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09/05/2003 | SUISSE | N°6S.116/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 mai 2003, 6S.116/2003


{T 0/2}
6S.116/2003 /mks

Arrêt du 9 mai 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Karlen.
Greffier: M. Denys

X.________,
recourant, représenté par Me Philippe Girod, avocat,
rue Plantamour 42, 1201 Genève,

contre

Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

Escroquerie,

pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de
Genève,
Chambre pénale, du 24 fÃ

©vrier 2003.

Faits:

A.
Par jugement du 9 octobre 2001, le Tribunal de police du canton de
Genève a
condamné X.________...

{T 0/2}
6S.116/2003 /mks

Arrêt du 9 mai 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Karlen.
Greffier: M. Denys

X.________,
recourant, représenté par Me Philippe Girod, avocat,
rue Plantamour 42, 1201 Genève,

contre

Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

Escroquerie,

pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de
Genève,
Chambre pénale, du 24 février 2003.

Faits:

A.
Par jugement du 9 octobre 2001, le Tribunal de police du canton de
Genève a
condamné X.________, pour escroqueries, à trois mois d'emprisonnement
sous
déduction de deux jours de détention préventive.

B.
Par arrêt du 24 février 2003, la Chambre pénale de la Cour de justice
genevoise a rejeté le recours de X.________ et confirmé le jugement de
première instance. En bref, il ressort ce qui suit de cet arrêt:

Le 8 octobre 1999, exposant avoir besoin d'argent pour l'exploitation
d'un
manège, X.________ a emprunté 20'000 francs à A.________, dont la
fille
pratiquait l'équitation audit manège. A.________ a consenti cette
avance en
croyant que X.________ entretenait des relations professionnelles
étroites
avec l'un de ses amis, B.________. A teneur de la reconnaissance de
dette
signée le même jour, X.________ s'est obligé à payer à A.________ la
somme de
20'000 francs dix semaines plus tard, soit le 18 décembre 1999. En
garantie
de cet engagement, X.________ a remis un chèque d'un même montant,
daté du 19
décembre 1999 et tiré sur un compte postal, dont il était titulaire
avec
B.________. Le prêt n'a pas été honoré à l'échéance. A.________ n'a
pas pu
encaisser le chèque, le compte n'étant en particulier pas provisionné.
A.________ avait entre-temps appris que X.________ avait obtenu
d'autres
prêts de tiers, qui n'avaient jamais été remboursés, qu'il faisait
l'objet de
poursuites pour plus de 70'000 francs et qu'il avait déjà été condamné
pénalement. A.________ a déposé plainte pénale le 21 janvier 2000.
Ultérieurement, X.________ lui a remboursé 6'500 francs en plusieurs
acomptes.

Le 12 mars 2000, à la suite d'une annonce qu'il avait fait paraître
dans la
presse spécialisée, X.________ a acheté à C.________ un cheval pour
le prix
de 2'000 francs payable "de suite", c'est-à-dire dans un délai
d'usage de
neuf jours. Un mois après, il a acheté à D.________ un autre cheval
pour
3'500 francs. Il a immédiatement pris possession des deux chevaux. Il
ne
s'est pas acquitté des montants convenus. Il a été retenu qu'il avait
agi
avec la volonté délibérée de ne pas honorer ses engagements. Le 5 mai
2000,
C.________ et D.________ ont dénoncé les faits au Procureur général.
Trois
mois plus tard, X.________ leur a versé un acompte de 2'000 francs.
Le solde
dû demeure impayé.
S'agissant de ses antécédents, X.________ a déjà fait l'objet des
condamnations suivantes: le 13 décembre 1985, à sept ans de réclusion
pour
escroqueries par métier, faux dans les titres et abus de confiance;
le 11
janvier 1995, à huit mois d'emprisonnement pour escroqueries et abus
de
confiance; le 31 juillet 1997, à trois mois d'emprisonnement pour
abus de
confiance.

Une expertise psychiatrique a été menée. Selon l'experte, la capacité
pénale
de X.________ doit être considérée comme entière. Elle admet un
risque de
récidive et indique que ce dernier suit une thérapie de manière
régulière, ce
qui est nouveau. Elle précise que les chances de succès de ce
traitement ne
seraient pas entravées par l'exécution d'une peine privative de
liberté.

C.
X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral contre cet
arrêt. Il
conclut à son annulation et sollicite par ailleurs l'assistance
judiciaire.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle
l'application du
droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base d'un état de fait
définitivement
arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 273 al. 1 let. b et 277bis
al. 1
PPF). Le raisonnement juridique doit donc être mené sur la base des
faits
retenus dans la décision attaquée, dont le recourant est irrecevable à
s'écarter (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67).

Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne
peut
aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Les
conclusions
devant être interprétées à la lumière de leur motivation (ATF 127 IV
101
consid. 1 p. 103), le recourant a circonscrit les points litigieux.

2.
En l'espèce, le recourant remet uniquement en cause les escroqueries
commises
au détriment de C.________ et de D.________. Il conteste avoir agi
astucieusement.

2.1 Sur le plan objectif, l'escroquerie réprimée par l'art. 146 CP
suppose en
particulier que l'auteur ait usé de tromperie, que celle-ci ait été
astucieuse, que l'auteur ait ainsi induit la victime en erreur (sous
réserve
de l'erreur préexistante), que cette erreur ait déterminé la personne
trompée
à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un
tiers et
que la victime ait subi un préjudice patrimonial.

L'astuce au sens de cette disposition est réalisée lorsque l'auteur
recourt à
un édifice de mensonges, à des manoeuvres frauduleuses ou à une mise
en
scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations,
si leur
vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut
raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe
de
vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera
à le
faire en raison d'un rapport de confiance particulier. L'astuce n'est
toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum
d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on
pouvait
attendre d'elle. Il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait
escroquerie, que
la dupe ait fait preuve de la plus grande diligence et qu'elle ait
recouru à
toutes les mesures de prudence possibles; la question n'est donc pas
de
savoir si elle a fait tout ce qu'elle pouvait pour éviter d'être
trompée.
L'astuce n'est exclue que lorsque la dupe est coresponsable du
dommage parce
qu'elle n'a pas observé les mesures de prudence élémentaires qui
s'imposaient
(ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 20/21).

2.2 En l'espèce, il a été établi qu'au moment de la passation des
contrats,
le recourant avait agi avec la volonté délibérée de ne pas
s'acquitter du
prix des chevaux. Le recourant conteste cela. Or, savoir ce que
l'auteur
voulait relève de l'établissement des faits, de sorte que la critique
du
recourant sur ce point est irrecevable dans un pourvoi (ATF 125 IV 49
2d p.
56).

En étant d'emblée décidé à ne pas respecter les contrats, le
recourant a
trompé les venderesses sur sa volonté de payer le prix convenu et les
a
déterminées à passer un acte préjudiciable à leurs intérêts. La
question à
résoudre ici est de définir si cette tromperie doit ou non être
qualifiée
d'astucieuse.

Une tromperie portant sur la volonté d'exécuter une prestation n'est
pas
astucieuse dans tous les cas, mais uniquement lorsque la vérification
de la
capacité d'exécution n'est pas possible, ne l'est que difficilement
ou ne
peut être raisonnablement exigée, ou encore, en conséquence,
lorsqu'aucune
conclusion ne peut être tirée quant à la volonté d'exécution (ATF 125
IV 124
consid. 3a p. 128; 118 IV 359 consid. 2 p. 360 ss).

Selon les constatations cantonales, le recourant a fait paraître dans
la
presse spécialisée une annonce selon laquelle il désirait acquérir des
chevaux. Dans ce contexte, C.________ et D.________ se sont adressées
à lui.
Elles lui ont chacune proposé un cheval, dont le prix de vente a été
fixé
respectivement à 2'000 et 3'500 francs. Le recourant a immédiatement
pris
possession des chevaux et s'est engagé à payer les venderesses à bref
délai,
taisant ses véritables intentions à ce propos.

Dans les circonstances d'espèce, rien ne permet de dire que les
venderesses
ont fait preuve d'une légèreté justifiant d'exclure l'astuce. En
effet, le
prix de vente des chevaux n'était pas d'une importance telle qu'il
imposait
en soi un contrôle sérieux de la solvabilité du recourant. L'annonce
du
recourant dans la presse spécialisée permettait de supposer qu'il
s'agissait
d'une opération courante, laquelle ne devait susciter aucune méfiance
particulière. De plus, l'arrêt attaqué (p. 3) mentionne à propos du
cheval
vendu par C.________ qu'il était payable "de suite" et ajoute
"c'est-à-dire
dans le délai d'usage de 9 jours". De la sorte, la Chambre pénale
s'est
implicitement référée à la plainte pénale du 5 mai 2000 déposée par
les
venderesses, dont il ressort que "selon le Code des obligations le
bétail se
paie dans les 9 jours". Il doit s'agir d'une référence à l'art. 202
CO, qui
prévoit en particulier que le vendeur n'est responsable envers
l'acheteur que
si les défauts ont été découverts et signalés dans les neuf jours à
partir de
la délivrance. Entendu par la police le 11 août 2000, le recourant a
lui-même
indiqué que d'après la loi, il avait neuf jours pour effectuer le
paiement ou
décider de rendre le cheval si ce dernier présente un problème. En
faisant
allusion à un délai d'usage de neuf jours, on comprend donc que la
Chambre
pénale a admis qu'il était conforme à la pratique que les venderesses
n'aient
pas exigé un paiement immédiat. Au vu de l'ensemble des éléments
précités, le
recourant s'est bien rendu coupable de tromperie astucieuse.

3.
Le pourvoi doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme
il
paraissait d'emblée voué à l'échec, la requête d'assistance
judiciaire est
rejetée (art. 152 al. 1 OJ). Le recourant, qui succombe, supporte les
frais
de la cause (art. 278 al. 1 PPF), lesquels sont fixés de manière
réduite pour
tenir compte de sa mauvaise situation financière.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du
recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Procureur général du canton de Genève et à la Cour de justice
genevoise,
Chambre pénale.

Lausanne, le 9 mai 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.116/2003
Date de la décision : 09/05/2003
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-05-09;6s.116.2003 ?
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