La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/07/2003 | SUISSE | N°1P.312/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 juillet 2003, 1P.312/2003


{T 0/2}
1P.312/2003/col
Arrêt du 14 juillet 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Aeschlimann et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

Les hoirs de feu A.________,
recourants,

contre

Commune de X.________,
intimée, représentée par Me Luke H. Gillon, avocat, boulevard de
Pérolles 21,
case postale 408,
1701 Fribourg,
Préfet du district de Z.________,
Tribunal administratif du canton de Fribourg,
IIème Cou

r administrative, route André-Piller 21,
case postale, 1762 Givisiez.

démolition par substitution sans sommation préa...

{T 0/2}
1P.312/2003/col
Arrêt du 14 juillet 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Aeschlimann et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

Les hoirs de feu A.________,
recourants,

contre

Commune de X.________,
intimée, représentée par Me Luke H. Gillon, avocat, boulevard de
Pérolles 21,
case postale 408,
1701 Fribourg,
Préfet du district de Z.________,
Tribunal administratif du canton de Fribourg,
IIème Cour administrative, route André-Piller 21,
case postale, 1762 Givisiez.

démolition par substitution sans sommation préalable,
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de
Fribourg du 21 mars 2003.

Faits:

A.
Les hoirs de feu A.________ sont propriétaires de la parcelle n° xxx
du
registre foncier de la commune de X.________. Cette parcelle, sise en
zone
agricole, accueille une ferme comportant un logement, que G.________
et
C.________ occupent avec leur mère, un rural et une remise.
Par décision du 1er octobre 1998, le Conseil communal de X.________ a
ordonné
aux membres de l'hoirie de feu A.________ de procéder à la démolition
de la
partie rurale de la ferme et de la remise attenante dans un délai de
trente
jours, pour des motifs de sécurité. Cette décision se fondait sur les
conclusions concordantes de deux rapports d'expertise établis en
décembre
1997. Elle a été confirmée par le Préfet du district de Z.________,
le 24
février 1999, puis par le Tribunal administratif du canton de Fribourg
(ci-après, le Tribunal administratif), au terme d'un arrêt rendu le 11
décembre 2000. Statuant le 10 avril 2001, le Tribunal fédéral a
rejeté le
recours de droit public formé par les hoirs de feu A.________ et leur
a
imparti un délai de deux mois dès la notification de l'arrêt,
intervenue le 3
mai 2001, pour démolir la partie rurale et la remise de leur ferme,
sous la
menace d'une exécution par substitution.
Les propriétaires n'ayant pas donné suite à l'ordre de démolition
dans le
délai qui leur avait été fixé, la Commune de X.________ a mandaté
l'entreprise O.________, pour procéder aux travaux de démolition.
Ceux-ci ont
débuté le 11 novembre 2002; le charpentier chargé de consolider la
toiture de
la partie habitable de la ferme a alors constaté que la charpente
était
délabrée et pourrie et qu'il était impossible de l'assainir. Le
Conseil
communal de X.________ a décidé de mettre en oeuvre un complément
d'expertise
portant sur la sécurité des structures porteuses de la partie
habitable du
bâtiment, qu'il a confié à J.________, ingénieur civil à Fribourg,
auteur de
l'une des deux expertises effectuées en décembre 1997. Dans son
rapport,
déposé le 18 novembre 2002, l'expert constate que la façade est de la
partie
habitation est bombée vers l'extérieur, probablement sous la pression
du foin
stocké à l'étage, et que la panne intermédiaire n'a plus de point
d'appui à
son extrémité est, des fils de fer torsadés servant à maintenir en
équilibre
les deux pans de toiture opposés. Il souligne quatre défauts qui font
courir
un grand danger pour tout l'édifice, une rupture à l'un de ces
endroits
pouvant provoquer la chute en cascade de plusieurs éléments. Il
relève aussi
que le pan nord du toit sur l'habitation est fortement affaissé et
que son
effondrement entraînerait immédiatement celui du pan sud, dont l'état
paraît
meilleur. En conclusion, il estime que la détérioration de l'ensemble
de
l'ossature en bois est trop avancée pour pouvoir envisager de la
maintenir
partiellement, que les éléments en maçonnerie ne peuvent subsister aux
intempéries sans être couverts par une toiture et que la démolition
complète
de l'immeuble est irrémédiable.
Le Conseil communal de X.________ a pris acte de ce rapport dans sa
séance du
18 novembre 2002 et a ordonné la démolition immédiate totale de la
partie
habitable de la ferme des hoirs de feu A.________ en vertu de l'art.
196 al.
1 let. d de la loi fribourgeoise sur l'aménagement du territoire et
les
constructions (LATeC); étant donné l'urgence et la gravité de la
situation,
il a renoncé à impartir un délai aux propriétaires pour procéder aux
travaux,
conformément à l'art. 75 al. 2 du Code fribourgeois de procédure et de
juridiction administrative (CPJA), et il a confié l'exécution de cette
décision à l'entreprise déjà mandatée pour démolir le rural. Le
Préfet du
district de Z.________ a confirmé cette décision au terme d'un arrêté
prononcé le 16 décembre 2002.
Par arrêt du 21 mars 2003, le Tribunal administratif a rejeté le
recours
formé contre cette décision par les membres de l'hoirie de feu
A.________,
après avoir vainement requis la production du rapport du charpentier
professionnel auquel ces derniers disaient s'être adressés pour
contester la
nécessité d'une démolition. Il a estimé en substance que compte tenu
du refus
obstiné des propriétaires d'entreprendre des travaux aussi longtemps
que leur
terrain ne serait pas classé dans une zone à bâtir, la démolition
totale du
bâtiment était la seule solution raisonnable, conformément aux
conclusions de
l'expertise. Il a retenu qu'en raison du risque sérieux, imminent et
concret
d'effondrement de la toiture, les autorités communales pouvaient
admettre la
présence d'un péril en la demeure, au sens de l'art. 75 al. 2 CPJA,
propre à
justifier de renoncer à l'octroi d'un délai convenable d'exécution,
selon
l'art. 197 al. 1 LATeC; au demeurant, il a admis que la mise en
oeuvre d'une
exécution par équivalent sans sommation respectait pleinement cette
disposition dans la mesure où les membres de l'hoirie de feu
A.________ ont
d'emblée annoncer ne pas vouloir exécuter l'ordre de démolition qui
leur a
été signifié. Il a écarté les autres griefs invoqués à l'encontre de
la
décision attaquée.

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, les hoirs de feu
A.________
demandent au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Ils se plaignent à
divers
titres d'une constatation incomplète et arbitraire des faits
pertinents,
d'une application arbitraire du droit cantonal et d'une violation du
principe
de la proportionnalité.
Le Tribunal administratif, le Préfet du district de Z.________ et la
Commune
de X.________ concluent au rejet du recours.

C.
Par ordonnance du 19 juin 2003, le Président de la Ire Cour de droit
public a
rejeté la demande d'effet suspensif présentée par les recourants.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Les hoirs de feu A.________ sont directement touchés par l'arrêt
attaqué, qui
ordonne la démolition immédiate par substitution de la partie
habitable de la
ferme, dont ils sont propriétaires; ils ont un intérêt personnel,
actuel et
juridiquement protégé à son annulation et, partant, qualité pour agir
selon
l'art. 88 OJ. Formé en temps utile contre une décision prise en
dernière
instance cantonale, le recours est recevable au regard des art. 86
al. 1 et
89 al. 1 OJ.
Selon l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peine
d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits
constitutionnels ou
des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la
violation.
Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral
n'a pas
à vérifier d'office si l'arrêt attaqué est en tous points conforme au
droit
et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel
invoqués
et suffisamment motivés dans l'acte de recours (ATF 128 III 50
consid. 1c p.
53/54 et la jurisprudence citée). Par ailleurs, dans un recours fondé
sur
l'art. 9 Cst., les recourants ne peuvent se contenter de critiquer
l'arrêt
attaqué, mais ils doivent au contraire préciser en quoi cet arrêt
serait
arbitraire, ne reposant sur aucun motif sérieux et objectif,
apparaissant
insoutenable ou heurtant gravement le sens de la justice (ATF 125 I
492
consid. 1b p. 495 et les arrêts cités). Enfin, lorsque la décision
attaquée
se fonde sur plusieurs motivations indépendantes, alternatives ou
subsidiaires, toutes suffisantes, les recourants doivent, à peine
d'irrecevabilité, démontrer que chacune d'entre elles violent leurs
droits
constitutionnels (art. 90 al. 1 let b OJ; ATF 121 I 1 consid. 5a p.
10; 121
IV 94 consid. 1b p. 95; 119 Ia 13 consid. 2 p. 16; 118 Ib 26 consid.
2b p. 28
et les arrêts cités; cf. aussi Jean-François Poudret, La pluralité de
motivations, condition de recevabilité des recours au Tribunal
fédéral ?, in:
Le droit pénal et ses liens avec les autres branches du droit,
Mélanges en
l'honneur du Professeur Jean Gauthier, RDS 114/1996 p. 205 et les
références
citées).

2.
Les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir constaté les
faits
pertinents de manière incomplète et arbitraire. Selon eux,
l'expertise de
l'ingénieur civil J.________ serait inapte à démontrer l'existence
d'un réel
danger et l'urgence d'une démolition de la partie habitable de leur
ferme; en
outre, le Tribunal administratif n'aurait entrepris aucune démarche
visant à
instruire ce point ou à refaire une expertise de l'immeuble, en
violation de
l'art. 45 CPJA, qui enjoint l'autorité de procéder d'office aux
investigations nécessaires pour établir les faits pertinents, sans
être
limitée par les allégués et les offres de preuves des parties.

2.1 La jurisprudence reconnaît au juge un important pouvoir
d'appréciation
dans la constatation des faits et leur appréciation, qui trouve sa
limite
dans l'interdiction de l'arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41;
124 IV 86
consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2a p. 38; 118 Ia 28 consid. 1a p.
30; 116
Ia 85 consid. 2b p. 88 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral
n'intervient
en conséquence pour violation de l'art. 9 Cst. que si le juge a abusé
de ce
pouvoir, en particulier lorsqu'il admet ou nie un fait pertinent en se
mettant en contradiction évidente avec les pièces et éléments du
dossier,
lorsqu'il méconnaît des preuves pertinentes ou qu'il n'en tient
arbitrairement pas compte, lorsque les constatations de fait sont
manifestement fausses ou encore lorsque l'appréciation des preuves se
révèle
insoutenable ou qu'elle heurte de façon grossière le sentiment de la
justice
et de l'équité (ATF 129 I 49 consid. 4 p. 58; 128 I 81 consid. 2 p.
86; 124
IV 86 consid. 2a p. 88).
Concernant plus particulièrement l'appréciation du résultat d'une
expertise,
le juge n'est en principe pas lié par ce dernier, mais s'il entend
s'en
écarter, il doit motiver sa décision et ne saurait, sans motifs
déterminants,
substituer son appréciation à celle de l'expert, sous peine de verser
dans
l'arbitraire (ATF 129 I 49 consid. 4 p. 57/58; 128 I 81 consid. 2 p.
86; 122
V 157 consid. 1c p. 160; 119 Ib 254 consid. 8a p. 274; 118 Ia 144
consid. 1c
p. 146/147 et les arrêts cités). Pour le surplus, comme le Tribunal
fédéral a
déjà eu l'occasion de le préciser dans un arrêt rendu le 21 mars 1996
sur
recours des hoirs de feu A.________ (arrêt 1P.695/1995), ces derniers
ne
peuvent tirer des règles cantonales de procédure aucun droit à la
mise en
oeuvre d'une expertise et, a fortiori, d'une nouvelle expertise. Dans
le
système de libre instruction des preuves organisé aux art. 45 ss
CPJA, il
appartient au juge qui dirige la procédure de dire quels sont les
faits
pertinents et d'administrer les preuves propres à les établir. Il
peut ainsi
renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsqu'il parvient à
la
conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige
ou
qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (cf. art. 59
al. 2
CPJA). Ce refus d'instruire ne viole le droit de procédure cantonal
que si
l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à
laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d'arbitraire.

2.2 Contrairement aux allégués des recourants, l'expert mandaté par la
Commune de X.________ ne s'est pas limité à constater une simple
défectuosité
de la panne intermédiaire de la toiture aisément réparable. Il a
également
souligné le risque d'effondrement du toit, lié au mauvais état du pan
nord de
la toiture et de la charpente; il a par ailleurs mis en évidence
quatre
points sensibles propres à entraîner la chute en cascade de plusieurs
éléments de l'édifice en cas de rupture, pour finalement conclure que
la
démolition complète du bâtiment était irrémédiable. Cela étant, la
question
de savoir si l'expertise réalisée par l'ingénieur civil J.________
est apte à
démontrer l'existence d'un réel danger et l'urgence d'une démolition
ne
relève pas de la constatation des faits, mais de leur appréciation. Le
reproche fait à la cour cantonale d'avoir statué sur la base de
constatations
de fait incomplètes se confond en réalité avec le refus de procéder
d'office
à une seconde expertise que les recourants tiennent à tort pour
arbitraire.
Le Tribunal administratif n'avait en effet aucune raison de mettre en
doute
les constatations de l'expert quant à l'état de délabrement de la
charpente,
dans la mesure où elles venaient corroborer celles faites par le
charpentier
chargé de la consolider dans le cadre des travaux de démolition de la
partie
rurale de la ferme des recourants. Ces derniers ont certes fait état
de
l'avis divergent d'un charpentier professionnel qu'ils ont consulté
et qui
leur aurait fourni deux devis, l'un pour la réparation de la toiture,
l'autre
pour la
rénovation de l'immeuble; ils n'ont cependant pas produit
cette
pièce, malgré une invitation en ce sens. Ils ne prétendent pas que le
délai
imparti par le Juge délégué aurait été trop court pour ce faire; ils
ont au
contraire clairement renoncé à produire ce document parce qu'ils
n'entendaient pas effectuer de travaux de réparation ou de remise en
état sur
leur bâtiment avant de savoir si celui-ci serait colloqué dans une
zone à
bâtir dans le cadre de la modification de la planification communale
en
cours. Dans ces conditions, ils ne sauraient se plaindre du fait que
le
Tribunal administratif a considéré l'avis exprimé par le charpentier
consulté
par les recourants comme de simples allégués de fait (cf. ATF 127 I 73
consid. 3f/bb p. 82) insuffisants à l'emporter sur l'expertise de
l'ingénieur
civil J.________ et à justifier la mise en oeuvre d'office d'une
nouvelle
expertise.

3.
3.1L'ordre de démolir sans délai une construction menaçant ruine ou
présentant un danger pour la sécurité de ses occupants et du public en
général porte une atteinte grave au droit de propriété qui n'est
conforme à
l'art. 26 Cst. que si elle repose sur une base légale claire, se
justifie par
un intérêt public suffisant et respecte les principes de la
proportionnalité
et de l'égalité devant la loi (art. 36 al. 1 à 3 Cst.; pour la
jurisprudence
rendue sous l'empire de l'art. 22ter aCst., ATF 125 II 129 consid. 8
p. 141;
124 II 538 consid. 2a p. 540; 121 I 117 consid. 3b p. 120; 119 Ia 348
consid.
2a p. 353 et les arrêts cités). Le principe de la proportionnalité
suppose
que des dispositions limitant le droit de propriété soient aptes à
produire
les résultats attendus et que ceux-ci ne puissent pas être atteints
par des
mesures moins restrictives. En outre, il interdit toute limitation
qui aille
au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci
et les
intérêts publics et privés qui sont compromis (ATF 129 I 12 consid.
9.1 p.
24, 173 consid. 5; 126 I 112 consid. 5b p. 119/120, 219 consid. 2c p.
222 et
les arrêts cités).

3.2 L'ordre de démolition litigieux trouve sa base légale à l'art.
196 al. 1
let. d LATeC, qui permet au conseil communal d'ordonner à un
propriétaire de
consolider, réparer, assainir ou, le cas échéant, de démolir un
bâtiment
menaçant ruine, délabré ou insalubre, lorsque des raisons de
sécurité, de
salubrité, d'esthétique ou de protection des biens culturels ou
naturels
l'exigent. La démolition d'un bâtiment présentant un danger pour la
sécurité
de ses occupants et du public en général répond à un intérêt public
évident.
Les recourants ne le contestent d'ailleurs pas. Ils tiennent en
revanche
l'ordre de démolition qui leur a été signifié pour disproportionné.
Selon
eux, une telle mesure ne serait pas nécessaire au vu des démarches
qu'ils ont
entreprises afin de réparer leur bâtiment et des mesures ordonnées
par la
Commune de X.________ pour interdire l'accès à la partie rurale de
leur ferme
et à ses abords directs; à tout le moins, la cour cantonale aurait dû
y
renoncer jusqu'à droit connu sur la procédure de planification
actuellement
en cours qui permettrait d'affecter leur parcelle à la zone à bâtir.
L'expert a clairement mis en évidence l'état de délabrement de la
charpente
et du pan nord du toit et le risque d'effondrement de la toiture qui
en
résultait. Les recourants ne critiquent nullement ce point, mais ils
le
tiennent pour insuffisant à justifier une démolition totale de leur
ferme, au
motif que l'état de délabrement de la partie habitable ne
concernerait pas,
aux dires de l'expert, les éléments de maçonnerie, sous réserve d'un
mur
bombé en façade est; le Tribunal administratif n'a pas ignoré ce
fait; il a
toutefois exclu, pour des raisons de sécurité et d'esthétique, de
tolérer une
construction à moitié démolie, recouverte de bâches ou d'autres
moyens de
fortune, jusqu'à un hypothétique classement de la parcelle des hoirs
de feu
A.________ en zone à bâtir, dès lors que ces derniers n'entendaient
entreprendre aucun travail dans l'intervalle. Les recourants ne
critiquent
nullement cette motivation et ne prétendent pas qu'elle serait
impropre à
justifier la démolition intégrale de leur immeuble, au regard des
critères
fixés par l'art. 196 al. 1 LATeC; il est douteux que leur recours
réponde aux
exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Peu importe en définitive, car
l'arrêt attaqué échappe de toute manière au grief d'arbitraire. Une
démolition limitée à la charpente et à la toiture de la partie
habitable de
la ferme des recourants serait certes envisageable d'un point de vue
technique, mais elle ne pourrait être admise pour les motifs
d'esthétique et
de sécurité invoqués par la cour cantonale, dès lors que les
recourants n'ont
donné aucune indication sur les démarches entreprises qui permettrait
d'admettre que leur parcelle serait colloquée à court terme en zone à
bâtir
et qu'ils excluent dans l'intervalle toute mesure de restauration ou
de
réhabilitation de leur immeuble. Quant aux mesures prises par la
Commune de
X.________ pour interdire l'accès à l'immeuble, sous la forme de
panneaux
d'interdiction, elles ne sont pas adéquates pour assurer une sécurité
absolue
du public à moyen ou long terme et éviter qu'une personne, en
particulier un
enfant, ne pénètre à l'intérieur de la ferme ou dans ses abords
immédiats,
dès lors qu'elles ne sont accompagnées d'aucune mesure de
surveillance.

4.
Les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir violé l'art.
197 al. 1
LATeC en ordonnant la démolition immédiate par substitution de la
partie
habitable de leur ferme, sans leur avoir fixé de délai pour
s'exécuter.
En l'absence d'une disposition expresse de la loi sur l'aménagement du
territoire et des constructions l'autorisant à ordonner l'évacuation
immédiate de l'immeuble pour des raisons de sécurité, la Commune de
X.________ s'est fondée sur l'art. 75 al. 2 CPJA qui permet à
l'autorité
administrative de renoncer à un avertissement avant de recourir à un
moyen de
contrainte, en cas de péril en la demeure. Le Tribunal administratif
a admis
ce mode de faire, après avoir constaté l'existence d'une lacune dans
la loi
cantonale sur l'aménagement du territoire et les constructions. Les
recourants ne cherchent pas à démontrer en quoi l'application de
l'art. 75
al. 2 CPJA serait insoutenable, mais se bornent à se plaindre d'une
application arbitraire de l'art. 197 al. 1 LATeC. Il est douteux que
le
recours satisfasse sur ce point aux exigences de motivation de l'art.
90 al.
1 let. b OJ. Peu importe en définitive; la jurisprudence admet en
effet que
l'autorité puisse faire procéder à l'exécution par équivalent sans
sommation
préalable, s'il y a péril en la demeure ou lorsqu'il apparaît
d'emblée que le
débiteur ne voudra pas - ou ne pourra plus - exécuter lui-même son
obligation
dans un délai raisonnable; dans ces deux cas, l'autorité peut agir
immédiatement sans perdre le droit d'exiger du débiteur le
remboursement des
frais (arrêt 1P.242/1997 du 23 juin 1997, consid. 1a paru à la ZBl
99/1998 p.
138; ATF 105 Ib 343 consid. 4b p. 345/346 et les références citées;
Kölz/Bosshart/Röhl, Kommentar zum Verwaltungsrechtspflegegesetz des
Kantons
Zurich, 2ème éd., Zurich 1999, ch. 21 ad § 30, p. 531/532). La
condition du
péril en la demeure est remplie dès qu'un bien ou un intérêt
juridiquement
protégé est soumis à un danger sérieux et pressant qui ne peut être
écarté au
terme d'une procédure ordinaire (Magdalena Ruoss Fierz, Massnahmen
gegen
illegales Bauen, thèse Zurich 1998, ch. 6.3.3, p. 227; Elisabeth
Bétrix, Les
coûts d'intervention - difficultés de mise en oeuvre, DEP 1995 p.
373/374).
Or, la Commune de X.________, puis le Préfet et la cour cantonale
pouvaient
sans arbitraire admettre la présence d'une telle situation en
l'espèce au
regard du rapport d'expertise relevant le danger d'effondrement
permanent de
la toiture.
La cour cantonale a également justifié l'intervention immédiate sans
sommation préalable par le refus anticipé des recourants de se
soumettre à un
éventuel ordre de démolition. La jurisprudence admet en effet que
l'autorité
renonce à la procédure ordinaire prévue à l'art. 197 al. 1 LATeC même
en
l'absence de danger imminent lorsqu'il est d'emblée clair que
l'intéressé
n'obtempérera pas à un ordre de démolition parce qu'il n'a pas les
moyens ou
la volonté nécessaires (ATF 105 Ib 343 consid. 4b p. 345/346; 94 I 403
consid. 3 p. 408; 91 I 295 consid. 3a p. 302). Or, les recourants
n'attaquent
nullement cet aspect de la décision, comme il leur appartenait de
faire à
peine d'irrecevabilité pour répondre aux exigences de l'art. 90 al. 1
let. b
OJ en matière de double motivation (cf. ATF 121 I 1 consid. 5a
précité). Quoi
qu'il en soit, l'arrêt attaqué est de toute manière exempt
d'arbitraire sur
ce point. Les recourants ont en effet clairement indiqué qu'ils
n'entreprendraient aucune réparation ou remise en état avant de
connaître
l'issue de la procédure de planification en cours concernant leur
parcelle.
Par ailleurs, ils n'ont pas obtempéré à l'ordre de démolition de la
partie
rurale de leur ferme et de la remise attenante dans le délai imparti
par
l'arrêt du Tribunal fédéral du 10 avril 2001, en faisant obstruction à
l'intervention des personnes mandatées par la Commune de X.________
pour
procéder à l'exécution des travaux à leur place. Dans ces
circonstances,
l'autorité pouvait sans arbitraire admettre que la fixation d'un
délai pour
démolir la partie habitable de l'immeuble serait inutile en raison du
comportement des recourants.

5.
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est
recevable, aux frais des recourants qui succombent (art. 156 al. 1
OJ). Ces
derniers verseront, solidairement entre eux, une indemnité de dépens
à la
Commune de X.________, qui obtient gain de cause avec l'assistance
d'un
avocat (art. 159 al. 1 et 7 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge des
recourants.

3.
Une indemnité de 1'000 fr. est allouée à la Commune de X.________ à
titre de
dépens, à la charge des recourants, solidairement entre eux.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux recourants, au
mandataire de la
Commune de X.________, au Préfet du district de Z.________ et au
Tribunal
administratif du canton de Fribourg.

Lausanne, le 14 juillet 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.312/2003
Date de la décision : 14/07/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-07-14;1p.312.2003 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award