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07/07/2003 | SUISSE | N°8G.61/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 07 juillet 2003, 8G.61/2003


{T 0/2}
8G.61/2003 /rod

Arrêt du 7 juillet 2003
Chambre d'accusation

MM. les Juges Karlen, Président,
Fonjallaz, Vice-président, et Marazzi.
Greffier: M. Fink.

C. X.________,
plaignant

contre

Procureur général du canton du Jura, Le Château, case postale 9, 2900
Porrentruy,
Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

Plainte au sujet du for,

plainte contre la décision du 18 février 2003 par laquelle le
P

rocureur
général du canton du Jura a accepté sa compétence locale.

Faits:

A.
A la suite de plaintes de B.________GmbH...

{T 0/2}
8G.61/2003 /rod

Arrêt du 7 juillet 2003
Chambre d'accusation

MM. les Juges Karlen, Président,
Fonjallaz, Vice-président, et Marazzi.
Greffier: M. Fink.

C. X.________,
plaignant

contre

Procureur général du canton du Jura, Le Château, case postale 9, 2900
Porrentruy,
Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

Plainte au sujet du for,

plainte contre la décision du 18 février 2003 par laquelle le
Procureur
général du canton du Jura a accepté sa compétence locale.

Faits:

A.
A la suite de plaintes de B.________GmbH -société allemande- et de
F.________
(directeur de cette société) contre les administrateurs de A.________
SA, à
Genève, pour diminution effective de l'actif au préjudice des
créanciers,
infraction prévue à l'art. 164 CP, les autorités genevoises ont
ouvert une
instruction pénale. Il en ressort que A.________ SA, mise en faillite
à
Genève le 27 mars 2000, n'a jamais eu d'activité dans ce canton et
que son
siège précédent se trouvait à Saignelégier, où son ancienne raison
sociale
était H.________ SA.

A la demande du Procureur général du canton de Genève, le Procureur
général
du canton du Jura a reconnu la compétence des autorités jurassiennes
par une
décision du 18 février 2003. D'après ce magistrat, A.________ SA a
toujours
été administrée depuis Saignelégier, ce qui justifie l'acceptation du
for, au
lieu de commission, en application de l'art. 346 ch. 1 CP et de la
jurisprudence (ATF 107 IV 75). Par ailleurs, la jonction avec une
autre
affaire en cours dans le Jura est ordonnée.

B.
Le 30 avril 2003, la Juge d'instruction jurassienne chargée de
l'affaire
consécutive aux plaintes pour infraction à l'art. 164 CP a demandé
des pièces
à D.X.________et à C.X.________, respectivement administrateur et
actionnaire
principal de A.________ SA. En annexe à ce courrier figurait la
décision du
18 février 2003 par laquelle le for jurassien avait été reconnu.

C.
Le 15 mai 2003, C.X.________ a saisi la Chambre d'accusation du
Tribunal
fédéral d'une plainte (intitulée recours) au sujet du for, tendant à
ce que
les autorités genevoises soient déclarées compétentes. Il s'oppose
également
à la jonction avec l'autre affaire en cours devant les autorités
pénales
jurassiennes.

En substance, le plaignant nie avoir eu une activité au sein de
A.________ SA
après le transfert du siège de celle-ci à Genève, il relève que le
commandement de payer à l'origine de la faillite a été notifié au
domicile de
l'administratrice, dans le canton de Berne, et affirme que A.________
SA n'a
eu aucune activité réelle dans le canton du Jura alors que son siège
était
dans le canton de Genève. Les autres arguments ont trait à
l'infraction
reprochée, non pas à la question du for intercantonal.

D.
D.X.________, administratrice de A.________ SA et soeur de
C.X.________, a
également déposé une plainte devant la Chambre de céans, tendant à ce
que les
autorités genevoises soient déclarées compétentes (procédure n°
8G.62/2003).

E.
Invité à répondre, le Procureur général du canton de Genève a conclu
au rejet
de la plainte sous suite de frais. Il se réfère à sa demande du 4
février
2003 adressée au Procureur général du canton du Jura en vue du
transfert du
dossier.

Il en ressort notamment que B.________GmbH et son directeur avaient
obtenu,
en Allemagne, la condamnation de A.________ SA à leur payer un
montant de
plus de 13'000 DM; ces créanciers ont obtenu la mainlevée définitive
de
l'opposition au commandement de payer correspondant, mainlevée
prononcée le
24 février 1999 par le Tribunal du district des Franches-Montagnes.
Cette
même créance a entraîné la mise en faillite de A.________ SA le 27
mars 2000
par un jugement du Tribunal de première instance du canton de Genève.
Les
mêmes créanciers ont ensuite déposé les plaintes pénales à Genève
reprochant
à D.X.________ et à C.X.________ d'avoir "vidé", dès 1997, A.________
SA de
sa substance en transférant sans contre-prestation les droits que
possédait
cette société sur la marque Y.________; cette marque a été acquise par
K.________AG, contrôlée par la fratrie X.________ (soit D.X.________,
C.X.________ et E.X.________). Le gérant de fortunes genevois, qui
avait
accepté la domiciliation de A.________ SA à son adresse, a déclaré
s'être
limité à recevoir le courrier de cette société et à l'avoir transmis,
fermé,
à E.X.________; il a indiqué avoir agi pour rendre service à
celui-ci, qu'il
connaissait.

F.
Le Procureur général du canton du Jura a déclaré qu'il s'en tenait aux
considérants de sa décision d'acceptation du for.

La Chambre considère en droit:

1.
Aux termes de l'art. 351 CP, s'il y a contestation sur l'attribution
de la
compétence entre les autorités de plusieurs cantons, le Tribunal
fédéral
désignera le canton qui a le droit et le devoir de poursuivre et de
juger.
Ces contestations relèvent de la compétence de la Chambre
d'accusation;
l'inculpé a qualité pour contester la compétence locale d'un canton
devant la
Chambre de céans (art. 264 PPF).

En l'espèce, la plainte de C.X.________ est recevable dans la mesure
où il
conteste le for intercantonal. En revanche, elle est irrecevable
s'agissant
de ses griefs contre la jonction de la procédure relative à
A.________ SA
avec une autre affaire en cours dans le canton du Jura. Cette
jonction relève
du droit cantonal de procédure.

2.
2.1Selon la jurisprudence, les crimes et délits dans la faillite
doivent en
principe être poursuivis au lieu d'ouverture de celle-ci. Il n'y a
d'exceptions à cette règle que là où font défaut les circonstances
qui la
justifient (ATF 107 IV 75).

Cette règle se justifie lorsqu'au siège de la faillie se trouvent les
documents utiles à l'instruction, les témoins et l'office des
faillites qui
peut fournir les renseignements nécessaires à la poursuite pénale. Au
cas où
ces éléments se trouvent dans un autre canton, il est possible de
déroger à
la règle générale énoncée à l'ATF 106 IV 31 et de considérer, pour
des motifs
d'opportunité, que le siège formel est fictif, ce qui permet de fixer
le for
là où l'autorité pénale pourra agir avec le plus d'efficacité et de
célérité.
Le for intercantonal correspond alors au siège effectif du débiteur.
Cette
jurisprudence a été confirmée à l'ATF 118 IV 296 consid. 3c p. 300.

2.2 Selon les pièces à disposition, en particulier celles de la
procédure
ouverte à Genève, et malgré certaines erreurs sans portée juridique
entachant
la décision attaquée ainsi que le résumé du Procureur général du
canton de
Genève, force est d'admettre que le siège effectif de la faillie ne se
trouvait pas à Genève.

En effet, le gérant de fortunes à l'adresse duquel la société était
domiciliée à Genève a déclaré avoir transmis tout le courrier, fermé,
à
E.X.________ et ne posséder aucun document relatif à la faillie.
C.X.________
concède qu'après le transfert du siège de A.________ SA de
Saignelégier à
Genève, la société n'a eu aucune activité dans le Jura. Or, ce
transfert a eu
lieu le 29 septembre 1998 et, d'après les déclarations de
l'administratrice,
la cession des droits de A.________ SA à K.________AG était
intervenue à la
fin de l'année 1994. Les créanciers estiment dans leur plainte pénale
que la
substance de la faillie a été diminuée dès le début de l'année 1997.
On en
déduit que les éventuels actes délictueux pouvant relever de l'art.
164 CP
ont été commis avant l'inscription de la société à Genève, alors que
son
siège était à Saignelégier. Les autorités pénales jurassiennes
paraissent
donc mieux à même de procéder aux investigations nécessaires sur ce
point.
Cela d'autant plus que le domicile de C.X.________ se trouve à
Saignelégier
et celui de D.X.________ainsi que E.X.________ à Bienne. Au demeurant,
jusqu'en 1999, l'organe de revision de A.________ SA était une
fiduciaire des
Breuleux (JU). De plus, c'est le Tribunal du district des
Franches-Montagnes
qui a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition faite au
commandement
de payer émanant des créanciers allemands (jugement du 24 février
1999).
Enfin, D.X.________ a notamment déclaré au Juge d'instruction
genevois que
A.________ SA n'avait plus d'activité depuis 1995, date à laquelle
lesdites
activités ont été reprises par H.________ SA, dont le siège est à
Saignelégier (procès-verbal du 4 avril 2001).

Dans ces circonstances, la règle imposant de fixer le for spécial en
matière
d'infractions dans la faillite au lieu de l'ouverture de cette
dernière ne
saurait s'appliquer. Les autorités jurassiennes sont nettement plus
proches
des sources de renseignements propres à élucider les éventuels actes
délictueux relatifs à la faillie. Cela vaut même si celle-ci n'a pas
eu
d'activité du tout, à partir de 1998, ni à Genève, ni dans le canton
du Jura,
ni ailleurs (ce que la Chambre de céans n'a pas à vérifier).

3.
Dans la mesure où elle est recevable, la plainte au sujet du for doit
être
rejetée, aux frais de son auteur (art. 156 OJ).

Par ces motifs, la Chambre prononce:

1.
Dans la mesure où elle est recevable, la plainte au sujet du for est
rejetée
et les autorités jurassiennes sont déclarées compétentes aux fins
d'instruire
et de juger les infractions relatives à la faillite de A.________ SA.

2.
Un émolument judiciaire de 1500 fr. est mis à la charge du plaignant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au plaignant, au Procureur
général
du canton du Jura et au Procureur général du canton de Genève.

Lausanne, le 7 juillet 2003

Au nom de la Chambre d'accusation
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 8G.61/2003
Date de la décision : 07/07/2003
Chambre d'accusation

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-07-07;8g.61.2003 ?
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