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05/05/2003 | SUISSE | N°6P.34/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 05 mai 2003, 6P.34/2003


{T 0/2}
6P.34/2003 /viz

Arrêt du 5 mai 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Mme Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffière: Mme Kistler.

A. A.________,
recourant, représenté par Me Mauro Poggia, avocat,
rue De-Beaumont 11, 1206 Genève,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale, 1014 Lausanne.

art. 9 Cst. (procédure pénale; arbitraire),r>
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois,
Cour de
cassation pénale, du 14 août 2002.
...

{T 0/2}
6P.34/2003 /viz

Arrêt du 5 mai 2003
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Mme Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffière: Mme Kistler.

A. A.________,
recourant, représenté par Me Mauro Poggia, avocat,
rue De-Beaumont 11, 1206 Genève,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale, 1014 Lausanne.

art. 9 Cst. (procédure pénale; arbitraire),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois,
Cour de
cassation pénale, du 14 août 2002.

Faits:

A.
Par jugement du 18 avril 2002, le Tribunal de police de
l'arrondissement de
La Côte a condamné A.A.________, pour faux dans les titres, à la
peine d'un
mois d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans. Il a en outre
donné acte
à la Fondation de prévoyance des sociétés du groupe Y.________ de ses
réserves civiles contre A.A.________ et lui a alloué 5'000 francs de
dépens.
Statuant le 14 août 2002, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal
vaudois a confirmé le jugement de première instance.

B.
En résumé, les faits à la base de cette condamnation sont les
suivants:
B.aA.A.________, né en 1950, a été salarié dans différentes branches
du
groupe bancaire Y.________ pendant une quinzaine d'années. En janvier
1999,
il a déposé une demande de prise en charge à 100 % par
l'assurance-invalidité, dès lors qu'il souffrait notamment de
lombalgies,
cruralgies et de douleurs à la hanche gauche.
Le 17 septembre 1999, la Fondation de Prévoyance des sociétés du
groupe
Y.________ (ci-après: la Fondation) s'est adressée à l'Office de
l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: Office AI),
avançant
que A.A.________ "pratiquerait le golf et participerait plus ou moins
régulièrement à des compétitions au Golf du club X.________, dont il
est
membre". Elle ajoutait qu'elle n'était évidemment pas en mesure de
déterminer
si cette pratique était compatible avec l'affection dont souffrait
A.A.________.

B.b C'est dans ces circonstances que, le 25 septembre 1999, à la
demande de
A.A.________, la direction du club X.________ a fait l'attestation
suivante:
"Par ces lignes, nous attestons que Monsieur A.A.________ n'a
participé à
aucune compétition dans notre club pendant les saisons 1997 et 1998. "
Le conseil de A.A.________ a transmis cette attestation à l'Office
AI. Le
directeur du club a admis qu'il avait pu se montrer négligent et
n'avait pu
que se fonder sur les déclarations de A.A.________, puisque les
renseignements de l'attestation ne concordaient pas avec les pièces
que
détenait le club de golf. Celles-ci établissaient en effet que
A.A.________
avait participé à plusieurs compétitions, soit en 1997 à une
compétition
individuelle et à cinq compétitions par équipe et en 1998, à neuf
compétitions par équipe.

B.c Par lettre du 4 octobre 1999, l'Office AI s'est adressé comme
suit au
club X.________:
"La personne citée en marge est membre du golf et participe
régulièrement à
des entraînements et tournois sur votre terrain. Selon des renseigne
ments
dignes de foi, M. A.A.________ aurait participé le 1er août 1999 à
un
départ interne et le 12 septembre 1999 à une compétition Cartier.
Nous vous
saurions gré de bien vouloir nous confirmer l'engagement de M.
A.A.________
aux différentes compétitions, étant entendu que notre assurance se
réserve le
droit de confronter les témoignages requis pour l'instruction du
dossier de
notre assuré."
Le directeur du club X.________ a préparé le projet suivant de
réponse daté
du 8 octobre 1999, lequel comprend en pied de page notamment la note
manuscrite "lettre proposée à M. A.A.________ après discussion avec
lui,
j'attends sa réponse pour l'envoi":
"En référence à votre lettre du 4 octobre 1999 concernant notre membre
A.A.________, en qualité de golfeur, nous vous signalons que nous ne
donnons
aucune information sur nos membres; mais avec l'autorisation de
Monsieur
A.A.________ à titre confidentiel, nous pouvons vous confirmer que
celui-ci a
fait équipe avec Madame B.A.________, le 12 septembre 1999, à la
Compétition
Cartier.
D'autre part, nous ne pouvons pas vous dire que Monsieur A.A.________
participe régulièrement à des entraînements et tournois sur le Golf
du club
X.________, et nous vous serions gré de nous préciser ce que vous
entendez
par un départ interne le 1er août."
L'attestation finale, datée du 22 octobre 1999 et signée par le
directeur du
club X.________, a la teneur suivante:
"Par la présente, nous faisons suite à votre courrier du 4 courant.
En tant qu'association sportive privée, nous avons pour politique de
refuser
systématiquement toute demande de renseignements concernant l'un ou
l'autre
de nos membres.
Toutefois, compte tenu du cas particulier et avec l'accord de Monsieur
A.A.________, nous vous confirmons volontiers que celui-ci figure
dans nos
registres pour l'année golfique 1999, en qualité de membre actif et
que
celui-ci était inscrit aux compétitions organisées les 1er août et 12
septembre 1999, pour cette dernière en qualité de coéquipier de son
épouse,
Madame B.A.________."
L'instruction a permis d'établir que A.A.________ avait participé à
huit
compétitions par équipe et à deux compétitions individuelles entre le
1er
janvier et le 22 octobre 1999.

B.d La Fondation a déposé plainte, se constituant du même coup partie
civile,
par lettre du 30 août 2000.

B.e Par décision du 21 janvier 2002, l'Office AI a rejeté la demande
de
prestations AI de A.A.________. Il a constaté que celui-ci ne
souffrait ni
d'une atteinte physique, ni d'une atteinte psychique diminuant sa
capacité de
travail.

C.
A.A.________ forme un recours de droit public auprès du Tribunal
fédéral. Se
plaignant d'arbitraire dans l'application du droit cantonal et dans
l'établissement des faits, il demande l'annulation de l'arrêt
cantonal.
Parallèlement, il a déposé un pourvoi en nullité.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral peut être formé contre
une
décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des
citoyens
(art. 84 al. 1 let. a OJ). Il ne peut cependant pas être exercé pour
une
violation du droit fédéral, laquelle peut donner lieu à un pourvoi en
nullité
(art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc être invoqué dans le
cadre
d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ;
art. 269
al. 2 PPF).
Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que
les
griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans
l'acte
de recours. Il résulte de l'art. 90 al. 1 let. b OJ que le recourant,
en se
fondant sur la décision attaquée, doit indiquer quels sont les droits
constitutionnels qui auraient été violés et préciser, pour chacun
d'eux, en
quoi consiste la violation (voir par exemple ATF 122 I 70 consid. 1c
p. 73).

2.
Invoquant une application arbitraire des articles 83 et 94 du Code de
procédure pénale vaudois (ci-après: CPP/VD), le recourant fait valoir
que la
Fondation n'était pas lésée par l'infraction dénoncée et n'aurait pas
dû être
admise comme partie civile.
Selon l'article 83 CPP/VD, toute personne lésée par une infraction
peut
porter plainte. Doit être considéré comme lésé celui qui prétend être
atteint
immédiatement et personnellement dans ses droits protégés par la loi,
lors de
la commission d'une infraction (ATF 118 IV 209 consid. 2 p. 211;
Bovay/Dupuis/Moreillon/Piguet, Procédure pénale vaudoise, Code
annoté, n. 2.1
ad. art. 83 CPP). Le plaignant est alors de plein droit partie civile
(art.
94 CPP). Le juge n'a ainsi pas à rendre une décision comme il doit le
faire
s'agissant d'un tiers non plaignant qui entend être partie civile au
procès
(art. 96 CPP).
En l'espèce, la Fondation a déposé plainte le 30 août 2000. Dans sa
plainte,
elle expose notamment qu'elle risque de devoir payer au recourant des
prestations à concurrence de 218'952 fr. par an si celui-ci est
reconnu
invalide (sur la base notamment des fausses attestations). Aux
débats, elle a
fait valoir qu'elle était réassurée par K.________ et avait subi des
pertes
dans sa participation aux excédents (soit environ 142'000 fr. en 2001
et
188'000 fr. pour 2002). Les taux de participation aux excédents
avaient chuté
de 40 % à 0 % dès le 1er janvier 2001 en raison de l'annonce du cas
d'invalidité du recourant et le taux serait maintenu à 0 % aussi
longtemps
que le cas resterait en suspens. En cas de refus des prestations AI,
les
sommes seraient certes remboursées, mais avec un intérêt moindre que
celui
que la Fondation aurait obtenu en procédant à des placements.
Il faut dès lors admettre la qualité de lésée de la Fondation.
Infondé, le
grief du recourant doit être rejeté.

3.
Le recourant se plaint en outre d'arbitraire dans l'établissement des
faits.

3.1 Dans le recours de droit public, le recourant peut se plaindre
d'arbitraire dans l'établissement des faits pertinents pour le
prononcé. Le
recours de droit public n'est cependant pas un appel qui permettrait
au
Tribunal fédéral de procéder lui-même à l'appréciation des preuves; le
Tribunal fédéral n'établit pas les faits.
Une décision n'est arbitraire selon la jurisprudence que lorsqu'elle
viole
gravement une règle de droit ou un principe juridique clair et
indiscuté ou
lorsqu'elle contredit de manière choquante le sentiment de la justice
et de
l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que
si
celle-ci est insoutenable, en contradiction manifeste avec la
situation
effective, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation
d'un
droit certain. Il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable,
encore
faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF 124 V 137
consid. 2b
p. 139).

3.2 En premier lieu, le recourant soutient que l'autorité cantonale a
retenu,
sans fondement et arbitrairement, en rapport avec les deux
attestations
litigieuses, que l'Office AI entendait connaître les participations du
recourant à toute compétition de golf sans distinction.
L'autorité cantonale a bien expliqué, à propos de l'attestation du 25
septembre 1999, que seules les compétitions individuelles comptaient
pour le
handicap, que les compétitions par équipe n'obligeaient pas les
joueurs à
frapper la balle à chaque coup et avaient un caractère plus ludique
que les
compétitions individuelles sans supprimer toutefois l'engagement qui
fait
l'intérêt du jeu. Il n'y a rien d'arbitraire à retenir que les
compétitions
par équipe, même si elles requièrent un effort physique moindre que
les
compétitions individuelles, étaient susceptibles d'intéresser
l'Office AI,
alors que le recourant se plaignait de ne pas pouvoir marcher plus
d'une
heure. Mal fondé, le grief du recourant doit donc être rejeté.
Quant à l'attestation du 22 octobre 1999, dans la mesure où il s'agit
d'apprécier si les réponses données par le club sportif sont exactes
eu égard
aux questions posées, le moyen relève du pourvoi en nullité (cf.
consid.
3.5).
3.3 Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir retenu que le
directeur du club de golf s'était fondé sur ses déclarations pour
établir
l'attestation du 25 septembre 1999, alors que celui-ci aurait déclaré
devant
la police qu'il ne se souvenait plus de ce document et sur quelle
base il
avait donné ces renseignements.
Dans la procédure pénale vaudoise, le juge de première instance
établit
souverainement les faits, en appréciant librement les preuves sur la
base de
l'instruction aux débats (art. 325 CPP/VD). En l'absence de la
verbalisation
des témoignages, l'établissement des faits, en tant qu'il repose sur
l'appréciation des témoignages, ne peut donc faire l'objet d'aucun
contrôle
par le Tribunal fédéral, dès lors que celui-ci ignore le contenu des
dépositions faites en première instance (ATF 126 I 15 c. 2a/bb p.
18). En
l'espèce, le recourant, assisté d'un avocat, n'a pas requis la
verbalisation
des déclarations du directeur du golf lors des débats. En
conséquence, la
Cour de céans ignore ce que le directeur du golf a dit lors de
l'audience et
ne peut dès lors examiner s'il y a arbitraire dans l'établissement
des faits.
Infondé, le grief du recourant doit donc être rejeté.

3.4 Le recourant s'en prend également à l'affirmation de l'autorité
cantonale, selon laquelle son intention aurait été de "dissoudre la
méfiance
de l'Office cantonal AI, afin d'obtenir un résultat favorable à
l'accueil de
la demande AI"; selon lui, aucun élément du dossier ne saurait
permettre
d'affirmer qu'il aurait transmis la première attestation et laissé
transmettre la seconde, connaissant leur fausseté.
Il ressort de l'arrêt cantonal que l'Office AI voulait des
renseignements sur
la pratique du golf par le recourant, car il estimait qu'une activité
d'une
certaine importance dans ce domaine pouvait jouer un rôle dans la
décision
qu'il rendrait, que le recourant a eu connaissance de cette demande de
renseignements, que son conseil a signifié à la Fondation que ses
"allégations intempestives" sur la participation de son client à des
compétitions de golf étaient susceptibles de "causer un grave
dommage" à ce
dernier et qu'ensuite le recourant a obtenu auprès du club de golf une
attestation. Il n'y a rien d'arbitraire
de déduire de ces faits que le
recourant désirait "dissoudre la méfiance de l'Office AI, afin
d'obtenir un
résultat favorable à l'accueil de la demande AI". Le grief du
recourant est
donc infondé et doit être rejeté.

3.5 Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir écrit que
l'attestation du 22 octobre 1999 "constate des faits tout aussi
faux". Il
prétend que le club de golf n'aurait fait que répondre avec
exactitude aux
questions de l'Office AI.
En l'occurrence, l'autorité cantonale a repris, dans son arrêt, la
teneur des
deux lettres et a estimé, après une analyse de texte, que la lettre
du golf
ne répondait pas de manière correcte à la demande de l'Office AI.
Savoir
quelle est la portée de la réponse donnée par le club et si celle-ci
est
exacte eu égard aux questions posées est une question
d'interprétation du
texte, qui relève du pourvoi en nullité et non du recours de droit
public. Le
moyen du recourant est donc irrecevable.

3.6 Enfin, le recourant estime que l'autorité cantonale a retenu
arbitrairement qu'il était intervenu dans l'établissement de la
lettre du 22
octobre 1999, alors que cette lettre a été rédigée par des
représentants du
club de golf en réponse à une demande de l'Office AI.
Au vu des faits retenus par l'autorité cantonale, cette conclusion
n'a rien
d'arbitraire. L'Office AI a en effet demandé au directeur du club
X.________
une confirmation quant à l'activité du recourant; le directeur a
ensuite
préparé un projet, qu'il a soumis au recourant et a attendu sa
réponse avant
d'envoyer une attestation définitive à l'AI. Il n'y a dès lors rien
d'arbitraire d'avoir retenu que le recourant a participé à la
confection de
l'attestation. Infondé, le grief du recourant doit être rejeté.

4.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure
où il est
recevable, et le recourant, qui succombe, doit supporter les frais
(art. 156
al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois,
Cour de
cassation pénale.

Lausanne, le 5 mai 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6P.34/2003
Date de la décision : 05/05/2003
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-05-05;6p.34.2003 ?
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