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02/04/2003 | SUISSE | N°1A.37/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 avril 2003, 1A.37/2003


{T 0/2}
1A.37/2003 /svc

Arrêt du 2 avril 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral,
Reeb et Féraud.
Greffier: M. Zimmermann.

C. ________,
recourant, représenté par Maîtres Dominique Poncet
et Vincent Solari, avocats, rue de Hesse 8-10,
case postale 5715, 1211 Genève 11,

contre

République Islamique du Pakistan,
intimée, représentée par Me Jacques Python, avocat,
rue Massot 9, 1206 Genève,
Juge d'instructi

on du canton de Genève,
case postale 3344, rue des Chaudronniers,
1204 Genève,
Chambre d'accusation du canton de Genève...

{T 0/2}
1A.37/2003 /svc

Arrêt du 2 avril 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour
et Président du Tribunal fédéral,
Reeb et Féraud.
Greffier: M. Zimmermann.

C. ________,
recourant, représenté par Maîtres Dominique Poncet
et Vincent Solari, avocats, rue de Hesse 8-10,
case postale 5715, 1211 Genève 11,

contre

République Islamique du Pakistan,
intimée, représentée par Me Jacques Python, avocat,
rue Massot 9, 1206 Genève,
Juge d'instruction du canton de Genève,
case postale 3344, rue des Chaudronniers,
1204 Genève,
Chambre d'accusation du canton de Genève,
place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108,
1211 Genève 3.

entraide judiciaire internationale en matière pénale
au Pakistan - B 107700 BF/Reu,

recours de droit administratif contre l'ordonnance de la Chambre
d'accusation
du canton de Genève du
15 janvier 2003.

Faits:

A.
Le 16 octobre 1997, la République islamique du Pakistan (ci-après: la
République islamique) a adressé à la Suisse une demande d'entraide
judiciaire
présentée pour les besoins de la procédure ouverte contre E.________,
F.________ et G.________, soupçonnés de détournements de fonds
publics. La
demande tendait notamment à la saisie de documents relatifs à des
comptes
bancaires ouverts au nom de sociétés gérées par l'avocat genevois
C.________.
La demande a été complétée le 7 novembre 1997.

Le Juge d'instruction du canton de Genève, auquel l'exécution de la
demande
avait été déléguée, a rendu une décision d'entrée en matière et
ordonné la
saisie de comptes bancaires.

La procédure d'exécution de la demande d'entraide est en cours. Des
décisions
de clôture partielle ont été rendues, dont certaines ont été
entreprises
jusqu'au Tribunal fédéral (cf. notamment arrêt 1A.147/2001 du 15
octobre
2001).

B.
Le 4 novembre 1997, le Procureur général du canton de Genève a ouvert
une
information pénale contre C.________, soupçonné de blanchiment
d'argent et de
corruption passive.

Cette procédure, désignée sous la rubrique P/11105/1997, a été
confiée au
même Juge d'instruction que celui chargé de la procédure d'entraide.

Le 2 juin 1998, le Juge d'instruction a inculpé C.________ de
complicité de
blanchiment d'argent, voire de blanchiment.

Le 24 juin 1998, le Juge d'instruction a admis la République
islamique comme
partie civile à la procédure. La Chambre d'accusation du canton de
Genève a
admis les recours formés contre cette décision qu'elle a annulée, le 2
octobre 1998. La République islamique a recouru auprès du Tribunal
fédéral
qui n'est pas entré en matière, par arrêt du 13 janvier 1999 (cause
1P.601/1998).

Le 20 mars 2002, le Juge d'instruction a mis un terme à ses
investigations et
communiqué la procédure au Procureur général selon l'art. 185 CPP/GE.
Le 12 juin 2002, la Chambre d'accusation a admis un recours formé par
C.________ contre cette décision. Elle a renvoyé le dossier au Juge
d'instruction pour qu'il interroge le prévenu sur ses antécédents, sa
situation personnelle et le choix de l'autorité de jugement. Le Juge
d'instruction était également invité à faire verser au dossier le
procès-verbal de l'audition d'un témoin.

Le 2 septembre 2002, la République islamique a derechef demandé à
pouvoir se
constituer partie civile, ce que le Juge d'instruction a accepté le 4
novembre 2002.

Par décision du 15 janvier 2003, la Chambre d'accusation a rejeté le
recours
formé par C.________ contre cette décision. Elle a toutefois fait
interdiction à la République islamique de faire usage des pièces de la
procédure P/11105/1997 pour les besoins de toute procédure pénale,
civile ou
administrative, y compris celle à l'origine de la demande d'entraide,
et cela
jusqu'à l'entrée en force de la décision de clôture de la procédure
d'entraide, en tant que celle-ci concerne C.________.

Dans le délai de quinze jours imparti par la Chambre d'accusation, la
République islamique a fourni l'engagement de se conformer à cette
condition.
Elle a partant eu accès à la procédure P/11105/1997 et obtenu une
copie du
dossier (cf. art. 142 al. 2 CPP/GE).

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, C.________
demande au
Tribunal fédéral d'annuler la décision du 15 janvier 2003, de rejeter
la
demande de constitution de partie civile de la République islamique et
d'interdire la remise à celle-ci de toute pièce de la procédure
P/11105/1997
le concernant. Il invoque le principe de la proportionnalité.

La Chambre d'accusation se réfère à sa décision. Le Juge d'instruction
propose de rejeter le recours. La République islamique et l'Office
fédéral de
la justice concluent principalement à l'irrecevabilité du recours
pour cause
de tardiveté, subsidiairement à son rejet.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a
p. 48,
et les arrêts cités).

1.1 L'état de fait de la présente cause est analogue à celui qui a
donné lieu
au prononcé de l'arrêt Abacha et Bagudu (ATF 127 II 198). Dans un cas
comme
dans l'autre, la même autorité conduit de front la procédure
d'exécution de
la demande d'entraide et une procédure pénale étroitement connexe,
portant
sur les mêmes faits. Dans un cas comme dans l'autre, le recourant,
partie aux
deux procédures, soutient que l'admission de l'Etat requérant comme
partie
civile à la procédure pénale aurait pour conséquence de dévoiler des
pièces
de la procédure pénale que l'Etat requérant ne pourrait recevoir
qu'au terme
de la procédure d'entraide. Il prétend que la constitution de partie
civile
aurait pour effet concret de compromettre la procédure d'entraide, en
violation des règles fondamentales de l'EIMP. En pareil cas, comme le
Tribunal fédéral a eu l'occasion de le dire dans l'arrêt précité, la
voie du
recours de droit administratif est en principe ouverte (ATF 127 II 198
consid. 2a et b p. 201-205). Il n'y a pas de raison de se départir de
cette
jurisprudence.

1.2 La décision relative à la constitution de partie civile et de
consultation du dossier est de nature incidente. Elle n'est séparément
attaquable, selon l'art. 80e let. b EIMP, que si elle cause à son
destinataire un préjudice immédiat et irréparable découlant de la
saisie
d'objets ou de valeurs (ch. 1) ou de la présence de personnes qui
participent
à la procédure à l'étranger (ch. 2). Le risque de dévoilement
intempestif,
dans le cadre de la procédure pénale, de documents et d'informations
qui ne
pourraient être remis à l'Etat requérant qu'au terme de la procédure
d'entraide, constitue un dommage assimilable à celui visé à l'art.
80e let. b
ch. 2 EIMP (ATF 127 II 198 consid. 2b p. 204).

1.3 Contre une décision incidente, le délai de recours est de dix
jours (art.
80k EIMP). En l'espèce, l'acte de recours déposé le 18 février 2003
contre
une décision notifiée le 20 janvier 2003, est tardif, partant
irrecevable.

Lorsqu'il existe une obligation de mentionner une voie de droit, son
omission
ne doit pas porter préjudice au justiciable; celui-ci ne doit en
outre pas
devoir pâtir d'une indication inexacte ou incomplète sur ce point
(ATF 127 II
198 consid. 2c p. 205; 127 IV 150 consid. 1a p. 151; 126 II 506
consid. 1b p.
509, et les arrêts cités). Cela étant, celui qui s'aperçoit du vice
affectant
l'indication de la voie de droit ou qui devait s'en apercevoir en
faisant
usage de la prudence que l'on pouvait attendre de lui, ne peut se
prévaloir
d'une indication inexacte ou incomplète sur ce point (ATF 127 II 198
consid.
2c p. 205; 121 II 72 consid. 2a p. 78; 119 IV 330 consid. 1c p. 333,
et les
arrêts cités).

En l'espèce, la décision attaquée ne mentionne ni la voie du recours
de droit
administratif, ni le délai de dix jours, contrairement à ce que
prévoit
l'art. 22 EIMP. Cette omission est d'autant moins explicable que la
Chambre
d'accusation a fondé en partie sa décision sur l'arrêt Abacha et
Bagudu,
précité. Le recourant ne saurait cependant tirer argument de ce
manquement,
car il a lui-même cité cet arrêt dans son recours cantonal (ch. 28,
77 et
103). Avocat et représenté dans la procédure par deux mandataires, il
ne peut
sérieusement prétendre ne pas avoir discerné la portée de l'art. 80k
EIMP. Il
est ainsi forclos.

2.
Le recours est irrecevable. Les frais en sont mis à la charge du
recourant
(art. 156 OJ), qui versera en outre à la République islamique une
indemnité
pour ses dépens (art. 159 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Déclare le recours irrecevable.

2.
Met à la charge du recourant un émolument de 4000 fr., ainsi qu'une
indemnité
de 2000 fr. à verser à l'intimée pour ses dépens.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties,
au Juge
d'instruction et à la Chambre d'accusation du canton de Genève ainsi
qu'à
l'Office fédéral de la justice, Division des affaires internationales,
Section de l'entraide judiciaire internationale (B 107700 BF/Reu).

Lausanne, le 2 avril 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.37/2003
Date de la décision : 02/04/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-04-02;1a.37.2003 ?
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