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13/05/2003 | SUISSE | N°1A.22/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 mai 2003, 1A.22/2003


{T 0/2}
1A.22/2003 /col
1P.45/2003

Arrêt du 13 mai 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Aeschlimann et Reeb.
Greffier: M. Kurz.

A. ________,
recourant, représenté par Me Marc-Etienne Favre, avocat, case postale
3149,
1002 Lausanne,

contre

B.________,
intimé, représenté par la Société rurale d'assurance de protection
juridique
FRV, case postale, 1000 Lausanne 6,
Municipalité de Berolle, 1149

Berolle,
Service de l'aménagement du territoire du canton de Vaud, 1014
Lausanne,
représenté par Me Edmond C.M. de Braun, ...

{T 0/2}
1A.22/2003 /col
1P.45/2003

Arrêt du 13 mai 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Aeschlimann et Reeb.
Greffier: M. Kurz.

A. ________,
recourant, représenté par Me Marc-Etienne Favre, avocat, case postale
3149,
1002 Lausanne,

contre

B.________,
intimé, représenté par la Société rurale d'assurance de protection
juridique
FRV, case postale, 1000 Lausanne 6,
Municipalité de Berolle, 1149 Berolle,
Service de l'aménagement du territoire du canton de Vaud, 1014
Lausanne,
représenté par Me Edmond C.M. de Braun, avocat, place St-François 5,
case
postale 2700, 1002 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15,
1014
Lausanne.

permis de construire un hangar agricole et une fosse à purin,

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal
administratif du
canton de Vaud du 24 décembre 2002.

Faits:

A.
Le 19 octobre 2001, B.________, agriculteur à Berolles, a requis
l'autorisation de construire un hangar pour machines agricoles et une
fosse à
purin ouverte de 450 m3 , au sud-est de la parcelle n° xxx dont il est
propriétaire. La fosse existante, de 80 m3, située à proximité de
l'habitation et des écuries existantes au nord-ouest de la parcelle,
était
insuffisante au regard des exigences de la protection des eaux. Le
projet a
suscité l'opposition de A.________, propriétaire de la parcelle n°
yyy où se
trouve sa maison d'habitation, et dans le prolongement de laquelle
devait
être implanté le projet. L'opposant invoquait l'harmonie des
alentours du
village et se plaignait d'une perte de la vue dont il bénéficiait
depuis sa
maison. Il préconisait un déplacement des installations au
nord-ouest. Le 11
décembre 2001, la Centrale des autorisations en matière de
constructions
(CAMAC) a fait parvenir à la municipalité l'ensemble des décisions
nécessaires. En particulier, le Service de l'aménagement du
territoire (SAT)
a estimé que les travaux envisagés étaient conformes à l'utilisation
de la
zone agricole, que le hangar et la fosse (autorisée en 1997 mais non
réalisée) étaient d'une surface et d'un volume admissibles, que
l'implantation aux abords du centre d'exploitation n'était pas
possible pour
des raisons d'accessibilité et de configuration du terrain, et que
l'emplacement prévu se situait dans le prolongement du village. Des
mesures
d'intégration complémentaires (plantation d'arbres au sud-est) étaient
exigées.
Le 14 janvier 2002, après s'être rendue sur les lieux, la
municipalité a
décidé de lever l'opposition.

B.
Par arrêt du 24 décembre 2002, après une nouvelle inspection locale,
le
Tribunal administratif du canton de Vaud a rejeté le recours formé par
A.________. Les installations correspondaient aux besoins de
l'exploitation,
et il n'était pas possible de les regrouper avec le reste des
bâtiments, en
raison de difficultés d'accès et de la pente, qui nécessiteraient des
travaux
de remblayage importants. La construction s'intégrait dans le tissu
villageois. Elle était distante d'environ 90 m de la villa du
recourant, et
celui-ci conservait un dégagement au sud-est, ainsi qu'une vue sur le
paysage
lointain constitué par le massif forestier de Ballens.

C.
A. ________ forme dans une même écriture un recours de droit
administratif et
de droit public contre ce dernier arrêt. Sur recours de droit
administratif,
il demande le renvoi de la cause au Tribunal administratif pour
nouvelle
décision dans le sens des considérants, le cas échéant après
complément
d'instruction. Sur recours de droit public, il conclut à l'annulation
de
l'arrêt attaqué. L'effet suspensif a également été requis. Il a été
accordé,
par ordonnance présidentielle du 4 mars 2003.
Le Tribunal administratif propose le rejet du recours, de même que
l'intimé
B.________. Le SAT conclut au rejet du recours de droit administratif
et à
l'irrecevabilité du recours de droit public. L'Office fédéral du
développement territorial a renoncé à déposer des observations. La
municipalité ne s'est pas déterminée.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité et
la
qualification juridique des recours qui lui sont soumis (ATF 128 II
311
consid. 1 p. 314-315).

1.1
Le recours de droit administratif est ouvert, conformément à l'art.
34 LAT,
notamment contre les décisions de dernière instance cantonale sur la
reconnaissance de la conformité de l'affectation de constructions
hors de la
zone à bâtir. Le recours de droit administratif permet ainsi
d'obtenir le
respect des principes de droit fédéral relatifs à l'affectation de la
zone
agricole, eu faisant notamment contrôler que les installations
projetées sont
adaptées, par leur importance et leur implantation, aux besoins
objectifs de
l'exploitation agricole (ATF 123 II 335 consid. 1a p. 338, 114 Ib 131
consid.
2 p. 133, relatifs à l'ancien art. 34 LAT). En revanche, lorsque sont
invoquées, à l'encontre d'une autorisation de construire, des règles
du droit
cantonal ayant une portée indépendante par rapport au droit fédéral
(c'est-à-dire qui ne sont ni d'exécution du droit fédéral, ni en
étroite
connexité avec celui-ci), en particulier les dispositions sur
l'esthétique et
l'intégration des bâtiments dans le paysage, le recourant doit agir
par la
voie du recours de droit public (ATF 125 II 10 consid. 2a p. 13; 123
II 359
consid. 1a/aa p. 361; 121 II 72 consid. 1b p. 75;
Aemisegger/Kuttler/Moor/Ruch, Commentaire LAT, n° 15 in fine ad art.
34 LAT).

1.2 En l'espèce, le recourant ne conteste pas que l'installation
(hangar et
fosse à purin) est en soi nécessaire à l'exploitation agricole, et
proportionnée aux besoins de l'exploitation. Il ne soutient pas non
plus que
l'implantation prévue ne permettrait pas une exploitation rationnelle
du
domaine agricole; cette question, qui relève bien de la conformité à
l'affectation de la zone (ATF 114 Ib précité), a été examinée par la
cour
cantonale, qui a admis que l'implantation prévue était la seule qui
permettait un accès aisé depuis le chemin situé à l'est de la
parcelle.
Le recourant préconise un déplacement des installations, sur la même
parcelle. Ce faisant, il invoque l'intérêt public lié à la nécessité
de
regrouper les bâtiments, posée par l'art. 83 al. 3 du règlement
d'application
de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire (RATC), dont la
teneur
est la suivante: "Les différents bâtiments d'exploitation d'une
entreprise
agricole ou assimilée, y compris l'habitation de l'exploitant,
doivent être
regroupés et former un ensemble architectural. Des dérogations
peuvent être
accordées par le département si les impératifs de l'exploitation le
justifient". Or, cette exigence de regroupement des bâtiments ne fait
pas
expressément partie des conditions posées à l'art. 16a LAT pour
admettre la
conformité d'une construction à l'affectation de la zone agricole; la
nécessité de ne pas disperser les constructions en zone agricole, et
de
regrouper autant que possible les bâtiments d'une même exploitation,
découle
certes de l'art. 16 LAT, et en particulier de l'exigence de maintenir
des
surfaces libres d'une certaine étendue (art. 16 al. 2 LAT), mais cette
question est sans rapport avec celle du respect proprement dit de
l'affectation de la zone agricole. L'art. 83 al. 3 RATC apparaît
comme une
disposition de police des constructions qui tend essentiellement à
sauvegarder l'esthétique et l'intégration des constructions hors de
la zone à
bâtir; elle ne saurait, par conséquent, être considérée comme une
disposition
d'exécution du droit fédéral, ou présentant un rapport étroit avec
celui-ci.

1.3 C'est par conséquent par la voie du recours de droit public que le
recourant devait agir.
Le recourant invoque d'ailleurs aussi l'art. 83 al. 3 RATC, à côté
des art.
54 al. 1 et 2 LATC et 76 du règlement communal de Berolle, comme
moyen à
l'appui de son recours de droit public. Il y a lieu d'examiner la
recevabilité de ces différents griefs au regard de l'art. 88 OJ.

2.
Aux termes de cette disposition, ont qualité pour recourir les
particuliers
ou les collectivités lésés par des arrêtés ou décisions qui les
concernent
personnellement ou qui sont de portée générale. Le recours de droit
public
n'est ainsi ouvert, selon la jurisprudence, qu'à celui qui est
atteint par
l'acte attaqué dans ses intérêts personnels et juridiquement
protégés; le
recours formé pour sauvegarder l'intérêt général, ou visant à
préserver de
simples intérêts de fait, est en revanche irrecevable (ATF 126 I 43
consid.
1a p. 44, 81 consid. 3b p. 85; 125 II 440 consid. 1c et les arrêts
cités).

2.1 A l'encontre d'une autorisation de construire, le propriétaire
voisin ne
peut recourir que lorsqu'il invoque des normes qui tendent, au moins
dans une
certaine mesure, à la protection de ses propres intérêts (ATF 127 I 44
consid. 2c p. 46). Il doit en outre se trouver dans le champ de
protection
des dispositions dont il allègue la violation, et être touché par les
effets
prétendument illicites de la construction ou de l'installation
litigieuse
(ATF 121 I 267 consid. 2 p. 268 et les arrêts cités). Il ne peut
ainsi se
prévaloir des principes généraux de la planification, des
prescriptions sur
la protection de la nature et du paysage (ATF 116 Ia 433 consid. 2a
p. 437)
et des clauses d'esthétique (ATF 118 Ia 232 consid. 1b p. 235; 112 Ia
88
consid. 1b p. 90), qui tendent exclusivement à préserver l'intérêt
public. Il
peut en revanche invoquer les prescriptions relatives aux distances,
aux
dimensions des bâtiments et à la densité des constructions, qui sont
des
règles mixtes (118 Ia 232 consid. 1b p. 235).

2.2 Force est de constater qu'aucune des dispositions invoquées par le
recourant ne tend à la protection des propriétaires voisins. De même
que
l'art. 83 al. 3 RATC, l'art. 76 du règlement communal de Berolle tend
à
assurer l'intégration des constructions dans le milieu, bâti et non
bâti. Il
s'agit là de règles d'esthétique qui ont pour but de préserver une
harmonie
d'ensemble des secteurs bâtis, et non de préserver une vue dégagée
pour les
propriétaires voisins. Quant à l'art. 54 al. 1 et 2 LATC, il tend à
assurer
une certaine protection des sites, paysages d'une beauté
particulière, rives
de lacs, réserves naturelles et espace de verdure, en limitant les
constructions. Il ne fait pas non plus partie des normes destinées à
protéger
les voisins, au sens de la jurisprudence rappelée ci-dessus.

3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit administratif et de
droit
public doit être déclaré irrecevable. Conformément à l'art. 156 al. 1
OJ, un
émolument judiciaire est mis à la charge du recourant, qui succombe.
L'intimé
B.________ est représenté par une assurance de protection juridique
qui n'a
elle-même pas recouru aux services d'un avocat. Il convient néanmoins
de lui
allouer des dépens réduits, à la charge du recourant. Le SAT a
procédé avec
l'assistance d'un avocat, mais, conformément à l'art. 159 al. 2 OJ,
il ne lui
est pas alloué de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit administratif et de droit public est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Une indemnité de dépens de 800 fr. est allouée à l'intimé B.________,
à la
charge du recourant. Il n'est pas alloué d'autres dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux représentants des
parties et du
Service de l'aménagement du territoire du canton de Vaud, à la
Municipalité
de Berolle, au Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi qu'à
l'Office
fédéral du développement territorial.

Lausanne, le 13 mai 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.22/2003
Date de la décision : 13/05/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-05-13;1a.22.2003 ?
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