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31/07/2003 | SUISSE | N°2P.185/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 31 juillet 2003, 2P.185/2003


{T 1/2}
2P.185/2003 /mks

Arrêt du 31 juillet 2003
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président, Hungerbühler et Yersin.
Greffier: M. Vianin.

Commune mixte de Courfaivre, 2853 Courfaivre,
recourante,
représentée par Me Oscar Zumsteg, avocat,
rue de l'Hôpital 11, 2001 Neuchâtel 1,

contre

Département de la santé, des affaires sociales et de la police du
canton de
Jura, rue du 24-Septembre 2, 2800 Delémont,
Chambre administrative du Tribunal cantonal du canton du Jur

a, Le
Château,
2900 Porrentruy.

art. 5, 8 et 9 Cst. (participation des communes aux subventions
hospita...

{T 1/2}
2P.185/2003 /mks

Arrêt du 31 juillet 2003
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président, Hungerbühler et Yersin.
Greffier: M. Vianin.

Commune mixte de Courfaivre, 2853 Courfaivre,
recourante,
représentée par Me Oscar Zumsteg, avocat,
rue de l'Hôpital 11, 2001 Neuchâtel 1,

contre

Département de la santé, des affaires sociales et de la police du
canton de
Jura, rue du 24-Septembre 2, 2800 Delémont,
Chambre administrative du Tribunal cantonal du canton du Jura, Le
Château,
2900 Porrentruy.

art. 5, 8 et 9 Cst. (participation des communes aux subventions
hospitalières),

recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre administrative du
Tribunal cantonal du canton du Jura
du 3 juin 2003.

Faits:

A.
Par arrêté du 13 novembre 2002, le Département de la santé, des
affaires
sociales et de la police (ci-après: le Département) du canton du Jura
a fixé
pour 2002 la part provisoire des subventions d'exploitation des
établissements hospitaliers mise à la charge des communes.

Contre cet arrêté, la commune mixte de Courfaivre a formé une
opposition qui
a été rejetée le 13 mars 2003.

La commune mixte de Courfaivre a déféré la décision sur opposition à
la
Chambre administrative du Tribunal cantonal du canton du Jura
(ci-après: le
Tribunal cantonal), en concluant à son annulation. Elle a également
demandé
que le décompte de répartition des charges établi à son endroit le 13
novembre 2002, voire tous ceux à elle notifiés depuis le 1er janvier
1995,
soient annulés et remplacés par de nouveaux décomptes conformes au
droit.

Par arrêt du 3 juin 2003, le Tribunal cantonal a déclaré le recours
irrecevable dans la mesure où il tendait à l'annulation des décomptes
relatifs aux années antérieures à 2002 et l'a rejeté pour le surplus.

B.
Agissant le 4 juillet 2003 par la voie du recours de droit public, la
commune
mixte de Courfaivre demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du
Tribunal
cantonal, sous suite de frais et dépens. En se plaignant d'une
atteinte à son
patrimoine financier, elle invoque la garantie de l'autonomie
communale (art.
50 Cst.), la protection contre l'arbitraire (art. 9 Cst.), ainsi que
les
principes de la légalité (art. 5 al. 1 Cst.) et de l'égalité (art. 8
Cst.).

Il n'a pas été requis d'observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Selon l'art. 88 OJ, le recours de droit public est ouvert aux
particuliers et
aux collectivités lésés par des arrêtés ou des décisions qui les
concernent
personnellement ou qui sont d'une portée générale.

Le recours de droit public est conçu pour la protection des droits
constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 lettre a OJ). Il doit
permettre
à ceux qui en sont titulaires de se défendre contre toute atteinte à
leurs
droits de la part de la puissance publique. De tels droits ne sont
reconnus
en principe qu'aux citoyens, à l'exclusion des collectivités
publiques qui,
en tant que détentrices de la puissance publique, n'en sont pas
titulaires et
ne peuvent donc pas attaquer, par la voie du recours de droit public,
une
décision qui les traite comme autorités. Cette règle s'applique aux
cantons,
aux communes et à leurs autorités, qui agissent en tant que
détentrices de la
puissance publique (ATF 125 I 173 consid. 1b p. 175; 121 I 218
consid. 2a p.
219; 120 Ia 95 consid. 1a p. 96-97 et les références citées).

La jurisprudence considère toutefois qu'il y a lieu de faire deux
exceptions
pour les communes et autres corporations de droit public. La première
est
admise lorsque la collectivité n'intervient pas en tant que
détentrice de la
puissance publique, mais qu'elle agit sur le plan du droit privé ou
qu'elle
est atteinte dans sa sphère privée de façon identique ou analogue à un
particulier, notamment en sa qualité de propriétaire de biens frappés
d'impôts ou de taxes, ou d'un patrimoine financier ou administratif.
La
seconde est reconnue lorsque la collectivité se plaint d'une
violation de son
autonomie (art. 50 Cst., cf. ATF 128 I 3 consid. 1c p. 7) ou d'une
atteinte à
son existence ou à l'intégrité de son territoire, garanties par le
droit
cantonal (ATF 125 I 173 consid. 1b p. 175; 121 I 218 consid. 2a p.
219-220;
119 Ia 214 consid. 1a p. 216). La collectivité est alors aussi
recevable à
invoquer, à titre accessoire, la protection contre l'arbitraire ainsi
que les
autres droits découlant de l'art. 4 aCst., soit notamment l'égalité,
la
proportionnalité, la bonne foi et le droit d'être entendu, à
condition que
ces griefs se trouvent en relation étroite avec celui de la violation
de
l'autonomie communale (ATF 113 Ia 332 consid. 1b p. 333-334; voir
aussi ATF
121 I 218 consid. 4a p. 220; 116 Ia 221 consid. 1c p. 224, 252
consid. 3b p.
255-256).

Le nouvel art. 189 al. 1 lettre b Cst. a consacré cette
jurisprudence, qu'il
ne modifie en rien (Message du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle
constitution fédérale, FF 1997 I p. 433; cf. Andreas Auer/ Giorgio
Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. I,
Berne
2000, nos 2018 ss).

2.
A titre préliminaire, la recourante critique les conditions
restrictives
auxquelles une collectivité publique a qualité pour interjeter un
recours de
droit public. Elle appelle de ses voeux une nouvelle jurisprudence où
la
qualité pour recourir des collectivités publiques serait le principe
et non
plus l'exception, en faisant valoir qu'il serait "choquant qu'une
commune
soit dans l'obligation d'accepter une décision insoutenable de la
dernière
instance cantonale sans avoir de voie de recours possible".

Toutefois, il n'y a pas lieu en l'espèce de modifier la jurisprudence
sur la
qualité pour recourir des communes et autres corporations de droit
public,
laquelle correspond à une pratique constante et a été consacrée à
l'art. 189
al. 1 Cst.

3.
La recourante fait valoir que l'arrêt contesté porte atteinte à son
patrimoine financier. Si elle entend par là qu'elle est touchée dans
sa
sphère privée de façon identique ou analogue à un particulier, son
argumentation est infondée. En effet, l'arrêt en cause concerne la
part des
subventions d'exploitation des établissements hospitaliers mise à la
charge
des communes. Ces charges sont assumées pour une part par le canton
et pour
l'autre par les communes (art. 67 al. 2 de la loi jurassienne du 22
juin 1994
sur les hôpitaux; RS/JU 810.11), selon une répartition à effectuer
entre
elles. Les communes sont ainsi tenues de fournir leur contribution en
leur
qualité de collectivités publiques. Leur situation n'est donc
nullement
comparable à celle de particuliers, de sorte que la recourante ne
saurait se
prévaloir valablement de la première exception mentionnée plus haut
pour se
voir reconnaître la qualité pour recourir.

En revanche, la décision entreprise atteint la recourante en tant que
détentrice de la puissance publique; celle-ci est donc autorisée à
invoquer
une violation de son autonomie. La qualité pour recourir doit dès
lors lui
être reconnue. Le point de savoir si, dans le domaine juridique
particulier,
elle est effectivement autonome n'est pas une question de
recevabilité mais
de fond (ATF 120 Ia 203 consid. 2a p. 204; 119 Ia 214 consid. 1c p.
217).

4.
4.1
Selon l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit notamment
contenir
- sous peine d'irrecevabilité - un exposé succinct des droits
constitutionnels ou des principes juridiques violés, précisant en quoi
consiste la violation. Ainsi, pour que son recours soit recevable, la
commune
ne peut se contenter d'invoquer son autonomie en laissant le soin au
Tribunal
fédéral d'examiner lui-même l'éventuel fondement de cette allégation.
Elle
doit au contraire non seulement expliquer en détail en quoi consiste
son
autonomie dans le domaine particulier, mais encore démontrer pourquoi
la
décision entreprise en constitue une violation (ATF 114 Ia 73 consid.
2a p.
76, 80 consid. 1b p. 82, 315 consid. 1b p. 316).

4.2
En l'occurrence, la recourante soutient que l'application prétendument
arbitraire de l'art. 64 du décret sur les hôpitaux a eu pour
conséquence de
mettre à sa charge une part des frais d'exploitation excédant sa
capacité
contributive et ainsi de porter atteinte à "son autonomie dans
l'administration de ses biens".

Sous l'angle des exigences relatives à la motivation, il ne suffit
pas de
faire valoir que l'institution de la contribution litigieuse ou,
comme en
l'espèce, son mode de calcul porte atteinte à l'autonomie de la
commune, car
le simple fait d'imposer aux communes une contribution financière ne
constitue pas en soi une telle violation (arrêt non publié
2P.388/1997 du 28
décembre 1998, consid. 3d). La recourante aurait dû démontrer en quoi
les
dispositions sur la répartition entre les communes des frais en
question,
voire celles qui instituent un régime transitoire, lui accorderaient
une
autonomie et en quoi celle-ci aurait été violée par la décision
attaquée. Or,
elle n'en fait rien et l'on ne voit du reste pas de quelle manière
ces règles
de droit cantonal, dont l'application incombe à des organes cantonaux,
laisseraient aux communes une liberté de décision relativement
importante.
Comme en matière de péréquation financière et de délimitation de
souveraineté
fiscale entre communes, il s'agit en principe d'un domaine qui
implique des
conflits d'intérêts entre des sujets de droit de même niveau,
contestations
que seul un organe de rang supérieur est apte à régler d'une manière
contraignante pour les parties (cf. ATF 119 Ia 214 consid. 3b p. 219
et arrêt
non publié 2P.114/2001 + 2P.70/2003 du 4 avril 2003, consid. 5.1).

Ainsi, le grief de violation de l'autonomie communale n'est pas
recevable,
faute de motivation conforme aux exigences de l'art. 90 al. 1 OJ.
Partant,
les moyens accessoires tirés de la protection contre l'arbitraire, de
la
légalité et de l'égalité ne le sont pas non plus.

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable.
Succombant, la
recourante doit supporter les frais judiciaires, dès lors que ses
intérêts
pécuniaires étaient en cause (art. 156 al. 2 OJ). Il n'y a pas lieu
d'accorder de dépens à l'autorité cantonale (art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Il est mis à la charge de la recourante un émolument judiciaire de
1'500 fr.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la
recourante, au
Département de la santé, des affaires sociales et de la police ainsi
qu'à la
Chambre administrative du Tribunal cantonal du canton du Jura.

Lausanne, le 31 juillet 2003

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.185/2003
Date de la décision : 31/07/2003
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-07-31;2p.185.2003 ?
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