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29/01/2003 | SUISSE | N°C.68/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 janvier 2003, C.68/02


{T 7}
C 68/02

Arrêt du 29 janvier 2003
IIe Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard.
Greffière : Mme von Zwehl

Service de l'emploi du canton de Vaud, première instance cantonale de
recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lausanne,
recourant,

contre

N.________, intimé,

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 25 février 2002)

Faits :

A.
N. ________ travaillait depuis le 1er octobre 1999

en qualité de
«chief
finance officer» auprès de l'Etude de Me A.________, avocat, à Y. Son
activité consistait en la gestion ...

{T 7}
C 68/02

Arrêt du 29 janvier 2003
IIe Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard.
Greffière : Mme von Zwehl

Service de l'emploi du canton de Vaud, première instance cantonale de
recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lausanne,
recourant,

contre

N.________, intimé,

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 25 février 2002)

Faits :

A.
N. ________ travaillait depuis le 1er octobre 1999 en qualité de
«chief
finance officer» auprès de l'Etude de Me A.________, avocat, à Y. Son
activité consistait en la gestion administrative de sociétés offshore
(tenue
de la comptabilité, contrôle des flux de fonds, établissement
d'ordres de
paiement). Le 22 janvier 2001, N.________ a résilié son contrat de
travail
pour le 31 mars 2001; le 1er avril suivant, il s'est annoncé à
l'assurance-chômage.

Invité par la Caisse publique cantonale vaudoise de chômage (ci-après
: la
caisse) à s'expliquer sur les motifs de son congé, N.________ a
exposé que
celui-ci résultait d'une divergence de vue d'ordre juridique avec son
employeur à propos de certaines activités; conforté dans ses doutes
sur la
régularité de ces activités après avoir pris conseil auprès d'un autre
avocat, il s'était vu contraint de quitter son emploi «pour éviter le
moindre
risque juridique».

Par décision du 7 mai 2001, la caisse a suspendu l'assuré dans son
droit aux
indemnités de chômage pour une durée de 31 jours, au motif qu'il
était sans
travail par sa propre faute. N.________ a déféré cette décision au
Service de
l'emploi du canton de Vaud (ci-après : le service de l'emploi),
première
instance cantonale de recours en matière d'assurance-chômage, qui l'a
débouté
par décision du 14 septembre 2001.

B.
Après avoir tenu une audience de comparution personnelle, le Tribunal
administratif du canton de Vaud a, par jugement du 25 février 2002,
admis le
recours formé par l'assuré contre la décision du service de l'emploi
et
annulé les décisions administratives précédentes.

C.
Le service de l'emploi interjette recours de droit administratif
contre ce
jugement, dont il requiert l'annulation.

Alors que la juridiction cantonale a présenté des observations,
N.________ et
le Secrétariat d'état à l'économie ont tous deux renoncé à se
déterminer.

Considérant en droit :

1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances
sociales
(LPGA) du 6 octobre 2000, entrée en vigueur au 1er janvier 2003,
n'est pas
applicable au présent litige, dès lors que le juge des assurances
sociales
n'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de
l'état de
fait postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du
7 mai
2001 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

2.
Selon l'art. 30 al. 1 let. a LACI, l'assuré doit être suspendu dans
l'exercice de son droit à l'indemnité lorsqu'il est sans travail par
sa
propre faute. Tel est notamment le cas de l'employé qui a résilié
lui-même le
contrat de travail, sans être préalablement assuré d'un autre emploi,
à moins
qu'on n'eût pu exiger de lui qu'il conservât son ancien emploi (art.
44 al. 1
let. b OACI). Il y a lieu d'admettre de façon restrictive les
circonstances
pouvant justifier l'abandon d'un emploi (DTA 1989, n° 7 p. 89,
consid. 1a et
les références; voir cependant ATF 124 V 234).

3.
Selon les premiers juges, N.________ a rendu vraisemblable que les
circonstances auxquelles il avait été confronté dans le cadre de ses
activités professionnelles auprès de Me A.________ étaient de nature à
détruire les rapports de confiance qui sont à la base du contrat de
travail,
de sorte qu'on ne pouvait plus exiger de lui qu'il poursuivît les
relations
contractuelles avec son employeur. Aucune faute ne pouvait dès lors
lui être
reprochée dans le cadre de l'assurance-chômage.

Pour le recourant, en revanche, l'assuré n'a pas rapporté la preuve du
caractère prétendument illicite des activités auxquelles il était
censé
participer; à supposer que tel eût été le cas, il aurait pu s'y
soustraire
sans pour autant résilier purement et simplement son contrat de
travail. Rien
n'indiquait d'ailleurs que son employeur n'était plus du tout disposé
à
respecter ses propres engagements contractuels puisqu'il avait pu
continuer
de travailler jusqu'à la fin de son délai de congé.

4.
Des déclarations de l'assuré en cours d'audience, la juridiction
cantonale a
retenu les faits suivants : vers la fin de l'année 2000, N.________
avait été
requis par son employeur d'effectuer un voyage professionnel au siège
d'une
société offshore dont il était chargé de la gestion afin de contrôler
certaines procédures administratives la concernant; soupçonnant des
irrégularités et craignant de se compromettre par sa signature, il
avait pris
conseil auprès d'un avocat le 18 décembre 2000, lequel lui avait
suggéré de
mettre en garde son employeur et, le cas échéant, de résilier son
contrat de
travail; fort de ce conseil, N.________ avait informé Me A.________,
alors
aux Etat-Unis, par courrier électronique qu'il n'effectuerait pas le
voyage
prévu, en le rendant attentif aux risques encourus; après discussion
entre
les intéressés, N.________ avait été mis devant le choix de revenir
sur ses
déclarations ou de démissionner, ce qu'il fit par lettre du 22
janvier 2001.

En l'occurrence, on ne saurait faire grief à la juridiction cantonale
d'avoir
estimé, à la lumière de ces éléments, que la poursuite des rapports de
travail n'était plus exigible de la part de l'intimé. Quand bien même
l'illicéité des activités en cause n'est pas démontrée, rien ne
permet de
douter que les suspicions de N.________ ne reposaient pas sur des
indices
objectifs et sérieux. Pour s'en assurer, le prénommé a d'ailleurs
pris la
précaution de demander l'avis d'un homme de loi, Me B.________ de
l'Etude
X.________, qui, dans une attestation du 8 janvier 2002 produite par
l'intimé, a décrit la situation comme il suit : « (...) Mon analyse,
conduite
sur la base des informations dont je disposais, m'a amené à
conseiller à
N.________ de mettre sérieusement en garde son employeur et de
demander une
nouvelle définition de son activité au sein de l'entreprise de son
employeur.
Pour le cas où cette démarche resterait infructueuse, j'ai conseillé à
N.________ de résilier son contrat de travail. (...)». Suivant le
conseil de
cet avocat, l'intimé a d'abord fait part de ses préoccupations à son
employeur; n'ayant toutefois pas pu obtenir, de la part de ce
dernier, des
explications satisfaisantes au sujet des activités qu'il jugeait
problématiques, il a préféré se libérer de ses engagements.
Contrairement à
ce que prétend le recourant, ce n'est donc qu'en dernier ressort,
comme
ultima ratio, que l'assuré a envisagé de résilier son contrat de
travail,
faute d'avoir reçu l'assurance de la légalité de ces activités. Dans
un tel
contexte, on peine à imaginer que l'employeur fût seulement prêt à y
renoncer, voire à confier d'autres tâches à N.________ au sein de son
Etude.
Les affirmations du recourant dans ce sens apparaissent pour le moins
hypothétiques; s'il entendait opposer à l'assuré un comportement
intempestif,
il aurait dû, en tout état de cause, recueillir la version des faits
de
l'employeur à ce sujet, ce que, visiblement, il a renoncé à faire. On
relèvera enfin que l'intimé justifie de plusieurs années d'expérience
dans le
monde des affaires et qu'il a toujours été décrit par ses précédents
employeurs comme un employé sérieux, consciencieux et digne de
confiance (cf.
certificats de travail de la Banque E.________, de F.________ Bank
(Switzerland) LDT, G.________ Trust & Banking Corporation
(Switzerland)
Limited).

Sur le vu de ce qui précède, le jugement attaqué n'est pas
critiquable et le
recours se révèle mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif du
canton de Vaud, à la Caisse publique cantonale vaudoise de chômage, à
l'Office régional de placement des districts de H.________,
I.________ et de
J.________, et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 29 janvier 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

p. le Président de la IIe Chambre: p. la Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.68/02
Date de la décision : 29/01/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-01-29;c.68.02 ?
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