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03/06/2003 | SUISSE | N°4C.35/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 juin 2003, 4C.35/2003


{T 0/2}
4C.35/2003 /ech

Arrêt du 3 juin 2003
Ire Cour civile

MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Rottenberg Liatowitsch et
Favre.
Greffière: Mme Michellod

les époux A.________,
recourants, représentés par Me Alain Ribordy, avocat, rue
St-Pierre-Canisius
1, case postale 1304,
1701 Fribourg,

contre

la société coopérative B.________
intimée, représentée par Me Christophe Maillard, avocat, avenue de la
Gare
10, case postale 231, 1630 Bulle 1.

contrat de bail à l

oyer; déconsignation de loyers

recours en réforme contre l'arrêt du Tribunal des baux de X.________
rendu le
27 novembre...

{T 0/2}
4C.35/2003 /ech

Arrêt du 3 juin 2003
Ire Cour civile

MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Rottenberg Liatowitsch et
Favre.
Greffière: Mme Michellod

les époux A.________,
recourants, représentés par Me Alain Ribordy, avocat, rue
St-Pierre-Canisius
1, case postale 1304,
1701 Fribourg,

contre

la société coopérative B.________
intimée, représentée par Me Christophe Maillard, avocat, avenue de la
Gare
10, case postale 231, 1630 Bulle 1.

contrat de bail à loyer; déconsignation de loyers

recours en réforme contre l'arrêt du Tribunal des baux de X.________
rendu le
27 novembre 2002.

Faits:

A.
Les époux A.________, les locataires, et la société coopérative
B.________,
la bailleresse, ont conclu le 28 février 1997 un contrat de bail à
loyer
portant sur les bâtiments, locaux et extérieurs composant un manège.

Par courrier du 27 mars 2001, confirmé par formule officielle du 11
avril
2001, la bailleresse a résilié le contrat de bail.

Le 20 avril 2001, les locataires ont rappelé à la bailleresse qu'elle
devait
exécuter certains travaux d'entretien, lesquels lui avaient déjà été
demandés
par des courriers antérieurs, et ils l'ont avertie qu'en cas
d'inexécution
dans un délai raisonnable, le loyer serait consigné, ce qui a été
fait à
partir du mois de mai 2001.

En date du 11 mai 2001, les locataires ont saisi la Commission de
conciliation en matière de bail à loyer d'une requête aux fins de
conciliation et en exécution de travaux, en annulation du congé et,
subsidiairement en prolongation de bail. Ils concluaient également à
l'octroi
d'une réduction de loyer.

Par décision du 5 décembre 2001, la Commission de conciliation a
notamment
jugé que les loyers consignés à partir du mois de mai 2001 jusqu'au
prononcé
de ladite décision devaient être libérés dans leur totalité en faveur
de la
bailleresse.

Les locataires ont saisi, le 18 janvier 2002, le Tribunal des baux de
X.________ dans le cadre d'une action en constatation de droit, en
exécution
de travaux et en réduction de loyer.

Le 22 juin 2002, la bailleresse a formulé une requête de mesures
provisionnelles urgentes tendant à la libération partielle des loyers
consignés à concurrence de 30'000 fr.

Le Président du Tribunal des baux de X.________ a admis cette requête
par
ordonnance du 10 octobre 2002. Les locataires ont recouru contre cette
dernière devant le Tribunal des baux de X.________, lequel a accordé
au
recours l'effet suspensif.

Par arrêt du 27 novembre 2002, ce Tribunal a rejeté le recours et
confirmé
l'ordonnance de mesures provisionnelles. Il a par conséquent donné
ordre à la
Banque C.________ de prélever sur le compte de consignation de loyers
le
montant de 30'000 fr. et de le virer sur le compte courant de la
bailleresse.

B.
Les locataires interjettent un recours en réforme contre l'arrêt
cantonal et
concluent à son annulation.

Invitée à déposer une réponse, la bailleresse conclut à
l'irrecevabilité du
recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Le recours en réforme n'est recevable en règle générale que
contre les
décisions finales prises par les tribunaux ou autres autorités
suprêmes des
cantons et qui ne peuvent pas être l'objet d'un recours ordinaire de
droit
cantonal (art. 48 al. 1 OJ).

Selon la jurisprudence, une décision est qualifiée de finale lorsque
la
juridiction cantonale statue sur le fond d'une prétention ou s'y
refuse pour
un motif empêchant définitivement que la même prétention soit exercée
à
nouveau entre les mêmes parties (ATF 126 III 445 consid. 3b p. 447;
123 III
414 consid. 1; 120 II 352 consid. 1b p. 354). Il importe peu que la
décision
ait été prise en procédure sommaire, à condition notamment qu'elle
ait été
rendue à l'issue d'une procédure probatoire complète, non limitée à la
vraisemblance des faits allégués, et qu'elle se fonde sur une
motivation
exhaustive en droit, sans qu'une procédure ordinaire demeure réservée
(cf.
ATF 126 III 445 consid. 3b p. 447; 119 II 241 consid. 2 p. 243). Sous
réserve
d'exceptions (cf. ATF 126 III 445 consid. 3b), les décisions rendues
en
matière de mesures provisionnelles ne remplissent pas ces exigences
et ne
sont pas considérées comme des décisions finales au sens de l'art. 48
al. 1
OJ.

Les recourants soutiennent que l'arrêt attaqué statue définitivement
sur leur
prétention visant à priver la bailleresse, jusqu'à droit connu sur le
fond du
litige, de la faculté de disposer de 30'000 fr. (cf. art. 259g CO).
Cet arrêt
constituerait donc une décision définitive quant à l'affectation des
loyers
consignés au sens de l'art. 259i al. 1 CO.

L'arrêt attaqué confirme une ordonnance par laquelle le Président du
Tribunal
des baux, en cours de procédure, a libéré en faveur de la bailleresse
une
partie des loyers consignés par les locataires. Cette ordonnance ne
statue
pas sur le fond de la prétention des locataires puisqu'elle ne se
prononce ni
sur l'existence de défauts de la chose louée ni sur leur droit à une
réduction de loyer de ce chef. Elle ne constitue donc pas une
décision finale
au sens de l'art. 48 al. 1 OJ.

1.2 Dans l'hypothèse où l'arrêt attaqué ne constitue pas une décision
finale,
les recourants considèrent que le recours en réforme est recevable
sur la
base de l'art. 49 al. 1 OJ.

Aux termes de cette disposition, le recours est recevable contre les
décision
incidentes prises séparément du fond par les juridictions visées par
l'art.
48 al. 1 et 2 OJ, pour violation des prescriptions de droit fédéral
sur la
compétence à raison de la matière. Dans la compétence matérielle, on
englobe
la compétence fonctionnelle, c'est-à-dire la répartition des tâches
entre
plusieurs autorités appelées à connaître de l'affaire à des stades
différents
(Corboz, Le recours en réforme, SJ 2000 II p. 10 et l'arrêt cité).

En l'espèce, les recourants estiment que le juge des mesures
provisionnelles
n'est pas compétent pour ordonner la libération de loyers déjà
consignés. Ils
invoquent à cet égard une violation des art. 274f al. 2 et 259i CO qui
répartissent à leur avis les compétences entre le juge du fond et le
juge des
mesures provisionnelles.

Le grief des recourants ne concerne pas deux autorités différentes
mais la
même autorité, à savoir le juge saisi d'une action relative aux
défauts de la
chose louée, suite à une consignation du loyer (art. 259i al. 2 CO).
Leur
critique revient plutôt à se demander si ce juge peut déconsigner des
loyers
par le biais de mesures provisionnelles en se fondant sur l'art. 274f
al. 2
CO. Il ne s'agit donc pas d'un conflit de compétence matérielle au
sens de
l'art. 49 al. 1 OJ.

Le recours est par conséquent irrecevable comme recours en réforme.

1.3 Dans l'hypothèse où leur recours serait irrecevable au regard des
art. 43
et s. OJ, les recourants sollicitent sa conversion en recours de droit
public. Ils estiment que l'arrêt attaqué constitue dans ce cadre une
décision
finale, par analogie avec la jurisprudence relative aux mesures
provisionnelles en matière de procédure matrimoniale. Outre
l'application
arbitraire des art. 274f al. 2, 259g et 259i CO, ils invoquent une
application arbitraire des règles de procédure cantonale (art. 364
al. 3 et
369 al. 1 CPC/FR) et une violation de leur droit d'être entendu.

1.3.1 Un recours d'un type donné, irrecevable à ce titre, peut dans
certains
cas être traité comme recours d'un autre type, s'il en remplit les
conditions
(ATF 120 II 270 consid. 2, 118 II 184 consid. 1a p. 186, 111 II 384
consid. 1
p. 386 et les références).

En l'espèce, il n'y a pas lieu d'examiner, sous l'angle du recours de
droit
public, si la décision entreprise revêt le caractère d'une décision
finale ou
d'une décision incidente prise séparément du fond, auquel cas sa
recevabilité
serait soumise à l'exigence d'un dommage irréparable au sens de
l'art. 87 al.
2 OJ. La jurisprudence admet en effet qu'en matière de mesures
provisoires,
un tel dommage est toujours à craindre, car la mesure tombe avec le
jugement
final, rendant impossible un contrôle constitutionnel par le Tribunal
fédéral
(arrêt 4P.183/1995 du 24 septembre 1996 publié in sic! 1997 p. 414,
consid.
1a; ATF 118 II 369 consid. 1; 116 Ia 446 consid. 2). Qu'elles soient
qualifiées de finales ou d'incidentes, les décisions statuant sur des
mesures
provisoires prises en dernière instance peuvent donc toujours être
attaquées
par la voie du recours de droit public (arrêt 4P.155/1994 du 4
novembre 1994,
publié in RSPI 1996 II 241, consid. 2).

1.3.2 Comme l'exposent les recourants, l'arrêt rendu par le Tribunal
des baux
sur mesures provisionnelles n'est pas susceptible d'un recours
cantonal,
ordinaire ou extraordinaire (art. 86 al. 1 OJ; Esseiva/Maillard, Code
de
procédure civile fribourgeois annoté, Fribourg 2001, ad art. 367 p.
298).

1.3.3 Les recourants sont personnellement touchés par l'arrêt attaqué
qui
statue sur le sort d'une partie des loyers qu'ils ont consignés, si
bien
qu'ils ont un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce
que cet
arrêt n'ait pas été rendu en violation de leurs droits
constitutionnels; ils
ont donc qualité pour recourir (art. 88 OJ).

1.3.4 Le recours a été interjeté en temps utile (art. 89 al. 1 OJ) et
dans
les formes prévues par la loi (art. 90 al. 1 OJ). En effet, pour
répondre aux
exigences de motivation de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, il appartient
aux
recourants d'indiquer brièvement quel droit constitutionnel ils
invoquent et
en quoi consiste la violation de ce droit. En l'espèce, les recourants
invoquent la violation de l'art. 9 Cst. La motivation présentée à
l'appui de
leur recours en réforme quant à l'application du droit fédéral répond
aux
exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ.

Le recours interjeté par les locataires est donc recevable en tant que
recours de droit public.

2.
Les recourants invoquent tout d'abord une application arbitraire des
art.
274f al. 2, 259g et 259i CO.

Ils estiment que le juge des mesures provisionnelles n'est pas
compétent pour
ordonner la libération, même partielle, des loyers consignés. Seul le
juge du
fond pourrait, après avoir statué sur les prétentions des parties,
décider du
sort de ces loyers.

2.1 Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle
viole
gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou
encore
lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et
de
l'équité (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 126 III 438 consid. 3 p. 440).
Arbitraire et violation de la loi ne sauraient être confondus; une
violation
doit être manifeste et reconnue d'emblée pour être considérée comme
arbitraire. Le Tribunal fédéral n'a pas à examiner quelle est
l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner
des
dispositions applicables; il doit uniquement dire si l'interprétation
qui a
été faite est défendable. Il n'y a pas d'arbitraire du seul fait
qu'une autre
solution paraît également concevable, voire même préférable (ATF 126
III 438
consid. 3 in fine; 125 II 129 consid. 5 p. 134). En outre, pour qu'une
décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la
motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision
apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 128 I 81 consid. 2 p.
86, 177
consid. 2.1).
2.2 La consignation du loyer en cas de défaut de la chose louée est
conçue
comme un moyen de pression à disposition du locataire pour obtenir du
bailleur la réparation du défaut (ATF 124 III 201 consid. 2d p. 203
et les
références, notamment au Message du Conseil fédéral). Dans cette
optique, le
locataire peut consigner l'intégralité de son loyer, indépendamment
de la
gravité du défaut dont il exige la réparation et du montant de ses
prétentions financières (ATF 124 III 201 consid. 2d p. 203; Wey, La
consignation du loyer, thèse Lausanne 1995, p. 87 n. 352 et les
références
aux débats parlementaires; Lachat, Le bail à loyer, Lausanne 1997, p.
181 n.
7.4.3; Higi, Commentaire zurichois, art. 259g CO n. 59; Zihlmann,
Commentaire
bâlois, art. 259g CO n. 9; critique: SVIT-Kommentar, art. 259g CO n.
19).

La consignation a un caractère provisoire. Pour ne pas en perdre le
bénéfice,
le locataire doit saisir l'autorité de conciliation dans les 30 jours
suivant
l'échéance du premier loyer consigné, sinon les loyers consignés sont
acquis
au bailleur (art. 259h al. 1 CO; Lachat, op. cit., p. 182 n. 7.5.1 et
les
références au Message du Conseil fédéral).

Aux termes de l'art. 259i CO, l'autorité de conciliation s'efforce
d'amener
les parties à un accord. Si elle n'y parvient pas, elle rend une
décision
quant aux prétentions des parties et à l'affectation des loyers (al.
1). La
partie qui succombe peut saisir le juge dans les 30 jours, à défaut
de quoi
la décision de l'autorité de conciliation devient définitive (al. 2).

L'art. 274f al. 2 CO donne la compétence au juge d'ordonner des
mesures
provisionnelles pour la durée de la procédure. La critique des
recourants
porte sur l'ampleur de ces mesures en cas de consignation du loyer,
question
sur laquelle le Tribunal fédéral ne s'est pas encore prononcé.

La doctrine considère que l'art. 274f al. 2 CO permet
au juge de
limiter, par
le biais de mesures provisionnelles, la portée de la consignation
pour la
durée de l'instance (Lachat, op. cit., p. 185 n. 7.5.10; Wey, op.
cit., p.
133 n. 569; Terrapon, Les défauts de la chose louée et la
consignation du
loyer, 8e Séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 1994, p. 15). Il
peut par
exemple réduire ou augmenter la proportion du loyer consigné (Lachat,
op.
cit., p. 104 n. 3.2.7) ou même libérer une partie de ce loyer en
faveur du
bailleur, notamment si le montant déjà consigné est disproportionné
par
rapport aux prétentions du locataire (SVIT-Kommentar, art. 259h CO n.
14 et
débats parlementaires cités par Züst, Die Mängelrechte des Mieters
von Wohn-
und Geschäftsräumen, thèse St-Gall 1992, p. 301 note 95).

2.3 Les recourants considèrent que le juge des mesures
provisionnelles doit
veiller à maintenir un rapport raisonnable entre la part du loyer
pouvant
encore être consignée et les prétentions que le locataire peut faire
valoir
conformément à l'art. 259a CO. A leur avis, cet équilibre ne peut
être trouvé
qu'en pondérant l'intérêt du bailleur à encaisser la totalité des
loyers
futurs avec celui du locataire à maintenir une pression suffisante
sur le
bailleur pour l'amener à supprimer les défauts litigieux. Les
recourants
estiment que si les loyers valablement consignés pouvaient être
libérés
ultérieurement par le juge des mesures provisionnelles, l'institution
de la
consignation de loyer ne pourrait plus atteindre son but coercitif à
l'égard
du bailleur. Les intérêts de ce dernier sont à leur avis suffisamment
protégés par la possibilité d'obtenir, par la voie de mesures
provisionnelles, une limitation de la part de loyer qui pourra encore
être
consignée à l'avenir.

2.4 Le Tribunal des baux de X.________ a estimé que l'art. 274f al. 2
CO
permettait au juge de libérer, avant l'issue du litige, une partie
des loyers
consignés si l'équilibre du rapport contractuel était mis en péril
par la
consignation. Il a en outre veillé à ce que cette mesure
provisionnelle, par
son ampleur, ne menace pas l'exécution du jugement au fond.

Cette application de l'art. 274f al. 2 CO ne peut en aucun cas être
qualifiée
d'arbitraire. En effet, étant donné que la compétence d'ordonner des
mesures
provisionnelles n'appartient pas à l'autorité de conciliation (Higi,
op.
cit., art. 259i CO n. 34 i.f.), le montant des loyers consignés peut
être
relativement important lorsque la partie qui succombe en conciliation
saisit
le juge en application de l'art. 259i al. 2 CO. En outre, la loi
n'empêche
pas le locataire de poursuivre la consignation du loyer jusqu'à droit
connu
sur le fond, accord entre les parties ou réparation complète des
défauts (ATF
124 III 201 consid. 2d p. 203 s.; Lachat, op. cit., p.182 n. 7.4.5;
SVIT-Kommentar, art. 259g n. 17; Wey, op. cit., p. 110). Dans ces
circonstances, il apparaît nécessaire que le juge puisse intervenir,
par le
biais de mesures provisionnelles, sur le montant déjà consigné en cas
de
disproportion entre celui-ci et les prétentions financières du
locataire. Il
ne s'agit pas de préjuger du bien-fondé de l'action du locataire ou
de le
priver d'un moyen de pression, mais de permettre au rapport
contractuel de
fonctionner durant l'instance si son équilibre est menacé.

En confirmant la compétence du juge des mesures provisionnelles pour
libérer
partiellement les loyers consignés, le Tribunal des baux de
X.________ n'a
pas effectué une application arbitraire des art. 274f al. 2, 259g et
259i al.
2 CO. Le grief des recourants doit donc être rejeté.

3.
Les recourants estiment par ailleurs que le Tribunal des baux a violé
l'art.
259g CO en affirmant qu'une prétention en dommages-intérêts ne
justifiait pas
en soi la consignation du loyer. Les recourants allèguent que cette
conception juridique erronée a eu pour effet que le Tribunal a refusé
de
donner suite à leur réquisition de preuve tendant à démontrer, sous
l'angle
de la vraisemblance, le bien-fondé de leurs prétentions en
dommages-intérêts.
Par ailleurs, cette violation de la loi aurait conduit le Tribunal à
retenir
à tort que la libération d'un montant de 30'000 fr. ne risquait pas de
compromettre l'exécution du jugement au fond.

Comme cela a été rappelé ci-dessus, il ne suffit pas, pour qu'une
décision
soit annulée pour cause d'arbitraire, que la motivation formulée soit
insoutenable; il faut encore que la décision apparaisse arbitraire
dans son
résultat (cf. consid. 2.1). En l'espèce, la décision attaquée ne
serait
arbitraire dans son résultat que si le Tribunal des baux devait
entrer en
matière sur la question de savoir si une prétention en
dommages-intérêts
ouvrait la voie de la consignation. Or tel n'est pas le cas pour les
motifs
exposés ci-dessous.

4.
Les recourants soutiennent que la maxime d'office instaurée par
l'art. 274d
al. 3 CO obligeait le Tribunal des baux à prendre en compte les
nouvelles
conclusions sur le fond qu'ils allaient déposer le 27 novembre 2002
ou le
lendemain.

Selon cette disposition, l'autorité de conciliation et le juge
établissent
d'office les faits et apprécient librement les preuves; les parties
sont
tenues de leur présenter toutes les pièces nécessaires à
l'appréciation du
litige.

Le Tribunal fédéral a jugé que d'éventuelles dispositions de droit
cantonal
interdisant l'allégation de faits nouveaux en instance de recours
cantonale
devaient l'emporter sur l'art. 274d al. 3 CO (ATF 125 III 231 consid.
4a p.
238 s.; 118 II 50 consid. 2a p. 52).

En l'espèce, les recourants ont déposé leur mémoire de recours contre
l'ordonnance de mesures provisionnelles le 22 octobre 2002. Lors de
l'audience convoquée par le Tribunal le 27 novembre 2002, le
mandataire des
recourants a allégué que ses clients allaient modifier leurs
conclusions sur
le fond du litige par détermination déposée le même jour ou le
lendemain. Les
locataires avaient l'intention de demander à être autorisés à
procéder aux
travaux d'entretien aux frais de la bailleresse et à ce que les
entreprises
soient payées par prélèvement sur le compte de consignation des
loyers. Les
locataires voulaient également demander la réfection de dix box
supplémentaires atteints par des infiltrations d'eau ainsi que des
dommages-intérêts à ce titre.
Le Tribunal des baux a considéré qu'il ne lui appartenait pas de se
pencher
sur les faits nouveaux allégués par les recourants, puisqu'il devait
se
placer dans la situation telle qu'elle était lors du prononcé de
l'ordonnance
de mesures provisionnelles. Il a considéré, au demeurant, que les
recourants
n'avaient pas rendu vraisemblable que leurs nouvelles conclusions
seraient
justifiées à ce stade de la procédure, ni que les défauts allégués
auraient
été découverts récemment. En outre, il a estimé que la conclusion en
dommages-intérêts ne justifiait pas en soi la consignation du loyer.

En l'espèce, peut rester ouverte la question de savoir si le droit de
procédure fribourgeois interdit l'allégation de faits nouveaux dans
le cadre
d'un recours contre une ordonnance de mesures provisionnelles au sens
de
l'art. 376 al. 1 CPC/FR. En effet, dans l'affirmative, les
restrictions de
droit cantonal priment sur la maxime d'office de l'art. 274d al. 3 CO
(cf.
ATF 125 III 231 consid. 4a p. 238 s.), de sorte que cette disposition
n'est
pas violée par l'arrêt attaqué. Dans la négative, l'arrêt attaqué est
également conforme au droit fédéral dans son résultat, puisque les
recourants
n'ont en réalité pas allégué de faits nouveaux lors de l'audience du
27
novembre 2002. Ils se sont bornés à annoncer leur intention de
déposer de
nouvelles conclusions sur le fond du litige et à affirmer que leurs
prétentions dépassaient largement le montant des loyers consignés.
Ainsi,
lors de l'audience en question, aucun fait nouveau procédural ne
s'était
encore produit. Quant au défaut invoqué à l'appui des nouvelles
conclusions
en dommages-intérêts, les recourants n'ont pas allégué qu'il aurait
été
découvert récemment.

Dans ces circonstances, la maxime d'office, instaurée par le droit du
bail
pour protéger la partie au contrat la plus faible, n'obligeait pas le
Tribunal des baux à prendre en considération les nouvelles
allégations des
recourants pour statuer sur leur recours. En tous les cas, le refus du
Tribunal d'entrer en matière sur ce point ne constitue pas une
application
arbitraire de la maxime d'office prévue par l'art. 274d al. 3 CO. Le
grief se
révèle par conséquent infondé.

5.
Les recourants invoquaient en tête de leur mémoire une application
arbitraire
des art. 364 al. 3 et 369 al. 1, 2ème phrase CPC/FR. Ils ne
développent
toutefois à cet égard aucune motivation indépendante de celle
concernant la
maxime d'office. Il en va de même de la prétendue violation de leur
droit
d'être entendu. Ces griefs sont donc irrecevables (cf. art. 90 al. 1
let. b
OJ; ATF 129 I 113 consid. 2.1. p. 120).

6.
Le recours sera par conséquent rejeté dans la mesure où il est
recevable et
il appartiendra aux recourants, qui succombent, d'assumer
solidairement les
frais judiciaires et les dépens de la procédure fédérale (art. 156
al. 1 et
7, 159 al. 1 et 5 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge des
recourants,
solidairement entre eux.

3.
Ceux-ci verseront à l'intimée, solidairement entre eux, une indemnité
de
2'500 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et au
Tribunal des baux de X.________.

Lausanne, le 3 juin 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.35/2003
Date de la décision : 03/06/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-06-03;4c.35.2003 ?
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