La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/08/2003 | SUISSE | N°6S.83/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 août 2003, 6S.83/2003


{T 0/2}
6S.83/2003 /pai

Arrêt du 6 août 2003
Cour de cassation pénale

MM. et Mme les Juges Schneider, Président,
Kolly et Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffière: Mme Paquier-Boinay.

B. X.________,
recourant, représenté par Me Eric Stauffacher, avocat, case postale
2532,
1002 Lausanne,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de
l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne.

Fixation de la peine,

pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale

du
Tribunal
cantonal vaudois du 19 juillet 2002.

Faits:

A.
A.a B.________ et C. X.________, agriculteurs à Ol...

{T 0/2}
6S.83/2003 /pai

Arrêt du 6 août 2003
Cour de cassation pénale

MM. et Mme les Juges Schneider, Président,
Kolly et Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffière: Mme Paquier-Boinay.

B. X.________,
recourant, représenté par Me Eric Stauffacher, avocat, case postale
2532,
1002 Lausanne,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de
l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne.

Fixation de la peine,

pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du
Tribunal
cantonal vaudois du 19 juillet 2002.

Faits:

A.
A.a B.________ et C. X.________, agriculteurs à Ollon, se sont mariés
en
1976. Ils ont eu trois enfants, D.________, née en 1977, E.________,
né en
1979 et F.________, née en 1983. Le couple a divorcé en 1996. B.
X.________
s'est remarié en 1999.

A.b Dès 1978, B. X.________ a commis des actes d'ordre sexuel sur
deux de ses
nièces, nées en 1970 et 1974, ainsi que sur une voisine, née en 1975.
Ces
faits, pas contestés, étaient prescrits lorsque l'autorité de première
instance a eu à en connaître.

A.c A partir de la fin de 1983 ou du début de 1984, B. X.________
s'est livré
à des actes d'ordre sexuel sur sa fille aînée, D.________, née en
1977. Dans
un premier temps, il s'est agi de caresses sur le corps de la
fillette puis
sur son sexe nu, B. X.________ amenant en outre la main de l'enfant
sur son
membre pour se faire masturber avant d'éjaculer sur le ventre de
celle-ci.
Par la suite, il a procédé à des pénétrations digitales dans le vagin
et
obtenu, notamment par des promesses de cadeaux, que sa fille le
masturbe
régulièrement. Enfin, dès 1989 en tout cas et jusqu'à l'âge de 15
ans, sa
fille a été contrainte de subir des relations sexuelles complètes
avec lui un
nombre considérable de fois, que la cour cantonale estime être de
l'ordre de
la cinquantaine.

A.d B. X.________ s'est en outre frotté le sexe contre le corps de sa
fille
cadette, F.________, née en 1983, à plusieurs reprises, alors qu'il se
trouvait avec elle à la piscine et était vêtu d'un maillot de bain;
il lui a
également touché les fesses dans des circonstances analogues. Ces
faits ont
débuté lorsque la fillette était âgée de 7 ans et, selon la version
la plus
favorable à l'accusé, ont cessé en 1994. Au cours de la même année,
alors que
F.________ jouait avec une amie, B. X.________ les a toutes deux
entourées de
ses bras et en a profité pour leur toucher les seins et l'entrejambe
par-dessus les vêtements.

A.e Au cours de l'enquête, B. X.________ a été soumis à une expertise
psychiatrique, effectuée par les Drs O.________ et P.________, de la
Fondation de Nant. Dans leur rapport daté du 3 juillet 1996, les
experts
posent le triple diagnostic de pédophilie, de personnalité immature à
traits
pervers et d'intelligence limite. Ils estiment que les troubles de la
personnalité présentés par B. X.________ étaient de nature à atténuer
sa
faculté d'apprécier le caractère illicite de ses actes, la capacité
de se
déterminer d'après cette appréciation faisant défaut. Ils n'ont pas
exclu un
risque de récidive, relevant toutefois que cette éventualité était peu
probable. Ils ont en outre estimé qu'un traitement ambulatoire pouvait
s'avérer utile, l'exécution d'une peine privative de liberté
n'entravant pas
gravement la poursuite de ce traitement. Le 7 octobre 1999, dans un
complément de leur rapport, les experts ont précisé que les troubles
de la
personnalité de B. X.________ réduisaient sa responsabilité pénale
dans une
mesure moyenne. Enfin, entendue lors des débats, la Dresse P.________
a
confirmé cette appréciation, précisant que lors de la commission des
infractions la capacité de B. X.________ d'apprécier le caractère
illicite de
l'acte était conservée, sa capacité de détermination étant par contre
restreinte dans une mesure moyenne.

B. Par jugement du 18 décembre 2001, le Tribunal correctionnel de
l'arrondissement de l'Est vaudois a, notamment, condamné B.
X.________, pour
actes d'ordre sexuel avec des enfants, contrainte sexuelle, viol et
actes
d'ordre sexuel avec une personne incapable de discernement ou de
résistance,
à la peine de 6 ans de réclusion.

C.
Statuant en séance du 19 juillet 2002, la Cour de cassation pénale du
Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par le condamné
contre ce
jugement, qu'elle a confirmé.

La cour cantonale a en premier lieu rejeté comme mal fondés tous les
moyens
de nullité relatifs à une appréciation arbitraire des faits. Elle a
ensuite
examiné les moyens de réforme, qui tous portaient sur la peine
infligée à B.
X.________, qui ne contestait pas la qualification des actes qui lui
étaient
reprochés; tous ces griefs ont également été rejetés.

D.
B. X.________, forme un pourvoi en nullité contre cet arrêt.
Invoquant une
violation des art. 11, 13, 43, 63, 64 et 66 CP ainsi que 6 CEDH, il
conclut,
avec suite de frais, à l'annulation de l'arrêt attaqué.

E.
Invité à présenter des observations, le Ministère public a conclu au
rejet du
recours, les frais étant mis à la charge de son auteur. Le Ministère
public
se réfère assez largement à l'arrêt attaqué. Il estime notamment
suffisamment
motivée la diminution de peine concédée eu égard à la diminution de
responsabilité constatée; il relève par ailleurs que si la capacité du
recourant de se déterminer était restreinte dans une mesure moyenne,
sa
capacité d'apprécier le caractère illicite de ses actes était, elle,
intacte.
En ce qui concerne l'écoulement d'un temps relativement long entre les
infractions et la condamnation, il relève que l'attitude du recourant
n'est
pas étrangère à cette durée.

Pour sa part, l'autorité cantonale s'est référée aux considérants de
l'arrêt
attaqué, précisant n'avoir pas d'observations à présenter.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal
fédéral, qui
revêt un caractère purement cassatoire (art. 277ter al. 1 PPF), ne
peut être
formé que pour violation du droit fédéral, à l'exception de la
violation
directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 269 PPF). La Cour de
cassation n'est pas liée par les motifs invoqués, mais elle ne peut
aller
au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Les
conclusions
devant être interprétées à la lumière de leur motivation (ATF 126 IV
65
consid. 1 p. 66 et les arrêts cités), le recourant, qui ne s'en prend
pas à
la qualification des actes qui lui sont imputés, a clairement
circonscrit à
divers points relatifs à la peine qui lui a été infligée la question
litigieuse que le Tribunal fédéral peut examiner.

En revanche, la Cour de cassation saisie d'un pourvoi en nullité est
liée par
les constatations de fait de l'autorité cantonale, sous réserve de la
rectification d'une inadvertance manifeste (art. 277bis al. 1 PPF); le
recourant ne peut pas présenter de griefs contre les constatations de
fait,
ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 273 al. 1 let. b
PPF); la
qualification juridique des actes litigieux doit être opérée
exclusivement
sur la base de l'état de fait retenu par l'autorité cantonale (ATF
126 IV 65
consid. 1 p. 67; 124 IV 53 consid. 2 p. 55), de sorte qu'il n'est pas
possible de tenir compte de l'argumentation du recourant dans la
mesure où
elle est fondée sur des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt
attaqué (ATF
123 IV 184 consid. 1a).

2.
Le recourant reproche à l'autorité cantonale de ne pas l'avoir mis au
bénéfice de la circonstance atténuante prévue à l'avant-dernier
alinéa de
l'art. 64 CP.

Selon cette disposition, le juge pourra atténuer la peine lorsqu'un
temps
relativement long se sera écoulé depuis l'infraction et que le
délinquant se
sera bien comporté pendant ce temps. La cour cantonale a considéré
que la
condition de l'écoulement d'un temps relativement long n'était pas
réalisée
car le jugement de première instance a été rendu un peu moins de 8
ans après
que le recourant ait commis les dernières infractions.

Selon la jurisprudence, on ne peut considérer qu'un temps
relativement long
s'est écoulé que si la prescription pénale est près d'être acquise,
c'est-à-dire si le jugement a été rendu à une date proche de celle où
la
prescription ordinaire serait intervenue (ATF 102 IV 198 consid. 5 p.
209; 92
IV 201 consid. I p. 202 s.). Cette circonstance atténuante est liée à
la
prescription car l'effet guérisseur du temps écoulé, qui rend moindre
la
nécessité de punir, doit aussi pouvoir être pris en considération
lorsque la
prescription n'est pas encore acquise mais qu'elle est près de l'être
et que
le délinquant s'est bien comporté dans l'intervalle (ATF 92 IV 201
consid. I
p. 202 s.). Pour déterminer si l'action pénale est proche de la
prescription,
il faut se référer à la date à laquelle les faits ont été
souverainement
établis (ATF 115 IV 95 consid. 3; 102 IV 198 consid. 5 p. 209),
savoir, en
procédure vaudoise, celle du jugement de première instance, sans
qu'il y ait
lieu de tenir compte d'interruptions de la prescription qui auraient
pu
intervenir entre-temps conformément à l'art. 72 CP (ATF 92 IV 201
consid. Ic
p. 203). Dans deux arrêts non publiés, le Tribunal fédéral a jugé,
d'une
part, qu'une durée de 7 ans n'est pas proche du délai de prescription
de 10
ans (arrêt 6S.783/1997 du 13 janvier 1998) et, d'autre part, qu'une
période
de 4¿ ans constitue un temps relativement long s'agissant d'une
infraction
qui se prescrit par 5 ans (arrêt 6S.238/1999 du 4 juin 1999).

En l'espèce, l'autorité cantonale a constaté que les dernières
infractions
ont été commises en 1994; au bénéfice du doute, elle a retenu le
début de
cette année comme date déterminante. Le jugement de première instance
a été
rendu le 18 décembre 2001, savoir un peu moins de 8 ans après qu'ait
commencé
de courir le délai de prescription, qui est de 10 ans. Dès lors dans
l'hypothèse la plus favorable au recourant, il s'est écoulé moins des
4/5 de
la durée du délai de prescription; c'est à juste titre que l'autorité
cantonale a considéré qu'il ne s'agissait pas d'un temps relativement
long au
sens de l'art. 64 avant-dernier alinéa CP et a refusé de mettre le
recourant
au bénéfice de la circonstance atténuante prévue par cette
disposition.

3.
Le recourant soutient en outre que c'est à tort que l'autorité
cantonale a
considéré que le principe de célérité n'avait pas été violé en
l'espèce.

Savoir si le principe de la célérité a été violé est une question
concernant
l'application du droit constitutionnel ou conventionnel. Savoir si de
justes
conséquences ont été tirées d'une violation de ce principe est en
revanche
une question qui touche à la bonne application du droit fédéral,
c'est-à-dire
à l'application du droit fédéral conforme aux principes
constitutionnels et
conventionnels. Il s'ensuit que le recourant doit agir par la voie du
recours
de droit public s'il entend faire grief à l'autorité cantonale de ne
pas
avoir formellement constaté une violation du principe de célérité. En
revanche, s'il veut se plaindre de ce que celle-ci n'a pas tiré les
conséquences que le droit fédéral fait découler d'une violation de ce
principe, en particulier au niveau de la peine, elle doit agir par le
biais
du pourvoi en nullité. Dans ce contexte, il y a lieu d'examiner si la
durée
de la procédure doit induire des conséquences sur la durée de la
peine (ATF
119 IV 107 consid. 1c p. 110). Le grief tiré par le recourant d'une
prétendue
violation du principe de célérité doit donc être examiné sous cet
angle.

Le principe de la célérité, consacré notamment par l'art. 6 § 1 CEDH,
invoqué
par le recourant, postule que toute personne a droit à ce que sa
cause soit
jugée dans un délai raisonnable. Le caractère raisonnable de la durée
d'une
procédure s'apprécie suivant les circonstances de la cause, lesquelles
commandent généralement une évaluation globale, en tenant compte
notamment de
la complexité de l'affaire, du comportement de l'accusé ainsi que de
celui
des autorités compétentes. Cette appréciation d'ensemble, tenant
compte de
l'ampleur du travail accompli, joue un rôle décisif. Comme on ne peut
pas
exiger de l'autorité pénale qu'elle s'occupe constamment d'une seule
et
unique affaire, il est inévitable de rencontrer dans la procédure
quelques
temps morts. Lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée choquante, c'est
l'appréciation d'ensemble qui prévaut; des périodes d'activité intense
peuvent donc compenser le fait que le dossier a été momentanément
laissé de
côté en raison d'autres affaires (ATF 124 I 139 consid. 2c p. 142 et
les
références citées).

Lorsque plusieurs personnes sont impliquées dans une même affaire, il
résulte
de l'art. 349 CP qu'elles doivent en principe être jugées
simultanément.
Cette solution s'explique pour des raisons d'économie de procédure
mais aussi
pour permettre une vision d'ensemble, pour éviter que chacun des
accusés, en
comparaissant seul, ne puisse rejeter la responsabilité sur les
autres, et
enfin pour permettre une égalité de traitement au stade de la
fixation de la
peine. Ce procédé n'est pas en soi critiquable. La cause formant un
tout, on
ne saurait dire que le principe de la célérité a été violé parce que
certaines opérations concernaient uniquement des coaccusés et ne
touchaient
pas le recourant lui-même (ATF 124
I 139 consid. 2c p. 143).

Pour qu'il y ait violation du principe de la célérité, il faut
qu'apparaisse
une carence choquante de la part de l'autorité pénale, carence
imposant une
réduction de la peine; il ne suffit pas de constater que tel ou tel
acte
aurait pu être réalisé un peu plus rapidement si, en définitive,
compte tenu
du travail à accomplir, la durée totale de la procédure apparaît
raisonnable.
Selon la jurisprudence européenne, constituent des carences
choquantes une
inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction, un
délai de
quatre ans pour que soit statué sur un recours contre l'acte
d'accusation ou
encore un délai de dix ou onze mois pour que le dossier soit transmis
à
l'autorité de recours (ATF 124 I 139 consid. 2c p. 144).

Il faut relever en premier lieu que c'est en vain que le recourant
présente
sa propre version du déroulement de la procédure; il s'agit
d'éléments qui
ressortissent aux constatations de fait et lient par conséquent la
Cour de
cassation saisie d'un pourvoi en nullité (art. 277bis al. 1 PPF). Si
l'on se
réfère aux constatations de l'autorité cantonale, on remarque que
l'enquête,
qui a duré en tout près de trois ans, s'est déroulée sans désemparer,
des
actes d'instruction ayant eu lieu de manière régulière à l'exception
d'une
période de quelques mois consacrée à des vérifications de police
relatives à
des mauvais traitements qu'aurait subis le fils du recourant. Par la
suite
les périodes d'inactivité ont été essentiellement causées par la
procédure
dirigée contre l'épouse du recourant, les deux causes ayant au
demeurant fini
par être jointes et jugées simultanément. Pour le surplus, la durée
de la
procédure est imputable aux délais relatifs à la fixation des
audiences, qui
ont été de l'ordre de six mois, justifiés selon l'autorité cantonale
par la
difficulté de trouver des dates qui permettent de rassembler, pour
plusieurs
jours d'audience, les membres du Tribunal, les avocats et le Ministère
public. On ne saurait y voir une carence choquante de la part de
l'autorité,
de sorte qu'il n'apparaît pas que le principe de célérité ait été
violé; ce
grief doit donc également être rejeté.

4.
Le recourant reproche en outre à l'autorité cantonale de n'avoir pas
ordonné
une nouvelle expertise ou à tout le moins un complément d'expertise
afin de
déterminer s'il ne se justifiait pas d'ordonner un traitement
ambulatoire en
application de l'art. 43 CP et, le cas échéant, de suspendre
l'exécution de
la peine.

Conformément à l'art. 43 ch. 1 CP, lorsque l'état mental d'un
délinquant
ayant commis, en rapport avec cet état, un acte punissable de
réclusion ou
d'emprisonnement, exige un traitement médical ou des soins spéciaux
et à
l'effet d'éliminer ou d'atténuer le danger de voir le délinquant
commettre
d'autres actes punissables, le juge peut ordonner le renvoi dans un
hôpital
ou un hospice; il peut ordonner un traitement ambulatoire si le
délinquant
n'est pas dangereux pour autrui. Le juge rend sa décision au vu d'une
expertise sur l'état physique et mental du délinquant ainsi que sur la
nécessité d'un internement, d'un traitement ou de soins. S'il ordonne
un
traitement ambulatoire, le juge peut suspendre l'exécution de la
peine si
celle-ci n'est pas compatible avec le traitement (art. 43 ch. 2 al.
2 CP).

Une expertise qui figure déjà au dossier peut servir de base au
jugement sur
ce point si elle est encore suffisamment actuelle. Dans ce contexte,
il y a
lieu, comme pour toute l'administration des preuves en procédure
pénale, de
respecter le principe de la proportionnalité. L'élément déterminant
n'est pas
le temps qui s'est écoulé depuis le moment où l'expertise a été
établie, mais
plutôt l'évolution qui s'est produite dans l'intervalle. Il est
parfaitement
concevable de se fonder sur une expertise relativement ancienne si la
situation ne s'est pas modifiée entre-temps; suivant les
circonstances, il
est également possible de se contenter d'un complément apporté à une
expertise précédente (ATF 128 IV 241 consid. 3.4 p. 247 s.). Il y a
en outre
lieu de relever qu'en vertu du principe de proportionnalité, les
exigences
peuvent être un peu moins strictes si la mesure est moins lourde;
ainsi, on
peut admettre qu'un traitement ambulatoire soit ordonné sur la base
d'un
examen moins exhaustif que celui qui s'impose pour un internement, à
la
condition toutefois qu'il traite de l'ensemble des questions
pertinentes (ATF
128 IV 241 consid.3.1 p. 245).

En l'espèce, il ressort des constatations de l'autorité cantonale
qu'une
expertise a été effectuée en juillet 1996; l'autorité cantonale
disposait en
outre d'un rapport établi par le Dr H.________, psychiatre qui suit le
recourant depuis plusieurs années, en juin 1999 ainsi que d'un
complément à
l'expertise daté d'octobre 1999. De surcroît, le Dr H.________ et
l'un des
coauteurs de l'expertise de juillet 1996 ont été entendus lors des
débats
devant les juges de première instance; à cette occasion, aucun des
deux n'a
fait état d'une évolution chez le recourant qui ferait apparaître
l'expertise
comme dépassée. Dans ces circonstances, l'autorité cantonale n'était
pas
tenue d'ordonner une nouvelle expertise pour pouvoir se déterminer sur
l'opportunité de soumettre le recourant à un traitement ambulatoire
et de
suspendre l'exécution de la peine pendant la durée du traitement.

On ne saurait en outre faire grief à l'autorité cantonale d'avoir
abusé du
large pouvoir d'appréciation qui lui est reconnu en cette matière
(voir ATF
116 IV 101 consid. 1a p. 102) en refusant d'ordonner à titre de
traitement
ambulatoire la poursuite du traitement auprès du Dr H.________ car
celui-ci
n'offre pas suffisamment de perspectives d'amélioration de l'état du
recourant compte tenu des faibles résultats obtenus après presque six
ans de
traitement.

On constate toutefois que l'expertise de 1996 parvient à la
conclusion qu'un
traitement ambulatoire peut s'avérer utile. Or les autorités
cantonales n'ont
pas examiné l'opportunité de soumettre le recourant à un traitement
ambulatoire autre que la poursuite de la thérapie entreprise avec le
Dr
H.________, se contentant de relever que l'exécution d'une peine
privative de
liberté n'est pas incompatible avec un traitement ambulatoire, qui
pourrait
d'ailleurs être dirigé par l'unité psychiatrique pénitentiaire. Une
telle
formulation donne à penser que les juges cantonaux s'en remettent aux
autorités d'exécution des peines pour déterminer s'il y a lieu
d'ordonner un
traitement ambulatoire, ce qui n'est pas admissible puisqu'il s'agit
d'une
décision que la loi réserve au juge (art. 43 ch. 1 CP). Il y a donc
lieu de
renvoyer la cause à l'autorité cantonale afin qu'elle se prononce sur
ce
point.

On peut encore relever que c'est à juste titre que l'autorité a noté
le fait,
qui ressort de l'expertise de juillet 1996, que la mise en oeuvre d'un
traitement ambulatoire n'était pas gravement entravée par l'exécution
d'une
peine privative de liberté, de sorte que le refus de suspendre
l'exécution de
la peine ne constitue de prime abord pas une violation du droit
fédéral
puisque la suspension de l'exécution de la peine constitue
l'exception (voir
ATF 116 IV 101 consid. 1a p. 102; Basler Kommentar Strafgesetzbuch I,
Marianne Heer, art. 43 n. 107). Elle ne peut être ordonnée que si
l'exécution
de la peine n'est pas compatible avec le traitement, ce qui ne suppose
toutefois pas que ledit traitement soit totalement impossible ou
dépourvu de
chances de succès, un amoindrissement notable de ses chances de succès
suffisant à justifier une incompatibilité (ATF 129 IV 161 consid.
4.1; 124 IV
246 consid. 2b p. 247; 120 IV 1 consid. 2b p. 3 s.; 119 IV 309
consid. 8b p.
314; 116 IV 101 consid. 1a p. 102), ce qui ne signifie pas qu'une
suspension
de peine puisse être ordonnée au seul motif qu'elle augmenterait les
chances
de succès du traitement (ATF 129 IV 161 consid. 4.2; Marianne Heer,
op. cit.
art. 43 n. 114, 120 et 126; Stratenwerth, Allg. Teil II, Berne 1989,
§ 11 n.
96). Une suspension ne se justifie que si le traitement ambulatoire
offre
dans le cas d'espèce de réelles perspectives d'amendement qui seraient
anéanties ou considérablement compromises par l'exécution de la peine
(ATF
129 IV 161 consid. 4.3). Enfin, même lorsque sont réunies les
conditions
permettant de suspendre l'exécution de la peine, la loi n'impose pas
au juge
de le faire mais lui en offre la possibilité, laissant à son
appréciation la
décision d'user ou non de cette faculté, de sorte que le Tribunal
fédéral
n'intervient qu'en cas d'excès ou d'abus du pouvoir d'appréciation
(ATF 129
IV 161 consid. 4.2 et 4.3; 124 IV 246 consid. 2b p. 248 s.; 120 IV 1
consid.
2c p. 5; 119 IV 309 consid. 8b p. 314; 116 IV 101 consid. 1a p. 102).

5.
Le recourant se plaint également d'une violation des art. 11, 66 et
63 CP au
motif que, bien qu'ayant admis que sa responsabilité était moyennement
restreinte l'autorité cantonale n'a réduit que de 40 % la peine à lui
infliger.

Le juge qui retient une responsabilité restreinte doit réduire la
peine en
conséquence, sans toutefois être tenu d'opérer une réduction
linéaire. Il ne
s'agit en effet ni d'appliquer un tarif ni de procéder à une relation
mathématique, mais de tirer des conséquences raisonnables d'une
situation.
Une diminution légère, moyenne ou forte de la responsabilité
n'entraîne donc
pas nécessairement une réduction de 25 %, respectivement 50 % ou 75 %
de la
peine. Il doit néanmoins exister une certaine corrélation entre la
diminution
de responsabilité constatée et ses conséquences sur la peine (ATF 129
IV 22
consid. 6.2 et les références citées). Ainsi, le Tribunal fédéral a
jugé que
l'autorité cantonale qui admet que la responsabilité d'un condamné est
moyennement diminuée viole le droit fédéral si, sans aucune
justification,
elle ne réduit que de 40 % la peine à lui infliger (ATF 129 IV 22
consid.
6.2).

En l'espèce, l'autorité cantonale se borne à se référer à la
motivation du
tribunal de première instance concernant l'ampleur de la réduction de
peine
afférente à la diminution de responsabilité, motivation qu'elle
qualifie
d'adéquate et de pertinente. Or, à la lecture du passage cité par
l'autorité
cantonale, on constate que les juges de première instance ont exposé
la
raison pour laquelle ils considéraient que le recourant devait être
mis au
bénéfice d'une responsabilité moyennement diminuée et pas d'une
irresponsabilité totale comme il le prétendait; on n'y trouve en
revanche pas
la moindre argumentation quant à la raison pour laquelle cette
responsabilité
moyennement diminuée ne justifiait qu'une réduction de 40 % de la
peine à lui
infliger. Dans ces circonstances, force est de constater que l'arrêt
attaqué,
qui ne motive pas le fait que la réduction de peine concédée au
recourant est
inférieure au degré de diminution de responsabilité admise, viole le
droit
fédéral.

L'argumentation du Ministère public, selon laquelle il faudrait
prendre en
considération le fait que la capacité du recourant d'apprécier le
caractère
illicite de ses actes est intacte, ne saurait être suivie. La
formulation de
l'art. 11 CP montre clairement qu'il suffit que l'une ou l'autre des
facultés
mentionnées soit réduite pour que l'on doive considérer la
responsabilité de
l'auteur comme diminuée. En l'espèce, les experts ont conclu à une
responsabilité réduite dans une mesure moyenne. Peu importe que
celle-ci soit
imputable à une défaillance de la capacité d'apprécier le caractère
illicite
de ses actes ou à celle de se déterminer en fonction de cette
appréciation.
Le pourvoi doit dès lors être admis sur ce point.

6.
Le recourant reproche enfin à l'autorité cantonale d'avoir violé
l'art. 63 CP
en lui infligeant une peine excessivement lourde; selon lui, la
motivation de
l'arrêt attaqué ne permet pas de se convaincre que les juges ont pris
en
compte des éléments positifs tels que le témoignage de sa seconde
épouse le
décrivant comme un être aimant et attentionné. Eu égard à l'admission
du
grief précédent, la cour cantonale sera de toute manière amenée à
statuer à
nouveau sur la question de la peine et à reprendre sa motivation sur
ce
point, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner cette question, qui
est
devenue sans objet.

7.
Le recourant obtient gain de cause sur deux des griefs soulevés, de
sorte
qu'il y a lieu de considérer que la part des frais qui devrait être
mise à sa
charge pour la partie où il succombe (art. 278 al. 1 PPF) est
compensée par
l'indemnité qui devrait lui être allouée pour celle où il obtient
gain de
cause (art. 278 al. 3 PPF); il n'y a donc pas lieu de percevoir de
frais ni
d'allouer d'indemnité au recourant.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est admis partiellement.

2.
L'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée à l'autorité
cantonale pour
qu'elle statue à nouveau.

3.
Il n'est pas perçu de frais ni alloué d'indemnité.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
à la
Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal et au Ministère public
du
canton de Vaud.

Lausanne, le 6 août 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.83/2003
Date de la décision : 06/08/2003
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-08-06;6s.83.2003 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award