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14/07/2003 | SUISSE | N°1P.173/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 juillet 2003, 1P.173/2003


{T 0/2}
1P.173/2003 /svc

Arrêt du 14 juillet 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Catenazzi.
Greffier: M. Zimmermann.

A. ________,
B.________,
C.________,
recourantes,
toutes les trois agissant par U.________,
lui-même représenté par Me Robert Liron, avocat,
rue des Remparts 9, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

les époux N.________,
les époux F.________
et M.________,
tous les cinq repré

sentés par Me Jean-Claude Perroud, avocat,
Grand-Chêne 4
et 8, case postale 3648,
1002 Lausanne,
Municipalité de Nyon,
...

{T 0/2}
1P.173/2003 /svc

Arrêt du 14 juillet 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Catenazzi.
Greffier: M. Zimmermann.

A. ________,
B.________,
C.________,
recourantes,
toutes les trois agissant par U.________,
lui-même représenté par Me Robert Liron, avocat,
rue des Remparts 9, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

les époux N.________,
les époux F.________
et M.________,
tous les cinq représentés par Me Jean-Claude Perroud, avocat,
Grand-Chêne 4
et 8, case postale 3648,
1002 Lausanne,
Municipalité de Nyon,
Département de l'économie du canton de Vaud, Service du logement,
rue Saint-Martin 2 - Caroline 7 bis, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.

autorisation de transformation d'un immeuble,

recours de droit public contre l'arrêt du
Tribunal administratif du canton de Vaud du
11 février 2003.

Faits:

A.
C. ________, A.________ et B.________ (ci-après: C.________ et
consorts)
étaient copropriétaires de la parcelle xxx du Registre foncier de
Nyon. Sur
ce bien-fonds sis dans la Vieille-Ville, est érigée une maison
d'habitation
de deux niveaux sur rez-de-chaussée et combles. Ce bâtiment ancien
abrite
huit logements, dont une partie est louée.

Les lieux sont compris dans le périmètre du plan d'extension partiel
« Forum
» (ci-après: le plan d'extension), adopté le 19 décembre 1977 par le
Conseil
communal de Nyon et approuvé le 15 février 1978 par le Conseil d'Etat
du
canton de Vaud. Ce plan prévoit le maintien en principe des bâtiments
existants, les gabarits devant être respectés à l'intérieur des
limites de
construction.

B.
En septembre 2001, après deux projets demeurés sans suite, C.________
et
consorts ont demandé une autorisation de construire portant sur la
démolition
d'une dépendance, la création d'un garage et la transformation
intérieure du
bâtiment. Le projet consiste notamment en d'importants travaux de
réfection
et au réaménagement de certains logements.

Mis à l'enquête publique, le projet a suscité plusieurs oppositions,
dont
celle des locataires.

Le 1er mars 2002, la centrale des autorisations du Département des
infrastructures du canton de Vaud a adressé à la Municipalité de Nyon
la
synthèse des préavis des services cantonaux. Parmi ceux-ci, le Service
cantonal du logement (ci-après: le Service cantonal) a délivré
l'autorisation
spéciale prévue par la loi vaudoise du 4 mars 1985 concernant la
démolition,
la transformation et la rénovation de maisons d'habitation, ainsi que
l'utilisation de logements à d'autres fins que l'habitation (LDTR),
sous
réserve de diverses charges et conditions.

Le 25 mars 2002, la Municipalité a accordé l'autorisation de
construire et
écarté les oppositions.
Les époux N.________, les époux F.________, ainsi que M.________
(ci-après:
N.________ et consorts), locataires de logements sis dans la maison
concernée, ont recouru auprès du Tribunal administratif du canton de
Vaud.

Par arrêt du 11 février 2003, celui-ci a admis le recours et annulé
les
décisions du Service cantonal (ch. II a du dispositif) et de la
Municipalité
(ch. II b). Il a considéré que les travaux allaient au-delà d'une
rénovation
« douce » conforme à la loi et sortaient du cadre de ce qui était
indispensable au sens de l'art. 4 LDTR. Pour le surplus,
l'autorisation
municipale n'était pas conforme au plan d'extension pour ce qui
concernait la
surélévation projetée et la suppression de la dépendance. Elle
heurtait en
outre le droit cantonal des constructions dans la mesure où elle
autorisait
la création d'une cuisine borgne dans l'appartement du
rez-de-chaussée.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, C.________,
A.________ et
B.________ ont demandé au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 11
février
2003 et de renvoyer la cause au Tribunal administratif pour nouvelle
décision
au sens des considérants. Elles invoquent l'art. 26 Cst.

Le Tribunal administratif se réfère à son arrêt. Le Service cantonal
propose
l'admission du recours. Les intimés N.________ et consorts concluent
principalement à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son
rejet.

D.
Le 2 avril 2003, C.________ et consorts ont vendu la parcelle xxx à
K.________ et L.________. Dans une convention annexée à l'acte de
vente, les
parties se sont accordées sur le point que les acquéreurs ont repris
des
venderesses « tous les droits et les obligations attachées au recours
au
Tribunal fédéral en capital, intérêts, frais et dépens de toutes les
instances saisies ».

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Lorsque, comme en l'espèce, l'immeuble litigieux est aliéné en cours
de
procédure, cela ne prive pas le recours de son objet et ne commande
pas une
substitution des parties (cf. art. 21 al. 2, deuxième phrase, et 17
al. 1
PCF, applicables par renvoi de l'art. 40 OJ; ATF 116 Ia 221 consid.
1b p.
223; 110 Ib 93). Le présent recours reste ainsi formé au nom de
C.________ et
consorts, sans que cela n'influe sur les rapports qui les lient à
K.________
et L.________.

2.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a
p. 48;
128 II 13 consid. 1a p. 16, et les arrêts cités).

2.1 Hormis des exceptions non réalisées en l'espèce, le recours de
droit
public n'a qu'un effet cassatoire (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 129 I
129
consid. 1.2.1 p. 131/132; 128 III 50 consid. 1b p. 53; 126 I 213
consid.1c p.
216/217, et les arrêts cités). Les conclusions du recours allant
au-delà de
l'annulation de la décision attaquée sont ainsi irrecevables.

2.2 Le recours de droit public exige un intérêt actuel et pratique à
l'annulation de la décision attaquée, respectivement à l'examen des
griefs
soulevés (art. 88 OJ; ATF 127 III 41 consid. 2b p. 42; 120 Ia 165
consid. 1a
p. 166; 118 Ia 46 consid. 3c p. 53, 488 consid. 1a p. 490, et les
arrêts
cités). L'intérêt au recours doit encore exister au moment où statue
le
Tribunal fédéral, lequel se prononce sur des questions concrètes et
non
théoriques (ATF 127 III 41 consid. 2b p. 42; 125 I 394 consid. 4a p.
397; 125
II 86 consid. 5b p. 97).

En l'occurrence, le projet des recourantes nécessitait, outre le
permis de
construire communal, l'autorisation spéciale délivrée par le Service
cantonal
en application de la LDTR. Selon le dispositif de l'arrêt attaqué, le
Tribunal administratif a annulé l'une et l'autre autorisation (ch. II
a et b
du dispositif). L'argumentation des recourantes porte uniquement sur
le point
de savoir si, en appliquant la LDTR comme il l'a fait, le Tribunal
administratif a violé l'art. 26 Cst. Pour le surplus, les recourantes
ne
critiquent en rien l'arrêt attaqué en tant qu'il porte sur
l'annulation du
permis communal. Or, celui-ci forme un tout avec l'autorisation
spéciale au
sens de la LDTR. La seconde est examinée en rapport avec les travaux
projetés, tels qu'ils sont autorisés par la Municipalité.
L'annulation du
permis communal remet ainsi en cause le projet, qui devrait de toute
manière
être remanié sensiblement avant de pouvoir être à nouveau soumis à la
procédure d'autorisation. Se pose alors la question de savoir s'il y
a un
sens à examiner le seul aspect de la procédure que contestent les
recourantes, indépendamment de la question de savoir quels travaux
pourraient
être autorisés en définitive.

Cette question peut rester indécise, eu égard au sort de la cause.

3.
Les recourantes reprochent au Tribunal administratif d'avoir
interprété la
LDTR en accordant trop d'importance à l'intérêt public lié à la
préservation
des logements à loyer abordables, au détriment de l'intérêt lié aux
rénovations indispensables. Elles y voient une violation de l'art. 26
Cst.

3.1 Les restrictions à la propriété ne sont compatibles avec la
Constitution
que si elles reposent sur une base légale, sont justifiées par un
intérêt
public suffisant et respectent le principe de la proportionnalité
(art. 36
al. 1 à 3 Cst.; ATF 126 I 219 consid. 2a p. 221, 2c p. 221/222).

3.2 Les recourantes fondent leur argumentation (assez elliptique, au
demeurant) sur le texte de l'art. 4 LDTR, aux termes duquel
l'autorisation
est accordée lorsque les travaux projetés apparaissent indispensables
pour
des motifs de sécurité, de salubrité ou d'intérêt général. Elles
estiment que
le Tribunal administratif se serait arbitrairement détaché de cette
disposition. Sur ce point toutefois, elles ne font qu'opposer des
considérations générales de politique économique à la solution
retenue dans
l'arrêt attaqué. Or, celui-ci repose sur une analyse très détaillée du
projet, ainsi que de ses incidences sur le bâtiment litigieux et ses
habitants (cf. notamment le considérant 3 de l'arrêt attaqué), à
laquelle les
recourantes ne formulent aucune objection précise. Il ressort en
outre de
l'arrêt attaqué que d'autres solutions seraient possibles, au regard
de
l'art. 4 LDTR, portant sur une rénovation plus légère du bâtiment,
partant
moins coûteuse, tant pour les propriétaires que pour les locataires.
Les
recourantes ne prétendent pas que cette appréciation serait
arbitraire.

3.3 Dans un autre moyen (dont on peut se demander s'il peut être tiré
de
l'art. 26 Cst.), les recourantes reprochent au Tribunal administratif
de
s'être arrogé les compétences d'une Cour constitutionnelle. Sur ce
point, les
recourantes se réfèrent à la jurisprudence antérieure du Tribunal
administratif (et notamment son arrêt du 13 décembre 2000, concernant
le même
litige) selon laquelle l'art. 12 du règlement d'application de la
LDTR (RDTR)
sortirait du cadre fixé à l'art. 4 LDTR, dans la mesure où cette
disposition
prévoit que l'autorisation doit aussi être accordée lorsque les
travaux
projetés paraissent opportuns d'un point de vue technique. Les
recourantes ne
démontrent pas toutefois que cette jurisprudence aurait été appliquée
en
l'espèce, ni même en quoi elle aurait pu influer sur la solution. De
toute
manière, il n'est pas contesté que les juridictions administratives
cantonales sont habilitées à contrôler la légalité des règlements
cantonaux,
en tout cas dans le cadre d'un contrôle préjudiciel (ou incident). Il
suffit
sur ce point de renvoyer à la jurisprudence et à la doctrine citées
par les
intimés dans leur réponse du 6 mai 2003 (art. 36a al. 3 OJ).

4.
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Les
frais sont mis à la charge des recourantes (art. 156 OJ), ainsi qu'une
indemnité en faveur des intimés, à titre de dépens (art. 159 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument de 5000 fr. est mis à la charge des recourantes, ainsi
qu'une
indemnité de 2000 fr. à verser aux intimés à titre de dépens.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties,
à la
Municipalité de Nyon, au Département de l'économie, Service du
logement, et
au Tribunal administratif du canton de Vaud.

Lausanne, le 14 juillet 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.173/2003
Date de la décision : 14/07/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-07-14;1p.173.2003 ?
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