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26/05/2003 | SUISSE | N°5C.280/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 mai 2003, 5C.280/2002


{T 0/2}
5C.280/2002 /frs

Arrêt du 26 mai 2003
IIe Cour civile

MM. et Mme les Juges Raselli, Président, Nordmann et Marazzi.
Greffière: Mme Mairot.

E. X.________,
C.X.________,
défendeurs et recourants, tous deux représentés par
Me René Schneuwly, avocat, boulevard de Pérolles 4, 1701 Fribourg,

contre

D.X.________,
demandeur et intimé, représenté par Me Damien Piller, avocat, rue du
Criblet
13, 1701 Fribourg.

action en réduction,

recours en réforme contre l'arrÃ

ªt de la Ie Cour d'appel du Tribunal
cantonal
de l'État de Fribourg du 3 septembre 2002.

Faits:

A.
A. X.________, ...

{T 0/2}
5C.280/2002 /frs

Arrêt du 26 mai 2003
IIe Cour civile

MM. et Mme les Juges Raselli, Président, Nordmann et Marazzi.
Greffière: Mme Mairot.

E. X.________,
C.X.________,
défendeurs et recourants, tous deux représentés par
Me René Schneuwly, avocat, boulevard de Pérolles 4, 1701 Fribourg,

contre

D.X.________,
demandeur et intimé, représenté par Me Damien Piller, avocat, rue du
Criblet
13, 1701 Fribourg.

action en réduction,

recours en réforme contre l'arrêt de la Ie Cour d'appel du Tribunal
cantonal
de l'État de Fribourg du 3 septembre 2002.

Faits:

A.
A. X.________, né le 7 juin 1914, est décédé le 15 février 1992 en
laissant
pour héritiers légaux son épouse, B.X.________, née le 28 septembre
1916, et
ses trois enfants: C.X.________, né le 28 juin 1942, D.X.________, né
le 14
novembre 1943, et E.X.________, née le 16 décembre 1946. B.X.________
est
décédée le 3 juillet 1997.

Par testament du 29 décembre 1987, A.X.________ avait institué sa
femme seule
héritière. Après le décès de celle-ci, les meubles et la lingerie
devaient
revenir à sa fille E.X.________; le reste de ses économies était
attribué à
son fils D.X.________.
De son vivant, le de cujus exploitait, avec ses enfants E.X.________
et
C.X.________, une entreprise de blanchisserie à Fribourg. Son fils
D.X.________ n'y a travaillé que peu et sans succès, en raison de ses
problèmes d'alcool.
En 1979, A.X.________ a décidé de cesser d'exploiter son entreprise
et de la
remettre à ses enfants E.X.________ et C.X.________. Par acte notarié
du 27
juin 1979, il leur a vendu, pour le prix de 174'254 fr. -
correspondant à la
reprise des dettes hypothécaires (164'371 fr.) et au solde d'un
crédit de
construction (9'883 fr.) -, les deux immeubles suivants: l'un, sis
rue de
l'Hôpital, comprenant une petite maison d'habitation avec magasin et
l'autre,
situé rue du Nord, un bâtiment vétuste dans lequel était exploité la
blanchisserie. Un droit d'habitation, qui n'a pas été inscrit au
registre
foncier, a été accordé à A.X.________ et B.X.________ ainsi qu'à la
soeur de
celle-ci. D.X.________ n'a appris l'existence de cette vente qu'après
le
décès de son père, à la suite de l'intervention de son avocat.

E. X.________ et C.X.________ ont également repris la blanchisserie,
en
particulier les machines et installations. Ils allèguent avoir payé
au total
372'827 fr. pour ces acquisitions, immeubles compris. Dès le 1er
juillet
1979, ils ont constitué une société en nom collectif. Des bilans ont
été
établis le 30 juin, puis le 1er juillet 1979. Les susnommés ont cessé
d'exploiter l'entreprise à fin octobre 1992.

B.
D.X.________ a ouvert action contre sa mère, sa soeur et son frère
par le
dépôt, le 10 février 1993, d'une requête de citation aux fins de
conciliation
devant le Juge de paix du IVe Cercle de la Sarine. Le 9 décembre
1993, il a
déposé une demande de partage de la succession auprès du Tribunal
civil de
l'arrondissement de la Sarine. Dans ce cadre, il a en outre conclu,
principalement, au rapport des biens mobiliers et immobiliers qui ont
fait
l'objet de l'acte de vente du 27 juin 1979 ou, le cas échéant, de
leur prix
de vente et, subsidiairement, à la réduction de ces libéralités de
manière à
reconstituer sa réserve.

Par nouvelles conclusions du 23 juin 1997, modifiées le 4 février
2000,
D.X.________ a demandé que le partage soit ordonné, que ses frère et
soeur
rapportent à la succession le montant de 627'775 fr.80 et que sa
mère, son
frère et sa soeur soient condamnés solidairement à lui payer la somme
de
78'742 fr., avec intérêts à 5% dès le 15 février 1992. Les défendeurs
ont
conclu au rejet de ces conclusions.
Statuant le 13 juillet 2000, le Tribunal civil de l'arrondissement de
la
Sarine a ordonné le partage, arrêté à 353'592 fr. le montant devant
être
rapporté à la succession, fixé la réserve héréditaire du demandeur à
1/8,
enfin, condamné E.X.________ et C.X.________ à payer solidairement à
celui-ci
la somme de 44'199 fr., avec intérêts à 5% dès le 15 février 1992.

Le 3 septembre 2002, la Ie Cour d'appel du Tribunal cantonal de
l'État de
Fribourg a rejeté, dans la mesure où il était recevable, l'appel
interjeté
par les défendeurs, admis l'appel joint du demandeur et réformé le
jugement
de première instance en ce sens que les défendeurs sont condamnés à
payer
solidairement au demandeur la somme de 63'394 fr.80, avec intérêts à
5% dès
le 24 juin 1997.

C.
Les défendeurs exercent un recours en réforme contre l'arrêt du 3
septembre
2002, concluant au rejet des actions en réduction et en paiement
introduites
par le demandeur.
Ils sollicitent par ailleurs l'octroi de l'assistance judiciaire.

Le demandeur n'a pas été invité à se déterminer.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Interjeté en temps utile contre une décision finale rendue par le
tribunal
suprême du canton, le recours est recevable sous l'angle des art. 48
al. 1
et 54 al. 1 OJ. Il l'est également au regard de l'art. 46 OJ, la
valeur
litigieuse étant, selon l'arrêt attaqué, de 64'919 fr.50.

2.
Lorsqu'il est saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral
conduit son
raisonnement sur la base des faits constatés par la dernière autorité
cantonale, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve
n'aient été violées, que des constatations ne reposent sur une
inadvertance
manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les
constatations de
l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits
pertinents régulièrement allégués et prouvés (art. 64 OJ). Les griefs
dirigés
à l'encontre des constatations de fait - ou de l'appréciation des
preuves à
laquelle s'est livrée l'autorité cantonale (ATF 127 III 543 consid.
2c p. 547
et l'arrêt cité) - et les faits nouveaux sont irrecevables (art. 55
al. 1
let. c OJ).

Dans la mesure où les défendeurs s'écartent des faits retenus dans
l'arrêt
entrepris sans pouvoir se prévaloir de l'une des exceptions
précitées, leur
recours est par conséquent irrecevable (ATF 127 III 248 consid. 2c p.
252 et
les références).

3.
L'autorité cantonale a retenu que la vente des immeubles et de
l'entreprise
de blanchisserie le 27 juin 1979 était une donation mixte, partant,
une
libéralité soumise à réduction en application de l'art. 527 ch. 1 CC.

Les défendeurs se plaignent d'une violation de cette disposition pour
le
motif que la condition subjective caractérisant une telle donation ne
serait
pas établie.

3.1 Aux termes de l'art. 527 ch. 1 CC, sont sujettes à réduction
comme les
libéralités pour cause de mort les libéralités entre vifs faites à
titre
d'avancement d'hoirie sous forme de dot, d'établissement ou d'abandon
de
biens, quand elles ne sont pas soumises au rapport.
Selon la jurisprudence, il n'y a pas seulement libéralité lorsque la
prestation du défunt est fournie à titre gratuit; tel est aussi le cas
lorsque le bénéficiaire doit fournir une contre-prestation pour
l'avantage
reçu, mais de valeur sensiblement moindre, de sorte qu'il existe une
disproportion évidente entre les deux (donation mixte). Dans cette
éventualité, la différence de valeur entre les prestations doit être
prise en
considération comme objet de la réduction. On parle de donation mixte
(negotium cum donatione mixtum) quand, lors de la conclusion,
l'attribution
échangée contractuellement avec une contre-prestation dépasse
celle-ci en
valeur (élément objectif) et que les parties le savent et conviennent
ainsi
d'une libéralité (animus donandi) à l'une d'elles, qui est favorisée
(élément
subjectif). Ce sont les circonstances au moment de l'attribution qui
déterminent si celle-ci doit être qualifiée de gratuite (ATF 126 III
171
consid. 3a p. 173; 116 II 667 consid. 3b/aa p. 674 et les références).

3.2 En l'espèce, l'autorité cantonale a retenu qu'en 1979, la valeur
vénale
des immeubles et de l'entreprise était de 968'546 fr. Comme les
défendeurs
avaient payé 372'827 fr., la disproportion objective entre les
prestations
était établie; la part de donation représentait ainsi 595'519 fr.
(968'546
fr. - 372'827 fr.), soit 61,5%.

Les défendeurs observent que le montant de 968'546 fr. fait totalement
abstraction de l'impôt latent sur le bénéfice en capital imposable à
la suite
de la cessation de l'activité de l'entreprise de blanchisserie,
élément qui
devait être pris en compte pour déterminer l'existence d'une
éventuelle
disproportion entre prestation et contre-prestation; dans le cas
particulier,
il aurait été démontré en appel que l'imposition portait sur un
montant de
298'117 fr.95, arrondi à 298'118 fr. La valeur des biens vendus en
1979
serait ainsi de 670'428 fr. (968'546 fr. - 298'118 fr.), et la
différence
entre les prestations réduite à 297'601 fr. (670'428 fr. - 372'827
fr.), soit
44,4%. Fondées sur un fait - le montant de l'impôt latent - qui ne
résulte
pas de l'arrêt entrepris, ces critiques sont irrecevables (art. 55
al. 1 let.
c, 63 al. 2 OJ). De toute façon, les défendeurs ne contestent pas
réellement
l'existence d'une donation mixte sur le plan objectif. Tout en
relevant que
l'autorité cantonale a donné une importance déterminante à la
disproportion
entre prestation et contre-prestation telle qu'elle l'a constatée, ils
exposent que cet élément n'est pas suffisant pour admettre la
présence d'une
libéralité sujette à réduction et soutiennent qu'en l'occurrence,
tant la
conscience de l'existence d'une disproportion que l'animus donandi
font
défaut.

L'autorité cantonale n'a cependant pas méconnu la jurisprudence du
Tribunal
fédéral, récemment confirmée (cf. ATF 126 III 171 consid. 3b p. 173
ss),
selon laquelle une réduction ne peut être admise que si, en sus de la
condition objective de la présence d'une libéralité, la condition
subjective
de l'intention de donner est également remplie. Après avoir apprécié
les
preuves, la Cour d'appel est parvenue à la conclusion que le défunt
avait eu
conscience, ainsi que l'intention, de favoriser les défendeurs, donc
de leur
accorder une libéralité. Cette constatation, qui porte sur la volonté
réelle
du de cujus, ne saurait être remise en cause dans le présent recours:
déterminer ce qu'un cocontractant savait et voulait au moment de
conclure
relève des constatations de fait qui lient la juridiction fédérale de
réforme
(arrêt 4C.394/2002 du 28 mars 2003, consid. 2.1; ATF 118 II 58
consid. 3a p.
62; 113 II 25 consid. 1a p. 27). Les arguments des défendeurs tendant
à faire
admettre que l'élément subjectif n'est pas établi sont donc
irrecevables (cf.
ATF 126 III 25 consid. 3c p. 29, 375 consid. 2e/aa p. 379; 125 III 435
consid. 2a/aa p. 436).

4.
En conclusion, le recours se révèle entièrement irrecevable. Comme il
était
d'emblée voué à l'échec, la requête d'assistance judiciaire ne
saurait être
agréée (art. 152 al. 1 OJ). Les défendeurs supporteront dès lors
solidairement les frais judiciaires (art. 156 al. 1 et 7 OJ). Il n'y
a pas
lieu d'allouer des dépens, des observations n'ayant pas été requises.

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge des
défendeurs,
solidairement entre eux.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Ie Cour d'appel du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.

Lausanne, le 26 mai 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.280/2002
Date de la décision : 26/05/2003
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-05-26;5c.280.2002 ?
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