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30/07/2003 | SUISSE | N°K.67/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 juillet 2003, K.67/02


{T 7}
K 67/02

Arrêt du 30 juillet 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M.
Wagner

Hoirs de feue P.________, recourant, représenté par Me Anne-Marie
Germanier
Jaquinet, avocate, 10, rue Beau-Séjour, 1002 Lausanne,

contre

La Caisse Vaudoise, Assurance maladie et accidents, Administration,
rue du
Nord 5, 1920 Martigny, intimée

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 26 février 2002)

Fait

s:

A.
P. ________ était affiliée à la Caisse Vaudoise dans le cadre de
l'assurance
obligatoire des soins. Le 10 mai ...

{T 7}
K 67/02

Arrêt du 30 juillet 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M.
Wagner

Hoirs de feue P.________, recourant, représenté par Me Anne-Marie
Germanier
Jaquinet, avocate, 10, rue Beau-Séjour, 1002 Lausanne,

contre

La Caisse Vaudoise, Assurance maladie et accidents, Administration,
rue du
Nord 5, 1920 Martigny, intimée

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 26 février 2002)

Faits:

A.
P. ________ était affiliée à la Caisse Vaudoise dans le cadre de
l'assurance
obligatoire des soins. Le 10 mai 1999, elle est entrée au Domaine
X.________
où elle a séjourné dans l'unité de soins appartement médicalisé.
Le 19 janvier 2000, la caisse a refusé de prendre en charge les
factures du
Domaine X.________ relatives à l'assurée, au motif que cet
établissement ne
figurait pas sur la liste cantonale vaudoise fixant les catégories
d'établissements médico-sociaux en fonction de leurs mandats et qu'il
n'était
donc pas autorisé à facturer des prestations au titre de la LAMal, ce
qu'elle
a confirmé le 12 avril 2000 puis par décision sur opposition du 19
mai 2000.

B.
Par jugement du 26 février 2002, le Tribunal des assurances du canton
de Vaud
a rejeté le recours formé par P.________ contre cette décision.

C.
P.________ est décédée le 18 mai 2002. Ses hoirs interjettent recours
de
droit administratif contre ce jugement, en concluant, sous suite de
frais et
dépens, à l'annulation de celui-ci, la caisse étant condamnée à
verser « les
mêmes prestations légales qui auraient été dues à P.________ en cas
de séjour
dans un EMS figurant dans la liste LAMal des établissements reconnus
d'utilité publique, autrement dit les prestations mentionnées à
l'art. 50
LAMal, avec effet rétroactif dès le 1er mai 1999, jusqu'à son décès,
au 18
mai 2002 ».
La Caisse Vaudoise conclut au rejet du recours. Dans ses observations,
l'Office fédéral des assurances sociales propose également que le
recours
soit rejeté.

Considérant en droit:

1.
La contestation, déterminée par la décision sur opposition du 19 mai
2000, a
pour objet le refus par l'intimée de prendre en charge les coûts des
prestations fournies par le Domaine X.________ lors du séjour de
l'assurée
entre le 1er mai 1999 et le 18 mai 2002 dans cet établissement,
lequel ne
figure pas sur la liste cantonale vaudoise des établissements
médico-sociaux
reconnus d'intérêt public. Le litige porte sur le point de savoir si,
en lieu
et place des coûts des prestations servies par le Domaine X.________,
l'assurée pouvait prétendre à la prise en charge des coûts des
prestations
légales dues en cas de séjour dans un établissement médico-social
admis à
pratiquer aux frais de l'assurance obligatoire des soins. Ratione
temporis,
les dispositions de la loi fédérale sur la partie générale du droit
des
assurances sociales (LPGA), entrée en vigueur le 1er janvier 2003, ne
sont
pas applicables.

2.
2.1L'assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts des
prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter une maladie et
ses
séquelles (art. 25 al. 1 LAMal). Ces prestations comprennent les
examens,
traitements et soins dispensés sous forme ambulatoire au domicile du
patient,
en milieu hospitalier ou semi-hospitalier ou dans un établissement
médico-social (art. 25 al. 2 let. a phrase introductive LAMal).
Selon l'art. 35 al. 1 LAMal, sont admis à pratiquer à la charge de
l'assurance obligatoire des soins les fournisseurs de prestations qui
remplissent les conditions des art. 36 à 40 LAMal. Ces fournisseurs de
prestations sont, notamment, les établissements médico-sociaux (art.
35 al. 2
let. k LAMal). L'art. 39 LAMal dispose ce qui suit :
1 Les établissements et celles de leurs divisions qui servent au
traitement
hospitalier de maladies aiguës ou à l'exécution, en milieu
hospitalier, de
mesures médicales de réadaptation (hôpitaux) sont admis s'ils :
a)garantissent une assistance médicale suffisante;
b)disposent du personnel qualifié nécessaire;
c)disposent d'équipements médicaux adéquats et garantissent la
fourniture
adéquate des médicaments;
d)correspondent à la planification établie par un canton ou,
conjointement,
par plusieurs cantons afin de couvrir les besoins en soins
hospitaliers, les
organismes privés devant être pris en considération de manière
adéquate;
e)figurent sur la liste cantonale fixant les catégories d'hôpitaux en
fonction de leurs mandats.
2 Les conditions fixées à l'al. 1, let. a à c, s'appliquent par
analogie aux
établissements, aux institutions et à leurs divisions qui prodiguent
des
soins semi-hospitaliers.
3 Les conditions fixées à l'al. 1 s'appliquent par analogie aux
établissements, aux institutions et à leurs divisions qui prodiguent
des
soins, une assistance médicale ainsi que des mesures de réadaptation
à des
patients pour une longue durée (établissements médico-sociaux).

2.2 Dans un arrêté du 28 mai 1997, entré en vigueur le 1er janvier
1997, le
Conseil d'Etat du canton de Vaud a édicté la liste des établissements
médico-sociaux et des divisions pour malades chroniques des hôpitaux
(divisions C), mandatés par l'Etat pour héberger des personnes
atteintes
d'affections chroniques, au sens de l'art. 39 al. 3 LAMal. Il en
ressort que
le Domaine X.________ ne figure pas sur la liste des établissements
reconnus
d'intérêt public. Cette liste, édictée pour l'année 1997, est toujours
valable.

3.
3.1Les premiers juges ont considéré que seuls les établissements
médico-sociaux qui remplissent les exigences posées à l'art. 39 al. 1
LAMal,
notamment à la let. e, sont admis à pratiquer aux frais de l'assurance
obligatoire des soins. Car, admettre que l'assurance doit fournir des
prestations, certes plafonnées, quel que soit l'établissement, pourvu
qu'il
remplisse les autres conditions de l'art. 39 LAMal, revient à priver
l'art.
39 al. 1 let. e LAMal de tout effet.

3.2 Selon les recourants, il y a lieu de déroger au sens littéral du
texte de
l'art. 39 al. 1 let. e LAMal par voie d'interprétation, car il existe
des
raisons objectives - découlant des travaux préparatoires, du but et
du sens
de la LAMal, de sa systématique et du bon sens - qui permettent de
penser que
ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en
cause. Citant
Jean-Louis Duc (Etablissements médico-sociaux et planification
hospitalière
[article 39 LAMal], in PJA 1997 p. 956), ils sont d'avis que la loi ne
saurait être comprise dans le sens que tout droit aux prestations est
exclu
si l'assuré séjourne dans un EMS qui ne figure pas sur la liste
cantonale des
établissements médico-sociaux prévue à l'art. 39 al. 1 let. e LAMal.

3.3 La loi fixe, de manière impérative, les conditions auxquelles un
fournisseur de prestations peut être admis à pratiquer aux frais de
l'assurance obligatoire des soins (art. 35 LAMal; ATF 125 V 452
consid. 3a).
Les établissements médico-sociaux au sens de l'art. 39 al. 3 LAMal
sont admis
s'ils remplissent les conditions fixées à l'art. 39 al. 1 LAMal, qui
s'appliquent par analogie. Parmi celles-ci, la condition relative à la
publicité et à la transparence fixée à l'art. 39 al. 1 let. e LAMal
oblige
ces établissements à figurer sur la liste dressée par le canton et
classant
les établissements par catégorie en fonction de leurs mandats
(Message du 6
novembre 1991 du Conseil fédéral concernant la révision de
l'assurance-maladie, FF 1992 I 149).
Contrairement à l'avis des recourants, le texte de l'art. 39 al. 1
let. e
LAMal restitue le sens véritable voulu par le législateur. Le fait
que le
projet du Conseil fédéral - qui reposait sur un régime de
planification
hospitalière développée - a été considérablement modifié par celui-ci
(Jean-Louis Duc, L'établissement médico-social et la LAMal, in :
LAMal-KVG :
recueil de travaux en l'honneur de la Société suisse de droit des
assurances,
Lausanne 1997, p. 275), ne constitue pas un motif de s'écarter d'un
texte
clair, adopté par le législateur (ATF 125 V 181 consid. 2c).
Ainsi que l'a exposé le Conseil fédéral dans une décision du 23 juin
1999
parue à la RAMA 1999 n° KV 83 p. 350 consid. 2.1 et 2.2, «
L'inscription sur
la liste implique que la condition fixée à la let. d relative à la
couverture
des besoins et à la coordination est satisfaite. Assimilable à un
registre
public, la liste sert à la sécurité du droit. Tous les intéressés -
fournisseurs, assurés et assureurs - doivent pouvoir se réclamer en
tout
temps de son caractère obligatoire. Elle déploie donc des effets de
publicité
tant négatifs que positifs : chaque institution qui, à un moment
donné,
figure sur la liste hospitalière d'un canton, doit, à ce moment, être
considérée comme admise au sens de l'art. 39 al. 1 LAMal. A contrario,
l'institution qui ne figure pas sur la liste n'est pas légitimée à
facturer à
charge de l'assurance obligatoire des soins les coûts causés par le
séjour
d'assurés ». Ces considérations du Conseil fédéral, relatives à la
liste
hospitalière, valent également en ce qui concerne la liste cantonale
des
établissements médico-sociaux au sens de l'art. 39 al. 3 LAMal.
Il n'est dès lors pas question de déroger par voie d'interprétation
(cf. ATF
129 II 118 consid. 3.1, 129 V 103 consid. 3.2 et les références) au
sens
littéral du texte de l'art. 39 al. 1 let. e LAMal, la volonté du
législateur
étant que pour être admis à pratiquer aux frais de l'assurance
obligatoire
des soins, les établissements figurent sur la liste cantonale et
remplissent
ainsi la condition relative à la publicité et à la transparence.

3.4 En l'occurrence, le Domaine X.________ ne figure pas sur la liste
cantonale vaudoise des établissements médico-sociaux reconnus
d'intérêt
public. Pendant la période litigieuse, celui-ci n'était pas admis à
pratiquer
à la charge de l'assurance obligatoire des soins.
La prétendue impossibilité pour l'assurée de trouver dans l'urgence un
établissement médico-social figurant sur la liste cantonale qui
veuille bien
l'accueillir n'est pas prouvée. Ainsi que le relèvent avec pertinence
les
premiers juges, elle n'a produit aucun document attestant que les EMS
inscrits sur la liste aient répondu à une demande d'admission de sa
part ou
du CMS. On ne saurait non plus faire abstraction du fait qu'elle est
entrée
au Domaine X.________ le 10 mai 1999, sans chercher ultérieurement à
changer
d'établissement. Il n'est dès lors pas établi qu'il lui était
objectivement
impossible de séjourner durant la période litigieuse dans un EMS
admis à
pratiquer aux frais de l'assurance obligatoire des soins.

4.
En matière d'assurance-maladie, le droit à la substitution de la
prestation
peut trouver application. Il ne doit cependant pas aboutir à ce qu'une
prestation obligatoirement à la charge de l'assurance soit remplacée
par une
prestation qui ne l'est pas. Dès lors si, pour quelle que raison que
ce soit,
un assuré choisit des soins et traitements qui ne font pas partie des
prestations à charge de l'assurance, il perd son droit. Au demeurant
le droit
à l'échange de la prestation suppose également que le fournisseur de
l'une et
l'autre prestations soit admis à pratiquer à la charge de l'assurance
obligatoire des soins, faute de quoi un droit à l'échange ne saurait
être
reconnu (ATF 126 V 332 consid. 1b).

Dans le cas particulier, les prestations en litige ont été fournies et
facturées par l'établissement Domaine X.________. Or, comme on l'a
vu, il
n'est pas admissible de substituer un établissement médico-social
admis à
pratiquer aux frais de l'assurance obligatoire des soins à un
établissement
médico-social ne figurant pas sur la liste cantonale et donc non
autorisé. Il
s'ensuit que l'assurée n'avait pas droit à la substitution de la
prestation,
dès lors que le fournisseur de prestations n'est pas admis à
pratiquer à la
charge de l'assurance obligatoire des soins.

5.
Le litige ayant pour objet l'octroi ou le refus de prestations
d'assurance,
la procédure est en principe gratuite (art. 134 OJ). Les recourants,
qui
succombent, ne sauraient prétendre une indemnité de dépens pour
l'instance
fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 30 juillet 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

p. la Présidente de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : K.67/02
Date de la décision : 30/07/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-07-30;k.67.02 ?
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