La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2003 | SUISSE | N°I.243/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 juin 2003, I.243/02


{T 7}
I 243/02

Arrêt du 17 juin 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M.
Wagner

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

S.________, intimé, représenté par Me Philippe Nordmann, avocat, place
Pépinet 4, 1003 Lausanne

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 25 septembre 2001)

Faits :

A.
S. ________, né le 5

février 1960, a travaillé en qualité de maçon au
service
de l'entreprise de maçonnerie X.________ Sàrl. Le 25 juillet 1996, il
...

{T 7}
I 243/02

Arrêt du 17 juin 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M.
Wagner

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

S.________, intimé, représenté par Me Philippe Nordmann, avocat, place
Pépinet 4, 1003 Lausanne

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 25 septembre 2001)

Faits :

A.
S. ________, né le 5 février 1960, a travaillé en qualité de maçon au
service
de l'entreprise de maçonnerie X.________ Sàrl. Le 25 juillet 1996, il
a
présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité.
Dans un rapport médical du 10 août 1996, le docteur A.________ a posé
le
diagnostic de syndrome lombo-vertébral sur hernie discale médiane et
paramédiane gauche en L5-S1, de dyspepsie non-ulcéreuse et de lésion
hépatique non investiguée. Il indiquait que le patient présentait une
incapacité totale de travail depuis le 7 mai 1996 dans son métier de
maçon.
L'assuré est entré en stage au COPAI de Z.________ dès le 10 novembre
1997,
pendant quatre semaines. Selon le rapport d'observation
professionnelle du 19
janvier 1998, S.________, peu limité dans sa gestuelle et gardant de
bonnes
capacités physiques de travail dans des activités légères, devrait
pouvoir
faire face à des activités légères avec des rendements de l'ordre de
75 %.
Sur cette base, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de
Vaud,
dans un rapport intermédiaire du 30 mars 1998, a conclu à un préjudice
économique de 48,5 %.
Dans un projet de décision du 10 novembre 1999, l'office AI a avisé
S.________ qu'il pourrait exercer à un taux de 100 % une activité
professionnelle adaptée à son état de santé, lui permettant d'éviter
le port
de lourdes charges et d'alterner les positions. Se fondant sur un
revenu sans
invalidité de 57'370 fr. (valeur 1998) par année et sur un revenu
annuel
d'invalide de 39'305 fr. 50 (valeur 1998), il concluait à une
invalidité de
31 %.
Le 29 novembre 1999, l'assuré a contesté l'évaluation de son
invalidité, en
invitant l'office AI à surseoir à une décision immédiate.
Le 23 février 2000, l'office AI a informé S.________ qu'on pouvait
raisonnablement exiger de lui, compte tenu de son état de santé,
qu'il exerce
une activité adaptée à 100 % avec plein rendement, et qu'il n'y avait
dès
lors aucune raison de remettre à plus tard sa décision. Retenant une
invalidité de 31 %, il a, par décision datée du même jour, rejeté la
demande.

B.
Par jugement du 25 septembre 2001, le Tribunal des assurances du
canton de
Vaud a admis le recours formé par S.________ contre cette décision,
annulé
celle-ci et renvoyé le dossier à l'office AI pour qu'il procède
conformément
aux considérants, puis rende telle nouvelle décision que de droit.

C.
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud interjette
recours
de droit administratif contre ce jugement, en concluant à
l'annulation de
celui-ci et au renvoi du dossier à l'office AI afin qu'il complète les
informations et rende une nouvelle décision. Il produit un avis
médical du 9
avril 2002 du docteur B.________, médecin du Service médical régional
AI de
T.________.

S. ________ conclut, sous suite de dépens, à l'irrecevabilité du
recours. A
titre subsidiaire, il demande que celui-ci soit rejeté. L'Office
fédéral des
assurances sociales n'a pas déposé d'observations.

Considérant en droit :

1.
En premier lieu, est litigieux le point de savoir si le recourant a un
intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification du
jugement
attaqué, l'intimé étant de l'avis que l'office AI entend uniquement
ne pas
être lié par les considérants de celui-ci et que le recours est dès
lors
irrecevable, puisqu'il s'agit en réalité d'un recours déguisé sur les
motifs.

1.1 En vertu de l'art. 103 let. a OJ a qualité pour recourir
quiconque est
atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection
à ce
qu'elle soit annulée ou modifiée.
L'intérêt digne de protection consiste en l'utilité pratique que
l'admission
du recours apporterait au recourant ou, en d'autres termes, dans le
fait
d'éviter un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou
autre que
la décision attaquée lui occasionnerait. L'intérêt doit être direct et
concret (ATF 127 V 3 consid. 1b et 82 consid. 3a/aa, 125 V 342
consid. 4a et
les références).

1.2 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances (ATF
120 V 237
consid. 1a, 117 V 241 consid. 1; VSI 2001 p. 121 consid. 1; DTA 1995
n° 23 p.
135 s. consid. 1a), le jugement attaqué, qui est une décision de
renvoi, doit
être considéré comme une décision finale. En principe, seul le
dispositif de
la décision est attaquable, non sa motivation. Toutefois, si le
dispositif
renvoie expressément aux considérants, ces derniers deviennent partie
du
dispositif et - dans la mesure où ils sont l'objet du litige -
participent de
la force matérielle. Par conséquent, s'ils ne sont pas attaqués, les
motifs
auxquels renvoie le dispositif lient l'autorité à laquelle la cause
est
renvoyée.
En l'occurrence, les premiers juges ont retenu que l'intimé
présentait une
capacité résiduelle de travail de 75 %. Ils ont renvoyé le dossier à
l'office
AI pour qu'il procède conformément aux considérants, puis rende telle
nouvelle décision que de droit. Le recourant conteste le taux précité
de la
capacité de travail de l'assuré. Il remet ainsi en cause les motifs
de la
décision de renvoi, en demandant que le dossier lui soit renvoyé afin
qu'il
puisse compléter les informations et rendre une nouvelle décision, ce
qui
revient à solliciter le renvoi de la cause pour instruction
complémentaire
dans le sens indiqué par le docteur B.________ dans son avis médical
du 9
avril 2002. Il a dès lors un intérêt digne de protection à la
modification du
jugement attaqué, dont le dispositif renvoie expressément aux
considérants.
Le recours est donc recevable.

2.
2.1La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie,
l'accident,
l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité
physique ou
mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour
pouvoir
établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou
le juge a
besoin de documents que le médecin doit lui fournir. L'appréciation
des
données médicales revêt ainsi une importance d'autant plus grande
dans ce
contexte. La jurisprudence a donc précisé les tâches du médecin, par
exemple
lors de l'évaluation de l'invalidité ou de l'atteinte à l'intégrité,
ou lors
de l'examen du lien de causalité naturelle entre l'événement
accidentel et la
survenance du dommage (ATF 122 V 158 consid. 1b et les références;
Spira, La
preuve en droit des assurances sociales, in : Mélanges en l'honneur de
Henri-Robert Schüpbach, Bâle, 2000, p. 268).
Dans l'assurance-invalidité, l'instruction des faits d'ordre médical
se fonde
sur le rapport du médecin traitant destiné à l'Office AI, les
expertises de
médecins indépendants de l'institution d'assurance, les examens
pratiqués par
les Centres d'observation médicale de l'AI (ATF 123 V 175), les
expertises
produites par une partie ainsi que les expertises médicales ordonnées
par le
juge de première ou de dernière instance (VSI 1997, p. 318 consid. 3b;
Stéphane Blanc, La procédure administrative en assurance-invalidité,
thèse
Fribourg 1999, p. 142). Lors de l'évaluation de l'invalidité, la
tâche du
médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à
indiquer dans
quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de
travailler.
En outre, les données médicales constituent un élément utile pour
déterminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré
(ATF 115 V
134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 s. consid. 1 in fine).

2.2 Le médecin-conseil du Centre d'observation professionnelle
(C.O.P.) de
l'assurance-invalidité, dans son résumé du 9 février 1998, a constaté
ce qui
suit : « (L'assuré) a dû arrêter son travail à cause d'une
lombosciatalgie
(gauche) sur hernie discale. Cette lombosciatalgie a partiellement
répondu à
un traitement conservateur, du moins les irradiations radiculaires.
Il a
toujours des douleurs lombaires, mais intermittentes et une
diminution de
mobilité. Il a des troubles statiques de la colonne vertébrale, mais
très peu
de contractures et il n'y a pas de déficit neurologique. Le port de
charges
est limité et il doit pouvoir changer de position. A l'atelier, on
n'a pas
observé de limitation importante et il garde d'assez bonnes capacités
résiduelles de travail. Dans un travail simple, qui ne nécessite pas
d'apprentissage, évitant le port de charges de plus de 10 -15 kg et
permettant une alternance des positions, il peut reprendre une
activité
professionnelle. Il faut certainement prévoir un réentraînement au
travail et
on peut espérer des rendements de l'ordre de 75 % ».
Se référant à ce document, la juridiction cantonale a conclu à une
capacité
résiduelle de travail de 75 %.

2.3 Dans son recours, l'office AI se fonde sur l'avis médical du
docteur
B.________ du 9 avril 2002 selon lequel, compte tenu des atteintes à
la santé
objectivées et des limitations fonctionnelles qui en résultent, il est
admissible d'envisager une capacité de travail dans une activité
adaptée qui
soit complète, donc une exigibilité médicale complète. Pour ce qui
est de
l'atteinte des articulations coxo-fémorales, non évoquées avant 2001,
les
limitations décrites seraient compatibles avec de telles atteintes si
elles
sont démontrées. Néanmoins, les renseignements médicaux du dossier
étant
plutôt restreints, il y aurait lieu d'envisager de faire le point sur
le plan
locomoteur et radiologique, afin d'avoir une approche exhaustive
permettant
d'établir les atteintes à la santé somatique de façon probante, de
définir
les limitations fonctionnelles de manière plausible, et de se
prononcer sur
l'exigibilité médicale de manière étayée.

2.4 Les diagnostics médicaux laissent subsister des divergences,
spécialement
quant aux conséquences sur la capacité de travail de l'intimé. Selon
un
rapport intermédiaire du 15 mars 1999 du docteur A.________, le taux
d'incapacité de travail n'avait pas changé par rapport à celui qui
était
indiqué dans son rapport médical du 10 août 1996. Dans une lettre du
10 avril
2001 adressée à ce spécialiste en médecine interne, le docteur
C.________,
spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a considéré l'incapacité de
travail comme maçon de 100 %, pour un travail plus léger selon
évolution.
On ne saurait donc, sans autres preuves, confirmer ni infirmer le
taux de
capacité de travail de 75 % retenu par les premiers juges. Il est dès
lors
nécessaire de renvoyer la cause au recourant pour qu'il procède à une
instruction complémentaire sur le point de savoir si et dans quelle
mesure
l'intimé subit une diminution de sa capacité de travail en raison de
ses
problèmes orthopédiques et neurologiques (voir le rapport du Service
de
neurochirurgie de Y.________ du 31 mai 1996 et celui du docteur
D.________ du
16 avril 1998). Il importera également de déterminer si et, cas
échéant, dans
quelles activités l'intimé pourrait être incapable de travailler,
subsidiairement quelles sont les activités exigibles.

3.
L'intimé n'obtenant pas gain de cause, il ne saurait prétendre une
indemnité
de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation
avec l'art.
135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal des
assurances du
canton de Vaud, du 25 septembre 2001, et la décision administrative
litigieuse du 23 février 2000 sont annulés, la cause étant renvoyée à
l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud pour
instruction
complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 17 juin 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.243/02
Date de la décision : 17/06/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-06-17;i.243.02 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award