La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/06/2003 | SUISSE | N°2A.17/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 juin 2003, 2A.17/2003


{T 0/2}
2A.17/2003 /viz

Arrêt du 10 juin 2003
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Wurzburger, Président, Merkli et Meylan, Juge suppléant.
Greffier: M. Vianin.

A. A.________,
recourante, représentée par Me Jörn-Albert Bostelmann, avocat, avenue
Ritz
31, case postale 2040, 1950 Sion 2,

contre

Service cantonal des contributions du canton du Valais, bâtiment
Planta 577,
avenue de la Gare 35,
1951 Sion,
Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du
Valais,

Palais du Gouvernement,
1951 Sion.

Impôt fédéral direct 1999/2000,

recours de droit administratif contre la ...

{T 0/2}
2A.17/2003 /viz

Arrêt du 10 juin 2003
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Wurzburger, Président, Merkli et Meylan, Juge suppléant.
Greffier: M. Vianin.

A. A.________,
recourante, représentée par Me Jörn-Albert Bostelmann, avocat, avenue
Ritz
31, case postale 2040, 1950 Sion 2,

contre

Service cantonal des contributions du canton du Valais, bâtiment
Planta 577,
avenue de la Gare 35,
1951 Sion,
Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du
Valais,
Palais du Gouvernement,
1951 Sion.

Impôt fédéral direct 1999/2000,

recours de droit administratif contre la décision de la Commission
cantonale
de recours en matière fiscale
du canton du Valais du 20 novembre 2002.

Faits:

A.
Par jugement du 28 octobre 1997, le Tribunal du district de Sion a
prononcé
le divorce des époux B.A.________ et A.A.________, et homologué une
convention sur les effets accessoires. Celle-ci prévoyait notamment
que
B.A.________ verserait en mains de son ex-épouse une contribution
mensuelle
de 400 fr. pour chacun de leurs trois enfants, jusqu'à leur
majorité, sans
indexation, et que A.A.________ paierait à son ex-époux le montant de
156'400
fr. au titre de la liquidation du régime matrimonial.
En parallèle, les ex-conjoints ont adopté une « convention interne »,
non
datée, dont l'art. 2 a la teneur suivante:
« Les Fr. 156'400.- résultant de la liquidation du régime matrimonial
seront
payés par Mme A.A.________ 'par renoncement' à encaisser les Fr.
400.- dus
mensuellement par son époux B.A.________ pour l'entretien de chacun
de leurs
enfants, étant précisé que, les créanciers n'étant pas les mêmes, Mme
A.A.________ renonce à encaisser pour ses trois enfants les montants
mensuels
de Fr. 400.- par enfant, et affectera directement, en prélèvement sur
ses
propres revenus, cette somme de Fr. 400.- par enfant pour l'entretien
de ses
trois enfants, de telle sorte que les intérêts de ses enfants ne sont
pas
prétérités. Les montants seront quittancés chaque mois. »
L'art. 3 de cette convention prévoit en outre que, pour le cas où la
garde
serait retirée à A.A.________, un décompte serait alors arrêté au
jour en
question, en tenant compte des montants « compensés » conformément à
l'art.
2.
Dans sa déclaration d'impôt pour la période fiscale 1999-2000,
A.A.________
n'a pas fait figurer les contributions d'entretien concernant ses
enfants. En
outre, elle a déduit un montant de 7'200 fr. (600 fr. par mois)
qu'elle
versait à sa mère, en contrepartie, selon ses dires, de la
renonciation
temporaire par cette dernière à un droit d'habitation sur sa maison.

B.
Par décision, confirmée sur réclamation le 23 janvier 2001, la
Commission
d'impôt de district pour la commune de Sion (ci-après: la Commission
de
district) a, d'une part, imposé les contributions d'entretien et,
d'autre
part, refusé de déduire le montant de 7'200 fr.

C.
Le 21 novembre 2001, la Commission de recours en matière fiscale du
canton du
Valais (ci-après: la Commission de recours) a rejeté le recours
interjeté par
l'intéressée contre cette décision. Elle a considéré en bref que la
convention interne n'empêchait pas les rentes d'être imposables chez
le
parent gardien. Concernant la déduction des sommes que A.A.________
versait à
sa mère, l'existence d'un droit d'habitation en faveur de celle-ci
n'était
pas établie. La Commission de recours a en revanche constaté que
l'intéressée
avait reçu de ses parents un montant de 300'000 fr. à titre
d'avancement
d'hoirie et admis que celui-ci constituait la contre-prestation de la
rente
en question. Elle a dès lors appliqué la règle selon laquelle, dans
le cas où
le débirentier a obtenu une contre-prestation, la rente ne peut être
défalquée qu'à partir du moment où la somme des arrérages excède le
montant
de la contre-prestation. Cette condition n'étant pas réalisée en
l'espèce, la
déduction devait être refusée.

A. A.________ a déféré cette décision au Tribunal fédéral (s'agissant
de
l'impôt fédéral direct; 2A.525/2002) et au Tribunal cantonal du
canton du
Valais (concernant les impôts cantonaux et communaux). Dans ce
dernier cas,
elle a soulevé le grief qu'un des membres de la Commission de recours
avait
omis de se récuser.
Statuant dans une nouvelle composition le 20 novembre 2002, soit
avant même
l'envoi d'une réponse, la Commission de recours a pris sur réexamen
une
nouvelle décision annulant celle du 21 novembre 2001. A l'instar du
prononcé
antérieur, et pour des motifs identiques, elle a rejeté le recours et
fixé
les frais de justice à 860 fr. 70, sans allouer de dépens.
Par ordonnance du 6 février 2003, le Président de la Cour de céans a
constaté
que le recours dirigé contre la décision du 21 novembre 2001 était
devenu
sans objet et rayé l'affaire du rôle. L'émolument judiciaire pour la
procédure fédérale a été mis à la charge de l'Etat du Valais, de même
qu'une
indemnité à titre de dépens de 1'500 fr. à verser à la recourante.

D.
Agissant le 13 janvier 2003 par la voie du recours de droit
administratif,
A.A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et
dépens,
d'annuler la décision de la Commission de recours du 20 novembre 2002
et, «
en tout état de cause », de lui allouer « la juste indemnité pour les
frais
et dépens concernant la procédure devenue sans objet à la suite de
l'annulation de la décision du 21 novembre 2001 ».
La Commission de recours et l'Administration fédérale des
contributions
concluent au rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi
contre un
arrêt rendu par une autorité judiciaire statuant en dernière instance
cantonale et fondé sur le droit public fédéral, le présent recours est
recevable en vertu des art. 97 ss OJ, ainsi que de la règle
particulière de
l'art. 146 LIFD.

1.2 Lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la
décision
d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits
constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou
incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles
de
procédure (art. 105 al. 2 OJ). Aussi la possibilité d'alléguer des
faits
nouveaux ou de faire valoir de nouveaux moyens de preuve est-elle très
restreinte (ATF 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150; 125 II 217 consid.
3a p.
221; 124 II 409 consid. 3a p. 420; 121 II 97 consid. 1c p. 99; 114 Ib
27
consid. 8b p. 33; Fritz Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2ème
éd., Berne
1983, p. 286-287).

2.
S'agissant d'abord des contributions d'entretien, la recourante
soutient
qu'elles ne sont pas imposables, puisqu'elles sont compensées avec le
montant
qu'elle doit au titre de la liquidation du régime matrimonial. De son
point
de vue, elle « ne les encaisse pas réellement », de sorte qu'elle ne
réalise
pas un revenu ni n'augmente son patrimoine.

2.1 Selon l'art. 23 lettre f LIFD, sont imposables les contributions
d'entretien obtenues par l'un des parents pour les enfants sur
lesquels il a
l'autorité parentale.
D'après les principes généraux du droit fiscal, un revenu est
considéré comme
réalisé lorsque le contribuable peut effectivement en disposer,
c'est-à-dire
lorsqu'un bien ou une prestation a passé en sa possession ou
lorsqu'il a
acquis un droit ferme à obtenir un bien ou une prestation. S'agissant
d'une
prestation en espèces, tel est le cas en principe lorsque le
contribuable
acquiert la créance, pour autant que l'exécution de celle-ci ne
paraisse pas
incertaine (ATF 113 Ib 23 consid. 2e p. 26; 105 Ib 238 consid. 4 p.
242;
Blumenstein/Locher, System des Steuerrechts, 6ème éd., Zurich 2002, p.
267-268).

2.2 En l'occurrence, il n'est pas certain que la « convention interne
»
passée entre la recourante et son ex-époux (document qui n'a pas été
approuvé
par l'autorité compétente et ainsi n'oblige pas leurs enfants en
vertu de
l'art. 287 CC) soit opposable au fisc. La question peut toutefois
demeurer
indécise, dès lors que, lui fût-elle opposable, la convention ne
changerait
rien à l'imposabilité des contributions d'entretien. Cet accord
constitue un
contrat portant sur la compensation (« Verrechnungsvertrag »), soit un
contrat innommé par lequel les parties dérogent à la réglementation
dispositive des art. 120 ss CO (Aeppli, Commentaire zurichois, n. 200
ad
remarques préalables aux art. 120-126 CO). Dans tous les cas,
cependant, la
compensation ne peut s'opérer qu'entre des créances qui existent (même
auteur, op. cit., n. 212 ad remarques préalables aux art. 120-126
CO). C'est
dire que, dans le cas particulier, les créances de contributions
d'entretien
ont servi à la compensation au fur et à mesure qu'elles naissaient.
Elles
constituent donc bien un revenu que la recourante a réalisé et qui est
imposable dans son chef. En les faisant valoir en compensation,
celle-ci en a
disposé de manière à diminuer son passif et, partant, à augmenter son
patrimoine. L'argumentation de la recourante est ainsi manifestement
mal
fondée.

3.
3.1En ce qui concerne les montants qu'elle verse à sa mère, la
recourante
maintient qu'ils représentent une indemnité pour renonciation à
l'exercice
d'un droit d'habitation. Par ailleurs, elle relève que ces montants
font déjà
l'objet d'un impôt sur le revenu chez sa mère, de sorte qu'ils
doivent être
déduits de ses propres revenus, sans quoi ils seraient doublement
imposés.

3.2 Selon l'art. 33 al. 1 lettre b LIFD (dans sa teneur en vigueur
jusqu'au
31 décembre 2000; RO 1991 II 1196), les rentes et les charges
durables sont
déduites du revenu; toutefois, le débirentier qui a obtenu une
contre-prestation ne peut déduire ses prestations que lorsque le
total des
rentes versées excède la valeur de la contre-prestation.

3.3 L'autorité intimée a nié l'existence du droit d'habitation
allégué par la
recourante. En revanche, elle a admis que les prestations de
l'intéressée à
sa mère correspondaient effectivement à une contre-prestation, à
savoir à une
somme de 300'000 fr. reçue de ses parents à titre d'avancement
d'hoirie.
Toutefois, les versements effectués par la recourante durant la
période
fiscale en cause n'atteignaient pas le montant de la contre-prestation
(celle-ci fût-elle même inférieure à 300'000 fr., une partie du
patrimoine
provenant du père), de sorte qu'ils ne pouvaient être déduits.
La recourante ne démontre pas que les constatations de fait qui
précèdent
seraient manifestement inexactes ou incomplètes ou qu'elles auraient
été
établies au mépris de règles essentielles de procédure. En
particulier, elle
échoue à démontrer en quoi l'autorité intimée aurait refusé à tort
d'admettre
l'existence du droit d'habitation allégué. Par ailleurs, l'autorité
intimée
n'a pas violé le droit fédéral en refusant, en vertu de l'art. 33 al.
1
lettre b LIFD, de déduire les montants versés par la recourante
pendant la
période fiscale en cause au motif qu'ils n'égalaient pas la somme
allouée par
sa mère. Quant à l'argumentation que la recourante tire du principe de
l'interdiction de la double imposition, elle méconnaît les
spécificités du
cas où le débirentier a obtenu une contre-prestation: celle-ci
n'ayant pas
été soumise à l'impôt sur le revenu, le contribuable ne doit pas
pouvoir
déduire les arrérages tant qu'ils n'ont pas atteint le montant de la
contre-prestation (Hans Peter Bieri, Die Besteuerung der Renten und
Kapitalabfindungen, thèse St-Gall 1970, p. 124).

4.
Il reste à traiter la conclusion tendant à l'allocation d'une
indemnité pour
les frais et dépens entraînés par la procédure devenue sans objet.
Il convient de relever que la recourante a été dûment indemnisée pour
cette
procédure, l'ordonnance présidentielle du 6 février 2003 lui ayant
accordé
1'500 fr. à titre de dépens. En particulier, le prononcé de la
nouvelle
décision n'a en soi pas engendré de coûts supplémentaires à la
recourante (en
tout cas, celle-ci n'indique pas lesquels), puisqu'il est intervenu
d'office
et que les frais mis à sa charge sont identiques à ceux prévus par la
première décision. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'accorder
l'indemnité requise.

5.
Vu ce qui précède, le recours est manifestement mal fondé et doit
être traité
selon la procédure simplifiée de l'art. 36a OJ. Succombant, la
recourante
doit supporter les frais judiciaires et n'a pas droit à des dépens
(art. 156
al. 1 OJ, 159 al. 1 OJ a contrario).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la
recourante, au
Service cantonal des contributions, à la Commission cantonale de
recours en
matière fiscale et au Tribunal cantonal du canton du Valais, ainsi
qu'à
l'Administration fédérale des contributions, Division juridique impôt
fédéral
direct.

Lausanne, le 10 juin 2003

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.17/2003
Date de la décision : 10/06/2003
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-06-10;2a.17.2003 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award