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23/06/2003 | SUISSE | N°5P.29/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 juin 2003, 5P.29/2003


{T 0/2}
5P.29/2003 /frs

Arrêt du 23 juin 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffière: Mme Mairot.

A. et B.X.________, recourants,
représentés par leur mère C.X.________,
au nom de qui agit Claude Paschoud, conseiller juridique, avenue de
la Gare
52,1003 Lausanne,

contre

Service de prévoyance et d'aide sociales, Bureau de recouvrement et
d'avances
sur pensions alimentaires (BRAPA), bâtiment administratif de la
Pontaise,
avenue d

es Casernes 2, case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15,
1014
...

{T 0/2}
5P.29/2003 /frs

Arrêt du 23 juin 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffière: Mme Mairot.

A. et B.X.________, recourants,
représentés par leur mère C.X.________,
au nom de qui agit Claude Paschoud, conseiller juridique, avenue de
la Gare
52,1003 Lausanne,

contre

Service de prévoyance et d'aide sociales, Bureau de recouvrement et
d'avances
sur pensions alimentaires (BRAPA), bâtiment administratif de la
Pontaise,
avenue des Casernes 2, case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15,
1014
Lausanne.

art. 8 et 9 Cst. (avances sur les contributions d'entretien)

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de
Vaud du 2 décembre 2002.

Faits:

A.
C. X.________, née le 31 août 1977, a donné naissance, le 6 novembre
1993, à
des jumeaux, A. et B.X.________. Ils ont été reconnus par leur père,
Y.________, le 24 novembre suivant.
Le 18 novembre 1998, le Tribunal du district de Lausanne a ratifié une
convention astreignant le père à servir en faveur de chacun de ses
fils une
contribution d'entretien, indexée, d'un montant mensuel de 250 fr.
Celui-ci
a payé la somme de 500 fr. pour le mois de décembre 1998; il n'a plus
rien
versé depuis lors.

C. X.________ (ci-après: la requérante) a, le 30 mars 1999, sollicité
l'intervention du Bureau de recouvrement et d'avances de pensions
alimentaires (BRAPA) pour qu'il lui consente une avance sur les
contributions
dues par Y.________ et procède à leur recouvrement; à cette fin, elle
lui a
cédé ses droits contre le débiteur.
Considérant que la requérante et ses deux enfants vivaient au
domicile de la
mère de celle-ci, qui les avait à charge, et qu'il fallait dès lors se
référer, pour calculer les montants déterminant le droit à
d'éventuelles
avances, à la norme applicable à un adulte et trois enfants, le BRAPA
lui a
demandé des précisions sur la situation financière de ses parents. La
requérante a répondu qu'elle n'était pas en mesure de fournir les
renseignements requis; en annexe à ce courrier, elle a produit sa
déclaration
d'impôts pour 1999-2000.
Après un échange de correspondance, le BRAPA a, par décision du 23
mai 2001,
confirmée dans un courrier du 20 juillet 2001, définitivement refusé
d'octroyer à la requérante des avances sur les contributions
d'entretien dues
pour ses enfants, tant que les pièces suivantes ne lui seraient pas
parvenues:
a) concernant la mère de la requérante:
- certificat de salaire dûment rempli par son employeur
- copie de son bail à loyer
- copie de sa dernière facture d'électricité
- copie de sa dernière facture de téléphone
- copie de sa notification de taxation définitive 2000
- copie de sa déclaration d'impôts sur le revenu 2001-2002
- copie de ses derniers relevés de comptes bancaires et/ou postaux
b) concernant la requérante:
- copie de sa notification de taxation définitive 2000
- copie de sa déclaration d'impôts sur le revenu 2001-2002
- copie d'une éventuelle décision d'octroi de bourse
- copie d'une attestation d'études
- copie de ses derniers relevés de comptes bancaires et/ou postaux.

B.
Le 25 juin 2001, C.X.________ et ses deux enfants ont, par
l'intermédiaire de
leur conseil, recouru contre la décision définitive rendue par le
BRAPA le 23
mai 2001.
Par arrêt du 2 décembre 2002, le Tribunal administratif du canton de
Vaud a
rejeté le recours et maintenu la décision attaquée.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A. et
B.X.________,
représentés par leur mère, concluent à l'annulation de l'arrêt du 2
décembre
2002 et de la décision du BRAPA du 23 mai 2001. Ils demandent en
outre au
Tribunal fédéral de décider qu'ils ont droit à l'avance sur les
pensions dues
par leur père du 1er avril 1999 à fin juillet 2001. Ils sollicitent
enfin le
renvoi de l'affaire au BRAPA pour nouvelle décision dans le sens des
considérants.
Des observations n'ont pas été requises.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a
p. 48
et les arrêts cités).

1.1 Selon l'art. 97 OJ, en relation avec l'art. 5 PA, le recours de
droit
administratif est ouvert contre les décisions fondées sur le droit
public
fédéral - ou qui auraient dû l'être -, à condition qu'elles émanent
des
autorités énumérées à l'art. 98 OJ et pour autant qu'aucune des
exceptions
prévues aux art. 99 à 102 OJ ou dans la législation spéciale ne soit
réalisée
(ATF 128 I 46 consid. 1b/aa p. 49; 128 II 13 consid. 1b p. 16, 34
consid. 1a
p. 36). Dans le cas particulier, l'arrêt attaqué a pour base la loi
cantonale
vaudoise sur la prévoyance et l'aide sociales, du 25 mai 1977 (LPAS),
ainsi
que son règlement d'application, du 18 novembre 1977 (RPAS). Comme il
ne met
en jeu aucune disposition du droit public de la Confédération, il ne
constitue pas une décision au sens de l'art. 5 PA et ne peut,
partant, faire
l'objet d'un recours de droit administratif.

1.2 Irrecevable, le recours de droit administratif peut cependant être
converti en un recours de droit public (ATF 117 Ia 107 consid. 2a p.
110/111), la désignation erronée du recours ne nuisant pas au
recourant, pour
autant que les conditions de forme prévues par la loi soient
respectées (ATF
127 II 198 consid. 2a p. 203; 126 II 506 consid. 1b p. 509; 124 I 223
consid.
1a p. 224; 122 I 328 consid. 2d p. 333). En l'espèce, les recourants
se
plaignent d'arbitraire dans l'application du droit cantonal et de
violation
du principe constitutionnel de l'égalité de traitement (art. 84 al. 1
let. a
OJ). Compte tenu de la suspension des délais prévue à l'art. 34 al. 1
let. c
OJ, le recours a de plus été déposé en temps utile (art. 89 al. 1
OJ). Il est
par conséquent recevable au regard de ces dispositions.

1.3 Selon l'art. 86 OJ, le recours de droit public ne peut être
dirigé, en
principe, que contre des décisions cantonales de dernière instance.
Le chef
de conclusions tendant à l'annulation de la décision du BRAPA est
ainsi
irrecevable.

1.4 Sous réserve d'exceptions non réalisées ici (cf. à ce sujet: ATF
124 I
327 consid. 4b p. 332/333 et les références), le recours de droit
public est
de nature purement cassatoire (ATF 128 III 50 consid. 1b p. 53 et les
arrêts
cités). Dans la mesure où elles vont au-delà de l'annulation de
l'arrêt
attaqué, les conclusions sont donc irrecevables.

2.
2.1Une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement
insoutenable,
méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté, ou
encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de
l'équité.
Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution apparaît
concevable, voire préférable; de plus, la décision ne sera annulée
que si
elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi
dans son
résultat (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275
et les
arrêts cités). Le recourant ne peut se contenter d'opposer sa thèse à
celle
de l'autorité cantonale, mais il doit démontrer, par une argumentation
précise, que cette décision repose sur une interprétation ou une
application
de la loi manifestement insoutenables (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF
128 I 295
consid. 7a p. 312; 128 III 50 consid. 1c p. 53; 125 I 492 consid. 1b
p. 495
et les références).

2.2 Les recourants reprochent au Tribunal administratif d'avoir perdu
de vue
qu'ils sont les créanciers d'aliments mentionnés à l'art. 20b LPAS, à
l'exclusion de leur mère ou de leurs grands-parents. Se référant aux
art. 20
et 20a à 20e RPAS, ils soutiennent que la situation financière de leur
grand-mère maternelle ne peut être prise en considération pour
calculer le
revenu global net déterminant leur droit à des avances. L'autorité
cantonale
aurait d'après eux considéré à tort que celle-ci était le "chef de
famille"
ou qu'elle "faisait partie de la composition familiale", au sens de
l'art.
20d RPAS. Ils contestent ainsi l'application de la limite de revenu
pour un
adulte et trois enfants, prévue à l'art. 20b RPAS, leur grand-mère
maternelle
ne jouant à leur avis que le rôle d'un "tiers faisant ménage commun",
selon
l'art. 20c al. 3 RPAS. De plus, l'art. 277 al. 2 CC, auquel l'autorité
cantonale se réfère, serait en l'occurrence sans pertinence. Enfin,
ils
exposent que si leur mère avait été mise à la porte par ses parents
au moment
de leur naissance et avait dû interrompre ses études, prendre son
propre
logement et gagner sa vie, personne n'aurait requis d'information sur
les
revenus et la fortune de leurs grands-parents.

2.3 Pour autant qu'elles soient recevables, ces critiques
n'apparaissent pas
fondées. Contrairement à ce que prétendent les recourants, l'autorité
cantonale ne s'est pas basée, comme l'avait fait le BRAPA, sur une
famille
composée d'un adulte et de trois enfants. Se référant à l'art. 20b
RPAS, elle
a exposé que les avances totales ou partielles ne sont accordées que
si le
revenu mensuel global du requérant est inférieur à 4'530 fr. "pour un
adulte
et deux enfants". Elle n'est donc pas partie de l'idée que la
grand-mère
maternelle constituait le chef d'une famille composée d'elle-même, de
sa
fille et de ses petits-fils. A cet égard, le grief tombe dès lors à
faux.
En réalité, selon l'autorité cantonale, il convient de déterminer le
revenu
global net de la mère des jumeaux, par quoi il faut comprendre "non
seulement
le revenu du travail sous déduction des charges sociales usuelles,
mais
l'ensemble des revenus dont le requérant dispose" (art. 20c al. 1
RPAS). En
l'espèce, l'intéressée est sans fortune et n'exerce aucune profession
susceptible de lui procurer un revenu. Elle est ainsi, avec ses deux
fils, à
la charge de ses père et mère. Née en 1977, elle poursuit, en tant
qu'étudiante, une formation à caractère professionnel. L'art. 277 al.
2 CC,
qui prévoit l'obligation d'entretien des parents au-delà de la
majorité, est
donc en principe applicable. Encore faut-il que les circonstances
permettent
de l'exiger d'eux, ce qui signifie notamment qu'il y a lieu de
prendre en
considération leur situation financière. En outre, la jurisprudence
fédérale
a admis une obligation d'entretien des grands-parents à l'égard de
leurs
petits-enfants lorsque la mère, responsable en première ligne, ne
peut les
entretenir elle-même. Dans ces conditions, le BRAPA n'avait aucun
moyen
d'évaluer de manière précise le revenu mensuel global déterminant de
la mère
des enfants sans connaître la situation financière de ses parents.
Faute de
renseignements suffisants, c'est à bon droit qu'il n'est pas entré en
matière
sur les prétentions de celle-ci.
Les recourants ne démontrent pas que cette opinion serait
insoutenable. Ils
se contentent d'affirmer que la référence à l'art. 277 al. 2 CC est
sans
aucune pertinence dans le cas particulier, le fait que leurs
grands-parents
maternels aient assumé l'obligation d'entretien prévue par cette
disposition
ne changeant rien, selon eux, à leur droit d'obtenir des avances sur
pensions
alimentaires. Une telle argumentation est à l'évidence insuffisante
au regard
des exigences de motivation déduites de l'art. 90 al. 1 let. b OJ
(cf. supra
consid. 2.1). Quant au grief selon lequel aucune information sur la
situation
financière de leurs grands-parents n'aurait été requise si leur mère
ne
bénéficiait pas du soutien de ceux-ci pour continuer ses études, il
n'apparaît pas non plus fondé. L'autorité cantonale pouvait en effet
considérer sans arbitraire que l'obligation d'entretien des enfants
incombe
en premier lieu à la famille, la collectivité publique n'intervenant
qu'à
titre subsidiaire, comme le prévoit notamment l'art. 1er LPAS. Les
recourants
ne prétendent d'ailleurs pas que cette disposition aurait été
arbitrairement
interprétée ou appliquée; au demeurant, cette solution est en
conformité avec
le devoir d'assistance de l'art. 328 al. 1 CC (cf. ATF 128 III 161
consid. 2c
p. 162 s.).

3.
Se référant à une attestation établie le 17 janvier 2003, les
recourants
soutiennent que les personnes qui ont requis des avances tout en
habitant
seules n'ont jamais dû fournir de renseignements concernant les
revenus de
leurs parents, même lorsque ceux-ci étaient millionnaires. Mais cette
pièce,
postérieure à l'arrêt attaqué, est nouvelle, partant irrecevable dans
un
recours de droit public soumis à l'exigence de l'épuisement préalable
des
instances cantonales (ATF 108 II 69 consid. 1 p. 71; Kälin, Das
Verfahren der
staatsrechtlichen Beschwerde, 1994, p. 370). Au demeurant, si les
recourants
entendent ainsi se plaindre d'une violation du principe de l'égalité
de
traitement, il convient de relever que leur mère n'habite en
l'occurrence pas
seule, de sorte que sa situation n'apparaît à première vue pas
semblable à
celle des personnes auxquelles ils se réfèrent (cf. à ce propos: ATF
125 I 1
consid. 2b/aa p. 4 et la jurisprudence citée). De plus, il n'y a en
principe
pas d'égalité de traitement dans l'illégalité (ATF 127 II 113 consid.
9 p.
121; 125 II 152 consid. 5 p. 166; 122 II 446 consid. 4a p. 451 s. et
les
références). Même à supposer que l'octroi d'avances alimentaires à
des tiers
sans que ceux-ci soient contraints de
fournir des renseignements sur
la
situation financière de leurs parents constitue un traitement
différent non
justifié, les recourants ne pourraient donc rien en tirer: le
principe de la
légalité prévalant sur celui de l'égalité de traitement, le
justiciable ne
peut, sous réserve d'exceptions non réalisées dans le cas
particulier, se
prétendre victime d'une inégalité devant la loi lorsque celle-ci est
- comme
en l'espèce - appliquée à son cas de façon non arbitraire, alors
qu'elle
aurait été faussement, voire pas appliquée du tout, dans une autre
affaire.

4.
Enfin, les allégations des recourants relatives à leur situation
financière
difficile et au prétendu manque de diligence du BRAPA concernant le
recouvrement des contributions d'entretien dues par leur père (n.
3.15 à 3.21
du recours) revêtent un caractère appellatoire (ATF 117 Ia 10 consid.
4b p.
11/12), de sorte qu'elles ne peuvent être prises en considération
(art. 90
al. 1 let. b OJ).

5.
En conclusion, le recours se révèle mal fondé et ne peut ainsi qu'être
rejeté, dans la mesure où il est recevable. Les frais judiciaires
seront dès
lors supportés par les recourants, solidairement entre eux (art. 156
al. 1 et
7 OJ). Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer des dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge des
recourants,
solidairement entre eux.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des
recourants, au
Service de prévoyance et d'aide sociales, Bureau de recouvrement et
d'avances
sur pensions alimentaires (BRAPA) et au Tribunal administratif du
canton de
Vaud.

Lausanne, le 23 juin 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.29/2003
Date de la décision : 23/06/2003
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-06-23;5p.29.2003 ?
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