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10/07/2003 | SUISSE | N°U.168/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 juillet 2003, U.168/02


{T 7}
U 168/02

Arrêt du 10 juillet 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier: M.
Métral

C.________, recourant, représenté par Me Henri Nanchen, avocat,
boulevard des
Philosophes 14, 1205 Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Service
juridique,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 23 avril 2002)

F

aits:

A.
A.a C.________, né en 1963, fut victime d'un accident de moto le 18
janvier
1983 qui lui causa une fracture du...

{T 7}
U 168/02

Arrêt du 10 juillet 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier: M.
Métral

C.________, recourant, représenté par Me Henri Nanchen, avocat,
boulevard des
Philosophes 14, 1205 Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Service
juridique,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 23 avril 2002)

Faits:

A.
A.a C.________, né en 1963, fut victime d'un accident de moto le 18
janvier
1983 qui lui causa une fracture du tiers distal du fémur droit et
entraîna
une incapacité de travail définitive comme manoeuvre de chantier,
activité
qu'il exerçait en dernier lieu avant la survenance de l'accident. La
Caisse
nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) prit en charge
le cas.

Par décision du 15 décembre 1986, elle mit l'assuré au bénéfice d'une
rente
d'invalidité fondée sur une incapacité de gain de 35 % à partir du 1er
novembre 1986; en outre, elle lui octroya une indemnité pour atteinte
à
l'intégrité de 10 %. La rente fut calculée sur la base d'un gain
assuré
(annuel) de 16'322 fr., montant correspondant au salaire que l'assuré
avait
réalisé comme manoeuvre durant l'année qui avait précédé l'accident.

A la suite d'une rechute, le taux de l'atteinte à l'intégrité fut
porté de 10
à 20 % (décision de la CNA du 1er mars 1989), tandis que la rente
demeura
inchangée (lettres de la CNA des 9 décembre 1988 et 15 janvier 1992).
Après
avoir exercé différentes activités lucratives, l'assuré fut engagé le
6 mai
1991 en qualité de serveur par la société X.________ SA.

A.b Le 28 juillet 1991, C.________ fut victime d'un accident
professionnel:
il se fit une entorse à la cheville gauche en traversant les voies de
chemin
de fer. Déclaré incapable de travailler depuis le jour de l'accident
jusqu'au
27 août 1991, il bénéficia derechef des prestations de la CNA,
notamment sous
la forme d'indemnités journalières calculées sur la base de son
dernier
salaire de serveur, soit 4'933 fr. par mois. Le 20 mars 1992, une
première
rechute fut annoncée à la CNA, puis une seconde le 22 juillet 1992.
Elles
entraînèrent des incapacités de travail respectivement de deux et
trois
semaines, qui furent indemnisées par la CNA.

A.c Le 3 août 1992, l'assuré annonça une nouvelle rechute relative au
premier
accident (du 18 janvier 1983). Une nouvelle entorse de la cheville
gauche fut
également annoncée le 27 août 1993. Ces cas furent pris en charge par
la CNA.

Dans un rapport du 27 septembre 1994, le docteur A.________, médecin
d'arrondissement de la CNA, constata que l'assuré ne pouvait plus
travailler
comme manoeuvre, mais qu'il jouissait encore d'une pleine capacité de
travail
dans une activité essentiellement sédentaire autorisant de fréquents
changements de positions. Il ajouta que «ces allégements suffis(ai)ent
largement pour les troubles extrêmement discrets persistant encore au
niveau
de la cheville gauche». Concernant l'atteinte à l'intégrité, le
docteur
A.________ l'estima à 30 %, en précisant que «dans ce taux (étaient)
largement compris les petits troubles résiduels au niveau de la
cheville
gauche». L'assuré fut par la suite examiné au Centre médical
d'observation de
l'assurance-invalidité de Lausanne (COMAI), du 14 au 17 mars 1995. Au
terme
de ce séjour, les médecins du COMAI conclurent qu'il présentait une
incapacité de travail totale dans toute activité de force, en
spécifiant que
seules des mesures de réadaptation d'ordre professionnel étaient, le
cas
échéant, susceptibles de mettre en valeur une capacité de travail
résiduelle
dans une activité adaptée (rapport d'expertise du 28 juin 1995).

Par décision du 13 février 1996, faisant suite à une communication du
11
octobre 1994, la CNA déclara qu'elle mettait fin au versement des
indemnités
journalières à partir du 1er décembre 1994 et que, dès ce moment,
seule la
rente en cours depuis le 1er novembre 1986 continuerait d'être versée
à
l'assuré. A la suite de l'opposition formée par ce dernier, la CNA
convint
transactionnellement avec lui de poursuivre le versement des
indemnités
journalières jusqu'au 28 avril 1996 et de prendre en charge une
intervention
chirurgicale au fémur droit pratiquée le 29 avril 1996. Après quoi
elle a
poursuivi le paiement des indemnités journalières jusqu'au 12 juillet
1998,
en les réduisant toutefois pour cause de surindemnisation (décisions
des 24
et 25 juin 1996 et décision sur opposition de la CNA du 10 décembre
1996;
arrêt du 4 novembre 1997 du Tribunal administratif de la République
et canton
de Genève).

A.d Entre-temps, C.________ fut mis au bénéfice d'une rente entière
d'invalidité à partir du 1er mai 1993 (décision de l'Office cantonal
genevois
de l'assurance-invalidité du 7 janvier 1994).

Par décision du 1er septembre 1997, la CNA lui alloua, en lieu et
place de la
rente d'invalidité fondée sur une incapacité de gain de 35 %, une
rente
complémentaire d'invalidité fondée sur le même taux à partir du 1er
décembre
1994. Elle précisait toutefois dans sa décision qu'elle ne «pouvait
pas
verser de rente jusqu'à nouvel avis», au motif que les prestations que
l'assuré percevait de l'assurance-invalidité étaient supérieures aux
90 pour
cent du gain assuré, fixé à 16'322 fr. (montant correspondant au
salaire
gagné par l'assuré durant l'année ayant précédé son premier accident
en
1983); les rentes touchées en trop du 1er décembre 1994 au 30
septembre 1997,
compte tenu de cette limite de surindemnisation, soit 17'990 fr.,
seraient
par ailleurs compensées avec les arrérages de l'assurance-invalidité.
C.________ s'opposa à cette décision, en faisant valoir que la CNA
devait
indemniser sa perte de gain actuelle.

Par décision du 22 février 1999, la CNA fit passer le degré
d'invalidité sur
lequel se fondait le droit à la rente complémentaire de 35 à 100 % à
partir
du 1er juillet 1998. Pour le même motif que celui qu'elle avait
exposé dans
sa décision du 1er septembre 1997, elle se déclara toutefois libérée
de tout
versement de la rente «jusqu'à nouvel avis»; elle porta par ailleurs
le taux
de l'atteinte à l'intégrité de 20 à 30 %. L'assuré fit opposition à
cette
décision, en contestant aussi bien le calcul de la rente d'invalidité
que le
taux de l'atteinte à l'intégrité.

Par une seule et même décision du 2 juin 1999, la CNA écarta les
oppositions
formées par l'assuré contre ses décisions des 1er septembre 1997 et 22
février 1999.

B.
B.aC.________ recourut contre la décision sur opposition de la CNA
devant le
Tribunal administratif de la République et canton de Genève. A
l'appui de son
recours, il déposa des rapports des docteurs B.________ (du 16 juin
1999) et
D.________ (du 17 juin 1999), médecins traitants et spécialistes FMH
en
chirurgie orthopédique, attestant la persistance d'atteintes
invalidantes à
sa cheville gauche.

Par jugement du 31 août 1999, le tribunal cantonal rejeta le recours
formé
par C.________.

B.b Ce jugement fut annulé par arrêt du 16 mars 2000 du Tribunal
fédéral des
assurances, qui renvoya la cause à la juridiction cantonale pour
qu'elle
statue à nouveau après avoir mis en oeuvre une nouvelle expertise
médicale.
Il convenait, selon cet arrêt, de déterminer quelle part de
l'invalidité de
l'assuré était due à l'accident de 1983 et à ses séquelles et quelle
part
devait être attribuée à l'accident de 1991; il était également
nécessaire que
l'expert décrive l'atteinte à l'intégrité subie par C.________,
compte tenu
de ses atteintes au genou droit et à la cheville gauche.

C.
C.aLe Tribunal administratif de la République et canton de Genève a
repris
l'instruction de la cause et confié une expertise aux docteurs
E.________,
spécialiste en rhumatologie, et F.________, spécialiste en chirurgie
orthopédique. Ceux-ci exposèrent que l'incapacité de travail de
l'assuré dans
ses emplois précédents était entièrement imputable à l'aggravation de
l'arthrose de son genou droit; les séquelles laissées à la cheville
gauche
par l'accident du 21 juillet 1991 n'entraînaient en revanche pas
d'incapacité
de travail. Par ailleurs, d'après les experts, ces séquelles ne
causaient pas
d'atteinte à l'intégrité, alors que l'état du genou droit de l'assuré
justifiait la reconnaissance d'une atteinte de 40 % (expertise des 30
novembre/13 décembre 2000).

A la suite de cette expertise, C.________ a produit deux nouveaux
rapports
médicaux des docteurs D.________ (du 19 novembre 2001) et B.________
(du 26
novembre 2001). Se référant également à un rapport établi le 22
septembre
1999 par le docteur G.________, chef de service adjoint au
département de
chirurgie des Hôpitaux Y.________, il a réitéré ses conclusions.

C.b Par jugement du 23 avril 2002, le Tribunal administratif de la
République
et canton de Genève a partiellement admis le recours de l'assuré,
dont le
taux d'atteinte à l'intégrité a été fixé à 40 %. La CNA fut condamnée
à
compléter les montants déjà versés à ce titre à l'assuré, ainsi qu'à
lui
payer une indemnité de dépens de 1'500 fr.

D.
C.________ interjette un recours de droit administratif contre ce
jugement,
dont il demande l'annulation. Il conclut, sous suite de dépens, au
renvoi de
la cause à la juridiction cantonale pour instruction complémentaire et
nouveau jugement. Invité à préciser ses conclusions, il a exposé
contester à
la fois le montant de la rente d'invalidité et celui de l'indemnité
pour
atteinte à l'intégrité. Dans le cadre d'un second échange d'écriture,
il a
maintenu ses conclusions, de même que la CNA, qui demande le rejet du
recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se
déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte, d'une part, sur le taux de l'atteinte à l'intégrité
reconnue
au recourant, et d'autre part, sur le montant de la rente
complémentaire
allouée par la CNA (après réduction pour cause de surindemnisation),
en
particulier sur le montant du gain assuré servant à calculer cette
rente.

2.
Est en principe déterminant pour le calcul des rentes le salaire que
l'assuré
a gagné durant l'année qui a précédé l'accident (art. 15 al. 2 LAA,
seconde
phrase). Toutefois, selon l'art. 15 al. 3 LAA troisième phrase, le
Conseil
fédéral édicte des prescriptions sur le gain assuré pris en
considération
dans des cas spéciaux. L'autorité exécutive a exhaustivement
déterminé ces
cas à l'art. 24 OLAA. Lorsque, par exemple, le bénéficiaire d'une
rente
d'invalidité est victime d'un nouvel accident couvert par l'assurance
qui
aggrave son invalidité, le salaire déterminant pour le calcul de la
nouvelle
rente est celui qu'il aurait reçu pendant l'année qui précède le
dernier
accident s'il n'avait pas subi auparavant un accident couvert par
l'assurance. Si ce salaire est inférieur à celui qu'il touchait avant
le
premier accident couvert par l'assurance, le salaire supérieur est
déterminant (art. 24 al. 4 OLAA, dans sa teneur en vigueur au moment
de la
survenance des accidents assurés; cf. arrêt du 16 mars 2000, par
lequel la
cause a été retournée à la juridiction cantonale, consid. 1 et 3).

Il convient par conséquent de déterminer si l'invalidité totale de
l'assuré
est exclusivement due à l'accident de 1983, comme l'ont admis les
premiers
juges, ou si elle est partiellement imputable à l'accident de 1991,
comme le
soutient le recourant. Dans la première hypothèse, le gain assuré
dépend du
salaire réalisé avant l'accident de 1983; dans la seconde, le salaire
versé
par X.________ SA doit être pris en considération.

3.
Les premiers juges se sont fondés, pour l'essentiel, sur l'expertise
réalisée
par les docteurs E.________ et F.________, dont le recourant conteste
la
valeur probante.

3.1 Dans un arrêt du 14 juin 1999 (ATF 125 V 351), le Tribunal
fédéral des
assurances a précisé sa jurisprudence relative à l'appréciation des
preuves,
notamment dans le domaine médical. Il a rappelé que selon le principe
de la
libre appréciation des preuves, l'administration ou le juge apprécie
les
preuves sans être lié par des règles formelles. Le juge doit examiner
de
manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la
provenance,
puis décider si les documents à disposition permettent de porter un
jugement
valable sur le droit litigieux. Si les rapports médicaux sont
contradictoires, il ne peut trancher l'affaire sans apprécier
l'ensemble des
preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur
une
opinion médicale et non pas sur une autre.
L'élément déterminant pour la valeur probante d'un certificat médical
n'est
ni son origine ni sa désignation sous la forme d'un rapport ou d'une
expertise, mais bel et bien son contenu. A cet égard, il importe que
les
points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée,
que le
rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en
considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine
connaissance du dossier (anamnèse), que la description des
interférences
médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient
bien
motivées.

3.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des
preuves,
la jurisprudence a posé
des lignes directrices en ce qui concerne la
manière
d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

3.2.1 Ainsi, le juge ne s'écarte en principe pas sans motifs
impératifs des
conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert
étant
précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de
la
justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait
donné.
Peut constituer une raison de s'écarter de l'expertise judiciaire le
fait que
celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée
par le
tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre,
lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes
à mettre
sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne
peut
exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions
de ce
dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire
sous la
forme d'une nouvelle expertise médicale.

3.2.2 Lorsque, au stade de la procédure administrative, une expertise
confiée
à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur
la base
d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi
qu'en pleine
connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats
convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun
indice
concret ne permet de douter de leur bien-fondé.

3.2.3 En outre, au sujet des rapports établis par les médecins
traitants, le
juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le
médecin
traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti
pour son
patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier.

3.2.4 Toutefois, le simple fait qu'un certificat médical est établi à
la
demande d'une partie et produit pendant la procédure ne justifie pas,
en soi,
des doutes quant à sa valeur probante. Une expertise présentée par
une partie
peut donc également valoir comme moyen de preuve. En vertu des
principes
énoncés par la jurisprudence concernant l'appréciation des preuves,
le juge
est tenu d'examiner si elle est propre à mettre en doute, sur les
points
litigieux importants, l'opinion et les conclusions de l'expert
mandaté par le
tribunal. Cette jurisprudence s'applique aussi lorsqu'un assuré entend
remettre en cause, au moyen d'une expertise privée, les conclusions
d'une
expertise aménagée par l'assureur-accidents ou par un office AI.

3.3
3.3.1D'après le recourant, les experts auraient négligé de prendre en
considération les douleurs à la cheville gauche qu'il avait décrites,
pour
s'en tenir à une analyse fondée exclusivement sur les lésions
objectivement
constatées. Ils n'auraient, par ailleurs, pas suffisamment pris en
compte
l'activité exercée avant l'aggravation de son invalidité. Enfin, les
experts
n'auraient pas réfuté les avis divergents des docteurs B.________,
D.________
et G.________.

3.3.2 Ces griefs sont infondés. D'abord, les docteurs E.________ et
F.________ ont largement pris en considération les douleurs dont
faisait état
l'assuré: qu'ils aient relativisé ces douleurs et leur influence sur
sa
capacité de travail, eu égard aux lésions objectivement constatées,
n'est pas
critiquable. Ensuite, les experts ont dûment tenu compte des activités
exercées par l'assuré postérieurement à l'accident de 1983. A cet
égard, ils
ont expressément indiqué que son incapacité de travail, tant comme
maçon que
comme vendeur de boissons dans les trains, était entièrement
imputable à
l'accident du 18 janvier 1983 et à l'aggravation de l'arthrose du
genou
droit, consécutive à cet accident. Enfin, les docteurs E.________ et
F.________ ont expliqué pour quels motifs ils ne partageaient pas les
conclusions des docteur G.________, B.________ et D.________. Ils ont
exposé,
en particulier, n'avoir pas décelé d'instabilité articulaire de la
cheville
gauche, de tuméfaction, d'épanchement ou d'autre signe clinique,
hormis une
douleur élective à la pression de l'interligne astragalo-calcanéen
externe;
ils ont indiqué par ailleurs n'avoir constaté qu'un remodelé
arthrosique
minime (rapport d'expertise, p. 39 ss). Cela étant, le seul fait que
subsiste, entre les experts désignés par la juridiction cantonale et
les
médecins traitants de l'assuré, une différence d'appréciation sur la
portée
de ces atteintes à la cheville gauche, en particulier quant à leur
influence
sur sa capacité de travail, ne justifie pas de tenir l'expertise des
docteurs
E.________ et F.________ pour insuffisamment probante et d'ordonner de
nouvelles mesures d'instruction. La juridiction cantonale pouvait à
bon droit
se fonder sur les conclusions de ces praticiens et nier l'existence
d'un lien
de causalité entre l'accident de 1991 et l'invalidité du recourant.

4.
Vu ce qui précède, c'est à juste titre que l'intimée et la juridiction
cantonale ont fait dépendre le gain assuré du recourant du salaire
réalisé
avant l'accident subi en 1983. Cela étant, il reste à examiner s'il y
a lieu,
dans le cadre du calcul de surindemnisation prévu à l'art. 20 al. 2
LAA,
d'adapter ce gain assuré au renchérissement intervenu depuis lors,
comme le
prévoit l'art. 31 al. 2 OLAA dans sa teneur en vigueur depuis le 1er
janvier
1997, introduite par l'Ordonnance du Conseil fédéral du 9 décembre
1996.

4.1 Selon l'alinéa 1 des Dispositions transitoires de la modification
du 9
décembre 1996, la disposition citée ne s'applique qu'aux rentes
complémentaires fixées postérieurement au 31 décembre 1996. Dans ce
cadre, la
date déterminante n'est pas celle de la décision d'allocation d'une
rente
complémentaire, mais celle de la naissance du droit à une telle
rente, à
savoir la date à laquelle l'assuré a pu prétendre simultanément, pour
la
première fois, une rente de l'assurance-invalidité et de
l'assurance-accidents (ATF 127 V 450 ss consid. 2).

4.2 C.________ s'est vu allouer une rente de l'assurance-accidents,
fondée
sur un taux d'invalidité de 35 %, dès le 1er novembre 1986. Par la
suite, il
a tenté de reprendre diverses activités lucratives, pendant de courtes
périodes, notamment au service de X.________ SA. A la suite de
l'entorse de
la cheville subie le 28 juillet 1991 et de rechutes de cette entorse,
il a
perçu des indemnités journalières de l'assurance-accidents jusqu'au 12
juillet 1998, en parallèle avec la rente qui lui avait été allouée
initialement, sous réserve d'une réduction de prestations en raison
d'une
surindemnisation. Ce procédé était conforme au droit, dès lors qu'un
assuré
au bénéfice d'une rente partielle et mettant en valeur sa capacité de
travail
résiduelle peut percevoir, en cas de nouvel accident, outre la rente
allouée
initialement, une indemnité journalière calculée selon cette nouvelle
situation (cf. arrêt H. du 26 juin 2001 [U 42/01] consid. 3; Maurer,
Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 2ème éd., Berne 1989 p.
327). Par
ailleurs, contrairement à ce que soutient le recourant, on ne saurait
tenir
pour infondé le maintien de la rente au motif que son activité au
service de
X.________ SA lui permettait de réaliser un salaire au moins égal à
celui
qu'il aurait obtenu en continuant à travailler comme manoeuvre sur un
chantier. Rien n'indique, en effet, que cette profession, qu'il a
rapidement
dû abandonner, était adaptée à son état de santé. Lui-même
s'apprêtait, du
reste, à donner son congé au motif que son travail lui imposait de
travailler
debout en permanence, selon ses déclarations à un inspecteur de la
CNA, le 25
novembre 1991.

Il s'ensuit que les prétentions de l'assuré à une rente de
l'assurance-accidents et de l'assurance-invalidité sont entrées en
concours
le 1er mai 1993, dès le début du droit à la rente allouée par l'Office
cantonal genevois de l'assurance-invalidité. Que les prestations de
l'assurance-accidents aient été réduites en raison d'une
surindemnisation
demeure sans pertinence sur le moment de la naissance du droit à une
rente
complémentaire au sens de l'art. 31 al. 2 OLAA, dont la teneur en
vigueur
depuis le 1er janvier 1997 n'est donc pas applicable en l'espèce.

5.
Le recourant conteste la compensation d'un montant de 17'990 fr. par
l'intimée avec des arrérages de l'assurance-invalidité, au motif que
la rente
litigieuse avait déjà conduit à une réduction des indemnités
journalières
versées par la CNA. Cette circonstance est toutefois sans influence
sur le
droit de l'assuré à une telle rente et, partant, sur la compensation
opérée
par l'intimée. En revanche, elle est susceptible d'influencer le
droit du
recourant aux indemnités journalières réduites pour cause de
surindemnisation, dans la mesure où cette réduction semble
effectivement
avoir été opérée, à l'époque, en tenant compte du versement d'une
rente
mensuelle de l'assurance-accidents dont la restitution est aujourd'hui
exigée. Dans la mesure où le droit à de telles indemnités
journalières a fait
l'objet d'un arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève,
rendu le 4
novembre 1997, il appartiendra au recourant de déposer une demande de
révision de ce jugement, à la lumière de la nouvelle situation de fait
résultant de la restitution exigée.

6.
Demeurent litigieuses l'atteinte à l'intégrité dont souffre le
recourant et
l'indemnité qu'il peut prétendre à ce titre.

6.1 Celui qui, par suite d'un accident assuré, souffre d'une atteinte
importante et durable à son intégrité physique ou mentale a droit à
une
indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité, sous forme de
prestation en
capital (art. 24 al. 1 et 25 al. 1 LAA). L'annexe 3 à l'OLAA comporte
un
barème des atteintes à l'intégrité en pour cent du montant maximum du
gain
assuré. Ce barème - reconnu conforme à la loi - ne constitue pas une
énumération exhaustive (ATF 124 V 32 consid. 1b, 210 consid. 4a/bb et
les
références). Il représente une «règle générale» (ch. 1 al. 1 de
l'annexe).
Pour les atteintes qui sont spéciales ou qui ne figurent pas dans la
liste,
il y a lieu d'appliquer le barème par analogie, en tenant compte de la
gravité de l'atteinte (ch. 1 al. 2 de l'annexe). A cette fin, la
division
médicale de la CNA a établi des tables complémentaires comportant des
valeurs
indicatives destinées à assurer autant que faire se peut l'égalité de
traitement entre les assurés. Ces tables émanant de l'administration
ne
constituent pas une source de droit et ne lient pas le juge, mais sont
néanmoins compatibles avec l'annexe 3 à l'OLAA (ATF 124 V 32 consid.
1c, 211
consid. 4a/cc, 116 V 157 consid. 3a).

6.2 Pour les mêmes motifs qu'exposé au considérant 3 ci-dessus, il
n'y a pas
lieu de s'écarter des conclusions des experts E.________ et
F.________ en ce
qui concerne l'atteinte à l'intégrité subie par C.________. Faute
d'atteinte
importante à l'intégrité de la cheville gauche, selon ces praticiens
(cf.
également le rapport du 27 septembre 1994 du docteur A.________),
seules les
lésions constatées au genou gauche ouvrent droit à une indemnisation.
Dès
lors, le taux de 40 % retenu à ce titre dans l'expertise, qui
correspond au
maximum prévu dans les tables établies par la CNA pour une arthrose
du genou
(table 4), est approprié.

7.
Vu le sort de ses conclusions, le recourant ne peut prétendre de
dépens (art.
159, en relation avec l'art. 135 OJ). Par ailleurs, la procédure
porte sur
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, de sorte qu'elle est
gratuite (art. 134 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté au sens des considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif de la
République et Canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 10 juillet 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.168/02
Date de la décision : 10/07/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-07-10;u.168.02 ?
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