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20/08/2003 | SUISSE | N°1P.450/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 août 2003, 1P.450/2003


{T 0/2}
1P.450/2003 /col

Arrêt du 20 août 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Nay, Vice-président du Tribunal fédéral, et Reeb.
Greffier: M. Zimmermann.

A. ________,
recourant, représenté par Me Paul Marville, avocat,
case postale 234, 1001 Lausanne,

contre

Président du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois, rue du
Simplon 22,
case postale, 1800 Vevey 1,
Procureur général du canton de Vaud, rue de

l'Université 24, case
postale,
1014 Lausanne,
Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route
...

{T 0/2}
1P.450/2003 /col

Arrêt du 20 août 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Nay, Vice-président du Tribunal fédéral, et Reeb.
Greffier: M. Zimmermann.

A. ________,
recourant, représenté par Me Paul Marville, avocat,
case postale 234, 1001 Lausanne,

contre

Président du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois, rue du
Simplon 22,
case postale, 1800 Vevey 1,
Procureur général du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case
postale,
1014 Lausanne,
Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route
du Signal
8, 1014 Lausanne.

liberté personnelle, art. 10, 36 al. 2 et 3 Cst.,
5 et 6 CEDH (détention préventive),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du
Tribunal
cantonal du canton de
Vaud du 23 juillet 2003.

Faits:

A.
Le 10 novembre 2001, le ressortissant portugais A.________ a tiré
sept coups
de feu sur B.________, sans l'atteindre.

Le 11 novembre 2001, le Juge d'instruction de l'arrondissement de
l'Est
vaudois a inculpé A.________ de tentative de meurtre, de mise en
danger de la
vie d'autrui, d'infraction à la LArm, et ordonné son incarcération
immédiate.

Le 31 janvier 2003, le Juge d'instruction a rejeté la demande de
libération
provisoire présentée par A.________. Le 27 février 2003, le Tribunal
d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté le
recours formé
contre cette décision, qu'il a confirmée en retenant l'existence d'un
risque
de récidive.

Le 25 mars 2003, le Juge d'instruction a renvoyé devant le Tribunal
correctionnel de l'Est vaudois A.________ comme prévenu de crime
manqué
d'assassinat, subsidiairement de crime manqué de meurtre, de mise en
danger
de la vie d'autrui, d'abus de confiance et d'escroquerie, ainsi que
d'infraction à la LArm et à la LCR.

Par arrêt du 7 mai 2003, le Tribunal fédéral a admis le recours formé
par
A.________ contre la décision du 27 février 2003, qu'il a annulée
tout en
maintenant la détention préventive. L'existence d'un risque de
récidive
n'était pas suffisamment démontrée.

B.
Le 14 mai 2003, le Tribunal d'accusation a admis le recours dirigé
contre la
décision du 31 janvier 2003 qu'il a annulée. Il a renvoyé la cause au
président du Tribunal correctionnel de l'Est vaudois pour qu'il
statue sur la
demande de libération provisoire.

Le 17 juin 2003, le Président du Tribunal correctionnel a rejeté la
demande
de libération provisoire et maintenu la détention préventive.

Saisi d'un recours, le Tribunal d'accusation a confirmé cette
décision le 23
juillet 2003. Il a retenu l'existence d'un risque de fuite.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler la décision du 23 juillet 2003 et
d'ordonner sa
libération immédiate. Il invoque les art. 10 al. 2 Cst., 5 CEDH et 59
CPP/VD.

Le Tribunal d'accusation se réfère à sa décision. Le Président du
Tribunal
correctionnel a renoncé à se déterminer. Le Ministère public propose
le rejet
du recours.

Invité à répliquer, le recourant a maintenu ses conclusions.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La liberté personnelle est garantie (art. 10 al. 2 Cst.). Nul ne peut
en être
privé si ce n'est dans les cas prévus par la loi et selon les formes
qu'elle
prescrit (art. 31 al. 1 Cst.). Le Tribunal fédéral examine à la
lumière de la
garantie de la liberté personnelle si le maintien en détention d'un
prévenu
se justifie pour des raisons objectives. Les principes que la
Convention
européenne des droits de l'homme consacre, essentiellement à son art.
5, sont
pris en considération pour l'interprétation et l'application de cette
garantie en tant qu'ils la concrétisent (ATF 115 Ia 293 consid. 3 p.
299; 108
Ia 64 consid. 2c p. 66/67; 105 Ia 26 consid. 2b p. 29). La liberté
personnelle n'empêche pas l'autorité publique d'incarcérer un
individu ou de
le maintenir en détention, aux conditions toutefois que cette mesure
particulièrement grave repose sur une base légale, qu'elle soit
ordonnée dans
l'intérêt public et qu'elle respecte le principe de la
proportionnalité (art.
36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270; 114 Ia 281
consid. 3 p.
283; 107 Ia 148 consid. 2 p. 149; 106 Ia 277 consid. 3a p. 281, et
les arrêts
cités). Le maintien d'un prévenu en détention doit être justifié par
les
besoins de l'instruction et du jugement, voire, dans certains cas,
par la
sauvegarde de l'ordre public. Il faut que les circonstances fassent
apparaître un danger de fuite, de collusion ou de réitération. Le
Tribunal
fédéral examine avec une cognition pleine l'application du droit
cantonal; en
revanche, il ne revoit les constatations de fait que sous l'angle
restreint
de l'arbitraire (ATF 123 I 31 consid. 3a p. 35; 115 Ia 293 consid. 1b
p.
297). Tel qu'il est invoqué, le grief de violation de l'art. 59
CPP/VD n'a
pas de portée propre par rapport à celui tiré de l'art. 10 al. 2 Cst.

2.
Le recourant, qui a admis les faits retenus contre lui, ne conteste
pas la
gravité des charges justifiant la détention préventive. Ne sont pas
davantage
en discussion les risques de récidive et de collusion. Seul est
contesté le
risque de fuite, que le recourant, contrairement à l'autorité
intimée, tient
pour inexistant. Il importe peu, à cet égard, que le Tribunal
d'accusation
ait, dans ses décisions antérieures, écarté le risque de fuite pour
retenir
celui de récidive. Ce changement de position n'est pas en soi
illicite. Il
s'explique aussi par le fait que l'autorité cantonale a dû prendre
en compte
l'évolution de la procédure dans son appréciation, notamment la
décision de
renvoi du 25 mars 2003.

2.1 Le recourant a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel dans
la
composition à cinq juges, compétent pour les affaires où une peine
privative
de liberté allant de six à douze ans de réclusion peut être envisagée
(art.
10 CPP/VD). Il serait exposé, en cas de verdict de culpabilité, à une
peine
de réclusion qui pourrait être longue. Sa situation est désastreuse
du point
de vue financier et précaire du point de vue médical et familial. Il
est
accablé de dettes, souffre d'alcoolisme et ses relations avec son
épouse et
son fils sont détériorées. Les perspectives qui s'offrent à lui sont
si peu
brillantes qu'il pourrait être objectivement tenté de profiter d'une
libération provisoire pour se soustraire à l'action de la justice.
L'offre
d'emploi d'un compatriote pourrait ne pas suffire à l'en dissuader.
Considérés dans leur ensemble, ces éléments justifient de maintenir la
détention préventive.

2.2 Le recourant tient pour disproportionnée la durée de sa détention
(de
dix-neuf mois actuellement et qui devrait se prolonger jusqu'à fin
novembre
2003, date de l'audience de jugement, soit deux ans et deux semaines
au
total).

2.2.1 La durée de la détention préventive s'apprécie au regard de
l'ensemble
des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 124 I 208 consid. 6
p. 215;
123 I 268 consid. 3a p. 273; 107 Ia 256 consid. 1b p. 257; arrêts de
la Cour
européenne des droits de l'homme Contrada c. Italie, du 24 août 1998,
par.
54, Muller c. France, du 17 mars 1997, Recueil 1997-II, par. 35 et W.
c.
Suisse, du 26 janvier 1993, Série A, vol. 254, par. 30). Elle est
excessive
lorsqu'elle se rapproche grandement de celle de la peine privative de
liberté
qui pourrait être prononcée, le cas échéant (ATF 126 I 172 consid. 5a
p.
176/177; 124 I 208 consid. 6 p. 215; 123 I 268 consid. 3a p. 273; 107
Ia 256
consid. 2 et 3 p. 257ss). La durée probable de la peine qui pourrait
être
prononcée doit être évaluée avec la plus grande prudence, car il faut
éviter
que le juge de l'action pénale ne soit incité à prononcer une peine
excessive
pour la faire coïncider avec la détention préventive à imputer (ATF
116 Ia
143 consid. 5a p. 147).

2.2.2 Pour le cas où il devrait être reconnu coupable des crimes qui
lui sont
reprochés, il est possible que le recourant puisse être condamné à
une peine
ferme de réclusion dont la durée dépasserait celle de la détention
préventive
subie. Le recourant critique le refus de l'autorité cantonale
d'envisager des
mesures moins incisives que la détention pour atteindre le but de
celle-ci,
soit par exemple, la remise des documents d'identité ou l'obligation
de se
soumettre à un contrôle de sa présence en Suisse. Il est toutefois à
craindre, comme l'indique le Tribunal d'accusation, que de telles
mesures
soient insuffisantes pour écarter le risque redouté, ceci d'autant
moins que
la perspective d'un jugement est désormais relativement proche.

3.
Le recours doit ainsi être rejeté. Les frais en sont mis à la charge
du
recourant (art. 156 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art.
159
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Président du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois, au Procureur
général
et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 20 août 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.450/2003
Date de la décision : 20/08/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-08-20;1p.450.2003 ?
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