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10/06/2003 | SUISSE | N°U.231/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 juin 2003, U.231/02


{T 7}
U 231/02

Arrêt du 10 juin 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffière : Mme
Berset

A.________, recourante, représentée par Me Caroline Könemann,
avocate, place
de la Taconnerie 5, 1204 Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Service
juridique,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 11 juin 2002)

Faits :

A.
A. ________ a travaillé pour X.________ du 1er juin 1975 au 31
décembre 1975,
puis du 1er novembre 1978 au ...

{T 7}
U 231/02

Arrêt du 10 juin 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffière : Mme
Berset

A.________, recourante, représentée par Me Caroline Könemann,
avocate, place
de la Taconnerie 5, 1204 Genève,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Service
juridique,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 11 juin 2002)

Faits :

A.
A. ________ a travaillé pour X.________ du 1er juin 1975 au 31
décembre 1975,
puis du 1er novembre 1978 au 31 décembre 1994 en qualité,
successivement,
d'auxiliaire, de dame d'office et d'employée affectée au nettoyage
(1978 à
1988), puis à la préparation (1988 à fin 1994) des plateaux de repas.
Y.________ ayant repris les activités de catering de X.________, elle
a
oeuvré pour cette société du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994,
date à
laquelle elle a résilié son contrat de travail.

Selon un rapport du 29 mai 1998 du docteur B.________, spécialiste en
oto-rhino-laryngologie et médecin traitant depuis 1981, A.________
présentait
à l'époque de la première consultation une perte auditive importante,
d'environ 30 % et souffrait actuellement d'une baisse
(supplémentaire) de
l'ouïe de 40 % sur les deux oreilles, stabilisée.

Une expertise réalisée le 9 juin 1998, à la demande de l'Office
cantonal AI a
confirmé la présence d'une hypoacousie bilatérale de perception, avec
perte
auditive gauche de 59 % et droite de 54 %, correspondant à une grave
surdité,
avec atteinte à l'intégrité.

Le 9 juillet 1998, la prénommée a annoncé à la Caisse nationale suisse
d'assurance en cas d'accidents (CNA) qu'elle souffrait d'une surdité
aiguë
des deux oreilles attribuable à l'exposition au bruit pendant les
années où
elle avait travaillé dans cette entreprise. Il résulte de ses
déclarations et
des pièces annexées qu'au moment de son engagement chez X.________,
elle a
subi une visite médicale approfondie qui n'a pas révélé la présence de
lésions auditives. L'état de ses oreilles s'est dégradé de manière
drastique
au cours de ses années d'activité professionnelle, ainsi qu'il
ressort du
rapport du 29 mai 1998 du docteur B.________. Elle a été dans
l'incapacité de
travailler entre 1995 et 1997 pour cause de dépression qu'elle a
attribué à
ses problèmes auditifs.

Le 18 novembre1998, A.________ a été entendue par la CNA qui a confié
une
mission d'expertise au docteur C.________, spécialiste en
oto-rhino-laryngologie et en médecine du travail, de sa division de
médecine
du travail.

Se fondant sur le rapport du 24 juin 1999 de l'expert, la CNA a
rejeté, par
décision du 3 août 1999, la demande de prestations de l'assurée, au
motif que
ses troubles auditifs n'étaient pas dus exclusivement ou d'une manière
nettement prépondérante à l'exercice de son activité professionnelle.

Par décision sur opposition du 9 août 2000, la CNA a derechef rejeté
la
demande de prestations dont elle était saisie.

B.
Le recours de l'assurée dirigé contre cette décision a été rejeté par
jugement du 11 juin 2002 du Tribunal administratif de la République
et canton
de Genève.

C.
A.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
elle demande l'annulation. Elle conclut, principalement, à ce qu'il
soit
constaté que sa surdité est une maladie professionnelle en
sollicitant le
renvoi de la cause à la CNA pour qu'elle octroie les prestations
légales et,
subsidiairement, au renvoi de la cause à la cour cantonale pour
instruction
complémentaire. Plus subsidiairement, elle demande que lui soit
octroyée la
faculté de prouver par toutes voies de droit, notamment par audition
de
témoins et expertises, les faits allégués dans son écriture.

La CNA conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales
a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
Le litige porte sur le droit de la recourante à des prestations
d'assurance à
charge de l'intimée pour les troubles auditifs dont elle souffre, au
titre de
maladie professionnelle.

2.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances
sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003,
entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-accidents. Cependant, le cas d'espèce reste régi par les
dispositions de la LAA en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard
au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur
au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V
467
consid. 1). En outre, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la
légalité
des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait
existant
au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366
consid. 1b).

3.
3.1La recourante soutient tout d'abord que la juridiction cantonale a
violé
son droit d'être entendue, en menant une instruction dans le plus
grand
secret et en refusant d'ordonner l'audition de témoins et l'expertise
médicale qu'elle avait demandées. D'ordre formel, ce grief doit être
examiné
en premier lieu, car son admission pourrait amener le tribunal à
renvoyer la
cause sans en examiner le fond (ATF 127 V 437 consid. 3d/aa, 126 V 132
consid. 2b, 124 V 92 consid. 2 et les arrêts cités).

3.2 La jurisprudence, rendue sous l'empire de l'art. 4 aCst. et qui
s'applique également à l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 127 I 56 consid. 2b,
127 III
578 consid. 2c, 126 V 130 consid. 2a), a déduit du droit d'être
entendu, en
particulier, le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une
décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves
quant
aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui
d'avoir accès
au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en
prendre
connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 126 I 16 consid.
2a/aa,
124 V 181 consid. 1a, 375 consid. 3b et les références).

3.3 La recourante fait grief à la juridiction cantonale d'avoir pris
contact,
d'une part, avec l'office cantonal de l'inspection des relations de
travail
pour savoir s'il disposait d'informations concernant les bruits
générés par
les installations situées dans les locaux où travaillait A.________
et,
d'autre part, avec Y.________ pour obtenir des renseignements sur les
machines utilisées à l'époque, notamment sur leur niveau sonore.

Il ressort des chiffres 15 et 16 du jugement cantonal que le juge
cantonal a
cherché à compléter l'instruction - ce dont il a avisé la recourante
qui ne
peut se plaindre d'une procédure menée secrètement - et que ses
démarches ont
été vaines. Il n'y a donc pas eu une véritable administration des
preuves,
les tentatives d'instruction étant au demeurant sans influence sur
l'issue de
la procédure. Dès lors que l'on ne voit pas quelle autre mesure le
juge
cantonal aurait dû prendre et que la recourante n'a pas fait de
proposition
sur ce point, le grief tiré de la violation du droit d'être entendue
tombe à
faux dans la mesure où il vise des preuves requises d'office et non
administrées.

En tout état de cause, le Tribunal administratif a tenu une audience
le 26
mars 2001, au cours de laquelle tant la recourante que son médecin
traitant,
la doctoresse D.________, se sont exprimées, de sorte que ce grief
est mal
fondé pour ce motif aussi.

3.4 La recourante reproche ensuite à la juridiction cantonale de
n'avoir pas
procédé à l'audition de témoins, en l'occurrence de collègues de
travail sur
la question du caractère excessif du bruit à son ancienne place de
travail.

3.4.1 Si l'administration ou le juge, se fondant sur une appréciation
consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles
ils
doivent procéder d'office, sont convaincus que certains faits
présentent un
degré de vraisemblance prépondérante et que d'autres mesures
probatoires ne
pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu
d'administrer
d'autres preuves (appréciation anticipée des preuves; Kieser, Das
Verwaltungsverfahren in der Sozialversicherung, p. 212, n° 450;
Kölz/Häner,
Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2e éd.,
p. 39,
n° 111 et p. 117, n° 320; Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e
éd., p.
274; cf. aussi ATF 122 II 469 consid. 4a, 122 III 223 consid. 3c, 120
Ib 229
consid. 2b, 119 V 344 consid. 3c et la référence). Une telle manière
de
procéder ne viole pas le droit d'être entendu selon l'art. 29 al. 2
Cst. (SVR
2001 IV n° 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous
l'empire de
l'art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 94 consid. 4b, 122 V
162
consid. 1d et l'arrêt cité).

3.4.2 Les dépositions écrites de certains ex-collègues de la
recourante sur
le caractère excessif du bruit figurent au dossier. Elles ne sont
toutefois
pas propres à apporter la preuve des faits pertinents. En effet, ces
témoignages écrits rapportent pour l'essentiel des impressions
subjectives,
dont la valeur probante est forcément limitée lorsqu'il s'agit de
mesurer de
manière précise le niveau acoustique au lieu de travail.

Dans ces circonstances, et par appréciation anticipée des preuves (cf.
consid. 3.4.1 ci-dessus), les premiers juges étaient fondés à
considérer les
témoignages requis par la recourante comme superflus dès lors qu'ils
n'étaient pas de nature à influer sur l'issue de la présente cause.

3.5 La recourante fait également grief au tribunal administratif de
n'avoir
pas ordonné l'expertise médicale qu'elle a sollicitée en cours de
procédure
et d'avoir fondé son opinion sur le rapport du 24 juin 1999 du docteur
C.________ qui ne l'a pas examinée personnellement.

Ce moyen soulève la question de la valeur probante du rapport du
docteur
C.________, qui ne saurait être mise en doute dans le cas d'espèce
(cf.
consid. 5 ci-après). Quant au reproche spécifique adressé à ce
praticien, il
est mal fondé dès lors que, selon la jurisprudence, une expertise
médicale
établie sur la base d'un dossier a valeur probante pour autant que
celui-ci
contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se
fondent sur
un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 no U 438 p. 346 consid.
3d), ce
qui est le cas des rapports des docteurs B.________ et D.________.

Par ailleurs, le dossier est bien documenté du point de vue médical et
acoustique: une expertise médicale n'aurait pas permis d'apporter de
nouveaux
éléments, de sorte que par appréciation anticipée des preuves (cf.
consid.
3.4.1), les premiers juges étaient également fondés à ne pas donner
suite à
la demande de mise en oeuvre d'une expertise médicale.

Sur le vu de ce qui précède, on ne saurait reprocher à la juridiction
cantonale d'avoir violé le droit d'être entendue de la recourante.

4.
4.1Selon l'art. 9 al. 1 LAA, sont réputées maladies professionnelles
les
maladies dues exclusivement ou de manière prépondérante, dans
l'exercice de
l'activité professionnelle, à des substances nocives ou à certains
travaux.
Le Conseil fédéral établit la liste de ces subs- tances ainsi
que celle
de ces travaux et des affections qu'ils provoquent. Se fondant sur
cette
délégation de compétence, ainsi que sur l'art. 14 OLAA, le Conseil
fédéral a
dressé à l'annexe I de l'OLAA la liste des substances nocives, d'une
part, et
la liste de certaines affections, ainsi que des travaux qui les
provoquent,
d'autre part.

Selon la jurisprudence, l'exigence d'une relation prépondérante est
réalisée
lorsque la maladie est due pour plus de 50 % à l'action d'une
substance
nocive mentionnée dans la première liste, ou que, dans la mesure où
elle
figure parmi les affections énumérées dans la seconde liste,
elle a
été causée à raison de plus de 50 % par les travaux indiqués en
regard. En
revanche, l'exigence d'une relation exclusive signifie que la maladie
professionnelle est due pratiquement à 100 % à l'action de la
substance
nocive ou du travail indiqué (ATF 119 V 200 consid. 2a et la
référence; RAMA
2000 no. U 398 p. 333 et sv consid. 3).

4.2 Aux termes de l'art. 9 al. 2 LAA, sont aussi réputées maladies
professionnelles les autres maladies dont il est prouvé qu'elles ont
été
causées exclusivement ou de manière nettement prépondérante par
l'exercice de
l'activité professionnelle. D'après la jurisprudence, l'exigence d'une
relation exclusive ou nettement prépondérante est remplie lorsque la
maladie
est due pour 75 % au moins à l'exercice d'une telle activité (ATF 126
V 186
consid. 2b, 119 V 201 consid. 2b et la référence).

4.3 Dans le cas d'espèce, ainsi que la recourante le fait observer,
le litige
doit être tranché en application des art. 9 al. 1 LAA et 14 OLAA, y
compris
du ch. 2 let. a de l'annexe I à l'OLAA (comp. RAMA 2000 no. U 398 p.
330 et
ss). Il s'ensuit que seule est requise une cause exclusive ou
prépondérante
(cf. Scartazzini, Les rapports de causalité dans le droit suisse de la
sécurité sociale, thèse Genève 1991, p. 96 ss). C'est dire que les
troubles
auditifs de la recourante doivent être attribuables à raison de plus
de 50 %
à l'activité professionnelle qu'elle a exercée pour X.________ et
Y.________
pour être tenus comme maladie professionnelle.

5.

Les premiers juges ont considéré, en bref, qu'il n'y avait pas de
motifs de
s'écarter des conclusions du médecin de la CNA selon lequel, d'une
part, la
recourante n'a pas été exposée à des bruits dépassant la valeur
limite du
bruit dangereux pour l'ouïe correspondant à un niveau acoustique
continu
équivalant à 85 décibels et, d'autre part, le lien de causalité
naturelle
entre l'activité professionnelle et les troubles auditifs est
seulement
possible.

Pour sa part, la recourante soulève à l'égard de ce rapport
différents griefs
qui seront examinés dans les considérants qui suivent.

5.1 Selon la jurisprudence, le juge peut accorder valeur probante aux
rapports et expertises établis par les médecins de la CNA aussi
longtemps que
ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs
conclusions sont
sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de
contradictions et
qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé.
Le
simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un
rapport de
travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son
appréciation
ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en
présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de
l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme
objectivement
fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans
le droit
des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences
sévères
quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 353 sv. consid. 3b/ee).

5.2 En ce qui concerne, par ailleurs, la valeur probante d'un rapport
médical, ce qui est déterminant c'est que les points litigieux aient
fait
l'objet d'une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des
examens
complets, qu'il prenne également en considération les plaintes
exprimées par
la personne examinée, qu'il ait été établi en pleine connaissance de
l'anamnèse, que la description du contexte médical et l'appréciation
de la
situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de
l'expert
soient dûment motivées. Au demeurant, l'élément déterminant pour la
valeur
probante n'est ni l'origine du moyen de preuve ni sa désignation comme
rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V
352
consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références).

5.3 Il ressort de l'expertise que la valeur limite du bruit dangereux
pour
l'ouïe correspond à un niveau acoustique de 85 décibels et qu'entre
85 et 87
décibels il y a une plage limite de mise en danger de l'ouïe, où des
lésions
importantes sont susceptibles de se produire s'il y a une exposition
au bruit
pendant des dizaines d'années. Selon les investigations techniques
réalisées,
l'assurée n'a jamais été exposée à un bruit dangereux dans son
activité
professionnelle. Plus précisément, les investigations réalisées à la
demande
de l'expert par un ingénieur de sécurité au service acoustique de la
CNA ont
mis en évidence que A.________ avait été exposée à un niveau sonore
de 83
décibels entre 1978 et 1988, si l'on tient aux mesures effectuées à
Zurich,
après légère diminution pour tenir compte du fait que la capacité de
traitement des installations de l'aéroport de Zurich était plus
importante
que celle de l'aéroport de Genève. Entre 1988 et 1995, l'exposition
au bruit
avait atteint un maximum de 80 décibels. Au surplus, les courbes
auditives de
l'intéressée n'étaient pas typiques de lésions dues à une exposition
au
bruit, car toutes les fréquences étaient atteintes de manière
identique.

5.4 L'expertise, qui émane d'un spécialiste reconnu, procède d'une
étude
détaillée du contexte médical et professionnel déterminant. L'expert
a, en
particulier, organisé une visite au lieu de travail de la recourante
et
examiné l'ensemble des pièces médicales figurant au dossier, ainsi
que les
autres documents qui lui ont été remis par l'intéressée. Ses
conclusions sont
dûment motivées et convaincantes de sorte que, conformément à la
jurisprudence rappelée aux consid. 5.1 et 5.2 ci-dessus, on ne
saurait faire
grief aux premiers juges de leur avoir reconnu une pleine valeur
probante.

On doit dès lors retenir que la recourante a été exposée à un niveau
sonore
de 83 décibels de 1979 à 1988 et de 80 décibels de 1988 à 1995 et que
l'exposition à ces valeurs de bruit au cours de ces douze années de
travail
n'est pas susceptible de produire une lésion importante de l'ouïe. Par
ailleurs, le type de surdité de la recourante et le tracé des courbes
audiométriques ne sont pas typiques d'une perte auditive due à une
exposition
au bruit durant le travail.

5.5 Indépendamment des autres conclusions de l'expert, la valeur
limite du
bruit dangereux pour l'ouïe (85 décibels) résulte d'études
scientifiques
(Schönenberger, Mehrtens, Valentin, Arbeitsunfall und
Berufskrankheit, 4e ed.
Berlin 1998, p. 329 et ss, not. 337 et 338 et les citations figurant
aux
notes 60 et ss) et elle n'est pas mise en doute par la recourante.
Or, il
n'est pas établi que cette limite ait été dépassée au lieu de travail
de
l'assurée, de sorte que pour ce motif déjà l'existence d'une maladie
professionnelle est exclue. Certes un document de la CNA du 9 février
1999
mentionne que l'assurée a été exposée à un niveau sonore d'une
moyenne de 89
décibels pendant seize ans. Il s'agissait toutefois d'une appréciation
sommaire donnée sans examen du poste de travail. Ainsi que l'explique
de
manière convaincante un ingénieur de sécurité de la CNA, cette
première
appréciation sommaire avait été corrigée à la baisse après
vérification sur
place des appareils de travail. Il n'y a ainsi pas de raison de
remettre en
cause l'appréciation technique du 19 mai 1999 sur laquelle s'est
fondé le
docteur C.________.

5.6 Au demeurant, même si on admettait que la recourante a été
exposée au
cours de son activité professionnelle à des niveaux sonores égaux ou
supérieurs à 85 décibels, le recours devrait être rejeté au motif que
l'origine professionnelle, pour plus de 50 %, de ses lésions
auditives doit
être niée pour d'autres motifs.

En effet, quoi qu'en dise la recourante, aussi bien ses médecins
traitants
que le docteur C.________ émettent des doutes concernant l'origine
professionnelle de ses troubles auditifs. Pour le docteur B.________,
il
était ainsi difficile de dire dans quelle mesure sa patiente aurait
été
affectée si elle n'avait pas travaillé dans le bruit, l'exercice de
son
emploi n'ayant pas amélioré la situation (rapport du 29 mai 1998). La
doctoresse D.________, pour sa part, a déclaré que la surdité de sa
patiente
avait pu être aggravée par son activité professionnelle, mais qu'il
était
difficile d'affirmer que son problème était dû exclusivement à
l'exposition
au bruit (rapport du 25 octobre 1999). Lors de l'audience du 26 mars
2001,
elle a précisé que la surdité dont souffre l'intéressée pouvait
provenir de
causes multiples et survenir à n'importe quel âge, sans cause
extérieure ou
avec des expositions au bruit; le lien de causalité entre le bruit et
la
lésion devait être considéré comme moyen.

Dès lors que les avis médicaux font état, dans le meilleur des cas,
d'un
faisceau de causes, aucune d'entre elles ne peut être considérée comme
prépondérante (à raison de plus de 50 %; cf. consid. 4.1 et 4.3
supra).
Partant, on ne saurait admettre, au degré de vraisemblance
prépondérante
requis (ATF 119 V 337 consid. 1), que les lésions auditives de la
recourante
sont attribuables de manière exclusive ou prépondérante à l'activité
professionnelle qu'elle a exercée pour X.________ puis Y.________. Il
s'ensuit que sa pathologie ne revêt pas le caractère d'une maladie
professionnelle.

Le recours se révèle dès lors mal fondé dans toutes ses conclusions.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif de la
République et canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 10 juin 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.231/02
Date de la décision : 10/06/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-06-10;u.231.02 ?
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