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10/06/2003 | SUISSE | N°2P.141/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 juin 2003, 2P.141/2003


2P.141/2003/RED/elo
{T 0/2}

Arrêt du 10 juin 2003
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Wurzburger, Président,
Hungerbühler et Müller.
Greffière: Mme Revey.

X. ________, recourant,
représenté par Me Christine Sordet, avocate, rue de la Croix-d'Or 10,
1204
Genève,

contre

Département de justice, police et sécurité du canton de Genève, rue de
l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3962, 1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève,
rue des Chaudronniers 3, 1204 Genève.



art. 29 Cst. (refus d'une carte professionnelle de chauf- feur
indépendant et
retrait du permis d'exploiter un se...

2P.141/2003/RED/elo
{T 0/2}

Arrêt du 10 juin 2003
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Wurzburger, Président,
Hungerbühler et Müller.
Greffière: Mme Revey.

X. ________, recourant,
représenté par Me Christine Sordet, avocate, rue de la Croix-d'Or 10,
1204
Genève,

contre

Département de justice, police et sécurité du canton de Genève, rue de
l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3962, 1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève,
rue des Chaudronniers 3, 1204 Genève.

art. 29 Cst. (refus d'une carte professionnelle de chauf- feur
indépendant et
retrait du permis d'exploiter un ser- vice de taxis),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal adminis- tratif du
canton
de Genève du 15 avril 2003.

Faits:

A.
X. ________, né en 1952, a obtenu en 1978 la carte professionnelle de
chauffeur de taxis. En 1981, 1989 et 1991, il s'est vu successivement
transférer trois permis de stationnement, qu'il a acquis de leurs
titulaires
pour un prix total de 255'000 fr. (auquel s'ajouteraient selon ses
dires des
dessous-de-table pour 105'000 fr.). Il a de même reçu l'autorisation
d'exploiter un service de taxis, activité qu'il a poursuivie pendant
plusieurs années.

Parallèlement, X.________ s'est largement investi dans maintes
associations
de chauffeurs de taxis, en participant en outre à l'élaboration de
projets de
loi relatifs à cette profession. A partir de 1995 toutefois, il s'est
quelque
peu découragé, négligeant de mettre ses propres comptes en ordre,
accumulant
les dettes et cessant de s'acquitter de la totalité de ses charges
sociales.

B.
A la suite de l'entrée en vigueur le 1er juin 1999 de la loi cantonale
genevoise du 26 mars 1999 sur les services de taxis (LTaxis; RS GE/H
1 30),
X.________ a sollicité par requêtes du 24 mars 2000 la carte
professionnelle
de chauffeur indépendant ainsi que l'autorisation d'exploiter un
service de
taxis avec permis de stationnement.

Par décision du 14 février 2002, le Département cantonal genevois de
justice,
police et sécurité a rejeté les demandes précitées, a retiré à
l'intéressé
l'autorisation d'exploiter un service de taxis avec permis de
stationnement
et l'a enjoint de déposer les plaques de ses taxis.

Statuant sur recours de X.________ le 15 avril 2003, le Tribunal
administratif a confirmé le prononcé du Département cantonal.
S'agissant
d'une part de la carte professionnelle de chauffeur indépendant, les
art. 1
et 5 al. 2 lettre c LTaxis commandaient que le requérant offre les
garanties
d'une activité irréprochable, à savoir qu'il produise notamment,
selon l'art.
3 al. 1 lettre c du règlement d'exécution du 8 décembre 1999 de
ladite loi
(RTaxis; RS/GE H 1 30.01), une attestation de la caisse de
compensation
relative à son affiliation comme indépendant et au paiement des
cotisations.
Or, X.________ n'avait pas été en mesure de fournir un tel document.
En ce
qui concernait d'autre part l'autorisation d'exploiter un service de
taxis,
l'art. 6 al. 2 lettre b LTaxis exigeait que le requérant soit
solvable et
qu'il dépose, selon l'art. 4 al. 1 lettre b RTaxis, une attestation de
l'office des poursuites et faillites certifiant cette solvabilité. Or,
X.________ ne tenait plus de comptabilité depuis 1995, n'avait pas
payé
l'intégralité des cotisations dues à la caisse de compensation, et
avait fait
l'objet d'une taxation d'office pour les impôts et la TVA. Enfin, le
Tribunal
administratif relevait dans sa partie en fait que des actes de défaut
de
biens avaient été délivrés à l'encontre de l'intéressé, à hauteur de
262'233
fr. à la fin septembre 2002.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif du 15
avril 2003
et de renvoyer la cause à cette autorité "pour nouvelle décision
après avoir
procédé à l'audition de X.________ et de ses témoins conformément à
son offre
de preuve." Il sollicite en outre l'octroi de l'effet suspensif au
recours.

Il n'a pas été requis d'observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière
instance
cantonale, le recours est recevable au regard des art. 84 ss OJ.

Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, des faits ou moyens de
preuve
nouveaux ne peuvent être produits à l'appui d'un recours de droit
public (ATF
124 I 208 consid. 4b; 118 Ia 20 consid. 5a, 369 consid. 4d; 118 III 37
consid. 2a; Walter Kälin, Das Verfahren der staatsrechtlichen
Beschwerde, 2e
éd., Berne 1994, p. 369 ss). Aussi les pièces déposées par le
recourant pour
la première fois devant le Tribunal fédéral, soit notamment la
comptabilité
1995-2001, ne peuvent-elles être prises en considération. Au
demeurant, ces
documents ne conduiraient de toute façon pas à admettre le recours,
conformément aux considérants qui suivent.

2.
2.1Le recourant reproche au Tribunal administratif d'avoir écarté ses
offres
d'audition de témoins et refusé de l'entendre lui-même en comparution
personnelle. Il se prévaut de son droit d'être entendu conféré par
les art.
19 (recte: 18) et 20 de la loi cantonale genevoise du 12 septembre
1985 sur
la procédure administrative (LPA; RS/GE E 5 10), ainsi que par l'art.
29 al.
2 Cst.

2.2 Le contenu du droit d'être entendu est déterminé en premier lieu
par les
dispositions cantonales de procédure, dont le Tribunal fédéral ne
contrôle
l'application et l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire;
dans tous
les cas, l'autorité cantonale doit cependant respecter les garanties
minimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst., dont le Tribunal fédéral
examine
librement le respect (ATF 127 III 193 consid. 3; 126 I 15 consid. 2a;
125 I
257 consid. 3a; 122 II 464 consid. 3d).

En l'espèce, il n'apparaît pas que les dispositions de droit cantonal
invoquées par le recourant assureraient une protection plus étendue
que celle
garantie par l'art. 29 al. 2 Cst. Du reste, le recourant ne l'établit
ni ne
le prétend, pas plus qu'il ne démontre que la législation cantonale
aurait
été appliquée de manière arbitraire. Dans ces conditions, il suffit
d'examiner sous l'angle de l'art. 29 al. 2 Cst. les griefs soulevés.

2.3 L'art. 29 al. 2 Cst. comporte le droit pour l'intéressé d'obtenir
qu'il
soit donné suite à ses offres de preuve, lorsqu'elles sont présentées
en
temps utile et dans les formes requises. Encore faut-il que les
preuves
fournies soient aptes à établir le fait à prouver et que celui-ci soit
pertinent, à savoir de nature à influer sur le sort de la décision à
prendre.
De surcroît, l'art. 29 al. 2 Cst. n'empêche pas le juge de refuser
d'administrer une mesure probatoire lorsqu'au terme d'une appréciation
anticipée non arbitraire des preuves proposées, il parvient à la
conclusion
que les faits pertinents sont déjà établis et qu'un résultat, même
favorable
au recourant, de la mesure probatoire sollicitée ne l'amènerait pas à
modifier sa conviction (ATF 124 I 208 consid. 4a, 241 consid. 2; 124
V 372
consid. 3b; 122 II 464 consid. 4a; 106 Ia 161 consid. 2b).

2.3.1 En l'occurrence, le recourant soutient que les témoins requis,
à savoir
des personnes disposées à l'aider financièrement ainsi que son
comptable,
entendaient attester de sa capacité retrouvée à remplir les conditions
prévues par la loi cantonale sur les services de taxis. Ces auditions
s'avéraient ainsi décisives au regard de la décision à prendre, si
bien que
le Tribunal administratif était tenu d'y procéder.

A l'appui, le recourant expose encore que sa situation découle non
seulement
des changements survenus dans sa profession - eux-mêmes issus de
l'adoption
en 1992 de l'initiative populaire "Pour des taxis égaux", puis de
l'introduction de la nouvelle loi du 26 mars 1999 -, mais aussi de
l'état
dépressif dont il a souffert ensuite de ces restructurations, dont les
résultats s'avéraient d'autant plus décevants à ses yeux qu'il s'était
largement investi dans l'élaboration des nouvelles législations. Il
précise
notamment que la libéralisation intervenue a entraîné la gratuité des
permis
de stationnement, si bien que les concessions acquises au prix fort ¿
et qui
représentaient son fond de prévoyance - ont perdu toute valeur, hormis
l'indemnité prévue par les dispositions transitoires de la nouvelle
loi sur
les services de taxis (art. 38), s'élevant au plus à 40'000 fr. par
concession. Le recourant déclare cependant s'être partiellement
rétabli
depuis l'été 2002, ainsi qu'en atteste un certificat médical du 13
janvier
2003, et se trouver maintenant en mesure d'assainir sa situation. Il
relève
du reste avoir réussi à remettre à jour sa comptabilité 1995-2001,
notamment
en ce qui concerne les charges sociales.

2.3.2 Il sied d'examiner si le Tribunal administratif pouvait, sans
tomber
dans l'arbitraire, considérer les témoignages sollicités comme
impropres à
démontrer que le recourant remplissait désormais les conditions
déterminant
l'octroi d'une carte professionnelle de chauffeur indépendant ou de
l'autorisation d'exploiter un service de taxis.

S'agissant de la carte professionnelle de chauffeur indépendant, le
Tribunal
administratif l'a refusée faute pour l'intéressé d'avoir produit une
attestation de la caisse de compensation. Les auditions requises étant
étrangères à un tel document, on ne discerne pas en quoi il serait
insoutenable d'y renoncer. Par ailleurs, les pièces comptables censées
démontrer le paiement des charges sociales, déposées pour la première
fois
devant le Tribunal fédéral, n'émanent pas de la caisse de
compensation, de
sorte qu'elles ne respectent de toute façon pas l'art. 3 al. 1 lettre
c
RTaxis.
En ce qui concerne la demande d'autorisation d'exploiter un service
de taxis,
le Tribunal administratif l'a rejetée en raison de l'insolvabilité du
recourant. Or, celui-ci ne démontre pas qu'il serait arbitraire de
tenir les
témoignages réclamés pour inaptes à établir qu'il disposait désormais
des
ressources nécessaires. En particulier, le recourant ne conteste pas
avoir
fait l'objet d'actes de défaut de biens à hauteur de 262'233 fr. à la
fin
septembre 2002 et n'indique pas, pour le moins pas de manière
suffisamment
convaincante, en quoi et dans quelle mesure les personnes prêtes à
l'assister
financièrement lui permettraient d'éponger de telles dettes. De plus,
le
rétablissement de sa comptabilité n'était pas achevé lorsque l'arrêt
attaqué
a été rendu, de sorte que le Tribunal administratif était fondé à
écarter
l'audition du comptable. Au demeurant, le dernier bilan de son
entreprise
établi au 31 décembre 2001 suscite quelques doutes, puisque les
concessions y
sont estimées à 255'000 fr., soit à leur prix officiel d'acquisition,
alors
que le recourant les évalue lui-même à 120'000 fr. (3 x 40'000 fr.)
au mieux.

Ce moyen s'avère ainsi mal fondé.

2.4 L'art. 29 al. 2 Cst. comprend également le droit pour l'intéressé
de
s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment (cf.
ATF 127
I 54 consid. 2b; 124 I 241 consid. 2; 124 II 132 consid. 2b et les
arrêts
cités). Toutefois, cette garantie constitutionnelle ne confère pas le
droit
d'être entendu oralement, sauf en présence de circonstances
particulières
(ATF 125 I 209 consid. 9b; 122 II 464 consid. 4c [où de telles
conditions
exceptionnelles ont été admises]; 117 II 132 consid. 3b; Alfred
Kölz/Isabelle
Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungs-rechtspflege des Bundes,
2e éd.,
Zurich 1998, nos 150 et 312; cf. aussi ATF 128 I 346 consid. 4.1).

En l'occurrence, le recourant n'établit pas que sa situation
imposerait
exceptionnellement aux autorités de l'entendre oralement.
Contrairement à ce
qu'il soutient, on ne discerne pas en quoi les causes de son
endettement,
soit notamment le fait qu'il se soit consacré à la défense des
intérêts
d'autrui plutôt qu'aux siens propres, constitueraient des
circonstances
particulières commandant une audition personnelle. Pour le surplus, le
recourant ne conteste pas avoir pu se déterminer suffisamment par
écrit, de
sorte que son droit de s'exprimer été respecté. Ce grief doit donc
également
être rejeté.

3.
Vu ce qui précède, le recours est manifestement mal fondé et doit
être traité
selon la procédure simplifiée de l'art. 36a OJ. Succombant, le
recourant doit
supporter les frais judiciaires et n'a pas droit à des dépens (art.
156 al. 1
OJ, 159 al. 1 OJ a contrario). Avec le prononcé au fond, la demande
d'effet
suspensif devient sans objet.

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 1'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire du
recourant, au
Département de justice, police et sécurité ainsi qu'au Tribunal
administratif
du canton de Genève.

Lausanne, le 10 juin 2003

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.141/2003
Date de la décision : 10/06/2003
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-06-10;2p.141.2003 ?
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