La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/03/2003 | SUISSE | N°4C.293/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 mars 2003, 4C.293/2002


{T 0/2}
4C.293/2002 /ech

Arrêt du 28 mars 2003
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, Président, Walter et Chaix, Juge suppléant.
Greffier: M. Carruzzo.

F. X.________,
demandeur et recourant, représenté par Me Nicolas Saviaux, avocat,
case
postale 155, 1000 Lausanne 13,

contre

la banque A.________, défenderesse et intimée, représentée par Me
Laurent
Trivelli, avocat, rue Caroline 7, case postale 3520, 1002 Lausanne,
Y.________ et Fils,
appelée en cause, représentée par Me Jean-Cl

aude Mathey, avocat,
avenue du
Léman 30, case postale 2753, 1002 Lausanne.

cautionnement

recours en réfor...

{T 0/2}
4C.293/2002 /ech

Arrêt du 28 mars 2003
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, Président, Walter et Chaix, Juge suppléant.
Greffier: M. Carruzzo.

F. X.________,
demandeur et recourant, représenté par Me Nicolas Saviaux, avocat,
case
postale 155, 1000 Lausanne 13,

contre

la banque A.________, défenderesse et intimée, représentée par Me
Laurent
Trivelli, avocat, rue Caroline 7, case postale 3520, 1002 Lausanne,
Y.________ et Fils,
appelée en cause, représentée par Me Jean-Claude Mathey, avocat,
avenue du
Léman 30, case postale 2753, 1002 Lausanne.

cautionnement

recours en réforme contre l'arrêt de la Cour civile du Tribunal
cantonal du
canton de Vaud du 4 avril 2002.

Faits:

A.
A.a Au printemps 1991, les frères F.X.________ et G.X.________ ont
donné en
location à X.________ AG des locaux professionnels, à Berne, pour un
loyer
forfaitaire de 215'000 fr. l'an. Le bail a été consenti pour une
durée de dix
ans à compter du 1er avril 1991, soit jusqu'au 31 mars 2001. Les
frères
X.________ ont signé le contrat aussi bien comme bailleurs qu'en
qualité
d'administrateurs de la société locataire. H.Y.________ et
I.Y.________ ont
également signé ce contrat. Ils étaient les associés de la société en
nom
collectif Y.________ & Fils, active dans le domaine des articles de
boucherie, qui avait acquis la totalité du capital-actions de
X.________ AG
en mars 1991. Le contrat de bail prévoyait l'ouverture d'un compte de
garantie de loyer ou la constitution d'une garantie bancaire d'un
montant de
107'500 fr.

Le 22 avril 1992, la banque B.________, à Lausanne, a créé, en faveur
de
F.X.________ et G.X.________, une lettre de garantie ainsi libellée:
"(...)Nous vous informons que, d'ordre et pour le compte de Messieurs
Y.________ & Fils (...), nous nous portons garants vis-à-vis de vous,
à
concurrence de la somme de 107'500 fr. (...) à titre de cautionnement
solidaire, au sens des art. 492 et suivants CO, pour assurer le
paiement
régulier du loyer d'une boucherie à Berne."
A la même date, la banque B.________ a adressé à Y.________ & Fils un
document ayant notamment le contenu suivant:
"(...) Pour faire suite à votre demande, nous vous confirmons que nous
délivrons, pour votre compte, une lettre de garantie (...), à titre de
cautionnement solidaire au sens des art. 492 et suivants CO, de
107'500 fr.
(...) en faveur de Messieurs F.X.________ et G.X.________ (...) , pour
assurer le paiement régulier du loyer d'une boucherie à Berne.
(...)
Validité: pour toute la durée du bail et ses renouvellements
éventuels.
(...)"
I.Y.________ et H.Y.________ ont tous deux contresigné ce document.

A.b Le 27 décembre 1994, Y.________ & Fils a revendu toutes les
actions de
X.________ AG qu'elle possédait. Elle a admis, en procédure, n'être
plus
partie au contrat de bail précité depuis le 1er janvier 1995. Il est
établi
que les loyers de la boucherie ont été intégralement payés jusqu'à
cette
date. Ladite boucherie a fermé ses portes en décembre 1994 pour être
remplacée, en mars 1995, après quelques travaux de transformation,
par une
boulangerie.

Au cours de l'année 1995, X.________ AG a pris du retard dans le
paiement des
loyers dus à F.X.________ et G.X.________. Le 17 novembre 1995, la
gérance
s'est adressée à la banque B.________ pour l'informer d'un arriéré de
près de
50'000 fr. et en exiger le paiement sur la base de l'engagement pris
le 22
avril 1992. La banque a accusé réception de ce courrier mais on
ignore si
elle s'est déterminée à son sujet. En revanche, le 23 septembre 1996,
la
banque A.________, qui avait repris les actifs et passifs de la banque
B.________, a informé F.X.________ et G.X.________ que la lettre de
garantie
émise le 22 avril 1992 était nulle du fait que le contrat de bail ne
liait
pas Y.________ & Fils, qui n'avait jamais été débitrice des
bailleurs. Le 30
septembre 1996, en réponse à une nouvelle demande de la gérance
portant sur
un arriéré de loyers supérieur à 50'000 fr., la banque A.________ a
signifié
à celle-ci son refus d'obtempérer, motif pris de la nullité de
l'engagement
litigieux. Elle a confirmé son refus dans un courrier du 9 octobre
1996.
Enfin, dans une lettre du 10 avril 1997 adressée au conseil des
bailleurs,
elle a précisé sa position en invoquant formellement l'erreur
essentielle
quant à l'identité du locataire, lequel n'était pas Y.________ &
Fils, une
cliente bien connue d'elle, mais X.________ AG, une société qui lui
était
inconnue.

A.c Au 30 avril 1997, les loyers en souffrance dus par X.________ AG
s'élevaient à 151'992 fr. En vertu d'un accord passé avec les
bailleurs,
E.________ ont versé à ceux-ci la somme de 100'000 fr., réduisant
ainsi le
solde des loyers arriérés à 51'992 fr.

Le 12 décembre 1997, F.X.________ est devenu l'unique propriétaire de
l'immeuble abritant la boulangerie.

B.
Le 18 septembre 1998, F.X.________ a assigné la banque A.________ en
paiement
d'un montant arrêté en cours d'instance à 51'992 fr., intérêts en sus.

La défenderesse a conclu au rejet de la demande. Elle a appelé en
cause
Y.________ & Fils afin qu'elle la relève de tous les montants
éventuellement
mis à sa charge.

L'appelée en cause a conclu au rejet tant des conclusions du
demandeur que de
celles de la défenderesse dirigées contre elle.

Par jugement du 4 avril 2002, la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois a
rejeté la demande principale de même que les conclusions prises par la
défenderesse à l'encontre de l'appelée en cause. Les juges cantonaux
ont
admis la validité du cautionnement litigieux, mais ils ont retenu que
la
banque avait invalidé son engagement en invoquant à bon droit son
erreur sur
la personne du débiteur principal. Selon eux, cette erreur était
certes
fautive, au sens de l'art. 26 CO; toutefois, les conditions justifiant
l'allocation de dommages-intérêts de ce chef n'étaient pas réalisées
en
l'espèce.

C.
Le demandeur interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral. Il
y
reprend les conclusions qu'il avait soumises à la cour cantonale.
Selon lui,
le cautionnement en cause n'est pas entaché d'erreur et le solde des
loyers
arriérés déterminé, de sorte que la défenderesse doit honorer son
engagement.

La défenderesse et l'appelée en cause concluent toutes deux au rejet
du
recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1
Interjeté par la partie demanderesse qui a succombé dans ses
conclusions
condamnatoires et dirigé contre un jugement final rendu en dernière
instance
cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une
contestation
civile dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art.
46 OJ),
le recours en réforme est en principe recevable, puisqu'il a été
déposé en
temps utile (art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ)
1.2Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral,
mais non
pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43
al. 1 OJ)
ou pour violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c; 126
III 189
consid. 2a, 370 consid. 5).

Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant
sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter
les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte
de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis
(art. 64
OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). Il ne peut
être
présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou
de moyens
de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours n'est pas
ouvert
pour remettre en cause l'appréciation des preuves et les
constatations de
fait qui en découlent (ATF 127 III 547 consid. 2c; 126 III 189
consid. 2a;
125 III 78 consid. 3a).

Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des
parties, mais
il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1
OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al.
3 OJ;
ATF 128 III 22 consid. 2e/cc; 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59
consid. 2a).

2.
Il n'est pas contesté ni contestable que le contrat conclu le 22
avril 1992
par la banque B.________ avec le demandeur et son frère doit être
qualifié de
cautionnement.

2.1 Aux termes de l'art. 492 al. 1 CO, le cautionnement est un
contrat par
lequel une personne s'engage envers le créancier à garantir le
paiement de la
dette contractée par le débiteur. L'objet du cautionnement porte sur
la
garantie d'une créance principale. Le cautionnement se caractérise
ainsi par
sa nature accessoire: l'obligation de la caution dépend de
l'existence et du
contenu de la dette principale, laquelle doit être déterminée ou, en
tout
cas, déterminable dès la conclusion du contrat. Dire quelle est la
créance
garantie est une question d'interprétation du contrat (ATF 120 II 35
consid.
3a et les références; voir aussi: Tercier, Les contrats spéciaux, 3e
éd., n.
6008 ss).

2.2 En l'espèce, il ressort clairement de la déclaration faite le 22
avril
1992 par la caution (la banque B.________) aux créanciers (les frères
X.________, en leur qualité de bailleurs et bénéficiaires de la
garantie
afférente au paiement du loyer) que la banque agissait en faveur des
Y.________. Sans doute la formulation de cette déclaration ne
permet-elle pas
de dire si la dette garantie était une dette personnelle des
Y.________ ou
une dette de la société en nom collectif Y.________ & Fils.
Toutefois, seule
est décisive, pour l'issue du présent litige, la circonstance que la
dette
visée par ladite déclaration était bien une dette des Y.________.

Force est en outre de souligner que, dans la déclaration litigieuse,
la dette
principale était définie concrètement comme étant celle relative au
loyer
d'une boucherie, à Berne.

On ne saurait admettre, sur le vu des constatations faites par la cour
cantonale, que les bénéficiaires de la garantie, c'est-à-dire les
frères
X.________, auraient pu attribuer de bonne foi à la déclaration du 22
avril
1992 une autre signification que celle qui résulte du texte de cet
écrit. A
cet égard, il convient d'observer que le nom de la société X.________
AG
n'apparaît jamais, à l'époque, entre la banque B.________, d'une
part, et les
frères X.________ ou même les Y.________, d'autre part. Au demeurant,
comme
ces derniers étaient des clients de la banque actifs dans le commerce
de
boucherie, les précisions figurant dans la déclaration de
cautionnement quant
à l'affectation des locaux loués revêtaient de l'importance. Rien ne
permet,
en effet, de penser qu'il eût été indifférent à la banque de
s'engager en
faveur d'une autre société (X.________ AG) que celle mentionnée dans
cette
déclaration ou d'un autre type de commerce que celui qui y est
indiqué en
toutes lettres (une boucherie). D'ailleurs, le demandeur n'avance
aucun
élément concret dont on pourrait inférer que, en dépit de la
formulation de
la déclaration de cautionnement, les bénéficiaires de la garantie
pouvaient
raisonnablement partir de l'idée que la caution n'attachait pas
d'importance
à la personne du débiteur principal et à l'affectation des locaux
loués.

Il suit de là que, contrairement à l'opinion erronée des premiers
juges, la
banque B.________ n'a pas commis d'erreur sur la personne du débiteur
principal puisqu'elle a entendu garantir une dette des personnes - les
Y.________ ou la société en nom collectif éponyme - nommément
désignées dans
la déclaration de cautionnement.

2.3 Il appert des constatations de la cour cantonale que la dette
impayée,
pour laquelle le demandeur se retourne contre la caution, est une
dette de la
société X.________ AG se rapportant à des arriérés de loyer pour les
locaux
d'une boulangerie exploitée, à Berne. Le demandeur lui-même reproduit
du
reste, dans son recours, l'affirmation de l'appelée en cause voulant
que
cette dernière n'ait plus été locataire desdits locaux pendant la
période
durant laquelle les loyers sont demeurés impayés.
Ainsi, il est évident que la dette invoquée par le demandeur à
l'égard de la
caution n'est pas celle dont le cautionnement litigieux garantissait
le
paiement. La cour cantonale a donc eu raison de rejeter la demande. La
solution qu'elle a retenue, sinon les motifs censés la justifier,
n'est en
rien contraire au droit fédéral. Par conséquent, le recours en
réforme du
demandeur ne peut qu'être rejeté.

3.
Dès lors qu'il succombe, le demandeur devra payer les frais de la
procédure
fédérale (art. 156 al. 1 OJ) et indemniser ses parties adverses (art.
159 al.
1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à la défenderesse une indemnité de 2'500 fr. à
titre de
dépens et à l'appelée en cause une indemnité de 1'000 fr. au même
titre.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Cour civile du Tribunal
cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 28 mars 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.293/2002
Date de la décision : 28/03/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-03-28;4c.293.2002 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award