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28/01/2003 | SUISSE | N°I.501/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 janvier 2003, I.501/02


{T 7}
I 501/02

Arrêt du 28 janvier 2003
IIe Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard. Greffière :
Mme
Moser-Szeless

M.________, rue des Auges 5, 1635 La Tour-de-Trême, recourant,
représenté par
Me Nicolas Grand, avocat, rue de l'Eglise 75, 1680 Romont FR,

contre

Office AI du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762
Givisiez,
intimé

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances
sociales,
Givisiez

(Jugement du

29 mai 2002)

Faits :

A.
A.a M.________, né en 1944, chauffeur de trains routiers, a déposé une
demande de prestat...

{T 7}
I 501/02

Arrêt du 28 janvier 2003
IIe Chambre

MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard. Greffière :
Mme
Moser-Szeless

M.________, rue des Auges 5, 1635 La Tour-de-Trême, recourant,
représenté par
Me Nicolas Grand, avocat, rue de l'Eglise 75, 1680 Romont FR,

contre

Office AI du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762
Givisiez,
intimé

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances
sociales,
Givisiez

(Jugement du 29 mai 2002)

Faits :

A.
A.a M.________, né en 1944, chauffeur de trains routiers, a déposé une
demande de prestations de l'assurance-invalidité le 18 novembre 1999.

L'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après :
l'office
AI) a requis l'avis du docteur A.________, médecin traitant, qui a
attesté
une incapacité de travail de 100 % dans la profession de l'assuré,
dès le 3
septembre 1999, en raison d'un diabète et de ses effets (traitement à
l'insuline, risques d'hypoglycémie), ainsi que d'une arthrose lombaire
(rapport du 25 novembre 1999). Le médecin a estimé que son patient
disposait
d'une capacité de travail partielle dans une activité qu'il convenait
encore
d'évaluer de façon plus précise (rapport du 30 août 2000). L'assuré a
effectué un stage d'observation auprès du Centre d'intégration
X.________ du
22 mars au 24 juin 2001. Selon le rapport de stage (du 25 juin 2001),
il
travaillait à cette époque presque tous les vendredis après-midi comme
concierge.

Estimant sur la base de ce rapport qu'il était capable d'exercer une
activité
adaptée, par exemple comme ouvrier dans la production industrielle
légère,
avec un horaire à plein temps, mais un rendement diminué de 30 %,
l'office AI
a communiqué à l'assuré un projet de décision (du 6 juillet 2001),
selon
lequel un degré d'invalidité de 44 % lui était reconnu à partir du 1er
septembre 2000. M.________ a produit un certificat médical du docteur
A.________ du 11 juillet 2001, selon lequel il avait dû interrompre
son
activité de concierge pour des raisons de santé et était actuellement
incapable de travailler à 100 %. Par décision du 10 août 2001,
l'office AI a
admis l'existence d'un cas pénible et a mis l'assuré au bénéfice d'une
demi-rente d'invalidité, fondée sur un taux d'incapacité de gain de
44 %, dès
le 1er septembre 2000.

A.b Le 6 septembre 2001, l'office AI a reçu du docteur A.________ un
certificat daté du 4 septembre 2001, selon lequel l'état clinique de
M.________ s'était aggravé et son incapacité de travail était totale,
ce que
le médecin a confirmé dans un rapport du 7 septembre suivant.

Le 2 novembre 2001, l'office AI a alloué à l'assuré une rente entière
d'invalidité, fondée sur un degré d'invalidité de 100 %, à partir du
1er
octobre 2001.

B.
Par écriture du 3 décembre 2001, M.________ a déféré cette décision
devant le
Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des assurances
sociales,
en concluant à ce qu'elle soit réformée «en ce sens que l'effet
rétroactif
prévu au 1er octobre 2001, le soit au 1er octobre 2000».

Par jugement du 29 mai 2002, le tribunal administratif a rejeté le
recours de
l'assuré.

C.
M.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
il demande implicitement l'annulation. Il conclut, principalement, «à
ce que
la décision rendue par l'Office AI du canton de Fribourg le 10 août
2001 soit
modifié[e] en ce sens que le taux d'invalidité (...) est fixé à 100 %
avec
effet rétroactif au 1er septembre 2000» et, subsidiairement, à ce que
«la
décision de l'Office AI du canton de Fribourg du 2 novembre 2001 soit
modifiée en ce sens que l'effet rétroactif prévu au 1er octobre 2001
(pour un
taux d'invalidité à 100 %) soit avancé au 1er octobre 2000».

Il requiert par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire
gratuite.

L'office AI conclut implicitement au rejet du recours, tandis que
l'Office
fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances
sociales
(LPGA), du 6 octobre 2000, est entrée en vigueur le 1er janvier 2003
et a
entraîné la modification de nombreuses dispositions dans le domaine de
l'assurance-invalidité. La législation en vigueur jusqu'au 31
décembre 2002
demeure cependant déterminante en l'espèce. En effet, d'après la
jurisprudence, la législation applicable en cas de changement de
règles de
droit reste celle qui était en vigueur lors de la réalisation de
l'état de
fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences
juridiques (ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 166 consid. 4b), les faits
sur
lesquels le Tribunal fédéral des assurances peut être amené à se
prononcer
dans le cadre d'une procédure de recours de droit administratif étant
par
ailleurs ceux qui se sont produits jusqu'au moment de la décision
administrative litigieuse (ATF 121 V 366 consid. 1b).

2.
2.1Sous l'angle de la recevabilité du recours cantonal, les premiers
juges
ont retenu qu'en déposant, par l'intermédiaire de son médecin
traitant, un
certificat médical attestant d'une incapacité totale de travailler,
M.________ entendait contester la décision de l'intimé du 10 août
2001; ils
ont dès lors admis qu'il avait valablement recouru contre celle-ci.
Par
ailleurs, ils ont estimé que le recours du 3 décembre 2001 devait être
considéré comme un mémoire complémentaire, et non pas comme un
recours dirigé
contre la décision de l'administration du 2 novembre 2001, dès lors
que
celle-ci faisait intégralement droit à la demande du recourant et
qu'il
n'avait par conséquent pas intérêt à la contester.

2.2 Le raisonnement de l'autorité cantonale de recours ne saurait
être suivi.
En effet, compte tenu des exigences posées par l'art. 85 al. 2 let. b
LAVS,
applicable par analogie en vertu de l'art. 69 LAI, quant à la forme
et le
contenu d'un recours auprès de l'instance cantonale de recours, on ne
voit
pas que le certificat médical du docteur A.________ (du 4 septembre
2001)
puisse être interprété comme un mémoire de recours. Si le juge qui
est saisi
d'un recours en vertu de l'art. 84 LAVS ne doit pas se montrer strict
lorsqu'il apprécie la forme et le contenu de l'acte de recours,
l'intéressé
doit néanmoins manifester clairement et par écrit sa volonté d'en
obtenir la
modification; à défaut, l'écriture qu'il produit ne peut être
considérée
comme une déclaration de recours (ATF 116 V 356 consid. 2b et les
références;
RAMA 1994 n° U 192 p. 150 consid. 4c). Contenant simplement le nom,
la date
de naissance, l'adresse et le numéro AVS de M.________, ainsi que la
mention
que «L'état clinique du patient s'est aggravé et l'incapacité de
travail est
totale», avec la signature du docteur A.________, on cherche
vainement dans
ce document l'expression de la volonté de l'intéressé de contester la
décision de l'office AI du 10 août 2001. Ce document ne remplit donc
manifestement pas les conditions posées par l'art. 85 al. 2 let. b
LAVS pour
être considéré comme un acte de recours. Par ailleurs, à la lecture
des
dispositions cantonales topiques (cf. art. 81 et ss du Code du 23 mai
1991 de
procédure et de juridiction administrative du canton de Fribourg
[CPJA; RSF
150.1]), il n'apparaît pas que le droit cantonal pose des exigences
moins
strictes quant à la forme et le contenu d'une écriture de recours que
le
droit fédéral. Cela étant, il y a lieu de retenir que la décision de
l'office
AI du 10 août 2001 est entrée en force, à défaut d'avoir été attaquée.

La réaction du médecin traitant du recourant, sous forme d'un
certificat
médical attestant d'une aggravation de l'état de santé de son
patient, doit
être considérée comme une demande de révision de la décision initiale
de
l'administration (art. 41 LAI), dès lors qu'est invoquée une
modification de
l'état de santé de l'assuré. C'est du reste l'interprétation que
l'intimé a
faite, à juste titre, de ce document.

2.3 Il ressort clairement des conclusions du mémoire de recours
cantonal du 3
décembre 2001 que le recourant entendait contester, en procédure
cantonale,
la décision de l'intimé du 2 novembre 2001. Contrairement à l'avis de
l'instance cantonale de recours, l'intimé n'a en effet pas, par la
décision
litigieuse, fait intégralement droit à la demande du recourant. Si
l'office
AI a certes admis une modification du degré d'invalidité du recourant
depuis
sa décision initiale (du 10 août 2001), il ne lui reconnaît le droit
à une
rente entière qu'à partir du 1er octobre 2001, et non pas déjà, comme
l'aurait souhaité ce dernier (cf. conclusions du recours cantonal),
dès le
1er octobre 2000. En conséquence, M.________ avait un intérêt à
recourir
contre la seconde décision de l'intimé, laquelle détermine l'objet de
la
présente contestation (cf. ATF 122 V 244 consid. 2a). Dès lors,
l'objet du
litige qu'il appartenait aux premiers juges d'examiner porte sur le
droit de
M.________ à une rente d'invalidité fondée sur un taux de 100 % à
partir du
1er octobre 2001, ce dernier ne contestant que le point de départ du
droit à
la rente. Dans la mesure où les conclusions du recours de droit
administratif
portent sur la modification de la décision de l'administration du 10
août
2001, elles sont irrecevables.

Quoiqu'il en soit, même si la juridiction cantonale a considéré le
droit à la
rente d'invalidité du recourant sous l'angle de la première décision
de
l'intimé, la solution à laquelle elle est parvenue n'est pas
différente de
celle à laquelle on aboutit, comme on le verra ci-après.

3.
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales
concernant
le droit à une rente d'invalidité et la révision de celle-ci, de
sorte qu'il
suffit d'y renvoyer sur ces points.

On ajoutera que selon l'art. 88a al. 2 première phrase RAI, si
l'incapacité
de gain ou l'impotence d'un assuré s'aggrave, il y a lieu de
considérer que
ce changement accroît, le cas échéant, son droit aux prestations dès
qu'il a
duré trois mois sans interruption. L'art. 88bis al. 1 let. a RAI
prévoit
d'autre part que si la révision est demandée par l'assuré,
l'augmentation de
la rente ou de l'allocation pour impotent prend effet, au plus tôt,
dès le
mois où cette demande est présentée. Le Tribunal fédéral des
assurances a
admis la légalité de ces dispositions réglementaires (ATF 121 V 272
consid.
6, 109 V 127, 105 V 264 consid. 2; voir également VSI 2001 p. 276
consid. 3).
Il a en outre jugé que la règle posée par l'art. 88a al. 2 RAI avait
le pas
sur celle de l'art. 88bis al. 1 let. a RAI, de sorte qu'aucune
augmentation
de la rente ou de l'allocation pour impotent ne peut intervenir avant
l'écoulement de la période de carence de trois mois, même si la
révision est
demandée par l'assuré (ATF 105 V 264 consid. 2; VSI 2001 p. 277
consid. 3b).

4.
Il est constant que l'état de santé du recourant s'est aggravé à
partir du
mois de juillet 2001. Le 11 juillet 2001, le docteur A.________ a
ainsi
certifié que le recourant a dû mettre fin à l'activité de
conciergerie qu'il
exerçait à temps partiel pour raison de santé. Par la suite, il a
confirmé la
péjoration de l'état de santé de son patient, liée à des troubles
d'équilibre, une instabilité du diabète, ainsi que des crises de
lombo-sciatalgies, laquelle entraînait une incapacité totale de
travail
(certificat médical du 4 septembre 2001 et rapport du 7 septembre
suivant).
Se fondant sur ces constatations médicales, l'intimé en a déduit que
le
recourant était désormais incapable de travailler dans quelque
activité que
ce soit, de sorte qu'il présentait une incapacité de gain de 100 %
(cf.
projet de décision du 11 octobre 2001, confirmé par la décision du 2
novembre
2001); il n'y a pas lieu de revenir sur cette appréciation.

En revanche, contrairement à ce que fait valoir le recourant, on
constate au
vu de l'ensemble des pièces médicales au dossier qu'il disposait,
avant
l'aggravation de son état de santé en juillet 2001, d'une capacité
résiduelle
de travail dans une activité adaptée. Son médecin traitant estimait
ainsi, le
25 novembre 1999, qu'il serait en mesure de travailler dans une
activité sans
port de charges et permettant de varier les positions avec un horaire
à
mi-temps, voire à plein temps selon la difficulté du travail. Le
praticien
confirmait ses conclusions le 30 août 2000, en préconisant un stage
d'observation pour déterminer de façon précise l'activité adaptée à
l'atteinte à la santé. Les résultats du stage d'observation qu'a
effectué le
recourant par la suite auprès du Centre d'intégration
socioprofessionnelle -
qu'il ne conteste pas au demeurant - ont montré qu'il était en mesure
d'exercer une activité légère, telle que travaux de production en
usine avec
un rendement de 70 % et un taux de présence de 100 %, ou encore une
activité
de conciergerie ou d'aide-jardinier à mi-temps, avec un rendement
«quelque
peu diminué» (rapport de stage du 25 juin 2001). La comparaison des
revenus
(avec et sans invalidité) que l'intimé a effectuée à ce moment
conduit, pour
la période du 1er septembre 2000 à la survenance de la péjoration de
l'atteinte à la santé du recourant en juillet 2001, à un taux
d'invalidité
(de 43,6 %) insuffisant pour ouvrir le droit à une rente entière
d'invalidité
(projet de décision du 6 juillet 2001).


A cet égard, c'est en vain que le recourant invoque les différents
certificats médicaux au dossier qui attestent d'une incapacité de
travail de
100 % à partir de l'automne 1999, en particulier ceux du docteur
A.________
(des 24 septembre, 8 octobre et 25 octobre 1999, ainsi que du 7
janvier 2000)
et du docteur B.________ du 20 août 1999. En effet, il confond la
notion
d'incapacité de travail dans l'activité exercée avant l'invalidité - à
laquelle se rapportent exclusivement ces avis médicaux - et celle
d'invalidité (cf. art. 28 al. 2 LAI). Ces appréciations médicales de
la
capacité de travail du recourant dans sa profession de chauffeur ne
permettent donc pas, à elles seules, d'établir son taux d'invalidité.

En conséquence, il y a lieu de retenir que la péjoration de l'état de
santé
du recourant est survenue en juillet 2001, de sorte que
l'augmentation du
degré d'invalidité qui s'en est suivie n'a pris effet qu'à la fin de
la
période de carence de trois mois (cf. consid. 3), à savoir le 1er
octobre
2001, comme l'a constaté à juste titre l'intimé dans la décision
litigieuse.

Il suit de là que le recours se révèle mal fondé.

5.
Le recourant succombe, de sorte qu'il ne saurait prétendre une
indemnité de
dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec
l'art.
135 OJ). Les conditions d'octroi de l'assistance judiciaire étant
toutefois
remplies, Me Nicolas Grand, avocat à Romont, représentant le
recourant, peut
être désigné en qualité d'avocat d'office de ce dernier (art. 152 al.
2 en
liaison avec l'art. 135 OJ). Le recourant est rendu attentif au fait
qu'il
devra rembourser la caisse du tribunal s'il devient ultérieurement en
mesure
de le faire (art. 152 al. 3 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Dans la mesure où il est recevable, le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'assistance judiciaire est accordée. Me Nicolas Grand est désigné en
qualité
d'avocat d'office du recourant pour la procédure fédérale et ses
honoraires
(y compris la taxe à la valeur ajoutée), fixés à 1'500 fr., seront
supportés
par la caisse du tribunal.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif du
canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, ainsi qu'à l'Office
fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 28 janvier 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

p. le Président de la IIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.501/02
Date de la décision : 28/01/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-01-28;i.501.02 ?
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