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30/04/2003 | SUISSE | N°I.360/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 avril 2003, I.360/02


{T 7}
I 360/02

Arrêt du 30 avril 2003
IIe Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard. Greffier :
M.
Métral

T.________, recourante, représentée par la Fédération suisse pour
l'intégration des handicapés (FSIH), place Grand-Saint-Jean 1, 1003
Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 18 février 2002)

Faits :

A.
T. ________ travaillait à mi-temps comme secrétaire de direction,
pour un
salaire de 2'000 fr. par mois. De ...

{T 7}
I 360/02

Arrêt du 30 avril 2003
IIe Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard. Greffier :
M.
Métral

T.________, recourante, représentée par la Fédération suisse pour
l'intégration des handicapés (FSIH), place Grand-Saint-Jean 1, 1003
Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 18 février 2002)

Faits :

A.
T. ________ travaillait à mi-temps comme secrétaire de direction,
pour un
salaire de 2'000 fr. par mois. De langue maternelle anglaise, elle
maîtrise
également le français. Dès le mois d'avril 1985, ses médecins
traitants, les
docteurs A.________ et B.________, ont attesté d'une incapacité de
travail
totale dans la profession exercée jusqu'alors, en raison notamment de
polyarthralgies non inflammatoires d'origine indéterminée, de
cervicalgies et
dorsalgies récidivantes et d'un état dépressif. Une demi-rente
d'invalidité
lui a été allouée avec effet dès le 1er avril 1986, puis une rente
entière,
dès le 1er janvier 1987, par deux décisions séparées du 22 septembre
1987 de
la Caisse interprofessionnelle d'assurance-vieillesse et survivants
de la
fédération romande des syndicats patronaux (ci-après : la caisse).
Par la
suite, les prestations de l'assurance-invalidité furent ramenées à une
demi-rente, avec effet dès le 1er septembre 1990 (décision du 3
juillet 1990
de la caisse).

Du 25 mai 1992 au 18 juillet 1994, T.________ a suivi une mesure de
reclassement professionnel de l'assurance-invalidité, sous la forme
de cours
dispensés par X.________, qui lui ont permis d'obtenir un diplôme en
sociologie et psychologie. La caisse a continué à lui verser une
demi-rente
d'invalidité pendant les trois premiers mois de cette mesure et lui a
par
ailleurs alloué une indemnité journalière jusqu'au 19 septembre 1994
(décisions des 7 juillet 1992 et 11 juillet 1994 de la caisse).

Au terme de cette réadaptation professionnelle, le nouveau médecin
traitant
de l'assurée, le docteur C.________, qui posait le diagnostic de
fibromyalgie
ainsi que d'état dépressif et d'anxiété chronique, décrivait une
amélioration
progressive de l'état de santé psychique de sa patiente (rapport du 21
novembre 1994). Dans le courant de l'année 1995, il constata
toutefois une
nouvelle dégradation de la situation : T.________ avait échoué à
plusieurs
reprises dans ses tentatives de reprendre une activité de secrétaire
à plein
temps, ce qui aggravait son état dépressif; il convenait par
conséquent de
lui reconnaître une incapacité de travail de 50 %, en attendant
qu'elle
retrouve un emploi adapté à son état de santé (rapport du 17 décembre
1995).
Par la suite, le docteur D.________, spécialiste en médecine interne,
a
attesté d'une incapacité de travail de 50 % dans l'activité de
secrétaire, et
de 25 % dans celle de sociologue-psychologue, en raison d'une
fibromyalgie et
d'arthrose cervicale (rapports des 28 janvier et 2 septembre 1997).
Il se
fondait notamment sur le résultat d'examens pratiqués par le docteur
E.________, spécialiste en médecine interne et maladies rhumatismales
(rapports du 27 février 1997; cf. également les rapports établis par
ce
praticien les 21 janvier 1999 et 6 septembre 2000).

En 1996 et 1997, l'assurée a occupé plusieurs emplois de manière
temporaire,
essentiellement comme secrétaire, sans toutefois exercer de manière
durable
une activité professionnelle à plus de 50 %. Elle travaille depuis le
mois
d'octobre 1997 comme secrétaire de direction à mi-temps.

Par décision du 25 août 1999, l'Office de l'assurance-invalidité pour
le
canton de Vaud (ci-après : l'Office AI) a refusé d'allouer à nouveau à
l'assurée la rente d'invalidité qui lui avait été versée jusqu'en
août 1992,
soit jusqu'au quatrième mois après le début de la réadaptation
professionnelle effectuée à X.________.

B.
T.________ a déféré cette décision au Tribunal des assurances du
canton de
Vaud. En cours de procédure, l'OAI a produit un rapport intermédiaire
de son
service de réadaptation, d'après lequel une personne bilingue
anglais/français et disposant d'un diplôme comparable à celui obtenu
par
l'assurée au terme de son reclassement professionnel pouvait
prétendre un
salaire mensuel de 6'000 à 8'000 fr. (plus le treizième salaire) «en
qualité
d'adjointe dans un service d'étude au sein d'une institution
internationale à
Genève»; il s'agissait toutefois de «terrains d'activité rares, qui
nécessit(aient) évidemment des efforts considérables dans la
recherche d'un
tel emploi» (rapport intermédiaire du 4 juillet 2000). Par jugement
du 18
février 2002, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a rejeté le
recours formé par l'assurée contre cette décision.

C.
T.________ interjette un recours de droit administratif contre ce
jugement,
en concluant au renvoi de la cause à l'intimé afin qu'il lui alloue
une
demi-rente d'invalidité pour la période postérieure à la fin de sa
formation
de sociologue-psychologue. L'Office AI conclut au rejet du recours,
alors que
l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
Le jugement entrepris expose les dispositions légales relatives à la
notion
d'invalidité, à l'échelonnement des rentes selon le taux de
l'invalidité et à
la manière de déterminer ce taux, de sorte qu'on peut y renvoyer sur
ces
différents points. On précisera cependant que la Loi fédérale sur la
partie
générale du droit des assurances sociales (LPGA), du 6 octobre 2000,
entrée
en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas applicable en l'espèce, le
juge des
assurances sociales n'ayant pas à tenir compte des modifications du
droit ou
de l'état de fait survenues après que la décision administrative
litigieuse a
été rendue (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

2.
Pendant la durée des mesures d'instruction ou de réadaptation,
l'assuré au
bénéfice d'une rente perçoit celle-ci au plus jusqu'à la fin du
troisième
mois civil entier qui suit le début des mesures. Il a en outre droit
à une
indemnité journalière, qui sera toutefois réduite d'un trentième du
montant
de la rente pendant la période durant laquelle les deux prestations
sont dues
(art. 43 al. 2 LAI et 20ter al. 3 RAI, tel qu'en vigueur jusqu'au 31
décembre
2002; cf. consid. 1 supra).

Conformément à ces dispositions, le versement de la demi-rente
d'invalidité
allouée à la recourante par décision du 3 juillet 1990 de la Caisse a
été
interrompu dès le 1er septembre 1992, soit dès le quatrième mois
civil après
le début de la mesure de reclassement professionnel suivie à
X.________. Le
litige porte sur le point de savoir si la recourante peut à nouveau
prétendre
une demi-rente d'invalidité depuis la fin de cette mesure.

3.
La mise en oeuvre de mesures d'instruction ou de réadaptation et le
versement
d'une indemnité journalière n'entraînent pas l'extinction du droit à
la rente
d'invalidité allouée précédemment à l'assuré. Son versement n'est que
suspendu, dès le troisième mois civil après le début de la mesure
d'instruction ou de réadaptation et jusqu'à ce que celle-ci prenne
fin. Par
la suite, il appartient à l'administration d'examiner si les
conditions d'une
révision du droit à la rente au sens de l'art. 41 LAI (tel qu'en
vigueur
avant son abrogation par la LPGA; cf. consid. 1 supra) sont réunies
et, le
cas échéant, d'augmenter, de réduire ou de supprimer la rente allouée
initialement à l'assuré (VSI 1998 p. 184 sv. consid. 2c).

A cet égard, on rappellera que la rente peut être révisée non
seulement en
cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque
celui-ci
est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité
de gain
ont subi un changement important (ATF 113 V 275 consid. 1a et les
arrêts
cités; voir également ATF 112 V 372 consid. 2b et 390 consid. 1b).
Tel pourra
notamment être le cas si la personne assurée a suivi avec succès une
mesure
de reclassement professionnel (ATF 122 V 78 consid. 2b; Meyer-Blaser,
Rechtsprechung des Bundesgerichts zum IVG, ad art. 41 LAI p. 255),
indépendamment du point de savoir si elle percevait des indemnités
journalières ou une rente pendant l'exécution de cette mesure (SVR
1995 IV no
58 p. 166 consid. 4).

4.
Il convient en premier lieu de déterminer si la formation de
sociologue-psychologue acquise par l'assurée lui a permis d'améliorer
sa
capacité de gain et, partant, de diminuer son taux d'invalidité.

Selon l'intimé, le diplôme obtenu par l'assurée n'est généralement pas
reconnu en Suisse, hormis par certaines organisations internationales
telles
que l'ONU, l'OMS ou le CERN (cf. rapport du 7 mai 1992 de l'Office
régional
de réadaptation professionnelle du canton de Vaud; lettre du 17 août
1999 de
l'Office AI à la recourante et décision du 25 août 1999). L'assurée
pourrait
y réaliser un revenu de 6'000 à 8'000 fr. par mois (plus le treizième
salaire), en qualité «d'adjointe dans un Service d'étude au sein d'une
institution internationale», d'après le rapport du 4 juillet 2000
produit par
l'intimé en instance cantonale.

On ignore toutefois en quoi consisterait une telle activité et, par
conséquent, dans quelle mesure elle serait adaptée à l'état de santé
de
l'assurée. Par ailleurs, les renseignements relatifs aux faits
déterminants
en droit doivent en principe être demandés et fournis par écrit;
lorsqu'un
renseignement est néanmoins obtenu par téléphone, il convient au
moins d'en
consigner par écrit le contenu essentiel (cf. ATF 117 V 284 consid.
4c). Le
rapport du 4 juillet 2000 produit par l'intimé, qui ne contient aucune
précision sur les sources d'information consultées, ne répond pas à
ces
exigences. En outre, il ne permet pas de savoir si le salaire mensuel
dont il
fait état correspond à quelques postes de travail isolés au sein
d'organisations internationales ou s'il représente une perspective
d'emploi
réaliste pour la recourante.

A défaut de renseignements concrets fiables sur les emplois
accessibles à la
recourante, eu égard à la formation professionnelle nouvellement
acquise, il
n'est pas possible en l'état du dossier, de déterminer si celle-ci
lui a
permis d'augmenter sa capacité de gain.

5.
Il convient encore d'examiner si la recourante, indépendamment de sa
nouvelle
formation professionnelle, a vu son état de santé s'améliorer au point
d'entraîner une diminution de son taux d'invalidité. Telle semble être
l'opinion de la juridiction cantonale, qui a retenu une capacité de
travail
de 75 % dans la profession de secrétaire de direction, alors qu'une
capacité
de travail de 50 % dans cette même profession avait été retenue en
1990 (cf.
décision du 3 juillet 1990 de la caisse).

Cette opinion ne se fonde toutefois sur aucune pièce médicale
probante. A cet
égard, les premiers juges ont, certes, relativisé à juste titre les
conclusions des docteurs D.________ et C.________, lesquels ont fait
état, de
manière constante, d'une incapacité de travail de 50 % dans la
profession de
secrétaire et n'ont pas décrit d'amélioration durable de l'état de
santé de
l'assurée. La valeur probante de ces rapport médicaux prête à
discussion, en
effet, dès lors qu'ils se concentrent plus sur les conséquences
sociales
qu'aurait un refus de reconnaître à l'assurée le droit à une rente
d'invalidité que sur une description objective et complète de son
état de
santé. Mais on voit mal, dans ces circonstances, quelle pièce du
dossier
permettrait de tenir pour établie, au degré de la vraisemblance
prépondérante, une amélioration de l'état de santé de l'assurée
depuis le 3
juillet 1992 : d'une part, les rapports des docteurs D.________ et
C.________
sont insuffisamment probants; d'autre part, une telle amélioration ne
ressort
pas des rapports des 27 février 1997, 21 janvier 1999 et 6 septembre
2000 du
docteur E.________. Ce praticien ne renseigne pas, notamment, sur
l'évolution
des atteintes à la santé psychique de l'assurée, dont les premiers
juges ont
fait abstraction dans leur analyse de sa capacité de travail (cf.
consid. 4,
p. 10, du jugement entrepris).

Dans ces conditions, force est de constater que le dossier n'est pas
suffisamment instruit pour permettre d'admettre ou de nier en
connaissance de
cause une amélioration de l'état de santé de l'assurée. Eu égard aux
atteintes à la santé physique et psychique dont souffre cette
dernière, il
appartiendra à l'intimé de compléter le dossier par la mise en oeuvre
d'une
expertise pluridisciplinaire, à laquelle s'ajoutera un complément
d'instruction sur les possibilités ouvertes à la recourante de mettre
en
valeur le diplôme acquis à X.________ (cf. consid. 4 supra).

6.
La recourante obtient partiellement gain de cause, de sorte qu'elle
peut
prétendre des dépens (art. 159 al. 1 OJ). Par ailleurs, la procédure
est
gratuite, dès lors qu'elle porte sur l'octroi ou le refus de
prestations
d'assurances (art. 134 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis, en ce sens que le jugement du 18 février 2002 du
Tribunal des assurances du canton de Vaud et la décision du 25 août
1999 de
l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud sont
annulés, la
cause étant renvoyée à cet office pour
complément d'instruction au
sens des
considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'intimé versera à la recourante la somme de 2'500 fr. (y compris la
taxe à
la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera à nouveau sur
les
dépens de la procédure cantonale, au regard de l'issue du procès.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 30 avril 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.360/02
Date de la décision : 30/04/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-04-30;i.360.02 ?
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