise à l'existence d'un
préjudice
irréparable.

Dans son écriture, la recourante ni n'allègue ni ne fournit
d'indications
concernant l'existence d'un tel préjudice. Celui-ci n'apparaît du
reste pas
d'emblée évident, dès lors que, comme l'a indiqué le Procureur
général dans
sa réponse, il s'agit seulement de maintenir l'intimé très
temporairement
dans son logement actuel, le temps de trouver une solution pour le
reloger,
de sorte que l'appartement, propriété de la recourante, devrait être
prochainement libéré.

Le présent recours doit donc être déclaré irrecevable.

2.
Compte tenu de l'issue du litige, les frais seront mis à la charge de
la
recourante (art. 156 al. 1 OJ). Aucun dépens ne sera alloué à
l'intimé, dès
lors qu'il n'a pas déposé d'observations.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et au Procureur
général
du canton de Genève.

Lausanne, le 27 août 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.85/2003
Date de la décision : 27/08/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-08-27;4p.85.2003 ?
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