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23/05/2003 | SUISSE | N°U.267/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 mai 2003, U.267/02


{T 7}
U 267/02

Arrêt du 23 mai 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffière : Mme
Piquerez

P.________, recourante, représentée par Me Pascal Pétroz, avocat,
avenue de
Champel 24, 1211 Genève 12,

contre

Helsana Accidents S.A., Stadelhoferstrasse 25, 8024 Zürich, intimée

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 23 juillet 2002)

Faits :

A.
P. ________, née en 1974, a t

ravaillé en qualité de gardienne
d'enfants et
d'aide ménagère au service de la famille R.________ à H.________. A
ce titre,
elle...

{T 7}
U 267/02

Arrêt du 23 mai 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffière : Mme
Piquerez

P.________, recourante, représentée par Me Pascal Pétroz, avocat,
avenue de
Champel 24, 1211 Genève 12,

contre

Helsana Accidents S.A., Stadelhoferstrasse 25, 8024 Zürich, intimée

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 23 juillet 2002)

Faits :

A.
P. ________, née en 1974, a travaillé en qualité de gardienne
d'enfants et
d'aide ménagère au service de la famille R.________ à H.________. A
ce titre,
elle était assurée contre les accidents professionnels et non
professionnels
auprès de l'Helsana Accidents SA (Helsana).

Le 13 juin 1997, alors qu'elle roulait à environ 30 km/h au volant
d'une
automobile, elle a dû freiner pour éviter un autre véhicule venant en
sens
inverse. Sa voiture a été percutée par le véhicule qui la suivait. Les
parties ont établi un constat amiable d'accident et P.________ a
repris son
travail le même jour. Se plaignant dans les heures suivant l'accident
de
douleurs dans la nuque et les épaules, de violents maux de têtes, de
vertiges
et de nausées, elle s'est rendue le lendemain en consultation au
service des
urgences de l'Hôpital universitaire de Zurich. Son médecin traitant,
la
doctoresse V.________, a diagnostiqué, le 17 juin 1997, une
distorsion de la
colonne cervicale, ainsi qu'une légère contusion de l'épaule droite.
Elle a
attesté une incapacité de travail totale jusqu'au 29 juin 1997.

En raison de la persistance des douleurs, l'assurée a été examinée, à
la
demande de son médecin, par le docteur J.________, spécialiste en
neurologie,
lequel a diagnostiqué un status post-distorsion de la colonne
cervicale avec
léger syndrome cervical et trouble de l'adaptation post-traumatique
avec état
anxieux et agité marqué (rapport du 20 juillet 1998).

Chargés par Helsana de procéder à une expertise, les docteurs
D.________ et
M.________, neurologues à la Clinique X.________, ont conclu à un
status
post-traumatisme indirect de la colonne cervicale avec syndromes
cervical,
cervico-brachial et céphalo-cervical et à un trouble de l'adaptation
post-traumatique avec état anxieux marqué (rapport du 29 octobre
1998). Selon
ces médecins, l'état de l'assurée n'était pas encore définitif, le
traitement
médical devant être poursuivi. Au moment de l'expertise, l'incapacité
de
travail comme aide-ménagère était totale; dans une activité adaptée de
vendeuse ou de standardiste, elle était dans un premier temps de 50 %
pour
diminuer par la suite.

Le docteur H.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie,
qui a
examiné l'assurée, a posé les diagnostics de syndrome douloureux
résistant,
de trouble de la fonction neuro-psychologique et de troubles
psychiques sous
la forme d'un "Shaken Sense of Self Syndrom" (rapport du 11 février
1999).
Selon ce médecin en revanche, le diagnostic de stress
post-traumatique ne
pouvait être posé, en l'absence des critères idoines.
Pour sa part, le docteur L.________, psychiatre et psychothérapeute,
a conclu
à un trouble de l'adaptation post-traumatique avec humeur anxieuse et
dépressive et à un trouble somatoforme douloureux chronique dans le
cadre de
l'évolution d'un syndrome incomplet de PTSD (rapport du 17 octobre
1999).

Finalement, Helsana a mandaté le docteur C.________, spécialiste en
psychiatrie et psychothérapie, afin de procéder à une expertise de
l'assurée.
Au terme de son examen (rapport du 9 février 2000), ce médecin a
conclu à
l'existence d'un trouble somatoforme douloureux persistant (ICD-10 F
45.4).

Par décision du 18 mai 2000, confirmée sur opposition le 14 août 2000,
Helsana a mis un terme au versement des prestations au 31 mai 1999,
au motif
que la relation de causalité adéquate entre les troubles et l'accident
n'était pas donnée.

B.
P.________ a déféré la cause au Tribunal administratif de la
République et
Canton de Genève. Son recours a été rejeté par jugement du 23 juillet
2002,
en raison de l'absence de lien de causalité adéquate entre les
troubles
allégués et l'accident du 13 juin 1997, considéré comme proche de la
banalité.

C.
L'assurée interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, dont
elle requiert l'annulation, en concluant, sous suite de frais et
dépens, au
versement des prestations prévues par la LAA dès le 31 mai 1999.

Helsana conclut au rejet du recours, alors que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit :

1.
Le litige a pour objet le droit de la recourante à des prestations de
l'assureur-accidents au-delà du 31 mai 1999.

2.
Conformément à l'art. 16 LAA, l'assuré totalement ou partiellement
incapable
de travailler à la suite d'un accident a droit à une indemnité
journalière
(al. 1). Le droit à cette indemnité naît le troisième jour qui suit
l'accident. Il s'éteint dès que l'assuré a recouvré sa pleine
capacité de
travail, dès qu'une rente est versée ou dès que l'assuré décède (al.
2).
L'indemnité journalière de l'assurance-accidents n'est pas allouée
lorsque
l'assuré a droit à une indemnité correspondante de
l'assurance-invalidité
(al. 3).

Le droit au versement de telles indemnités suppose en outre,
cumulativement,
l'existence d'un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 337
consid. 1, 118
V 289 consid. 1b et les références) et d'un rapport de causalité
adéquate
(ATF 123 V 103 consid. 3d, 139 consid. 3c, 122 V 416 consid. 2a, et
les
références citées) entre l'atteinte à la santé et l'événement assuré.

3.
3.1En matière de lésions du rachis cervical par accident de type
"coup du
lapin" (Schleudertrauma), sans preuve d'un déficit fonctionnel
organique,
l'existence d'un rapport de causalité naturelle doit, dans la règle,
être
reconnue lorsqu'un tel traumatisme est diagnostiqué et que l'assuré en
présente le tableau clinique typique (cumul de plaintes telles que
maux de
tête diffus, vertiges, troubles de la concentration et de la mémoire,
nausées, fatigabilité accrue, troubles de la vision, irritabilité,
labilité
émotionnelle, dépression, modification du caractère, etc.). Il faut
cependant
que, médicalement, les plaintes puissent de manière crédible être
attribuées
à une atteinte à la santé; celle-ci doit apparaître, avec un degré de
vraisemblance prépondérant, comme la conséquence de l'accident (ATF
119 V 338
consid. 2, 117 V 360 consid. 4b).

3.2 Selon les avis médicaux précités, la recourante, dont le véhicule
a été
percuté par l'arrière, a subi un traumatisme cervical, sans toutefois
que la
preuve d'un déficit fonctionnel organique puisse être apportée. Mais,
en
présence d'un tableau clinique typique présentant de multiples
plaintes (maux
de tête, vertiges, nausées, dépression), dont l'existence n'est pas
remise en
cause par ces médecins, on peut admettre l'existence d'un lien de
causalité
naturelle, à tout le moins partiel, entre l'accident et l'atteinte à
la
santé.

4.
4.1 La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des
choses et
l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un
effet
du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat
paraissant
de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 125 V 461
consid.
5a et les références).

Lors de troubles d'ordre psychique consécutifs à un accident,
l'appréciation
de la causalité adéquate se fonde sur des critères différents selon
que
l'assuré a été victime ou non d'un traumatisme de type "coup du
lapin" à la
colonne cervicale, d'un traumatisme analogue (SVR 1995 UV no 23 p. 67
consid.
2) ou d'un traumatisme cranio-cérébral. En effet, lorsque l'existence
d'un
tel traumatisme est établie, il faut, si l'accident est de gravité
moyenne,
examiner le caractère adéquat du lien de causalité en se fondant sur
les
critères énumérés aux ATF 117 V 366 sv. consid. 6a et 382 sv. consid.
4b,
sans qu'il soit décisif de savoir si les troubles dont est atteint
l'assuré
sont plutôt de nature somatique ou psychique (ATF 117 V 367 consid.
6a,
dernier paragraphe; RAMA 1999 no U 341 p. 408 sv. consid. 3b). En
revanche,
dans les autres cas, l'examen du caractère adéquat du lien de
causalité doit
se faire, pour un accident de gravité moyenne, sur la base des
critères
énumérés aux ATF 115 V 140 consid. 6c/aa et 409 consid. 5c/aa,
concernant les
troubles psychiques consécutifs à un accident.

Si les lésions appartenant spécifiquement au tableau clinique des
suites d'un
traumatisme de type "coup du lapin" à la colonne cervicale, d'un
traumatisme
analogue ou d'un traumatisme cranio-cérébral, bien qu'en partie
établies,
sont toutefois reléguées au second plan par rapport aux problèmes
d'ordre
psychique, ce sont les critères énumérés aux ATF 115 V 140 consid.
6c/aa et
409 consid. 5c/aa, et non pas ceux énumérés aux ATF 117 V 366 sv.
consid. 6a
et 382 sv. consid. 4b, qui doivent fonder l'appréciation de la
causalité
adéquate (ATF 123 V 99 consid. 2a; RAMA 1995 p. 115 ch. 6).

4.2 En ce qui concerne, par ailleurs, la valeur probante d'un rapport
médical, ce qui est déterminant c'est que les points litigieux aient
fait
l'objet d'une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des
examens
complets, qu'il prenne également en considération les plaintes
exprimées par
la personne examinée, qu'il ait été établi en pleine connaissance de
l'anamnèse, que la description du contexte médical et l'appréciation
de la
situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de
l'expert
soient dûment motivées. Au demeurant, l'élément déterminant pour la
valeur
probante n'est ni l'origine du moyen de preuve ni sa désignation comme
rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V
352
consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références).

Le juge peut ainsi accorder une valeur probante aux rapports et
expertises
établis à la demande de l'assureur-accidents aussi longtemps que
ceux-ci
aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont
sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de
contradictions et
qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé
ou de
douter de l'objectivité des appréciations portées.

4.3 Dans le cas particulier, l'assureur intimé a confié une expertise
neurologique aux docteurs D.________ et M.________ et une expertise
psychiatrique au docteur C.________. L'expertise de ce dernier,
rendue au
terme d'examens fouillés, fondée sur l'ensemble du dossier, et dont
les
conclusions sont clairement motivées, revêt ainsi pleine valeur
probante.

Au regard des conclusions de cet expert, il y a ainsi lieu de retenir
que la
recourante présente une personnalité histrionique, dont il est fort
vraisemblable qu'elle existait déjà avant l'accident. Les troubles
psychiques
actuels, de nature psychogène, prédominent, comme cela apparaissait
déjà lors
de l'expertise effectuée par la Clinique X.________ et, dans le
tableau
clinique, la surcharge psychique est ainsi au premier plan.
Dans ces conditions, les suites psychiques de l'accident doivent être
appréciées, en ce qui concerne la causalité adéquate, au regard des
conditions posées par la jurisprudence aux ATF 115 V 140 et 115 V 409.

5.
5.1Selon cette jurisprudence, l'existence d'un lien de causalité
adéquate
entre un accident insignifiant ou de peu de gravité et des troubles
psychiques peut, en règle générale, être d'emblée niée, tandis qu'en
principe
elle doit être admise en cas d'accident grave; pour admettre le
caractère
adéquat du lien de causalité entre un accident de gravité moyenne et
des
troubles psychiques, il faut que soient réunis certains critères
particuliers
et objectifs, dont les plus importants sont les circonstances
concomitantes
particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement
impressionnant
de l'accident, la gravité ou la nature particulière des lésions
physiques,
compte tenu notamment du fait qu'elles sont propres, selon
l'expérience, à
entraîner des troubles psychiques, la durée anormalement longue du
traitement
médical, les douleurs physiques persistantes, les erreurs dans le
traitement
médical entraînant une aggravation notable des séquelles de
l'accident, les
difficultés apparues au cours de la guérison et les complications
importantes, enfin, le degré et la durée de l'incapacité de travail
due aux
lésions physiques (ATF 115 V 139 sv. consid. 6, 408 consid. 5).

Lorsqu'un accident de gravité moyenne se trouve à la limite de la
catégorie
des accidents peu graves, les circonstances à prendre en considération
doivent se cumuler ou revêtir une intensité particulière pour que le
caractère adéquat du lien de causalité puisse être admis (ATF 115 V
140
consid. 6c/aa, 409 consid. 5c/aa).

5.2 En l'espèce, les circonstances de l'accident ne sauraient être
qualifiées
de dramatiques ou de particulièrement impressionnantes. Les lésions
subies
par l'intimée ne sont pas particulièrement graves et la recourante ne
semble
pas avoir été victime d'erreurs dans le traitement médical entraînant
une
aggravation des séquelles de l'accident. Par ailleurs, et à
l'exception des
douleurs persistantes, il n'apparaît pas que l'incapacité de travail
ait
découlé longuement de lésions physiques.

Dans
ces conditions, et même si l'accident du 13 juin 1997 doit être
classé
parmi les accidents de gravité moyenne, à la limite des accidents de
peu de
gravité, contrairement à l'opinion des premiers juges, l'existence
d'un
rapport de causalité adéquate entre cet accident et les atteintes à
la santé
dont souffre la recourante doit être niée. L'intimée était ainsi en
droit de
mettre un terme au versement de ses prestations au-delà du 31 mai
1999.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif de la
République et Canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 23 mai 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.267/02
Date de la décision : 23/05/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-05-23;u.267.02 ?
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