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28/02/2003 | SUISSE | N°5P.392/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 février 2003, 5P.392/2002


{T 0/2}
5P.392/2002 /frs

Arrêt du 28 février 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffier: M. Braconi.

X. ________,
recourant,

contre

Bureau de l'assistance judiciaire du canton de Vaud, Département des
institutions et des relations extérieures, place du Château 1, 1014
Lausanne.

art. 8, 9 et 29 al. 3 Cst. (assistance judiciaire; divorce),

recours de droit public contre la décision du Bureau de l'assistance
judiciaire du canton

de Vaud, Département des institutions et des
relations
extérieures, du 30 septembre 2002.

Faits:

A.
Le 2...

{T 0/2}
5P.392/2002 /frs

Arrêt du 28 février 2003
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffier: M. Braconi.

X. ________,
recourant,

contre

Bureau de l'assistance judiciaire du canton de Vaud, Département des
institutions et des relations extérieures, place du Château 1, 1014
Lausanne.

art. 8, 9 et 29 al. 3 Cst. (assistance judiciaire; divorce),

recours de droit public contre la décision du Bureau de l'assistance
judiciaire du canton de Vaud, Département des institutions et des
relations
extérieures, du 30 septembre 2002.

Faits:

A.
Le 26 juin 2002, X.________ a demandé à être mis au bénéfice de
l'assistance
judiciaire totale dans le cadre de la procédure en divorce introduite
par son
épouse.

Par décision du 5 juillet 2002, le Secrétariat du Bureau d'assistance
judiciaire du canton de Vaud a rejeté la requête parce que la fortune
et les
revenus du requérant lui permettent d'assurer les frais du procès sans
entamer la part de ses biens nécessaire à son entretien et à celui de
sa
famille.

B.
Le 19 juillet 2002, X.________ a déposé une réclamation contre cette
décision
auprès du Bureau de l'assistance judiciaire. Il a fait valoir, en
substance,
que ses revenus mensuels (11'219 fr. = 10'494 fr. [salaire net] + 725
fr.
[allocations familiales]) ne couvraient pas ses dépenses (11'400 fr.
= 1'100
fr. [minimum vital] + 1'000 fr. [amortissement du chalet] + 700 fr.
[frais
professionnels] + 1'735 fr. [loyer] + 130 fr. [place de parc] + 200
fr.
[frais de repas] + 270 fr. [prime d'assurance maladie] + 730 fr.
[impôts] 4'800 fr. [pensions] + 735 fr. [allocations familiales
versées à sa femme]).
Il s'est plaint en outre d'inégalité de traitement, puisque son
épouse, à
laquelle étaient servies mensuellement des contributions alimentaires
supérieures à 5'500 fr. (allocations familiales comprises),
bénéficiait,
elle, de l'assistance judiciaire; de surcroît, elle disposerait d'une
fortune
liquide de 30'000 fr. sur un compte d'épargne à son nom.

Statuant le 30 septembre 2002, le Bureau de l'assistance judiciaire
du canton
de Vaud a rejeté la réclamation.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral,
X.________ conclut à la constatation du caractère arbitraire de la
décision
attaquée et à son annulation, ainsi qu'à l'octroi de l'assistance
judiciaire
«cantonale» depuis le début du procès en divorce; il sollicite
l'assistance
judiciaire pour la procédure fédérale.

L'autorité cantonale propose le rejet du recours dans la mesure de sa
recevabilité.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 128 II 311 consid. 1 p. 315).

1.1 Le refus de l'assistance judiciaire constitue une décision
incidente qui
cause en principe un préjudice irréparable; le recours est dès lors
recevable
sous l'angle de l'art. 87 al. 2 OJ (ATF 126 I 207 consid. 2a p. 210;
125 I
161 consid. 1 p. 162 et les arrêts cités). Formé en temps utile
contre une
telle décision rendue en dernière instance cantonale, il l'est aussi
au
regard des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.

1.2 Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, le recours
de droit
public est de nature cassatoire et ne peut tendre qu'à l'annulation
de la
décision attaquée (ATF 124 I 327 consid. 4a-4c p. 332 ss et les arrêts
cités). Sont, par conséquent, irrecevables les conclusions qui visent
à la
constatation du caractère arbitraire de celle-ci (cf. ATF 124 I 327
consid.
4c/aa p. 333/334) et à l'octroi de l'assistance judiciaire pour le
procès en
divorce (cf. ATF 104 Ia 31 consid. 1 p. 32).

1.3 Le recourant se plaint, en l'espèce, d'une violation de son droit
à
l'assistance judiciaire garanti par la Constitution (fédérale), ainsi
que
d'une application arbitraire du droit cantonal. Il ne prétend pas que
ce
dernier lui accorderait une protection plus étendue que celle
découlant de
l'art. 29 al. 3 Cst., en sorte qu'il y a lieu d'examiner librement si
la
notion d'indigence a été violée; les constatations de fait de
l'autorité
cantonale ne peuvent, en revanche, être appréciées que sous l'angle
restreint
de l'arbitraire (ATF 127 I 202 consid. 3a p. 204/205).

2.
Dans un premier moyen, le recourant soutient que l'autorité cantonale
a dénié
son indigence sur la base d'une «appréciation manifestement
inadmissible des
faits».

2.1 D'après la jurisprudence, les autorités cantonales disposent d'un
large
pouvoir en ce domaine (ATF 104 Ia 381 consid. 9 p. 399). Saisi d'un
recours
de droit public, le Tribunal fédéral n'intervient que lorsque
l'appréciation
incriminée se révèle arbitraire, à savoir manifestement insoutenable
(ATF 129
I 8 consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2b p. 41 et les arrêts cités);
encore
faut-il que la décision attaquée en soit viciée, non seulement dans
ses
motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88
et les
arrêts cités).

2.2 Aux termes de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit -
sous
peine d'irrecevabilité (ATF 123 II 552 consid. 4d p. 558) - contenir
un
exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes
juridiques
violés, précisant en quoi consiste la violation. Le justiciable qui
forme un
recours de droit public pour arbitraire ne peut se borner à critiquer
la
décision attaquée comme il le ferait dans une procédure d'appel, où
l'autorité de recours jouit d'un libre pouvoir d'examen (ATF 117 Ia 10
consid. 4b p. 11/12; 107 Ia 186); en particulier, il ne peut se
contenter
d'opposer son argumentation à celle de l'autorité cantonale, mais doit
démontrer, par une argumentation précise, que cette décision repose
sur une
appréciation des preuves manifestement insoutenable (cf. sur ce
point: ATF
125 I 492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités).

Dans un recours pour arbitraire, la présentation de nouveaux moyens
de fait
ou de droit est prohibée (ATF 124 I 208 consid. 4b p. 212; 119 II 6
consid.
4a p. 7; 118 III 37 consid. 2a p. 39). Le Tribunal fédéral s'en tient
aux
faits constatés par la juridiction cantonale, à moins que le recourant
n'établisse que lesdites constatations sont arbitrairement fausses ou
lacunaires (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26).

2.2.1 Le recourant reproche tout d'abord à l'autorité cantonale
d'avoir
calculé de manière arbitraire son gain mensuel net, en incluant dans
son
revenu annuel treize versements d'allocations familiales, alors que
cette
prestation ne lui est versée que douze fois par an.

Cette critique est justifiée. Il convient de déduire du revenu
mensuel retenu
par l'autorité cantonale (11'870 fr.) l'équivalent d'une allocation
familiale
mensuelle, c'est-à-dire 60 fr. (725 fr. : 12); le revenu net du
recourant
s'élève ainsi à 11'810 fr. par mois.

2.2.2 Le recourant affirme ensuite que l'autorité cantonale est
tombée dans
l'arbitraire en intégrant dans son salaire la somme de 100 fr. qu'il
perçoit
mensuellement à titre de frais professionnels, cette indemnité ne lui
étant,
de plus, versée que douze, et non treize, fois par an.

Cette argumentation ne ressort ni de la réclamation cantonale, ni de
la
décision attaquée: nouvelle, elle est donc irrecevable (supra, 2.2).
Au
demeurant, le recourant n'établit pas en quoi la constatation
critiquée est
arbitrairement inexacte (art. 90 al. 1 let. b OJ; supra, 2.2).
2.2.3 Le recourant se plaint en outre de ce que l'autorité cantonale
a ramené
de 1'300 fr. à 1'000 fr. les postes «minimum vital» et «frais de
repas»; ce
montant-là avait pourtant été accepté en plein - tant dans ses propres
charges que dans celles de son épouse - par le Tribunal
d'arrondissement de
Lausanne dans son «ordonnance» du 15 mars 2002, et correspond aux
Directives
de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites qui
arrêtent à
1'100 fr. par mois le minimum vital pour une personne seule et à 8-10
fr. par
jour les frais de repas hors du domicile.

Ce grief ne paraît pas dépourvu de fondement. Il n'est cependant pas
nécessaire d'approfondir la question; en effet, malgré la
rectification de la
décision déférée sur ce point, le solde disponible permet néanmoins au
recourant d'assumer ses frais de procès (infra, 2.3).
2.2.4 Le recourant prétend encore qu'il est arbitraire de «revenir
sur une
taxation passée en force».

Autant qu'il est compréhensible, le grief est irrecevable. Le
recourant
paraît soutenir que le Bureau de l'assistance judiciaire serait lié
par la
décision qu'a prise le Tribunal d'arrondissement le 15 mars 2002; il
ne cite
toutefois aucune norme (cantonale) qui aurait été arbitrairement
appliquée
(art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 118 Ia 112 consid. 2c p. 118).

2.2.5 Le recourant critique au surplus l'autorité cantonale pour
avoir refusé
d'englober dans son minimum vital élargi les charges du chalet des
époux
(1'000 fr. par mois) en partant à tort du principe que cette somme
représente
l'«amortissement» de la dette hypothécaire, tandis qu'il s'agit des
«charges
fixes indispensables» (intérêts hypothécaires, impôt foncier, taxe
d'habitation, assurances, etc.).

Ce moyen est nouveau, partant irrecevable (supra, 2.2). En effet,
dans la
réclamation adressée à l'autorité cantonale, le recourant s'est borné
à
articuler, sans de plus amples précisions, un montant de 1'000 fr. au
titre
de l'«[a]mortissement du chalet».

2.2.6 Le recourant fait valoir de surcroît que l'autorité précédente a
arbitrairement cumulé dans le même poste ses frais de déplacement et
ses
frais professionnels. Le montant de 700 fr. qui est indiqué dans la
réclamation concerne uniquement ceux-là, charge qui a d'ailleurs été
retenue
par le Tribunal d'arrondissement; il faut y ajouter une somme de 100
fr. par
mois pour ceux-ci.
En instance cantonale, le recourant n'a invoqué aucune charge à titre
de
frais de déplacement; il n'a fait état que d'une dépense mensuelle de
700 fr.
pour ses frais «professionnels». Il s'ensuit que le moyen est
irrecevable
(supra, 2.2).
2.2.7 Dans sa réclamation cantonale, le recourant a mentionné au
chapitre de
ses dépenses «incompressibles» 270 fr. pour l'assurance maladie et
730 fr.
pour les impôts, alors que, dans son recours de droit public, il
chiffre ces
postes respectivement à 301 et 811 francs. Il n'y a pas de raison de
s'écarter en l'occurrence des sommes alléguées en instance cantonale
(supra,
2.2).
2.2.8 Enfin, le grief d'après lequel l'autorité cantonale - à
l'instar du
Tribunal d'arrondissement - n'a pas tenu compte des emprunts que le
recourant
a contractés pour couvrir ses frais de justice et d'avocat, et payer
la
caution de son appartement ainsi que divers meubles pour accueillir
ses trois
filles (40'000 fr. environ), n'a pas été soulevé dans la réclamation:
nouveau, il est irrecevable (supra, 2.2).
2.3 Selon la jurisprudence, doit être qualifiée d'indigente la partie
qui ne
peut pas assumer les frais liés à la défense de ses intérêts sans
porter
atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa
famille (ATF
127 I 202 consid. 3b p. 205 et les arrêts cités). Tel n'est pas le
cas en
l'espèce: nonobstant les amendements qui doivent être apportés à la
décision
attaquée (supra, 2.2.1 et 2.2.3), le recourant dispose encore de
2'155 fr.
par mois (= 11'810 - 9'655).

3.
Au dire du recourant, l'autorité cantonale aurait également enfreint
le
principe de l'égalité de traitement (art. 8 Cst.) en accordant le
bénéfice de
l'assistance judiciaire à son épouse, qui dispose d'un «excédent de
revenu de
CHF 5'868.--».

Autant qu'il est recevable sous l'angle de l'art. 88 OJ (cf. ATF 125
I 161
consid. 2a p. 162 et les références), le moyen est infondé. Le droit à
l'assistance judiciaire, désormais consacré à l'art. 29 al. 3 Cst.,
n'est
qu'une émanation du principe de l'égalité devant la loi (cf. ATF 115
Ia 193
consid. 3a p. 195 et la doctrine citée); si la décision attaquée ne
consacre
aucune violation de ce droit, il n'y a plus place pour un grief pris
de ce
que l'autorité cantonale aurait statué différemment dans une affaire
identique ou comparable. Quant à la jurisprudence citée par le
recourant -
qui concerne la répartition de l'excédent lors de la fixation des
contributions alimentaires (ATF 126 III 8) -, elle ne lui est d'aucun
secours
pour résoudre la question litigieuse dans le cas présent.

4.
Enfin, le recourant soutient que l'autorité cantonale a commis un
déni de
justice «formel» en rejetant sa requête d'assistance judiciaire, car
elle
aurait de la sorte «refusé de rendre justice».

Ce moyen apparaît mal fondé. Il y a déni de justice formel
(proprement dit)
lorsque l'autorité compétente refuse de statuer ou tarde à le faire de
manière injustifiée (ATF 107 Ib 160 consid. 3b p. 164 et les arrêts
cités);
aucune de ces hypothèses n'est réalisée ici, l'autorité cantonale
s'étant
dûment prononcée, et à temps, sur la requête.

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il
est
recevable. Les conclusions du recourant étant dénuées de chances de
succès,
l'assistance judiciaire doit lui être refusée (art. 152 al. 1 OJ), et
l'émolument de justice mis à sa charge (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté
dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et au Bureau de
l'assistance judiciaire du canton de Vaud, Département des
institutions et
des relations extérieures.

Lausanne, le 28 février 2003

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.392/2002
Date de la décision : 28/02/2003
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-02-28;5p.392.2002 ?
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