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08/04/2003 | SUISSE | N°1P.129/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 avril 2003, 1P.129/2003


{T 0/2}
1P.129/2003/svc

Arrêt du 8 avril 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral,
Reeb et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

M.________,
recourant, représenté par Me Jean-Luc Addor, avocat, case postale
387, 1951
Sion,

contre

Office du Juge d'instruction cantonal,
Z.________, Juge d'instruction,
Palais de Justice, case postale, 1950 Sion 2,
Ministère public du canton du Valais,
route de Gravelone 1,

case postale 2282, 1950 Sion 2,
Président du Tribunal cantonal du canton du Valais, Palais de
Justice, 1950
Sion 2.
...

{T 0/2}
1P.129/2003/svc

Arrêt du 8 avril 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral,
Reeb et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

M.________,
recourant, représenté par Me Jean-Luc Addor, avocat, case postale
387, 1951
Sion,

contre

Office du Juge d'instruction cantonal,
Z.________, Juge d'instruction,
Palais de Justice, case postale, 1950 Sion 2,
Ministère public du canton du Valais,
route de Gravelone 1, case postale 2282, 1950 Sion 2,
Président du Tribunal cantonal du canton du Valais, Palais de
Justice, 1950
Sion 2.

récusation,

recours de droit public contre la décision du Président du Tribunal
cantonal
du canton du Valais du 27 janvier 2003.

Faits:

A.
Par acte notarié du 1er mai 1996, S.________ a vendu à la société
anonyme
U.________ SA, à Neuchâtel, engagée par son administrateur B.________,
lui-même représenté par A.________, la PPE n° xxx de la Commune de
D.________, pour la somme de 225'000 fr. Le prix de vente était
payable à
raison de 6'250 fr. à l'agent immobilier C.________ à titre de
commission, et
de 118'750 fr. sur le compte du vendeur, le solde de 100'000 fr.
ayant été
versé "avant ce jour et dont quittance est donnée".
A la suite de circonstances ayant fait apparaître que le prix de vente
indiqué dans l'acte ne correspondait pas au prix réel, le Juge
d'instruction
du Valais central a ouvert, le 18 septembre 1997, une instruction
pénale
contre A.________ des chefs d'escroquerie et d'obtention frauduleuse
d'une
constatation fausse. Le prévenu a été renvoyé en jugement comme
accusé de ces
infractions devant le Juge III du district de D.________.
Lors de la séance de débats du 24 mai 2000, A.________ a déclaré que
le
notaire ayant instrumenté l'acte de vente, Me M.________, avait été
informé
du prix de vente réel lors de la stipulation de l'acte. Il a confirmé
ses
dires à la police cantonale valaisanne le 4 septembre 2000.
Le 30 mai 2001, le Juge d'instruction des affaires économiques du
Valais
central, Z.________ (ci-après: le Juge d'instruction), a ouvert une
instruction pénale pour faux dans les titres commis dans l'exercice de
fonctions publiques à l'encontre de M.________. Le 12 juillet 2001,
il a
rendu un arrêt de non-lieu pour insuffisance de charges.
Statuant le 24 mai 2002 sur appel du jugement rendu le 24 mai 2000
par le
Juge III du district de D.________, la Cour pénale II du Tribunal
cantonal du
canton du Valais (ci-après: la Cour pénale) a reconnu A.________
coupable
d'escroquerie et d'instigation à faux dans les titres commis dans
l'exercice
de fonctions publiques, et l'a condamné à sept mois d'emprisonnement,
révoquant le sursis accordé le 3 juillet 1995 à une peine de six mois
d'emprisonnement. Elle a notamment retenu que les preuves administrées
corroboraient la thèse selon laquelle le notaire M.________ avait été
informé
de la fausseté du prix de vente et des modalités de son paiement,
lors de la
séance du 1er mai 1996, mais qu'il avait néanmoins accepté
d'instrumenter
l'acte à ces conditions. Par arrêt du 8 octobre 2002, le Tribunal
fédéral a
rejeté, dans la mesure où il était recevable, le recours de droit
public
formé contre ce jugement par A.________; au terme d'un arrêt rendu le
même
jour, il a partiellement admis le pourvoi en nullité interjeté par le
condamné contre ce jugement, qu'il a annulé, renvoyant la cause pour
nouvelle
décision à l'autorité cantonale; il a considéré en substance que, si
la
condamnation de A.________ pour instigation à faux dans les titres
commis
dans l'exercice de fonctions publiques ne violait pas le droit
fédéral, tel
n'était pas le cas en revanche de sa condamnation pour escroquerie
prétendument commise au détriment de la société U.________ SA.
Considérant que les faits retenus par la Cour pénale et non remis en
cause
par le Tribunal fédéral pouvaient être constitutifs de faux dans les
titres
commis dans l'exercice de fonctions publiques, le Juge d'instruction a
informé M.________ qu'il rouvrait l'instruction en date du 16
décembre 2002.
Il l'a cité à comparaître à son audience du 13 janvier 2003.
A cette occasion, M.________ a précisé qu'il n'entendait pas se
soumettre à
une éventuelle ordonnance pénale sur la base des faits retenus dans
les
jugements cantonaux et fédéraux. En conséquence, le Juge
d'instruction l'a
informé qu'une instruction serait menée dans cette affaire et qu'il
procéderait à l'audition de A.________ et de la secrétaire de l'étude,
E.________, à l'échéance du délai fixé au 31 janvier 2003 pour lui
communiquer ses observations et les moyens de preuve qu'il entendait
faire
valoir en procédure.
Le 15 janvier 2003, M.________ a demandé la récusation du Juge
d'instruction
qu'il considérait comme prévenu à son égard en raison des propos
tenus lors
de l'audience du 13 janvier 2003; selon lui, le magistrat instructeur
aurait
déclaré textuellement que "tout est dit" à la suite des arrêts rendus
par le
Tribunal fédéral le 8 octobre 2002, démontrant ainsi qu'il le tenait
pour
coupable quel que soit le résultat des mesures d'instruction
auxquelles il
entendait procéder.
Statuant par décision du 27 janvier 2003, le Président du Tribunal
cantonal
du canton du Valais a rejeté la requête de récusation, dans la mesure
où elle
était recevable. Constatant que les assertions litigieuses figuraient
déjà
pour l'essentiel dans un courrier adressé au requérant le 16 décembre
2002,
il a considéré que la demande de récusation était tardive. Il l'a
tenue en
tout état de cause pour infondée, le fait, pour le Juge d'instruction,
d'avoir envisagé dans un premier temps de décerner une ordonnance
pénale en
se fondant sur des faits constatés dans des jugements définitifs et
exécutoires ne démontrant pas encore sa partialité.

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, M.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler cette décision, qui violerait son droit à
ce que
sa cause soit traitée équitablement garanti à l'art. 29 al. 1 Cst.
Le Président du Tribunal cantonal et le Juge d'instruction se
réfèrent aux
considérants de la décision attaquée. Le Ministère public du canton
du Valais
a renoncé à déposer des observations.

C.
Par ordonnance du 26 février 2003, le juge présidant de la Ire Cour
de droit
public a rejeté la demande de mesures provisionnelles présentée par le
recourant tendant à la suspension de l'enquête pénale jusqu'à droit
connu sur
le recours de droit public.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a p. 48; 128 II 66 consid.
1 p.
67).

1.1 Formé en temps utile contre une décision prise en dernière
instance
cantonale et relative à une demande de récusation, le recours est
recevable
au regard des art. 86 al. 1, 87 et 89 OJ (ATF 126 I 203). Le
recourant est
par ailleurs personnellement touché par la décision attaquée, qui
refuse la
récusation d'un magistrat qu'il considère comme prévenu à son égard,
et a
qualité pour agir selon l'art. 88 OJ.

1.2 En présence d'une décision se fondant sur deux motivations
indépendantes,
alternatives ou subsidiaires, il appartient au recourant de démontrer
que
chacune d'entre elles viole ses droits constitutionnels, à peine
d'irrecevabilité (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 121 I 1 consid. 5a p.
10; 121
IV 94 consid. 1b p. 95; 119 Ia 13 consid. 2 p. 16; 118 Ib 26 consid.
2b p. 28
et les arrêts cités; cf. aussi Jean-François Poudret, La pluralité de
motivations, condition de recevabilité des recours au Tribunal
fédéral ?, in:
Le droit pénal et ses liens avec les autres branches du droit,
Mélanges en
l'honneur du Professeur Jean Gauthier, RDS 114/1996 p. 205 et les
références
citées). Tel est le cas en l'espèce. A titre principal, le Président
du
Tribunal cantonal a jugé la requête irrecevable pour tardiveté; il
l'a tenue
pour infondée et l'a rejetée sur le fond, à titre subsidiaire, comme
l'indique l'usage des termes "en tout état de cause". Or, le
recourant se
borne à attaquer la décision au fond, sans chercher à démontrer en
quoi le
Président du Tribunal cantonal aurait fait preuve d'arbitraire en
considérant
sa demande de récusation comme tardive. Le recours est donc
irrecevable. Au
demeurant, il est manifestement mal fondé.

1.3 Suivant la jurisprudence, l'annonce d'une inculpation à venir,
avec
indication des motifs, ne saurait justifier une prévention, faute de
quoi il
conviendrait d'admettre la récusation de tout juge d'instruction qui,
nonobstant les dénégations de l'intéressé, considère que les charges
sont
suffisantes pour justifier une telle mesure (arrêt 1P.473/2002 du 28
octobre
2002, consid. 2.2). A fortiori, il en va de même du juge
d'instruction qui
estime que les conditions posées pour prononcer une ordonnance pénale
sont
réunies et qui en fait part au prévenu. Dans le cas particulier, le
Juge
d'instruction ne pouvait ignorer le jugement de la Cour pénale du 24
mai
2002, confirmé sur ce point par le Tribunal fédéral dans ses arrêts
du 8
octobre 2002, qui tenait pour établi le fait que le recourant a
instrumenté
l'acte de vente du 1er mai 1996 alors qu'il était informé de la
fausseté du
prix de vente et des modalités de son paiement. Il ne saurait lui
être fait
grief d'avoir envisagé dans un premier temps de rendre une ordonnance
pénale.
Enfin, dans la mesure où le recourant s'est opposé à cette solution,
le Juge
d'instruction a choisi de rouvrir l'instruction dirigée contre le
recourant
et de procéder à l'audition de témoins, considérant ainsi que les
faits
n'étaient pas suffisamment établis pour rendre une ordonnance pénale
(cf.
art. 143 al. 1 du Code de procédure pénale valaisan). A supposer
qu'il ait
tenu les propos que lui prête le recourant, rien ne permet d'admettre
que
cette opinion serait définitive et qu'elle exclurait l'éventualité
d'un
non-lieu selon les éléments nouveaux recueillis dans le cadre des
mesures
d'instruction auxquelles il entend procéder.
En rejetant la demande de récusation visant le Juge d'instruction
Z.________,
le Président du Tribunal cantonal n'a donc pas violé l'art. 29 al. 1
Cst.

2.
Vu l'issue du recours, il convient de mettre un émolument judiciaire
à la
charge du recourant, qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a en
revanche
pas lieu d'octroyer des dépens (art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au Juge
d'instruction Z.________, ainsi qu'au Ministère public et au
Président du
Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 8 avril 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.129/2003
Date de la décision : 08/04/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-04-08;1p.129.2003 ?
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