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19/08/2003 | SUISSE | N°5P.231/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 août 2003, 5P.231/2003


{T 0/2}
5P.231/2003 /frs

Arrêt du 19 août 2003
IIe Cour civile

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Meyer.
Greffière: Mme Mairot.

Dame Y.________ (épouse),
recourante, représentée par Me Geneviève Carron, avocate, rue du
Mont-de-Sion
12, 1206 Genève,

contre

Y.________ (époux),
intimé, représenté par Me Françoise Markarian, avocate, rue du Rhône
65, case
postale 3199, 1211 Genève 3,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
post

ale 3108,
1211 Genève 3.

art. 9 Cst. (mesures protectrices de l'union conjugale),

recours de droit public contre l'arr...

{T 0/2}
5P.231/2003 /frs

Arrêt du 19 août 2003
IIe Cour civile

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Meyer.
Greffière: Mme Mairot.

Dame Y.________ (épouse),
recourante, représentée par Me Geneviève Carron, avocate, rue du
Mont-de-Sion
12, 1206 Genève,

contre

Y.________ (époux),
intimé, représenté par Me Françoise Markarian, avocate, rue du Rhône
65, case
postale 3199, 1211 Genève 3,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

art. 9 Cst. (mesures protectrices de l'union conjugale),

recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de
justice du canton de Genève du 16 mai 2003.
Faits:

A.
Y. ________, né le 31 décembre 1954, de nationalité italienne, et dame
Y.________, née le 30 mai 1956, de nationalité grecque, se sont
mariés à
Genève le 10 juin 1987. Deux enfants sont issus de cette union:
A.________,
né le 29 août 1989 et B.________, né le 28 avril 1992.
Les conjoints sont soumis au régime de la séparation de biens. Depuis
le 11
mai 2002, ils vivent séparés: l'épouse continue d'habiter la maison
familiale
avec les enfants, le mari s'étant constitué un nouveau domicile.
Le 2 octobre 2002, l'épouse a déposé auprès du Tribunal de première
instance
de Genève une requête de mesures protectrices de l'union conjugale.
Le mari a
acquiescé à leur principe, estimant, comme la requérante, que la vie
séparée
s'imposait; il a fait part de son intention de divorcer, ayant perdu
tout
espoir de sauver son mariage.
Les conjoints se sont entendus sur l'attribution à la mère de la
jouissance
exclusive du domicile conjugal et de la garde des enfants, un large
droit de
visite étant réservé au père. En revanche, aucun accord n'a pu être
trouvé
sur la quotité de la contribution à l'entretien de la famille due par
celui-ci. Depuis la séparation du couple, le mari a payé à ce titre un
montant de 3'000 fr. par mois.

B.
Par jugement du 4 février 2003, le Tribunal de première instance a
notamment
condamné le mari à verser pour l'entretien de sa famille, dès le 11
mai 2002,
la somme de 6'267 fr. par mois, allocations familiales non comprises.
Le mari a appelé de ce jugement. Par arrêt du 16 mai 2003, la Chambre
civile
de la Cour de justice du canton de Genève l'a partiellement annulé et,
statuant à nouveau, a ramené à 3'000 fr. par mois le montant de la
contribution d'entretien due par l'appelant, allocations familiales
en sus.
Les parties ont été déboutées de toutes autres conclusions.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral,
l'épouse
conclut à l'annulation de l'arrêt du 16 mai 2003 et au renvoi de la
cause à
l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Des observations n'ont
pas été
requises.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Les décisions de mesures protectrices de l'union conjugale ne
constituent pas
des décisions finales au sens de l'art. 48 al. 1 OJ et ne peuvent par
conséquent être entreprises par la voie du recours en réforme (ATF
127 III
474 consid. 2a et b p. 476 ss et les références citées). Le présent
recours
est donc recevable sous l'angle de l'art. 84 al. 2 OJ. Il l'est aussi
au
regard des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ, dès lors qu'il a été formé
en temps
utile contre une décision prise en dernière instance cantonale.

2.
La recourante reproche d'abord à la Cour de justice d'avoir fait
preuve
d'arbitraire en fixant le montant de la contribution due par l'intimé
sur la
base des critères applicables à l'entretien après le divorce, au lieu
de s'en
tenir au standard de vie des époux durant la vie commune. La
référence faite
par l'autorité cantonale à l'arrêt paru aux ATF 128 III 65 serait
selon elle
sans pertinence, dès lors qu'elle travaille déjà à plein temps et
qu'il n'est
pas allégué qu'elle pourrait faire des efforts pour augmenter son
revenu.
Elle se plaint en outre sur ce point d'une violation de l'art. 29 al.
1 Cst.

2.1 Aux termes de l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, le juge fixe la
contribution
pécuniaire à verser par l'une des parties à l'autre. Le montant de
cette
contribution se détermine en fonction des facultés économiques et des
besoins
respectifs des époux, le train de vie mené jusqu'à la cessation de la
vie
commune constituant la limite supérieure du droit à l'entretien (ATF
118 II
376 consid. 20b p. 378). Selon la jurisprudence récente du Tribunal
fédéral,
lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie
commune, les critères applicables à l'entretien après le divorce
doivent être
pris en considération pour évaluer l'entretien et, en particulier, la
question de la reprise ou de l'augmentation de l'activité lucrative
d'un
époux (ATF 128 III 65 consid. 4a p. 67). Cela signifie d'une part
que, outre
les critères posés précédemment par la jurisprudence, le juge
retiendra les
éléments indiqués de façon non exhaustive à l'art. 125 al. 2 CC et,
d'autre
part, qu'il y a lieu d'apprécier la situation sous l'angle du
principe dit du
"clean break", en encourageant autant que possible l'indépendance
économique
des conjoints (cf. arrêts du Tribunal fédéral 5P.46/2003 du 2 juin
2003;
5P.333/2002 du 19 décembre 2002; 5P.90/2002 du 1er juillet 2002, in
FamPra
2002 813).

2.2 Dans le cas particulier, l'autorité cantonale ne saurait se voir
reprocher d'avoir arbitrairement méconnu ces principes (sur la notion
d'arbitraire: ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 128 I 273 consid. 2.1 p.
275 et
les arrêts cités). Contrairement à ce que prétend la recourante, la
jurisprudence selon laquelle il se justifie de tenir compte de la
réglementation applicable en cas de divorce lorsque, comme en
l'espèce, il
n'existe plus de perspective sérieuse de réconciliation entre les
conjoints,
ne vise pas seulement la question de la reprise ou de l'augmentation
de
l'activité lucrative d'un époux mais concerne, plus généralement, la
fixation
de la contribution d'entretien. La référence à l'arrêt paru aux ATF
128 III
65 n'apparaît donc pas insoutenable. Se fondant sur cette
jurisprudence, la
Cour de justice a considéré qu'en l'occurrence, l'épouse ne pouvait
réclamer
une pension pour elle-même car elle disposait de revenus suffisants
pour son
entretien. La recourante ne prétend pas, ni a fortiori ne démontre,
que cette
opinion serait arbitraire (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 128 I 295
consid. 7a
p. 312; 128 III 50 consid. 1c p. 53; 125 I 492 consid. 1b p. 495 et
les
références). Dans la mesure où elle soutient, au demeurant d'une façon
essentiellement appellatoire, qu'elle-même et les enfants ne
disposeraient
plus du même train de vie qu'avant la séparation du couple, son grief
tombe
dès lors à faux. L'art. 29 al. 1 Cst. n'apparaît pas non plus violé,
ce grief
n'étant du reste pas motivé (art. 90 al. 1 let. b OJ).

3.
Dans un autre moyen, la recourante se plaint de ce que l'autorité
cantonale
aurait tenu compte de la situation économique des époux prévalant en
2003 et,
en particulier, des changements intervenus dans les ressources
financières du
mari cette année-là, pour fixer la contribution d'entretien due en
2002.

3.1 La Cour de justice a certes retenu qu'il avait été établi en
appel que,
le 10 mars 2003, l'employeur du mari avait mis fin au contrat de
travail de
celui-ci pour le 31 décembre 2003. L'intéressé avait toutefois reçu
l'assurance qu'il continuerait de percevoir son salaire - auquel
s'ajoutait
un bonus - jusqu'à la fin de l'année 2003 s'il ne trouvait pas un
autre
emploi. Quoi qu'il en soit, cette circonstance n'apparaît pas avoir
été
décisive s'agissant de la fixation du montant de la contribution
d'entretien.
En réalité, l'autorité cantonale a estimé que le juge de première
instance
avait appliqué à tort la méthode dite du minimum vital, avec
répartition de
l'excédent (cf. à ce sujet: ATF 126 III 8 consid. 3c p. 9/10 et les
références citées). Du moment que l'épouse disposait de revenus
suffisants
pour son entretien, seuls les enfants pouvaient en effet prétendre à
une
contribution de la part de leur père; il était par ailleurs équitable
d'en
arrêter la quotité à 3'000 fr. par mois.

3.2 La recourante ne conteste pas le refus de lui allouer une
contribution
d'entretien (cf. supra consid. 2.2). Elle ne précise pas non plus,
concernant
sa situation financière ou celle de l'intimé, quels montants auraient

selon elle être pris en considération pour déterminer la contribution
due en
2002. Dans ces conditions, elle ne démontre pas que l'arrêt attaqué
serait
arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 8 précité). Pour autant qu'il
soit
suffisamment motivé (art. 90 al. 1 let. b OJ), le grief se révèle par
conséquent mal fondé.

4.
La recourante soutient en outre que la Cour de justice a
arbitrairement
constaté les faits en surestimant la charge fiscale de l'intimé,
d'une part,
et en déduisant des revenus de celui-ci l'amortissement du prêt
hypothécaire
relatif à son appartement, d'autre part. Il en résulterait
qu'elle-même et
les enfants ne disposeraient que d'une somme de 16'824 fr., l'époux
conservant pour lui seul 20'521 fr. par mois.
Dans la mesure où l'autorité cantonale n'a pas appliqué la méthode du
minimum
vital, ces allégations ne sont guère pertinentes. La Cour de justice a
considéré qu'en fixant à 3'000 fr. par mois la contribution due par
le mari
en faveur des enfants, celui-ci contribuerait à leurs frais
d'éducation à
raison des deux tiers, l'épouse en assumant pour sa part un tiers, ce
qui ne
représentait que la moitié de son disponible. Ce montant se justifiait
d'autant plus que le mari mettait à la disposition de sa famille la
villa
dont il est copropriétaire, d'où un manque à gagner qui venait
s'ajouter à sa
contribution. Or, la recourante ne s'en prend pas à cette
argumentation. Par
conséquent, son grief ne saurait être admis.

5.
En conclusion, le recours se révèle mal fondé et doit être rejeté,
dans la
mesure où il est recevable. La recourante, qui succombe, supportera
les frais
judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des
dépens, des
observations n'ayant pas été requises.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 19 août 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.231/2003
Date de la décision : 19/08/2003
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-08-19;5p.231.2003 ?
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