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23/01/2003 | SUISSE | N°I.179/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 23 janvier 2003, I.179/02


{T 7}
I 179/02

Arrêt du 23 janvier 2003
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard. Greffière : Mme
Moser-Szeless

T.________, recourant, représenté par Me Jean Pierre Bloch, avocat,
place de
la Gare 10, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 6 décembre 2001)

Faits :

A.
T. ________, d

e nationalité portugaise, a travaillé en qualité de
chauffeur-livreur auprès de l'entreprise X.________ SA. Le 3 avril
1998, il a
...

{T 7}
I 179/02

Arrêt du 23 janvier 2003
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard. Greffière : Mme
Moser-Szeless

T.________, recourant, représenté par Me Jean Pierre Bloch, avocat,
place de
la Gare 10, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 6 décembre 2001)

Faits :

A.
T. ________, de nationalité portugaise, a travaillé en qualité de
chauffeur-livreur auprès de l'entreprise X.________ SA. Le 3 avril
1998, il a
déposé une demande tendant à l'octroi de mesures de reclassement
professionnel de l'assurance-invalidité et subsidiairement au
versement d'une
rente.

Selon le docteur A.________ de l'Hôpital orthopédique Y.________,
T.________,
qui était suivi médicalement pour des calcifications
capsulo-ligamentaires
diffuses au niveau de la cheville droite depuis 1992, souffrait d'une
probable chondromatose de la cheville droite qui entraînait un arrêt
de
travail depuis le 13 octobre 1997 (rapport du 6 août 1998). Dans un
rapport
du 30 octobre 1998 à l'intention de La Suisse Assurance, le docteur
B.________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et chirurgie de
la
main, diagnostiquait une ostéochondrose synoviale des deux chevilles,
ainsi
qu'une arthrose débutante interne du coude droit, peu symptomatique.
Il
estimait nulle la capacité de travail du patient dans son activité
professionnelle de livreur, mais considérait qu'une reprise du
travail dans
une activité adaptée en position semi-assise, comme par exemple une
activité
de secrétariat, était immédiatement exigible à 50 %, voire à 100 %
dans un
poste bien adapté. L'assuré a été licencié à la fin du mois de
novembre 1998.

La société X.________ SA ayant proposé de réengager son ancien employé
moyennant une formation dans le domaine administratif, l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : l'office) a
envisagé de lui octroyer une formation en emploi dès le 3 mai 1999.
L'assuré
n'ayant pas pu assurer un taux d'activité supérieur à 30 %, les
mesures
complémentaires prévues n'ont pas été mises en place et l'office a
recueilli
divers renseignements d'ordre médical. Dans un rapport du 12 octobre
1999, le
docteur C.________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a fait
état
d'ostéochondromatose des deux chevilles, du coude droit et
d'impingement de
l'épaule droite sans lésion de la coiffe; il précisait que l'état de
santé du
patient était resté inchangé depuis l'expertise du docteur
B.________, la
capacité de travail dans une activité de type administratif n'étant
aucunement restreinte. A la suite d'un rapport du 10 février 2000 du
docteur
D.________ qui diagnostiquait un probable syndrome d'amplification de
la
douleur, ainsi qu'un état anxio-dépressif possible, l'office a confié
une
expertise psychiatrique au docteur E.________, spécialiste FMH en
psychiatrie
et en psychothérapie, et à la psychologue F.________ du Centre
médical de
psychothérapie Z.________. Les experts ont constaté que le seul
trouble
psychiatrique notable dont est atteint l'assuré est un trouble
douloureux
sans comorbidité psychiatrique significative, de sorte qu'il jouit
d'une
capacité de travail entière sur le plan psychiatrique (rapport du 10
octobre
2000).

Par décision du 30 novembre 2000, l'office a rejeté la demande de
prestations, motif pris que l'assuré ne présentait pas d'invalidité
économique significative.

B.
Saisi d'un recours, le Tribunal des assurances du canton de Vaud l'a
rejeté
par jugement du 6 décembre 2001.

C.
T.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, dont
il demande l'annulation, en concluant au renvoi de la cause au
tribunal
cantonal pour la mise en oeuvre d'une évaluation médicale
pluridisciplinaire.
A l'appui de ses conclusions, il produit deux nouvelles pièces
médicales. Il
requiert par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite.

L'office intimé conclut au rejet du recours, tandis que l'Office
fédéral des
assurances sociales a renoncé à présenter des déterminations.

Considérant en droit :

1.
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales
concernant
le droit à une rente et l'évaluation de l'invalidité, de sorte qu'il
suffit
d'y renvoyer sur ces points.

On ajoutera que la loi fédérale sur la partie générale du droit des
assurances sociales (LPGA) du 6 octobre 2000, entrée en vigueur au 1er
janvier 2003, n'est pas applicable en l'espèce, dès lors que le juge
des
assurances sociales n'a pas à prendre en considération les
modifications du
droit ou de l'état de fait postérieures à la date déterminante de la
décision
litigieuse du 30 novembre 2000 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366
consid.
1b).
Par ailleurs, on précisera que, parmi les atteintes à la santé
psychique, qui
peuvent, comme les atteintes physiques, provoquer une invalidité au
sens de
l'art. 4 al. 1 LAI, on doit mentionner - à part les maladies mentales
proprement dites - les anomalies psychiques qui équivalent à des
maladies. On
ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif,
donc pas
comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité,
les
diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en
faisant
preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être
déterminée aussi objectivement que possible. Il faut donc établir si
et dans
quelle mesure un assuré peut, malgré son infirmité mentale, exercer
une
activité que le marché du travail lui offre, compte tenu de ses
aptitudes. Le
point déterminant est ici de savoir quelle activité peut
raisonnablement être
exigée dans son cas. Pour admettre l'existence d'une incapacité de
gain
causée par une atteinte à la santé mentale, il n'est donc pas décisif
que
l'assuré exerce une activité lucrative insuffisante; il faut bien
plutôt se
demander s'il y a lieu d'admettre que la mise à profit de sa capacité
de
travail ne peut, pratiquement, plus être raisonnablement exigée de
lui, ou
qu'elle serait même insupportable pour la société (ATF 102 V 165; VSI
2001 p.
224 consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 298 consid. 4c
in
fine).

2.
2.1L'administration et les premiers juges ont considéré, sur le vu de
l'ensemble des rapports médicaux au dossier, que s'il était empêché
d'exercer
son ancienne activité lucrative, le recourant était toutefois capable
d'exercer à plein-temps une activité adaptée, nonobstant ses troubles
physiques et psychiques. Dès lors, il ne présentait pas une invalidité
significative lui ouvrant droit à des prestations de
l'assurance-invalidité.

2.2 Pour l'essentiel, se fondant sur le certificat médical (du 14
mars 2002)
de la doctoresse G.________, cheffe de clinique au Centre de
consultation
psychiatrique et psychothérapique, à S.________, produit en instance
fédérale, le recourant conteste les conclusions du docteur E.________
en
faisant valoir qu'il présente des troubles de nature psychiatrique
nettement
plus importants que ceux relevés par l'expert mandaté par l'office.
Selon
lui, seule une nouvelle expertise pluridisciplinaire est à même de
permettre
une évaluation correcte de sa capacité de travail résiduelle ainsi
que de son
taux d'invalidité. Pour cette raison, il demande l'aménagement d'une
telle
expertise.

3.
Il n'y a pas lieu en l'occurrence de donner suite à la conclusion du
recourant. Il ressort en effet du dossier que celui-ci a fait l'objet
de
diverses investigations médicales, qui ont porté aussi bien sur ses
troubles
psychiques que somatiques.

3.1 Ainsi, sur le vu des rapports des médecins consultés par le
recourant qui
se sont prononcés sur sa capacité de travail résiduelle (rapports du
docteur
B.________ du 30 octobre 1998; du docteur H.________, spécialiste FMH
en
médecine physique et réhabilitation, du 31 mai 1999; du docteur
C.________ du
12 octobre 1999), les troubles d'ordre somatique ne font pas obstacle
à la
reprise du travail dans une activité adaptée qui puisse s'exercer en
majeure
partie dans une position assise. Il n'y a pas lieu de s'écarter de ces
conclusions que le recourant ne remet du reste pas sérieusement en
cause. Il
se contente de produire en instance fédérale un rapport du docteur
D.________
du 15 mars 2002 selon lequel celui-ci estime le patient capable de
travailler
à 50 % dans une activité légère, adaptée à son état. Toutefois, ce
praticien
se borne simplement à constater une telle capacité de travail, sans
réellement motiver son appréciation, si ce n'est en se référant à
l'état
psychologique du recourant; il précise en même temps que les
différentes
investigations biologiques faites jusqu'alors n'ont pas montré
d'éléments en
faveur d'une atteinte systémique ou spécifique.

3.2 Appelés de leur côté à connaître des affections psychiques, les
experts
du Centre médical de psychothérapie Z.________ ont retenu que le
recourant
présente un trouble douloureux associé à la fois à des facteurs
psychologiques et une affection médicale générale chronique
d'intensité
légère (amplification volontaire). Ce syndrome d'amplification de la
douleur
avait du reste déjà été relevé par le docteur D.________ (rapport du
10
février 2000). Ce trouble n'est toutefois pas, selon les praticiens
dudit
centre, associé à une comorbidité psychiatrique significative, de
sorte que
le recourant dispose, du point de vue psychiatrique, d'une capacité de
travail entière dans une activité adaptée. Ces conclusions dûment
motivées
doivent être suivies.

3.3 Le recourant conteste certes la valeur probante de l'expertise du
docteur
E.________ et de la psychologue F.________ en suggérant que le
psychiatre
n'aurait pas été impartial, dès lors qu'il serait fréquemment mandaté
par
l'intimé pour des expertises. Toutefois, le fait qu'un médecin est
régulièrement chargé par un office de l'assurance-invalidité
d'établir des
expertises ne constitue pas à lui seul un motif suffisant pour
conclure au
manque d'objectivité et à la partialité de l'expert (RAMA 1999 n° U
332 p.
193 consid. 2a/bb). Au regard du déroulement de cette expertise et de
son
contenu, il n'y a pas lieu de mettre en doute l'impartialité du
docteur
E.________ au seul motif que son avis ne va pas dans le sens souhaité
par le
recourant.

Par ailleurs, pour accorder pleine valeur probante à un rapport
médical, il
est nécessaire que les points litigieux importants aient fait l'objet
d'une
étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets,
qu'il
prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait
été
établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la
description du
contexte médical et l'analyse de la situation médicale soient claires
et
enfin, que les conclusions de son auteur soient motivées (ATF 125 V
352
consid. 3a et les références).

L'expertise du docteur E.________ et de la psychologue F.________
répond en
tous points aux critères formels énumérés ci-dessus: rendue à la
suite de
deux consultations psychiatriques avec l'assuré et d'examens
complets, en
particulier des tests psychométriques et des tests de personnalité,
elle
repose sur une étude attentive et complète du dossier AI; en outre,
l'anamnèse est fouillée et les constatations objectives sont
clairement
exposées. Elle revêt donc une valeur probante certaine que le
certificat de
la doctoresse G.________ du 14 mars 2002 n'est pas susceptible de
mettre en
doute, contrairement à ce que fait valoir le recourant. En effet, ce
certificat très succinct ne répond pas aux exigences susmentionnées.
Il ne
contient par ailleurs aucune critique de l'expertise, mais se limite à
constater que le recourant présente, depuis février 2002, une
symptomatologie
dépressive apparue dans le contexte du refus du Tribunal des
assurances du
canton de Vaud de reconnaître le droit de l'assuré à une demi-rente
d'invalidité - le jugement ayant été notifié le 19 février 2002. La
doctoresse G.________ décrit donc une crise psychique récente, sans
faire
état de la situation du recourant sur le plan psychique en général
depuis
l'apparition de ses problèmes de santé. Le certificat médical porte
dès lors
sur des faits survenus postérieurement à la décision litigieuse qui
n'ont pas
à être pris en compte, seul étant déterminant en l'occurrence l'état
de fait
existant au moment où celle-ci a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1b
et la
référence).

3.4 Dans ces circonstances, la situation médicale du recourant ayant
fait
l'objet d'investigations suffisantes, tant du point de vue physique
que
psychique, la mise en oeuvre d'une expertise multidisciplinaire ne se
justifie pas.

4.
Enfin, il résulte de l'évaluation du taux d'invalidité effectuée par
l'intimé, - qui n'est pas contestée et n'apparaît du reste pas
critiquable
-, que le recourant ne présente pas un degré d'invalidité suffisant
pour
ouvrir droit à une rente (art. 28 al. 1 LAI).

Partant, le recours est mal fondé.

5.
Le recourant succombe, de sorte qu'il ne saurait prétendre une
indemnité de
dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec
l'art.
135 OJ). Les conditions d'octroi de l'assistance judiciaire étant
toutefois

remplies, Me Jean-Pierre Bloch, avocat à Lausanne, représentant le
recourant,
peut être désigné en qualité d'avocat d'office de ce dernier (art.
152 al. 2
en liaison avec l'art. 135 OJ). Le recourant est rendu attentif au
fait qu'il
devra rembourser la caisse du tribunal s'il devient ultérieurement en
mesure
de le faire (art. 152 al. 3 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'assistance judiciaire est accordée. Me Jean-Pierre Bloch est
désigné en
qualité d'avocat d'office du recourant pour la procédure fédérale et
ses
honoraires (y compris la taxe à la valeur ajoutée), fixés à 1'500
fr., seront
supportés par la caisse du tribunal.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 23 janvier 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.179/02
Date de la décision : 23/01/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-01-23;i.179.02 ?
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