La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/06/2003 | SUISSE | N°5P.46/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 juin 2003, 5P.46/2003


{T 0/2}
5P.46/2003 /frs

Arrêt du 2 juin 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président, Nordmann et Hohl.
Greffière: Mme Mairot.

C. ________ (époux), recourant,
représenté par Me Simone Walder-de Montmollin, avocate, Grand-Rue 7,
case
postale 249, 2108 Couvet,

contre

Dame C.________, (épouse), intimée,
représentée par Me Fabien Süsstrunk, avocat,
avenue de la Gare 1, 2114 Fleurier,
Cour de cassation civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel,
rue du
Po

mmier 1, case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1.

art. 9 Cst. (mesures protectrices de l'union conjugale),

recours d...

{T 0/2}
5P.46/2003 /frs

Arrêt du 2 juin 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président, Nordmann et Hohl.
Greffière: Mme Mairot.

C. ________ (époux), recourant,
représenté par Me Simone Walder-de Montmollin, avocate, Grand-Rue 7,
case
postale 249, 2108 Couvet,

contre

Dame C.________, (épouse), intimée,
représentée par Me Fabien Süsstrunk, avocat,
avenue de la Gare 1, 2114 Fleurier,
Cour de cassation civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel,
rue du
Pommier 1, case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1.

art. 9 Cst. (mesures protectrices de l'union conjugale),

recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation civile
du
Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 18 décembre 2002.

Faits:

A.
C. ________ et dame C.________, se sont mariés en 1983 et ont eu une
fille en
1985. Le couple s'est séparé à fin octobre 2001, la mère et l'enfant
restant
dans l'appartement copropriété des époux.

En conséquence d'une première requête de mesures protectrices de
l'union
conjugale, restée sans suite, le mari a versé spontanément 1'350 fr.
par mois
en faveur de sa fille, les allocations familiales, d'un montant
mensuel de
330 fr.70, étant perçues directement par l'épouse. Il a en outre payé
à
celle-ci la somme de 600 fr. durant sept mois, pour lui permettre
"d'organiser sa vie et de compléter son activité professionnelle". La
valeur
locative de l'appartement a été arrêtée par expert à 880 fr.

Le 15 février 2002, l'épouse a déposé une nouvelle requête de mesures
protectrices, concluant à l'octroi d'une contribution d'entretien
pour elle
et sa fille d'un montant global de 4'000 fr. par mois.

Dès le 1er juin 2002, le mari a cessé de verser toute contribution à
sa
femme.

B.
Le 2 septembre 2002, le président suppléant du Tribunal du district du
Val-de-Travers a pris acte de l'engagement du mari de verser
mensuellement
une pension en faveur de sa fille d'un montant de 1'350 fr., et l'a
condamné
à payer à sa femme la somme de 680 fr. par mois.

Par arrêt du 18 décembre 2002, la Cour de cassation civile du Tribunal
cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté le recours formé par le mari
contre
la décision de première instance.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral,
celui-ci
conclut à l'annulation de l'arrêt du 18 décembre 2002.

Des observations n'ont pas été requises.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Les décisions sur mesures protectrices de l'union conjugale ne
sont pas
des décisions finales au sens de l'art. 48 OJ et, partant, ne peuvent
être
entreprises par la voie du recours en réforme (ATF 127 III 474
consid. 2a et
b p. 476 ss et les références). Les griefs soulevés par le recourant
ne
pouvant être soumis par un autre moyen de droit au Tribunal fédéral,
la
condition de la subsidiarité absolue du recours de droit public est
remplie
(art. 84 al. 2 OJ). Formé en temps utile - compte tenu de la
suspension des
délais prévue par l'art. 34 al. 1 let. c OJ - contre une décision
prise en
dernière instance cantonale, le recours est aussi recevable au regard
des
art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.

1.2 Aux termes de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit -
sous
peine d'irrecevabilité (ATF 123 II 552 consid. 4d p. 558) - contenir
un
exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes
juridiques
violés, précisant en quoi consiste la violation. Saisi d'un recours
de droit
public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs soulevés de
manière
claire et détaillée, le principe iura novit curia étant inapplicable
(ATF 125
I 71 consid. 1c p. 76; 122 I 70 consid. 1c p. 73). Le justiciable qui
se
plaint d'arbitraire ne peut critiquer la décision attaquée comme il
le ferait
en instance d'appel, où l'autorité de recours dispose d'une libre
cognition
(ATF 117 Ia 10 consid. 4b p. 11/12), mais il doit démontrer, par une
argumentation précise, que cette décision repose sur une application
de la
loi ou une appréciation des preuves manifestement insoutenables (ATF
125 I
492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités).

2.
Le recourant reproche aux juges cantonaux d'avoir rendu une décision
arbitraire en dispensant l'intimée d'augmenter son activité lucrative
de
manière à subvenir seule à son entretien. Ce faisant, la Cour de
cassation
civile aurait méconnu la jurisprudence du Tribunal fédéral selon
laquelle,
lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie
commune, les critères applicables en cas de divorce doivent être pris
en
considération pour évaluer l'entretien. Le recourant se plaint à cet
égard
d'une insuffisance dans l'établissement des faits, l'autorité
cantonale ayant
selon lui omis de constater, bien qu'elle disposât des éléments
nécessaires
pour le faire, que toute reprise de la vie commune était exclue. La
cour de
cassation serait en outre tombée dans l'arbitraire en admettant qu'on
ne
saurait présumer que l'épouse gagnerait davantage si elle exerçait
une autre
activité, une telle affirmation constituant une violation de l'art. 8
CC.
L'octroi d'une contribution d'entretien à l'intimée aurait aussi pour
effet
d'amener celle-ci à commettre un abus de droit en s'opposant au
divorce
pendant quatre ans, comme le lui permet l'art. 114 CC. La décision
attaquée
serait également arbitraire dans son résultat, la répartition des
charges
entre les époux étant inéquitable.

2.1
2.1.1Une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement
insoutenable,
méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté, ou
encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de
l'équité.
Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution apparaît
concevable ou même préférable. Pour que la décision soit annulée, il
ne
suffit pas que sa motivation soit insoutenable; encore faut-il
qu'elle soit
arbitraire dans son résultat. En matière d'appréciation des preuves,
il n'y a
arbitraire que si l'autorité ne prend pas en compte, sans raison
sérieuse, un
élément important propre à modifier la décision, si elle se trompe
manifestement sur le sens et la portée d'un tel élément ou encore si
elle
procède à des déductions insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9
et les
arrêts cités).

2.1.2 Selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, le juge fixe la contribution
pécuniaire à verser par l'une des parties à l'autre en application de
l'art.
163 al. 1 CC. Conformément à la jurisprudence, les deux conjoints
doivent
participer, chacun selon ses facultés, aux frais supplémentaires
engendrés
par l'existence parallèle de deux ménages. Celui des époux qui
n'avait,
jusqu'à la suspension de la vie commune, pas exercé d'activité
lucrative, ou
seulement dans une mesure restreinte, pourra alors, selon les
circonstances,
se voir contraint de le faire ou d'étendre son activité. Il y a lieu
d'examiner dans chaque cas concret si et dans quelle mesure on peut
exiger
d'un époux qu'il exerce dorénavant une activité lucrative ou augmente
celle
qu'il a déjà, compte tenu de son âge, de son état de santé, de sa
formation
et, le cas échéant, du temps plus ou moins long pendant lequel il
aura été
éloigné de la vie professionnelle (cf. ATF 114 II 13 consid. 5 p. 17,
301
consid. 3a p. 302). Lors de la fixation de la contribution
d'entretien, on
pourra prendre en considération un revenu supérieur à celui que
l'intéressé
tire effectivement de son travail, pour autant qu'une telle
augmentation soit
économiquement possible et qu'on puisse l'exiger de lui (cf. ATF 128
III 4
consid. 4a p. 5; 117 II 16 consid. 1b p. 17), la première condition
relevant
du fait et la seconde du droit (ATF 126 III 10 consid. 2b p. 12/13).
La
jurisprudence a en outre précisé que lorsqu'on ne peut plus
sérieusement
compter sur une reprise de la vie commune, les critères applicables
en cas de
divorce doivent être pris en considération pour évaluer l'entretien
et, en
particulier, la question de la reprise ou de l'augmentation de
l'activité
lucrative d'un époux, en tenant compte du marché de l'emploi (ATF 128
III 65
ss). Cela signifie d'une part que, outre les critères posés
précédemment par
la jurisprudence, le juge retiendra les éléments indiqués de façon non
exhaustive à l'art. 125 al. 2 CC et, d'autre part, qu'il y a lieu
d'apprécier
la situation sous l'angle du principe dit du "clean break", en
encourageant
autant que possible l'indépendance économique des conjoints.

2.2
2.2.1L'autorité cantonale a considéré que, selon le juge de première
instance, l'épouse avait rapporté la preuve que son employeur ne
pouvait lui
fournir une occupation à plein temps, et qu'on ne pouvait présumer
qu'en
quittant son poste actuel dans la fonction publique pour exercer une
autre
activité, elle réaliserait des revenus plus élevés, quand bien même
elle
travaillerait à 100%; le recourant soutenait le contraire, mais s'en
tenait à
des allégations appellatoires, qui ne démontraient nullement en quoi
ledit
magistrat aurait excédé son pouvoir d'appréciation.

Dans son recours de droit public, le mari reconnaît que l'épouse a
démontré
que son employeur ne pouvait l'occuper à plein temps. Il soutient
cependant
qu'elle n'a effectué aucune recherche pour trouver un autre poste ou
une
activité complémentaire; or, il lui appartenait de prouver qu'elle
avait
accompli de vains efforts pour augmenter son taux de travail. En
retenant
qu'on ne pouvait présumer qu'elle réaliserait des revenus supérieurs
en
exerçant, même à plein temps, une autre activité, les juges cantonaux
auraient selon lui violé l'art. 8 CC.

2.2.2 Le recourant n'établit toutefois pas en quoi la constatation de
l'autorité cantonale, selon laquelle il n'avait aucunement démontré
que le
juge de première instance eût arbitrairement retenu qu'il n'était pas
possible pour l'épouse d'augmenter son taux d'activité, serait
insoutenable.
Il se contente en effet de reprendre, de manière irrecevable, les
arguments
déjà soulevés devant la cour de cassation, sans exposer pourquoi
celle-ci
aurait refusé à tort de qualifier d'arbitraire l'appréciation des
preuves par
l'autorité inférieure (cf. ATF 125 I 492 ss). De la même manière, il
se borne
à affirmer, sans rien démontrer, que l'intimée n'a pas essayé de
trouver une
autre activité; ce fait ne résulte cependant pas de l'arrêt attaqué
et ne
peut dès lors être pris en compte, le recourant ne se plaignant pas
d'arbitraire à ce sujet (cf. ATF 125 III 45 consid. 3b p. 47 et
l'arrêt
cité).

Quant à la prétendue violation de la règle sur le fardeau de la
preuve, il
s'agit d'un moyen nouveau et, par conséquent, irrecevable (ATF 108 II
69
consid. 1c p. 71; Kälin, Das Verfahren der staatsrechtlichen
Beschwerde, 2e
éd., Berne 1994, p. 369-370). Au demeurant, les mesures protectrices
de
l'union conjugale sont ordonnées à la suite d'une procédure sommaire
avec
administration restreinte des moyens de preuve et limitation du degré
de la
preuve à la simple vraisemblance. Il suffit donc que les faits soient
rendus
vraisemblables (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb p. 478 et les
références; cf.
aussi Christoph Leuenberger, Glaubhaftmachen, in Beweis im
Zivilprozess,
Berne 2000, p. 112; Leuenberger/Uffer-Tobler, Kommentar zur
Zivilprozessordnung des Kantons St. Gallen, Berne 1999, n. 6b ad art.
197;
Hasenböhler, Commentaire bâlois, n. 2 ad art. 179 CC). L'art. 8 CC
n'est dès
lors pas directement applicable (ATF 118 II 376 consid. 3 p. 377).

Dans ces conditions, les juges cantonaux n'ont pas méconnu la
jurisprudence
en admettant, à l'instar de l'autorité de première instance, qu'il ne
se
justifiait pas de contraindre l'épouse à augmenter son temps de
travail, et
ce même si sa fille, qui lui a été confiée, est âgée de 17 ans.

Le reproche selon lequel la cour de cassation n'aurait pas constaté
l'absence
de perspectives de réconciliation entre les époux n'est pas non plus
fondé.
L'autorité cantonale ayant examiné la question d'une éventuelle
augmentation
du taux de travail de l'intimée, en se référant de surcroît à l'arrêt
paru
aux ATF 128 III 65, elle est implicitement partie de l'idée que l'on
ne
pouvait plus sérieusement compter sur une reprise de la vie commune.
Dès lors
qu'il n'est pas établi que l'épouse soit à même d'augmenter son
activité
lucrative, le grief est de toute manière sans pertinence.

Par ailleurs, les critiques formulées par le recourant quant à un
éventuel
abus de droit de la part de l'intimée, ainsi que celles concernant une
prétendue répartition inéquitable des charges entre les époux,
présentent
essentiellement un caractère appellatoire et ne peuvent, dans cette
mesure,
être prises en considération, faute d'être suffisamment motivées (ATF
126 III
534 consid. 1b p. 536; 125 I 492 précité). Sur le second point,
l'autorité
cantonale pouvait du reste considérer sans arbitraire que le
certificat
médical produit par le mari, préconisant une réduction de son temps de
travail, ne justifiait pas une augmentation de l'activité lucrative de
l'épouse, rien dans le dossier ne permettant de supposer - ce que le
recourant ne conteste pas - que l'un des conjoints ait été plus
affecté que
l'autre par la séparation. Enfin, le comportement de l'intimée ne
saurait
être qualifié d'abusif, dès lors qu'il n'a pas été retenu qu'il lui
serait
possible de
gagner davantage.

3.
En conclusion, le recours se révèle mal fondé et ne peut qu'être
rejeté, dans
la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supportera
les
frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des
dépens, des observations n'ayant pas été requises.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Cour de cassation civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 2 juin 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.46/2003
Date de la décision : 02/06/2003
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-06-02;5p.46.2003 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award