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17/02/2003 | SUISSE | N°U.39/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 février 2003, U.39/02


{T 7}
U 39/02

Arrêt du 17 février 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M. Métral

S.________, recourante, représentée par Me Michel Bergmann, avocat,
rue de
Hesse 8-10, 1204 Genève,

contre

Allianz Suisse, Société d'Assurances, Badenerstrasse 694, 8048
Zürich, intimé

Tribunal administratif de la République et Canton de Genève, Genève

(Jugement du 27 novembre 2001)

Faits :

A.
S. ________, née en 1

957, travaillait comme gestionnaire dans le
service des
sinistres de l'assurance Y.________. Elle était assurée contre les
accidents...

{T 7}
U 39/02

Arrêt du 17 février 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M. Métral

S.________, recourante, représentée par Me Michel Bergmann, avocat,
rue de
Hesse 8-10, 1204 Genève,

contre

Allianz Suisse, Société d'Assurances, Badenerstrasse 694, 8048
Zürich, intimé

Tribunal administratif de la République et Canton de Genève, Genève

(Jugement du 27 novembre 2001)

Faits :

A.
S. ________, née en 1957, travaillait comme gestionnaire dans le
service des
sinistres de l'assurance Y.________. Elle était assurée contre les
accidents
par l'Elvia, société suisse d'assurances, Zurich (dont la nouvelle
raison
sociale est, depuis le 1er janvier 2002, Allianz Suisse société
d'assurances;
ci-après : l'Elvia).

Victime d'un accident de circulation, le 18 juin 1991, S.________ fut
conduite au service des urgences de l'Hôpital X.________, où la
doctoresse
A.________ constata une contracture musculaire paravertébrale et posa
le
diagnostic de «coup du lapin». Huit jours plus tard, elle subit un
traumatisme crânien, avec brève perte de connaissance, après une chute
entraînée par un malaise. L'Elvia alloua des indemnités journalières
et prit
en charge les frais de traitement de l'assurée, qui put reprendre son
travail
dès le 22 juillet 1991.

Par lettre du 16 février 1993, l'assurée demanda à l'Elvia d'examiner
son
droit à une indemnité pour atteinte à l'intégrité, au motif qu'elle
souffrait, depuis son accident du 18 juin 1991, de douleurs cervicales
accompagnées de migraines, d'insomnies et de troubles de la
concentration,
pour lesquels elle était suivie par le docteur B.________,
spécialiste en
rhumatologie, maladies des os et des articulations. Une expertise fut
confiée
au docteur C.________, spécialiste en chirurgie, qui décrivit des
douleurs
cervico-scapulo-humérales, une raideur cervicale antalgique lors de
rotations
ou d'inclinaisons de la tête à droite, ainsi que des cervicalgies
nocturnes,
sans toutefois déceler de cause anatomique ou neurologique à ces
symptômes.
Ce praticien considéra que l'origine accidentelle de ces douleurs
était
probable, avant de proposer d'attendre encore un an avant de statuer
sur
l'octroi d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité (rapport du 23
juin
1993).

Dès le mois de septembre 1993, S.________ a subi une nouvelle période
d'incapacité de travail, après avoir présenté un état fébrile avec
sensation
d'instabilité, accès de vertige mal systématisés, importante asthénie,
troubles phasiques et syndrome de restless leg. Lors d'une première
hospitalisation à D.________, les médecins n'ont pas mis en évidence
de
syndrome inflammatoire et conclurent à une atteinte encéphalitique
probablement d'origine virale. A la suite d'une seconde
hospitalisation, à
l'Hôpital X.________, du 25 avril au 3 mai 1994, le diagnostic posé
fut celui
de status post-distorsion cervicale et TCC avec perte de connaissance,
discret hémisyndrome sensitivo-moteur gauche d'origine indéterminée,
restless
leg syndrome et ramollissement du noyau lenticulaire gauche avec
troubles
phasiques (rapports des 11 mai et 4 août 1994 des docteurs E.________
et
F.________). L'assurée a par la suite repris son travail, jusqu'à la
résiliation de son contrat par Y.________, pour le mois de septembre
1995;
S.________ a toutefois retrouvé un emploi de réceptionniste à
mi-temps, dès
le mois de janvier 1996.

Poursuivant l'instruction du cas, l'Elvia a demandé un rapport
d'expertise au
docteur G.________, neurologue, lequel constata notamment une
limitation
modérée des mouvements de la nuque et une discrète hyperréflexie
gauche,
l'assurée lui ayant par ailleurs décrit des difficultés de
concentration, une
fatigabilité accrue et une intolérance au stress. L'expert proposa de
retenir
une atteinte à l'intégrité de 10 % en raison de la perte de mobilité
et des
douleurs de la colonne cervicale, ainsi que de 35 % en raison des
troubles de
la mémoire et de la concentration, ainsi que de la fatigabilité; il
ajouta
que l'assuré n'était pas capable d'exercer une activité plus
astreignante ou
plus stressante que celle exercée à mi-temps depuis le mois de
janvier 1996
(rapport du 12 mai 1997). Sur cette base, l'Elvia alloua une
indemnité pour
une atteinte à l'intégrité de 45 %, par décision du 8 août 1997.
L'assurée
s'est déclarée d'accord avec cette décision, tout en demandant à
l'Elvia
d'examiner encore son droit à une rente d'invalidité.

Le 27 octobre 1999, l'assureur-accidents confia au docteur H.________,
spécialiste en neurologie, le soin de réaliser une nouvelle expertise.
Celui-ci posa le diagnostic de sentiment subjectif d'incapacité
dysexécutive
persistante après whiplash et de status après suspicion de
méningo-encéphalite cryptogénique avec lésion vasculaire du putamen
gauche,
avant de nier l'existence d'une incapacité de travail d'origine
accidentelle
(rapport du 22 mai 2000). Par décision du 6 novembre 2000 et décision
sur
opposition du 6 mars 2001, l'Elvia refusa d'allouer à l'assurée une
rente
d'invalidité de l'assurance-accidents.

B.
Par jugement du 27 novembre 2001, le Tribunal administratif du canton
de
Genève rejeta le recours formé par l'assurée contre cette décision.

C.
S.________ interjette un recours de droit administratif contre ce
jugement,
dont elle demande l'annulation. Elle conclut, sous suite de dépens, à
ce que
l'Elvia soit condamnée à lui verser une rente fondée sur un taux
d'invalidité
de 50 % au moins; subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause
à la
juridiction cantonale pour qu'elle statue à nouveau après avoir mis
en oeuvre
une expertise judiciaire. L'Elvia demande le rejet du recours, tandis
que
l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
1.1 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose
d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et
l'atteinte
à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie
lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le
dommage
ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de
la même
manière. Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la
cause
unique ou immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit que
l'événement dommageable, associé éventuellement à d'autres facteurs,
ait
provoqué l'atteinte à la santé physique ou psychique de l'assuré,
c'est-à-dire qu'il se présente comme la condition sine qua non de
celle-ci.
Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un
rapport de causalité naturelle est une question de fait, que
l'administration
ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur
des
renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se
conformant à
la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée
généralement à
l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque
l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le
dommage
paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable
dans le
cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident
assuré
doit être nié (ATF 119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les
références).

1.2 En matière de lésions au rachis cervical par accident de type
«coup du
lapin» sans preuve d'un déficit fonctionnel, l'existence d'un lien de
causalité naturelle entre l'accident et l'incapacité de travail ou de
gain
doit en principe être admise en présence d'un tableau clinique typique
présentant de multiples plaintes (maux de tête diffus, vertiges,
troubles de
la concentration et de la mémoire, nausées, fatigabilité, troubles de
la vue,
irritabilité, dépression, etc...), lorsque ces symptômes ne sont
apparus
qu'après l'accident et qu'ils ne peuvent être expliqués, au degré de
la
vraisemblance prépondérante, par d'autres facteurs non accidentels
(cf. ATF
119 V 337 sv. consid. 1, 117 V 360 consid. 4b et les références
citées; voir
également arrêt S. du 8 juillet 2002 [U 139/00] consid. 3).

2.
Les premiers juges, s'appuyant sur le rapport du docteur H.________,
ont nié
l'existence d'un rapport de causalité naturelle entre les accidents
des 18 et
26 juin 1991 et une éventuelle diminution de la capacité de travail
et de
gain de la recourante. Cette dernière se réfère pour sa part au
rapport
établi par le docteur G.________ et fait valoir qu'il avait conduit
l'assureur-accidents à reconnaître une atteinte à la santé d'origine
accidentelle, pour laquelle il lui a alloué une indemnité
correspondant à une
atteinte à l'intégrité de 45 %. La recourante laisse entendre que
l'assureur-accidents serait désormais lié par cette décision entrée
en force.

3.
La reconnaissance d'une atteinte durable à l'intégrité nécessite de
poser un
pronostic relatif à l'évolution future de la santé de la personne
assurée,
dont on ne peut pas exclure qu'il se révèle par la suite erroné; par
ailleurs, l'existence d'une atteinte à l'intégrité n'implique pas
nécessairement une incapacité de travail et de gain ouvrant droit à
une rente
(cf. art. 36 al. 1 2ème phrase OLAA; ATF 115 V 147 consid. 1, 113 V
221
consid. 4b). Pour ces motifs, la jurisprudence considère que
l'assureur-accidents n'est en principe pas lié par une décision
entrée en
force dans laquelle il a reconnu l'existence d'une atteinte à
l'intégrité
imputable à un accident, lorsqu'il est saisi ultérieurement d'autres
prétentions de la personne assurée en raison de cet accident (arrêts
F. du 21
août 2002 [U 314/01] consid. 3, F. du 28 juin 2001 [U 50/99] consid.
3b ). Il
s'ensuit que l'intimée pouvait examiner l'existence d'une incapacité
de
travail et de gain, ainsi que, le cas échéant, d'un rapport de
causalité
entre cette incapacité et les accidents subis, sans être liée par la
décision
rendue le 8 août 1997.

4.
4.1En dépit d'incertitudes quant au diagnostic d'encéphalite posé à
l'hôpital
de D.________, aucun des médecins ayant examiné l'assurée ne met
sérieusement
en doute la survenance d'une atteinte cérébrale d'origine maladive, en
septembre 1993. Ce fait doit donc être tenu pour établi. Par
ailleurs, la
recourante ne soutient pas, à juste titre au vu des pièces médicales
figurant
au dossier, que les limitations de la mobilité de la nuque constatées
par les
docteurs C.________ et G.________ seraient la cause d'une incapacité
de
travail et de gain. En revanche, elle affirme souffrir d'une telle
incapacité
en raison de troubles de la concentration et de la mémoire, ainsi que
d'une
fatigabilité accrue, qui l'empêcheraient d'exercer à plein temps une
activité
à responsabilité. Ces affections ne seraient pas dues, contrairement
à ce
qu'à retenu l'intimée dans la décision sur opposition litigieuse, à
l'atteinte maladive survenue en septembre 1993, mais à l'accident du
18 juin
1991.

4.2 D'après le docteur H.________, S.________ ne présentait pas de
séquelle
accidentelle entravant sa capacité de travail lorsqu'il l'a examinée,
en mars
2000, même si elle-même demeurait persuadée de la persistance d'une
incapacité dysexécutive. Par ailleurs, toujours selon le docteur
H.________,
il est peu vraisemblable que les événements survenus en 1991 aient
eu, deux
ans plus tard, une influence sur la capacité de travail de l'assurée.
Pour sa
part, le docteur G.________ a exposé qu'il était difficile d'apprécier
l'impact des affections survenues en 1991 et en 1993 sur les troubles
neuro-psychologiques de l'assurée. A la suite de l'accident de juin
1991, une
limitation modérée des mouvements de la nuque, avec des épisodes de
blocage,
a persisté; il est également possible qu'une fatigabilité et des
troubles de
la concentration aient subsisté.

4.3 Contrairement à ce que soutient la recourante, cette seule
possibilité ne
suffit pas à tenir pour établie, au degré de la vraisemblance
prépondérante,
l'existence d'un rapport de causalité naturelle entre les accidents
survenus
en juin 1991 et les périodes d'incapacité de travail subies dès le
mois de
septembre 1993. Celles-ci sont plus probablement dues à l'atteinte
maladive
apparue à cette époque, laquelle a entraîné une dégradation
relativement
soudaine de l'état de santé de l'assurée. Que cette atteinte maladive
ait pu,
selon le docteur G.________, masquer d'éventuelles séquelles
accidentelles,
sur le plan neuro-psychologique, n'est pas déterminant. En effet, la
persistance de telles séquelles invalidantes ne constitue,
précisément,
qu'une éventualité, laquelle est d'autant moins vraisemblable que le
docteur
C.________ n'a pas fait état, dans son rapport du 23 juin 1993, de
fatigabilité ni de troubles de la mémoire ou de la concentration.

Dans ces conditions, les rapports des docteurs C.________, G.________
et
H.________ ne permettent pas de tenir pour établie, au degré de la
vraisemblance prépondérante, l'origine accidentelle des périodes
d'incapacité
de travail et de gain présentées par l'assurée dès le mois de
septembre 1993.
Le dossier n'en est pas pour autant lacunaire, sur le plan médical,
de sorte
qu'il n'y a pas lieu de retourner la cause à l'instance précédente
pour la
mise en oeuvre d'une nouvelle expertise.

5.
La recourante, dont les conclusions sont mal fondées, ne peut
prétendre de
dépens (art. 159
al. 1 OJ). Par ailleurs, la procédure est gratuite,
dès lors
qu'elle porte sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance
(art. 134
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif de la
République et Canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 17 février 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.39/02
Date de la décision : 17/02/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-02-17;u.39.02 ?
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