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11/02/2003 | SUISSE | N°4P.251/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 février 2003, 4P.251/2002


{T 0/2}
4P.251/2002 /ech

Arrêt du 11 février 2003
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Corboz, président de la Cour, Rottenberg
Liatowitsch et
Favre,
Greffière: Mme Michellod.

A. ________,
recourant, représenté par Me Laurent de Bourgknecht, avocat, case
postale 86,
1701 Fribourg,

contre

Canton de Fribourg, Service public de l'emploi (SPE),
case postale 189, 1705 Fribourg,
Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, IIe Cour d'appel, place de
l'Hôtel-de-Ville 2a, 1700 Fribourg.>
art. 9 Cst. (interdiction de l'arbitraire, principe de la bonne foi)

(recours de droit public contre l'arrêt du ...

{T 0/2}
4P.251/2002 /ech

Arrêt du 11 février 2003
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Corboz, président de la Cour, Rottenberg
Liatowitsch et
Favre,
Greffière: Mme Michellod.

A. ________,
recourant, représenté par Me Laurent de Bourgknecht, avocat, case
postale 86,
1701 Fribourg,

contre

Canton de Fribourg, Service public de l'emploi (SPE),
case postale 189, 1705 Fribourg,
Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, IIe Cour d'appel, place de
l'Hôtel-de-Ville 2a, 1700 Fribourg.

art. 9 Cst. (interdiction de l'arbitraire, principe de la bonne foi)

(recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal de
l'État de
Fribourg, IIe Cour d'appel, du 25 septembre 2002)

Faits:

A.
L'intimé a conclu avec le recourant un contrat de travail en mai
2001, dans
le cadre du programme de qualification cantonal prévu par l'art. 30
de la loi
fribourgeoise du 13 novembre 1996 sur l'emploi et l'aide aux chômeurs
(ci-après LEAC). Le recourant était engagé en qualité
d'aide-jardinier à 50%
auprès de la Ville de Fribourg, du 9 mai au 8 novembre 2001, pour un
salaire
brut de 2'879 fr. à 100%, sans 13e salaire. Le temps d'essai était de
trois
mois.

Le 21 mai 2001, soit durant la période d'essai, l'intimé a résilié le
contrat
de travail pour le 1er juin 2001, après avoir constaté que le
recourant ne
s'était pas présenté, sans motifs, auprès de quatre entreprises
différentes
pour un emploi fixe et convenable proposé dans le domaine du
jardinage par
l'Office régional de placement Sarine-Fribourg (ci-après ORP).

B.
Le 21 décembre 2001, le recourant a saisi le Président de la Chambre
des
prud'hommes de la Sarine d'une demande dirigée contre l'intimé, en
paiement
d'un montant de 7'581,35 fr., avec intérêts à 5% dès le jour de la
demande.
En bref, le recourant contestait la qualité de l'intimé pour résilier
son
contrat et le motif du congé, qu'il estimait abusif. Il réclamait dès
lors le
paiement d'une indemnité correspondant au salaire pour les six mois
que
devait durer le contrat résilié.

Le 24 avril 2002, le Président de la Chambre des prud'hommes de
l'arrondissement de la Sarine a rejeté la demande. Il a admis la
compétence
de l'intimé pour résilier le contrat et considéré que l'action du
recourant
était périmée (cf. art. 336b al. 2 CO). Examinant toutefois si la
résiliation
du contrat était abusive, il a estimé que tel n'était pas le cas,
tant au
regard de l'art. 336 CO que de l'art. 2 al. 2 CC. En effet, le motif
invoqué
par l'intimé, soit le non-respect des obligations imposées aux
demandeurs
d'emploi, n'était pas abusif.

Par arrêt du 25 septembre 2002, la IIe Cour d'appel du Tribunal
cantonal de
l'Etat de Fribourg a rejeté l'appel du recourant. D'une part, le
recourant
n'avait jamais fait opposition à la résiliation de son contrat avant
l'échéance du délai de congé et n'avait pas introduit d'action dans
le délai
de 180 jours prévu par la loi; d'autre part, le motif invoqué n'était
pas
abusif, l'intimé n'ayant fait que rétablir une situation conforme au
droit en
donnant le congé après avoir constaté que le travailleur ne
remplissait pas
les conditions posées par la LEAC pour bénéficier du programme de
qualification.

C.
Le recourant dépose un recours de droit public contre l'arrêt
cantonal,
concluant à son annulation. Il invoque une violation des principes de
l'interdiction de l'arbitraire et de la bonne foi, garantis par
l'art. 9
Cst., notamment dans l'application du droit cantonal. Il conteste
également
l'interprétation de la cour cantonale selon laquelle l'invocation
d'une
résiliation abusive au sens de l'art. 2 al. 2 CC doit respecter les
délais
fixés par l'art. 336b CO.

L'intimé conclut au rejet du recours, tandis que l'autorité cantonale
renonce
à formuler des observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une
décision
cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens
(art. 84
al. 1 let. a OJ). La décision attaquée, qui est finale, n'est
susceptible
d'aucun autre moyen de droit sur le plan cantonal (art. 86 al. 1 OJ).
Compte
tenu de la valeur litigieuse (7'581,35 fr.), un recours en réforme
est exclu
(cf. art. 46 OJ); le recourant peut donc se plaindre d'une violation
arbitraire du droit fédéral sans violer le principe de la
subsidiarité du
recours de droit public (art. 84 al. 2 OJ); l'examen du Tribunal
fédéral se
limitera toutefois au droit constitutionnel invoqué et il ne saurait
être
question de contrôler librement l'application du droit fédéral.

Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que
les
griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés par
l'acte de
recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 127 I 38 consid. 3c; 127 III 279
consid. 1c; 126 III 524 consid. 1c, 534 consid. 1b).

2.
Le recourant se plaint d'une violation des principes constitutionnels
de
l'interdiction de l'arbitraire et de la bonne foi dans l'application
de la
LEAC et des art. 336b CO et 2 al. 2 CC.

2.1 Aux termes de l'art. 9 Cst., toute personne a le droit d'être
traitée par
les organes de l'Etat sans arbitraire et conformément aux règles de
la bonne
foi.

Une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement
insoutenable,
méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté, ou
encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de
l'équité.
Il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; encore faut-il
que la
décision apparaisse arbitraire dans son résultat. A cet égard, le
Tribunal
fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît
insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective,
adoptée
sans motif objectif et
en violation d'un droit certain. Il n'y a pas arbitraire du seul fait
qu'une
autre solution paraît également concevable, voire même préférable
(ATF 128 I
81 consid. 2, 177 consid. 2.1; 128 II 259 consid. 5 p. 280).

2.2 Le recourant affirme que la LEAC a pour but d'empêcher que les
chômeurs
en fin de droit sortent du circuit économique et tombent à
l'assistance
publique. Par conséquent, les conditions fixées par cette loi pour
accéder
aux programmes de qualification ne doivent pas prendre le pas sur le
but
général que s'est fixé le législateur, surtout lorsque les
manquements sont
minimes et n'ont aucune incidence concrète sur le sort et les
objectifs des
mesures et de la loi en général.

Pour pouvoir bénéficier du programme de qualification cantonal au
sens de la
LEAC, le demandeur d'emploi doit remplir les conditions posées par
l'art. 23
LEAC, à savoir notamment, être apte au placement, se rendre une fois
par mois
auprès de l'office régional pour un entretien de conseil et rechercher
personnellement un emploi. Comme l'a relevé le juge de première
instance, les
mesures de qualification prévues par la LEAC sont financées par la
collectivité publique. Il se justifie par conséquent que l'intimé
applique
strictement les conditions posées par la loi pour déterminer si le
demandeur
d'emploi a le droit de participer aux mesures proposées. L'autorité
cantonale
n'a donc pas fait preuve d'arbitraire en déboutant le recourant pour
le motif
qu'il ne remplissait pas les conditions prévues pour le programme de
qualification cantonal.

2.3 Le recourant soutient que l'art. 23 LEAC ne fait nullement
référence aux
obligations du demandeur d'emploi antérieures aux mesures de
réinsertion, de
sorte qu'il était arbitraire de résilier son contrat de travail au
motif
qu'il avait failli, par le passé, à ses obligations.

La lecture de la disposition citée fait clairement apparaître que les
obligations énumérées constituent une condition sine qua non pour que
le
demandeur d'emploi puisse prétendre à des mesures de qualification
prévues
par la loi. Le grief, qui confine à la témérité, est dénué de tout
fondement.

3.
3.1Le recourant affirme que l'intimé connaissait ses manquements bien
avant
la conclusion du contrat de travail et qu'il a donc violé le principe
de la
bonne foi en invoquant ce motif pour résilier le contrat. Le recourant
n'apporte toutefois aucun élément convaincant permettant de faire
douter des
constatations cantonales selon lesquelles l'intimé a résilié le
contrat de
travail après avoir constaté que le travailleur ne remplissait pas les
conditions posées par la LEAC.

3.2 Il soutient également que l'intimé a violé le principe de la
bonne foi,
car les emplois proposés par l'ORP étaient des postes à plein temps,
tous
situés en dehors du canton de Fribourg.
Il ressort de la réponse de première instance de l'intimé, que parmi
les
quatre postes auxquels le recourant a été assigné, deux étaient
accessibles
en moins de deux heures au moyen des transports publics; cependant,
comme il
avait indiqué disposer d'un véhicule, il lui était possible d'accéder
aux
quatre emplois en moins de deux heures (cf. art. 16 al. 2 LACI, RS
837.0). En
outre, le recourant s'était inscrit auprès de l'ORP en tant que
demandeur
d'emploi à 100%, il ne pouvait donc refuser de se présenter à ce
taux. Tant
le premier juge que la Cour d'appel ont implicitement admis ces
arguments en
rejetant le caractère abusif du congé. Or le recourant ne formule
aucune
critique à leur encontre, se bornant à répéter que les emplois
proposés
n'étaient pas convenables et qu'il était contraire à la bonne foi de
le
sanctionner pour les avoir refusés. Cette argumentation est
manifestement
insuffisante pour établir une violation du principe de la bonne foi.

3.3 Le recourant estime implicitement que l'intimé ne pouvait
résilier son
contrat de travail pour des manquements antérieurs à sa conclusion.

Selon la jurisprudence, invoquer des faits antérieurs au contrat de
travail
pour le résilier ne constitue pas un abus de droit (ATF 111 II 242
consid.
2). La Cour d'appel n'est donc pas tombée dans l'arbitraire en
rejetant le
grief de violation de l'art. 2 al. 2 CC.

4.
Le recourant soutient enfin que la procédure prévue par l'art. 336b
CO ne
concerne que les cas visés aux art. 336 et 336a CO et non les
comportements
abusifs prohibés par l'art. 2 al. 2 CC.

Les congés abusifs en matière de contrat de travail sont réglés aux
art. 336
à 336b CO. Il est admis que la liste des différentes hypothèses
visées à
l'art. 336 CO n'est pas exhaustive, et qu'elle laisse place à la mise
en
oeuvre de l'art. 2 al. 2 CC, bien que la jurisprudence se montre
restrictive
en la matière (ATF 121 III 60 consid. 3d). La question de savoir si
les
règles de procédure instituées à l'art. 336b CO valent aussi lorsque
la
partie qui se prévaut d'un congé abusif se fonde sur l'art. 2 al. 2
CC n'a en
revanche pas été tranchée par le Tribunal fédéral. Cette question n'a
cependant pas à être résolue en l'espèce, puisque l'intimé ne peut se
voir
reprocher aucune atteinte aux règles de la bonne foi ni aucun abus de
droit,
pour les raisons exposées ci-dessus.

5.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Comme la valeur
litigieuse lors de l'ouverture de l'action ne dépassait pas 30'000
fr., il ne
sera pas perçu d'émolument judiciaire (art. 343 al. 2 et 3 CO). En
outre, il
n'y a pas lieu d'allouer des dépens, l'intimé étant une autorité
cantonale
(art. 159 al. 2 i.f. OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais ni alloué de dépens.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, au Canton de
Fribourg,
Service public de l'emploi (SPE) et au Tribunal cantonal de l'État de
Fribourg, IIe Cour d'appel.

Lausanne, le 11 février 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.251/2002
Date de la décision : 11/02/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-02-11;4p.251.2002 ?
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