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11/03/2003 | SUISSE | N°I.865/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 mars 2003, I.865/02


{T 7}
I 865/02

Arrêt du 11 mars 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente,
Rüedi et Ferrari. Greffière : Mme Gehring

K.________, recourante, représentée par
le Groupe Sida Genève, rue Pierre-Fatio 17,
1204 Genève,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 6 septembre 2002)

Faits :

A.
K. ________, née en

1964, a fait, dès l'âge de 15-16 ans, un usage
abusif de
substances toxiques (alcool, haschich, LSD, cocaïne, héroïne et
médicam...

{T 7}
I 865/02

Arrêt du 11 mars 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente,
Rüedi et Ferrari. Greffière : Mme Gehring

K.________, recourante, représentée par
le Groupe Sida Genève, rue Pierre-Fatio 17,
1204 Genève,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 6 septembre 2002)

Faits :

A.
K. ________, née en 1964, a fait, dès l'âge de 15-16 ans, un usage
abusif de
substances toxiques (alcool, haschich, LSD, cocaïne, héroïne et
médicaments).
Après avoir néanmoins achevé, sans obtenir de CFC, un apprentissage
d'ébéniste, elle a exercé les professions de serveuse et
d'éducatrice. Depuis
le mois de septembre 1997, elle a travaillé au service de la société
A.________ SA en qualité de dessinatrice, fouilleuse et
cuisinière-remplaçante. A partir du 27 septembre 1999, elle a alterné
les
périodes d'incapacité entière et partielle de travail jusqu'au 17
mars 2000.
Depuis lors, elle n'exerce plus d'activité lucrative.

Souffrant d'un syndrome immuno-déficitaire acquis et d'une hépatite C
chronique, elle a présenté, le 10 janvier 2000, une demande de
prestations de
l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'un reclassement dans une
nouvelle
profession. Après avoir recueilli l'avis des docteurs V.________,
médecin
généraliste (rapport du 17 janvier 2000) et C.________, spécialiste en
infectiologie (rapport du 11 avril 2000), l'Office cantonal de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI)
a rendu
une décision, le 30 novembre 2001, par laquelle il a rejeté la
demande de
prestations.

B.
Saisi d'un recours contre cette décision, le Tribunal des assurances
du
canton de Vaud a confié une expertise au docteur G.________,
spécialiste en
psychiatrie et psychothérapie (rapport du 18 mai 2002). Par jugement
du 6
septembre 2002, elle a rejeté le recours.

C.
K.________ interjette un recours de droit administratif contre ce
jugement
dont elle requiert l'annulation, en concluant à l'octroi d'une rente
correspondant à un degré d'invalidité de 50 %, dès le 27 septembre
2000. A
l'appui de ses conclusions, elle produit un avis de son médecin
traitant, le
docteur J.________ (rapport du 17 décembre 2002).

L'office AI conclut implicitement au rejet du recours tandis que
l'Office
fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances
sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003,
entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-invalidité. Le cas d'espèce reste toutefois régi par les
dispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard
au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur
au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V
467
consid. 1). En outre, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la
légalité
des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait
existant
au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366
consid. 1b).

2.
2.1Selon l'art. 8 al. 1 LAI, les assurés invalides ou menacés d'une
invalidité imminente ont droit aux mesures de réadaptation qui sont
nécessaires et de nature à rétablir leur capacité de gain, à
l'améliorer, à
la sauvegarder ou à en favoriser l'usage. Ce droit est déterminé en
fonction
de toute la durée d'activité probable.

Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il
est
invalide à 66 2/3 % au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50
% au
moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40 % au moins; dans
les cas
pénibles, l'assuré peut, d'après l'art. 28 al. 1bis LAI, prétendre une
demi-rente s'il est invalide à 40 % au moins.

2.2 Selon l'art. 4 al. 1 LAI, l'invalidité est la diminution de la
capacité
de gain, présumée permanente ou de longue durée, qui résulte d'une
atteinte à
la santé physique ou mentale provenant d'une infirmité congénitale,
d'une
maladie ou d'un accident.
Selon la jurisprudence, la toxicomanie ne constitue pas, en soi, une
invalidité au sens de la loi. En revanche, elle joue un rôle dans
l'assurance-invalidité lorsqu'elle a provoqué une maladie ou un
accident qui
entraîne une atteinte à la santé physique ou mentale, nuisant à la
capacité
de gain, ou si elle résulte elle-même d'une atteinte à la santé
physique ou
mentale qui a valeur de maladie (ATF 99 V 28 consid. 2; VSI 2002 p. 32
consid. 2a, 1996 p. 319 consid. 2a, 321 consid. 1a et 325 consid. 1a).

3.
3.1Selon l'office AI et la juridiction cantonale, la recourante n'a
pas droit
à une rente, motif pris qu'elle ne présente pas d'atteinte à la santé
physique ou mentale invalidante. En particulier, l'incapacité de
travail de
l'intéressée n'est pas liée à une maladie physique ou psychique mais
résulte
exclusivement de la toxicomanie de cette dernière.

De son côté, la recourante fait valoir qu'elle n'est plus en mesure
d'exercer
une activité lucrative à temps complet en raison de troubles
physiques et
psychiques invalidants, indépendants de sa toxicomanie.

3.2 Se fondant sur les critères du Manuel diagnostique et statistique
des
troubles mentaux DSM IV édité par l'Association des psychiatres
américains
(American Psychiatric Association), le docteur G.________ indique que
la
recourante souffre d'une infection HIV (044.9 DSM IV), d'hépatite C
(070.51
DSM IV), de bronchite chronique (491.21 DSM IV) et de problèmes de
réadaptation chroniques (309.9 DSM IV), de troubles dysthymiques
(300.4 DSM
IV), ainsi que de troubles de la personnalité (301.9 DSM IV). Ce
médecin
précise que les troubles psychiques sont antérieurs à la toxicomanie
de
l'assurée et à l'origine de comportements à risques (consommation
d'alcool et
de drogues, rapports sexuels sans protection). Ils n'ont pas été
causés par
la toxicomanie, les substances toxiques ayant été utilisées comme
anesthésiants afin de masquer la souffrance liée aux troubles
psychiques
préexistants. Des mesures de réadaptation professionnelle sont
inadaptées au
vu de l'importance de ces troubles. Une capacité résiduelle de
travail de 50
% dans une activité exigible est considérée comme adaptée à l'état de
santé
de la recourante.
Par ailleurs, le docteur V.________ fait état d'une infection HIV
(stade 3),
d'hépatite C chronique, de toxicomanie à l'héroïne substituée à la
méthadone,
d'un état dépressif chronique depuis l'âge de 20 ans, ainsi que de
troubles
de la personnalité (borderline). Selon ce médecin, la recourante
présente un
SIDA stable depuis de nombreuses années, mais elle n'est toutefois pas
capable d'effectuer des travaux de force. Sa capacité de travail peut
être
estimée à 50 % dans un métier physiquement moins lourd que son
activité
professionnelle habituelle, point de vue auquel le docteur C.________
se
rallie également (rapport du 11 avril 2000).

Enfin, selon l'avis du docteur J.________, l'assurée souffre
d'asthénie
chronique entraînant une incapacité de travail de 50 %. Ce médecin
précise
que cet état de fatigue résulte de l'effet conjugué des troubles
physiques
(infection HIV, hépatite C) et psychiques de l'intéressée,
indépendamment de
sa toxicomanie.

3.3 Ainsi, contrairement à l'opinion de l'administration et des
premiers
juges, il est incontestable que la recourante présente une atteinte à
sa
santé physique et psychique. De l'avis unanime des médecins,
l'ensemble de
ces troubles entraîne une incapacité entière de travail de la
recourante dans
son activité habituelle. En revanche, cette dernière dispose d'une
capacité
résiduelle de travail de 50 % dans une activité qui n'implique pas de
travaux
lourds. Dans ces circonstances, on ne saurait, comme l'office AI et la
juridiction cantonale, dénier tout caractère invalidant à l'ensemble
des
troubles dont la recourante souffre. Il convient dès lors de renvoyer
la
cause à l'office AI afin qu'il en détermine les effets sur la
capacité de
gain de l'intéressée et statue à nouveau sur son droit éventuel à une
rente.

4.
La recourante qui obtient gain de cause est représentée par un
juriste de
l'association "Groupe Sida Genève". Elle a droit à des dépens (ATF
122 V
278).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis. Le jugement du 6 septembre 2002 du Tribunal des
assurances du canton de Vaud et la décision du 30 novembre 2001 de
l'Office
de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud sont annulés, la
cause étant
renvoyée audit office pour nouvelle décision au sens des considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud versera à la
recourante la somme de 1'200 fr. (y compris la taxe à la valeur
ajoutée) à
titre dépens pour l'ensemble de la procédure.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud, à la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS et
à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 11 mars 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.865/02
Date de la décision : 11/03/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-03-11;i.865.02 ?
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