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18/07/2003 | SUISSE | N°4C.122/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 juillet 2003, 4C.122/2003


{T 0/2}
4C.122/2003 /ech

Arrêt du 18 juillet 2003
Ire Cour civile

MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Nyffeler.
Greffier: M. Carruzzo.

A. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Ivan Cherpillod et Me
Charles Joye,
avocats, avenue de Montbenon 2, case postale 2293, 1002 Lausanne,

contre

Y.________ AG,
défenderesse et intimée, représentée par Me Roger Crittin, avocat,
rue de
l'Hôpital 11, case postale 200, 1920 Martigny.

validité d'un brevet d'inventio

n,

recours en réforme contre le jugement de la IIe Cour civile du
Tribunal
cantonal du canton du Valais du 12 m...

{T 0/2}
4C.122/2003 /ech

Arrêt du 18 juillet 2003
Ire Cour civile

MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Nyffeler.
Greffier: M. Carruzzo.

A. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Ivan Cherpillod et Me
Charles Joye,
avocats, avenue de Montbenon 2, case postale 2293, 1002 Lausanne,

contre

Y.________ AG,
défenderesse et intimée, représentée par Me Roger Crittin, avocat,
rue de
l'Hôpital 11, case postale 200, 1920 Martigny.

validité d'un brevet d'invention,

recours en réforme contre le jugement de la IIe Cour civile du
Tribunal
cantonal du canton du Valais du 12 mars 2003.

Faits:

A.
A. ________ est titulaire du brevet CH ... relatif à un "dispositif
destiné à
permettre de prélever un liquide d'un conduit qui le contient". Le
brevet
comporte une revendication indépendante (1) et neuf revendications
dépendantes (2 à 10). Déposé le 13 septembre 1983, sous le n° ..., il
a été
délivré le 15 juillet 1986 au requérant, lequel, par déclaration de
renonciation partielle au sens de l'art. 24 al.1 let. c LBI, a limité
ultérieurement la revendication indépendante, dont la teneur est
désormais la
suivante:
"1. Dispositif destiné à permettre de prélever un liquide d'un
conduit qui le
contient, caracterisé par le fait qu'il comprend une vanne se montant
sur
ledit conduit, dont le corps est percé d'un passage traversant, ce
corps
enfermant un pointeau d'obturation dudit passage, actionnable de
l'extérieur
de la vanne, dont l'extrémité est tronconique" .

B.
Le 20 septembre 1990, A.________ a ouvert action contre Y.________
AG, devant
le Tribunal cantonal du canton du Valais. Il a demandé à cette
autorité
d'interdire à la défenderesse de fabriquer et de commercialiser toute
vanne
comprise dans le champ de protection du brevet CH ...; d'ordonner la
destruction immédiate de tels objets, ainsi que des appareils servant
à leur
fabrication et du matériel publicitaire; d'inviter la défenderesse à
en
informer immédiatement tous ses clients par écrit; de l'enjoindre de
remettre
au demandeur ou au Tribunal toutes ses factures et listes de clients à
compter de 1987; enfin, de la condamner à payer au demandeur une
licence de
13% sur les montants facturés pour les produits contrefaits à compter
du
début de la contrefaçon ainsi que la somme de 25'000 fr. avec
intérêts à 5%
dès le 1er janvier 1989.

Deux expertises techniques, confiées aux ingénieurs F.________ et
G.________,
ont été mises en oeuvre dans la procédure probatoire.
Le 4 janvier 1996, la défenderesse a pris des conclusions
reconventionnelles
visant à faire constater la nullité, subsidiairement la nullité
partielle, du
brevet CH .... Les 11/12 novembre 1998, elle a versé au dossier une
copie
d'un jugement rendu le 4 août 1998 par le Bundespatentgericht dans
une cause
l'opposant à A.________.

Par écriture du 17 juin 1999, Y.________ AG a ouvert action contre ce
dernier
en concluant à ce que le brevet litigieux soit déclaré nul dans sa
totalité.
Lors du débat préliminaire du 8 septembre 2000, elle a sollicité
l'édition du
dossier de la cause opposant A.________ à la société Z.________ AG
devant le
Tribunal cantonal valaisan ainsi qu'une expertise technique à
administrer
dans le cadre de celle déjà confiée à l'ingénieur E.________ dans
ladite
procédure. Les parties sont convenues à cette occasion de suspendre
la cause
A.________ contre Y.________ AG jusqu'au dépôt du rapport de cet
expert.

Le 29 janvier 2002, la défenderesse a produit une copie d'un arrêt du
13
novembre 2001 par lequel le Bundesgerichtshof allemand avait rejeté
l'appel
formé par A.________ contre le jugement précité du
Bundespatentgericht.

Lors de l'audience d'instruction du 30 septembre 2002, le Juge
délégué du
Tribunal cantonal valaisan a ordonné la jonction des causes
A.________ contre
Z.________ AG (actuellement: X.________ AG), d'une part, et
A.________ contre
Y.________ AG, d'autre part.

Par écriture du 31 janvier 2003, le demandeur a pris de nouvelles
conclusions
ainsi libellées:
"Préliminairement

Le Tribunal est invité à solliciter de l'IFPI et de M. E.________,
après
avoir entendu M. A.________, un complément d'expertise comportant leur
détermination sur les arguments développés par M. A.________ dans le
cadre de
la présente écriture.

Principalement

1. Le brevet CH ... est déclaré valable.

2. Dans la cause A.________ - Y.________ AG, il est ordonné la
continuation
de l'expertise économique, laquelle comportera à titre préliminaire
une
expertise technique portant sur les produits contrefaits ou imités par
Y.________ AG.

3. Dans la cause A.________ - X.________ AG, il est ordonné une
expertise
économique, laquelle comportera à titre préliminaire une expertise
technique
portant sur les produits contrefaits ou imités par X.________ AG.

4. Il est ordonné à Y.________ AG et X.________ AG:
a) de cesser de fabriquer, faire fabriquer, offrir en vente, vendre,
mettre
en circulation tout dispositif contrefaisant ou imitant le brevet CH
..., tel
que défini et énuméré par l'expertise technique dont il est question
à la
conclusion 3 ci-devant,
b) de détruire immédiatement les stocks de dispositifs contrefaisant
ou
imitant le brevet CH ..., tels que définis et énumérés par l'expertise
technique dont il est question à la conclusion 3 ci-devant, cet ordre
concernant également les prospectus, les plans originaux, les outils
spécifiques utilisés pour la fabrication desdits dispositifs,
c) de faire détruire chez tous les sous-traitants tous les systèmes
permettant la reconstruction des systèmes contrefaisant ou imitant le
brevet
CH ..., tels que définis et énumérés par l'expertise technique dont
il est
question à la conclusion 3 ci-devant,
d) d'adresser immédiatement à tous leurs clients, tant en Suisse qu'à
l'étranger, utilisant les systèmes en cause ainsi qu'à leurs
sous-traitants
une lettre, avec accusé de réception, mentionnant l'arrêt total de la
production et de la vente des dispositifs contrefaisant ou imitant le
brevet
CH ..., tels que définis et énumérées par l'expertise technique dont
il est
question à la conclusion 3 ci-devant.

5. Ces ordres sont donnés sous les sanctions de l'art. 202 CPS dont
la
teneur est la suivante:
" Celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée,
sous la
menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un
fonctionnaire compétents sera puni des arrêts ou de l'amende".
La défenderesse a conclu au rejet de l'action principale et à
l'admission de
l'action reconventionnelle visant à faire constater la nullité du
brevet CH
....
Par jugement du 12 mars 2003, le Tribunal cantonal valaisan a rejeté
la
demande en complément de preuves, constaté la nullité du brevet CH
... et dit
que l'action du demandeur devenait ainsi sans objet. Les juges
cantonaux ont
refusé d'ordonner une expertise complémentaire aux motifs qu'ils
disposaient
déjà de quatre expertises judiciaires, en plus des données techniques
figurant dans le dossier d'une procédure parallèle conduite en
Allemagne, que
les experts D.________ et E.________ avaient accompli leur travail au
plus
près de leur conscience et que le demandeur agissait abusivement en
sollicitant un complément d'instruction quelque trois ans après que
les
exerts avaient rendu leur rapport. Sur le fond, la cour cantonale a
tout
d'abord laissé ouverte la question du caractère suffisant de l'exposé
de
l'invention. Ecartant ensuite l'objection tirée de l'absence de
nouveauté de
celle-ci, elle est arrivée à la conclusion que, sur la base de l'état
de la
technique de l'époque, l'homme du métier était en mesure, par ses
propres
moyens et sans effort intellectuel particulier, de monter la vanne de
manière
à éviter la présence d'un volume mort dans le passage traversant,
après le
prélèvement d'un échantillon. Les premiers juges ont dès lors
constaté la
nullité de la revendication indépendante 1 du brevet litigieux, du
fait
qu'elle découlait à l'évidence de l'état de la technique, et ils en
ont fait
de même à l'égard de toutes les revendications dépendantes.

C.
Agissant par la voie du recours en réforme, le demandeur invite le
Tribunal
fédéral à annuler le jugement cantonal et à constater la validité du
brevet
CH .... Par ailleurs, il reprend, pour l'essentiel, les conclusions
dirigées
contre la défenderesse, qu'il avait soumises à l'autorité cantonale.
A titre
subsidiaire, le demandeur propose le renvoi de la cause à cette
autorité.
Invoquant la violation des art. 1er al. 2 et 26 al. 1 ch. 1 LBI, il
fait
valoir que les juges valaisans ont faussement appliqué la condition
de la
non-évidence, parce qu'ils n'ont pas déterminé objectivement le
problème
technique résolu par l'invention, qu'ils ont procédé à une
dissociation
artificielle de l'invention en en recherchant les éléments
constitutifs dans
l'état de la technique et en prêtant à l'homme du métier une
connaissance de
tout l'état de la technique, et qu'ils se sont basés sur les
expertises
D.________ et E.________ dont les conclusions découlaient des mêmes
erreurs
méthodiques. Pour cette dernière raison, le demandeur sollicite un
complément
d'expertise en application de l'art. 67 OJ.

Le demandeur, pourtant représenté par deux avocats, a néanmoins fait
parvenir
au Tribunal fédéral, le 29 mai 2003, une écriture qu'il a rédigée
lui-même.

Dans sa réponse du 23 juin 2003, la défenderesse a conclu au rejet du
recours. La réponse a été communiquée le 25 juin 2003 au demandeur
qui a
déposé, le 1er juillet 2003, une écriture dans laquelle il expose à
nouveau
son point de vue.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 L'acte de recours doit être adressé à l'autorité qui a statué,
dans les
trente jours dès la réception de la communication écrite de la
décision. Ce
délai ne peut pas être prolongé par l'emploi d'un moyen
extraordinaire de
droit cantonal, ni par une ordonnance attribuant effet suspensif au
recours
(art. 54 al. 1 OJ). Le jugement attaqué a été notifié le 14 mars 2003
au
conseil du demandeur. Le délai de recours a donc commencé à courir le
15 mars
2003 (art. 32 al. 1 OJ). Suspendu en raison des féries pascales du 13
au 27
avril 2003 (art. 34 al. 1 let. a OJ), il a expiré le 28 avril 2003. A
cette
dernière date, les avocats du demandeur ont remis à un office de
poste suisse
le mémoire de recours en réforme, qui a donc été déposé en temps
utile. Tel
n'est pas le cas, en revanche, de l'écriture que le demandeur a
adressée
directement au Tribunal fédéral le 29 mai 2003. Il n'en sera dès lors
tenu
aucun compte.

1.2 En vertu de l'art. 55 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit
contenir
l'indication exacte des points attaqués de la décision et des
modifications
demandées. La conclusion du demandeur visant à faire constater la
validité de
son brevet CH ... satisfait pleinement à cette exigence. La cour
cantonale a
déclaré sans objet les conclusions de la demande en rapport avec une
éventuelle violation du brevet litigieux et elle n'a pas procédé aux
constatations nécessaires à cet égard. De ce fait, en cas d'admission
du
recours, seul un renvoi de la cause à la cour cantonale serait
envisageable
(ATF 125 III 412 consid. 1b p. 414). Par conséquent, dans la mesure
où le
demandeur, outre la susdite conclusion, en prend d'autres qui vont
au-delà de
la simple demande de renvoi de la cause à la cour cantonale pour
qu'elle
traite les chefs de la demande laissés en suspens, son recours est
irrecevable.

1.3 Selon l'art. 59 al. 1 OJ, un délai de réponse est imparti à
l'intimé. En
règle général, il n'est pas procédé à un échange ultérieur
d'écritures. Après
avoir pris connaissance de la réponse, le demandeur a déposé, le 1er
juillet
2003, une écriture rédigée par ses soins dans laquelle il s'en prend
aux
expertises figurant au dossier cantonal sans faire valoir, cependant,
que la
réponse contiendrait de nouvelles assertions sur lesquelles il
n'aurait pas
encore eu l'occasion de prendre position. Il ne requiert pas non plus
un
échange ultérieur d'écritures. Dans ces conditions, l'écriture du 1er
juillet
2003 sera écartée du dossier.

2.
Le demandeur sollicite un complément d'expertise concernant la
validité de
son brevet sur la base de l'art. 67 ch. 1 OJ. Il reproche à la cour
cantonale
d'avoir écarté la requête ad hoc qu'il lui avait présentée.

2.1 La disposition spéciale de l'art. 67 ch. 1 OJ confère au Tribunal
fédéral
la possibilité de revoir les faits d'ordre technique constatés par la
juridiction cantonale et d'ordonner à cet effet les mesures
probatoires
nécessaires. Toutefois, selon une jurisprudence bien établie, il ne
fait
usage de cette faculté que lorsqu'il éprouve de sérieux doutes quant à
l'exactitude des constatations du juge du fond relatives à des
questions de
nature technique, en particulier lorsque ces constatations manquent
de clarté
ou sont contradictoires ou encore lorsqu'elles reposent sur des
considérations fausses parce que l'autorité cantonale ou les experts
mis en
oeuvre par elle ont raisonné à partir de notions juridiques erronées
ou n'ont
pas posé correctement les questions techniques déterminantes (arrêt
4C.26/2002, du 11 avril 202, publié in sic! 2002 p. 689; arrêt
4C.319/2001,
du 31 janvier 2002, publié in sic! 2002
p. 534; ATF 120 II 312
consid. 3b p.
315; 114 II 82 consid. 2a p. 85).

2.2 Ainsi qu'il le rappelle dans son recours, le demandeur s'est vu
refuser
un complément d'expertise, entre autres motifs, parce que la cour
cantonale a
considéré qu'il n'avait pas agi selon les règles de la bonne foi en
présentant sa requête y relative. Dans la mesure où il reproche aux
premiers
juges d'avoir méconnu, sur ce point, aussi bien le droit de procédure
cantonal (art. 55 al. 1 let. c OJ) que les droits constitutionnels des
citoyens (art. 43 al. 1 OJ in fine), l'intéressé soulève des moyens
qui n'ont
pas leur place dans un recours en réforme. En particulier, il n'est
pas
recevable à fournir, devant la juridiction fédérale de réforme, les
explications complémentaires de nature factuelle qu'il présente aux
pages 22
et 23 de son acte de recours et qu'il dit avoir voulu soumettre à la
cour
cantonale. De telles explications sont nouvelles et, partant,
irrecevables en
instance de réforme (art. 55 al. 1 let. c OJ).

2.3 Le demandeur soutient que les rapports des experts judiciaires
D.________
et E.________ reposent sur des prémisses méthodiques erronées,
passent sous
silence des faits importants et contiennent des inexactitudes. Selon
lui, la
cour cantonale ne s'est pas davantage souciée des contradictions qui
existent
entre les conclusions de ces experts et celles des expertises
F.________ et
G.________. Pour étayer son argumentation sur ces différents points,
le
demandeur se borne à renvoyer aux critiques qu'il formule par
ailleurs à
l'encontre du jugement attaqué en tant qu'il a conclu à la nullité de
son
brevet. Aussi, à supposer que cette conclusion résiste au grief de
violation
du droit fédéral et que l'examen auquel a procédé la cour cantonale
ne pèche
pas du point de vue de la méthode, la requête du demandeur tendant à
la mise
en oeuvre d'un complément d'expertise serait sans objet.

3.
Selon l'art. 1er LBI, les brevets d'invention sont délivrés pour les
inventions nouvelles utilisables industriellement (al. 1). Ce qui
découle
d'une manière évidente de l'état de la technique ne constitue pas une
invention brevetable (al. 2). Sur demande, le juge constatera la
nullité du
brevet, entre autres hypothèses, lorsque l'objet du brevet n'est pas
brevetable selon l'art. 1er (art. 26 al. 1 ch. 1 LBI) ou lorsque
l'invention
n'est pas exposée, dans le fascicule du brevet, de façon telle qu'un
homme du
métier puisse l'exécuter (art. 26 al. 1 ch. 3 LBI). La cour cantonale
a
laissé ouverte la question de savoir si l'invention en cause était
suffisamment exposée dans les revendications du brevet litigieux et
les
dessins y afférents. Elle a admis qu'il s'agissait d'une invention
nouvelle,
mais a considéré que celle-ci découlait d'une manière évidente de
l'état de
la technique. Pour l'essentiel, le demandeur lui fait grief d'avoir
méconnu
la notion de la non-évidence et d'avoir suivi une méthode erronée.

3.1 Le domaine des inventions brevetables commence au-delà de la zone
dans
laquelle, en s'appuyant sur l'état de la technique, l'homme du métier
moyennement bien formé dans le domaine en cause peut développer des
innovations grâce à son savoir et à ses capacités. Est donc décisif
le point
de savoir si pareil homme du métier peut arriver à la solution
exposée dans
le brevet litigieux moyennant un effort intellectuel modeste, en se
fondant
sur toutes les solutions partielles et les contributions isolées qui
constituent l'état de la technique, ou si un effort créatif
additionnel est
indispensable. Cette activité inventive nécessaire pour l'octroi d'un
brevet,
que la loi impose au travers de la notion de non-évidence (art. 1er
al. 2
LBI), à l'instar de l'art. 56 de la Convention du 5 octobre 1973 sur
la
délivrance de brevets européens (CBE; RS 0.232.142.2), était déjà
inhérente
au concept de brevetabilité - il était alors question de "niveau
inventif" -
avant la révision de la LBI de 1978 (ATF 123 III 485 consid. 2a p.
488; 120
II 312 consid. 4b p. 317; voir aussi: Benkard, Europäisches
Patentübereinkommen, Beck'sche Kurzkommentare Munich 2002:
Benkard/Jestaedt
n. 6 ad art. 56 CBE; Bertschinger, in: Bertschinger/Münch/Geiser,
Patentrecht, Handbücher für die Anwaltspraxis, Bâle 2002, n. 4.113
ss, p.
137).

3.2 La notion de non-évidence est une notion objective. Ce ne sont ni
les
efforts déployés personnellement par l'inventeur, ni ses connaissances
subjectives qui importent à cet égard, mais uniquement l'écart
mesurable
entre le résultat de l'invention et l'état de la technique (Jestaedt,
op.
cit., n. 8 ad art. 56 CBE). Font partie de l'état de la technique
toutes les
données accessibles au public à la date de dépôt ou de priorité (ATF
117 II
480 consid. 1a p. 481 s. et les références). Contrairement à ce qui
est le
cas en ce qui concerne la nouveauté de l'invention, l'examen de
l'activité
inventive suppose que l'on considère l'état de la technique dans sa
globalité, telle une mosaïque (Bertschinger, op. cit., n. 4.118, p.
139;
Jestaedt, op. cit., n. 30 ad art. 56 CBE). Il convient toutefois
d'éviter de
procéder à une analyse a posteriori, qui n'est pas admissible. Pour
ce faire,
on commencera, en règle générale, par rechercher le document
comportant le
plus grand nombre de caractéristiques techniques en commun avec
l'invention.
Dans une deuxième étape, on déterminera de manière objective le
problème
technique que l'invention cherche à résoudre. En dernier lieu, on
examinera
si l'état de la technique dans son ensemble contient un enseignement
qui
inciterait l'homme du métier, confronté à ce problème technique, à
modifier
ou à adapter l'état de la technique pour parvenir au même résultat que
l'invention (Bertschinger, op. cit., n. 4.126 s., p. 142; Jestaedt,
op. cit.,
n. 16 ss ad art. 56 CBE).

3.3 Selon la cour cantonale, l'invention litigieuse comporte les
caractéristiques suivantes, étant précisé que les deux dernières ne
figurent
pas dans les revendications mais peuvent être tout au plus déduites
des
dessins servant à clarifier le sens de celles-ci:

1. une vanne montée sur un conduit;
2. le corps de la vanne est traversé par la tige d'un pointeau;
3. il est cylindrique et percé d'un passage traversant;
4. la tige du pointeau, mobile axialement, traverse tout le corps de
la
vanne et permet d'obturer le passage traversant;
5. la partie antérieure du pointeau est reliée à des moyens externes
de commande, l'étanchéité entre le corps de la vanne et la tige
étant assurée par un presse-étoupe;
6 l'extrémité postérieure du pointeau est tronconique et elle obture,
en position fermée, le passage de forme conique qui en constitue
le siège;
7. celui-ci est de forme conique jusqu'à la sortie du passage
traversant;
8. la face terminale de l'extrémité tronconique du pointeau affleure,
en position fermée, l'extrémité externe dudit passage.

3.4 En fonction de ces caractéristiques, les premiers juges, suivant
en cela
les experts D.________, F.________ et G.________, ont considéré que
le brevet
allemand DE ... constituait l'état de la technique le plus proche. Le
demandeur leur reproche certes de n'avoir pas déterminé correctement
l'état
de la technique le plus proche. Il relève cependant lui-même que
l'autorité
cantonale a estimé que ledit brevet constituait l'état de la
technique le
plus proche. Or, il ne démontre pas dans son mémoire de recours et
l'on ne
voit du reste pas en quoi la cour cantonale aurait violé le droit
fédéral
dans la détermination de l'état de la technique le plus proche.
En revanche, le demandeur expose les raisons pour lesquelles, à son
avis, les
juges précédents auraient omis de définir le problème technique
résolu par
son invention. Selon lui, ce problème technique consistait dans la
réalisation d'une vanne permettant le prélèvement d'une quantité de
liquide
nocif par échantillon de façon simple et fiable, en toute sécurité, en
évitant des émanations toxiques ou la formation de résidus nocifs qui
nécessiteraient un rinçage.

3.5 Un problème en tant que tel, à l'exclusion de tout élément ou
début de
solution, ne peut pas être considéré comme une invention (ATF 114 II
82
consid. 2b-c p. 86 s). Le problème est la question technique qui est
résolue
objectivement par l'invention de manière reconnaissable pour l'homme
du
métier. Les explications fournies sur ce point par l'inventeur dans sa
demande de brevet ne sont pas décisives. Il s'agit, en effet, de
rechercher,
sur le vu des revendications formulées dans la demande de brevet, ce
que
l'invention litigieuse apporte objectivement à l'état de la technique
(Jestaedt, op. cit., n. 10 s. ad art. 56 CBE; Bertschinger, op. cit.,
n
4.128, p. 143). La cour cantonale n'a nullement méconnu ces
principes. Elle
expose le problème que le demandeur entendait résoudre, d'après les
explications fournies dans sa demande de brevet, puis examine - à
juste titre
-, sur la base des rapports d'expertise versés au dossier, quel est le
problème effectivement résolu par l'invention contestée. A l'occasion
de cet
examen, les premiers juges se demandent si l'exposé de l'invention est
suffisant pour permettre de résoudre objectivement le problème du
volume
mort, dès lors que les caractéristiques 7 et 8 précitées (cf. consid.
3.3),
qui se rapportent à ce problème, ne figurent pas dans les
revendications.
Exprimant des doutes à ce sujet, ils admettent toutefois, pour les
besoins de
la démonstration, que tel est bien le cas, en ce sens que ladite
invention
résout le problème consistant à éviter toute présence de substance
dans la
vanne après le prélèvement d'un échantillon. Aussi est-ce à tort que
le
demandeur leur reproche d'avoir omis de déterminer le problème
technique
résolu par son invention.

3.6 La cour cantonale a estimé - approuvée en cela par le demandeur -
que le
brevet DE ... représentait l'état de la technique le plus proche.
Selon elle,
en examinant la vanne à laquelle se rapporte ce brevet, l'homme du
métier
constatera immédiatement que la présence du mandrin étrangleur crée
un volume
mort et qu'il faut adapter le dispositif pour éviter toute présence de
substance à purger avant le prochain prélèvement. Le demandeur ne
conteste
pas, avec raison, les connaissances que les premiers juges ont
prêtées, en
l'occurrence, à l'homme du métier. A la lecture de son acte de
recours, on ne
voit pas en quoi l'autorité cantonale aurait violé le droit fédéral
pour
avoir admis, en fonction de l'état de la technique tel qu'il est
décrit dans
son jugement, que la solution retenue dans le brevet litigieux pour
l'élimination du volume mort découlait d'une manière évidente de cet
état-là.
Les juges cantonaux relèvent notamment, en se fondant sur les brevets
antérieurs allemands DE ... et DE ... ainsi que sur le brevet
japonais JP
..., qu'un homme du métier pouvait comprendre sans effort intellectuel
particulier que la solution au problème technique qui se posait à lui
consistait à supprimer le mandrin étrangleur installé dans la vanne
correspondant à l'état de la technique le plus proche (brevet DE ...)
et à le
remplacer par un dispositif permettant à l'extrémité du pointeau
d'obturer
totalement, en position fermée, le passage traversant sans laisser le
moindre
espace mort à l'intérieur dudit passage. La méthode utilisée par la
cour
cantonale pour l'examen des questions litigieuses ne prête pas le
flanc à la
critique et les constatations d'ordre technique auxquelles elle a
procédé, à
l'aide des rapports d'expertise, dans le jugement attaqué sont
suffisamment
claires et complètes. Aussi l'application de l'art. 67 OJ ne se
justifie-t-elle pas en l'espèce.

3.7 Selon le demandeur, le brevet litigieux décrirait également un
système de
rinçage permettant d'éviter tout contact entre l'opérateur et des
liquides
nocifs au moment et après la déconnexion du récipient de prélèvement.
On ne
voit pas ce que l'intéressé tente de démontrer par cette remarque.
Quoi qu'il
en soit, son assertion est nouvelle et, partant, irrecevable, étant
donné que
le jugement cantonal ne contient aucune constatation dont on pourrait
inférer
que les revendications du demandeur portaient également sur un nouveau
système de rinçage.

3.8 Cela étant, le recours en réforme ne peut qu'être rejeté dans la
mesure
où il est recevable. Par conséquent, le demandeur devra supporter les
frais
et dépens de la procédure fédérale (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).
La cour
cantonale a fixé la valeur litigieuse à 300'000 fr. A défaut d'indices
contraires, ce montant servira également à calculer l'émolument
judiciaire
ainsi que l'indemnité due à la partie adverse.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 7'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 8'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 18 juillet 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.122/2003
Date de la décision : 18/07/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-07-18;4c.122.2003 ?
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