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16/01/2003 | SUISSE | N°6S.469/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 janvier 2003, 6S.469/2002


{T 0/2}
6S.469/2002 /rod

Arrêt du 16 janvier 2003
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schneider, président,
Kolly, Karlen,
greffier Denys.

X. ________,
recourant, représenté par Me Grégoire Mangeat, avocat, rue
Charles-Galland
15, 1206 Genève,

contre

Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

fixation de la peine (art. 63 CP),

pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton> de Genève
du 5 novembre 2002.

Faits:

A.
Par arrêt du 30 mai 2002, la Cour correctionnelle du canton de Genève
a
c...

{T 0/2}
6S.469/2002 /rod

Arrêt du 16 janvier 2003
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schneider, président,
Kolly, Karlen,
greffier Denys.

X. ________,
recourant, représenté par Me Grégoire Mangeat, avocat, rue
Charles-Galland
15, 1206 Genève,

contre

Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3.

fixation de la peine (art. 63 CP),

pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton
de Genève
du 5 novembre 2002.

Faits:

A.
Par arrêt du 30 mai 2002, la Cour correctionnelle du canton de Genève
a
condamné X.________, pour actes d'ordre sexuel avec des enfants (art.
187 ch.
1 CP), contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP) et pornographie (art.
197 ch.
1 et 3 CP), à cinq ans de réclusion. En bref, il en ressort les faits
suivants:

X.________, né en 1957, enseignant, a vécu depuis mai 1995 avec sa
deuxième
épouse et la fille de celle-ci, prénommée Y.________, née en juin
1985. Il a
commis des abus sexuels sur la fillette durant près de six ans, en
profitant
des absences professionnelles de la mère, de son statut de beau-père,
de sa
différence d'âge, de son ascendant, de la crainte de l'enfant qu'une
dénonciation entraînât son retour et celui de sa mère au Portugal
dans des
conditions de vie difficiles, et en la menaçant de révéler à sa mère
ses
problèmes scolaires ou ses excès d'utilisation du téléphone portable.
A
d'innombrables reprises depuis mai 1995, X.________ l'a déshabillée et
caressée sur tout le corps, notamment ses parties intimes; dès les
dix ans de
la fillette, il a obtenu d'elle qu'elle le masturbe jusqu'à
éjaculation; dès
les onze ans de la fillette, il a obtenu d'elle qu'elle lui
administre des
fellations et qu'elle déglutisse son sperme; il lui a introduit à
plusieurs
reprises un doigt dans le vagin ou l'anus; il a introduit sa langue
dans son
sexe, alors qu'elle lui prodiguait une fellation; il a regardé avec
elle un
film représentant crûment des actes sexuels; il a exhibé devant elle,
sur
l'écran de son ordinateur, l'image d'une petite fille qui se faisait
pénétrer; il a téléchargé depuis Internet plusieurs milliers d'images
mettant
en scène des enfants en train de subir des actes sexuels ou d'ordre
sexuel
ainsi que des scènes de torture sur de jeunes enfants, voire des
nourrissons,
en a réalisé la sauvegarde sur CD-ROM et a rendu ces images
accessibles à son
épouse, à la jeune Y.________ et à tout tiers qui fréquentait son
logement;
il a enregistré au moyen d'une web-cam des scènes où il commettait un
acte
d'ordre sexuel sur Y.________ et d'autres scènes entre elle et une
camarade
de moins de seize ans.

B.
Par arrêt du 5 novembre 2002, la Cour de cassation genevoise a rejeté
le
recours de X.________, qui portait en particulier sur la fixation de
la
peine.

C.
X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral contre cet
arrêt. Il
conclut à son annulation.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle
l'application du
droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base d'un état de fait
définitivement
arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 273 al. 1 let. b et 277bis
al. 1
PPF). Le raisonnement juridique doit donc être mené sur la base des
faits
retenus dans la décision attaquée, dont le recourant est irrecevable à
s'écarter (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67).

2.
Le recourant se plaint uniquement de la peine infligée.

2.1 Aux termes de l'article 63 CP, le juge fixera la peine d'après la
culpabilité du délinquant, en tenant compte des mobiles, des
antécédents et
de la situation personnelle de ce dernier. Le critère essentiel est
celui de
la gravité de la faute; le juge doit prendre en considération, en
premier
lieu, les éléments qui portent sur l'acte lui-même, à savoir sur le
résultat
de l'activité illicite, sur le mode et l'exécution et, du point de vue
subjectif, sur l'intensité de la volonté délictueuse ainsi que sur les
mobiles. L'importance de la faute dépend aussi de la liberté de
décision dont
disposait l'auteur; plus il lui aurait été facile de respecter la
norme qu'il
a enfreinte, plus lourdement pèse sa décision de l'avoir transgressée
et
partant sa faute (ATF 127 IV 101 consid. 2a p. 103).

L'art. 63 CP n'énonce pas de manière détaillée et exhaustive les
éléments qui
doivent être pris en considération, ni les conséquences exactes qu'il
faut en
tirer quant à la fixation de la peine; il confère donc au juge un
large
pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral, qui n'interroge pas
lui-même les
accusés ou les témoins et qui n'établit pas les faits, est mal placé
pour
apprécier l'ensemble des paramètres pertinents pour individualiser la
peine;
son rôle est au contraire d'interpréter le droit fédéral et de
dégager des
critères et des notions qui ont une valeur générale. Il n'a donc pas à
substituer sa propre appréciation à celle du juge de répression ni à
ramener
à une sorte de moyenne toute peine qui s'en écarterait. Il ne peut
intervenir, en considérant le droit fédéral comme violé, que si ce
dernier a
fait un usage vraiment insoutenable de la marge de manoeuvre que lui
accorde
le droit fédéral (ATF 127 IV 101 consid. 2c p. 104).

Dans sa décision, le juge doit exposer les éléments essentiels
relatifs à
l'acte ou à l'auteur qu'il prend en compte, de manière à ce que l'on
puisse
constater que tous les aspects pertinents ont été pris en
considération et
comment ils ont été appréciés; mais il peut passer sous silence les
éléments
qui, sans abus du pouvoir d'appréciation, lui paraissent non
pertinents ou
d'une importance mineure. La motivation doit justifier la peine
prononcée, en
permettant de suivre le raisonnement adopté; mais le juge n'est
nullement
tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentages l'importance qu'il
accorde à
chacun des éléments qu'il cite. Plus la peine est élevée, plus la
motivation
doit être complète; cela vaut surtout lorsque la peine, dans le cadre
légal,
apparaît comparativement très élevée. Mais un pourvoi ne saurait être
admis
simplement pour améliorer ou compléter un considérant lorsque la
décision
rendue apparaît conforme au droit (ATF 127 IV 101 consid. 2c p.
104/105).

2.2 Le recourant se prévaut d'une inégalité de traitement. Il compare
son cas
à celui qui a fait l'objet de l'ATF 122 IV 97, où l'auteur, pour des
actes
similaires, voire plus graves, a été condamné à une peine de trois ans
d'emprisonnement.

Dans le considérant 2 publié de cet arrêt, le Tribunal fédéral ne
s'est pas
prononcé sur la mesure de la peine. Cela exclut d'emblée de pouvoir
s'y
référer pour une telle question. Dans le considérant 3 non publié de
cet
arrêt, le Tribunal fédéral, saisi d'un pourvoi du condamné, a jugé
que la
peine n'apparaissait pas excessive au point de constituer un abus du
pouvoir
d'appréciation reconnu à l'autorité cantonale. Il n'a pas dit, ce
qu'il
n'avait du reste pas à faire, où se situait la limite supérieure de
la peine
admissible. Le recourant ne peut donc pas tirer de conclusions
précises de
cet arrêt pour son propre cas. La jurisprudence a d'ailleurs toujours
souligné la primauté du principe de la légalité sur celui de
l'égalité (ATF
124 IV 44 consid. 2c p. 47), de sorte qu'il ne suffirait pas que le
recourant
puisse citer un ou deux cas où une peine particulièrement clémente a
été
fixée pour prétendre à un droit à l'égalité de traitement (ATF 120 IV
136
consid. 3a p. 144 et les arrêts cités). Le grief est infondé.

2.3 Le recourant invoque le principe selon lequel le même élément
d'appréciation ne doit pas être pris en compte deux fois dans la
fixation de
la peine (cf. ATF 118 IV 342 consid. 2b p. 347). Il se plaint de ce
que
certains éléments qui ont permis de conclure à l'existence d'une
contrainte
selon l'art. 189 CP ont également été appréciés pour fixer la peine.
L'argument tombe à faux. Certes, l'existence d'une contrainte en tant
qu'élément objectif constitutif de l'art. 189 CP doit être
déterminée en
tenant compte des circonstances concrètes. Cependant, la manière dont
la
contrainte a été obtenue et les éléments mis en oeuvre à cette fin
importent
également, avec les autres critères de l'art. 63 CP, pour situer
l'importance
de la faute d'espèce.

2.4 Le recourant relève qu'il n'a pas usé de violences physiques pour
contraindre la victime, ce qui rendrait sa faute moins grave. Le
grief est
sans pertinence. Il ne s'agit pas ici d'envisager le caractère
aggravant que
pourrait avoir l'usage de la force physique mais uniquement de se
demander si
la peine infligée au recourant est conforme au droit fédéral compte
tenu des
moyens de contrainte qu'il a employés. La Cour de cassation genevoise
a
souligné leur importance (cf. arrêt attaqué, p. 12).

2.5 Le recourant s'efforce de minimiser sa culpabilité en relation
avec
l'infraction réprimée par l'art. 197 CP, relevant notamment la
facilité
d'accéder aux photos sur Internet et le fait qu'il ne les a pas
diffusées
dans le cadre d'un réseau de pédophiles. Selon les constatations
cantonales,
qui lient le Tribunal fédéral (art. 277bis al. 1 PPF), le recourant a
réalisé
des copies de sauvegarde sur CD-ROM des photos litigieuses et les a
rendues
accessibles à son épouse et à l'enfant Y.________. Qu'il ait pu se
procurer
les photos avec une relative facilité ne saurait le disculper. En
outre, la
fixation de la peine exige uniquement la prise en compte des actes
commis, de
sorte qu'il importe peu d'envisager quels actes hypothétiques (la
transmission à un réseau de pédophiles) le recourant n'a pas commis.
La
critique est sans fondement.

2.6 Le recourant considère comme illogique l'appréciation de la Cour
correctionnelle selon laquelle "il a agi en cédant égoïstement à ses
pulsions
malsaines, sans se soucier des inévitables séquelles que subiraient sa
belle-fille et son épouse". On retient d'une telle appréciation le
mépris du
recourant à l'égard de l'enfant lors des actes reprochés. Cet élément
est
pertinent pour fixer la peine. Le grief est infondé.

2.7 Le recourant se prévaut d'une motivation insuffisante.

En l'espèce, la motivation permet de discerner quels sont les éléments
essentiels qui ont été pris en compte et s'ils l'ont été dans un sens
aggravant ou atténuant. On comprend sans difficulté ce qui a guidé
les juges
cantonaux dans leur solution. La motivation de la peine est donc
suffisante
pour vérifier l'application de l'art. 63 CP. Au surplus, dans la
mesure où le
recourant invoque les garanties minimales de motivation déduites de
l'art. 29
al. 2 Cst., son grief est irrecevable (art. 269 al. 2 PPF; ATF 116 IV
288
consid. 2c p. 291).

2.8 Le recourant met en avant différents éléments en sa faveur, comme
ses
bons antécédents, son admission des faits, ses regrets exprimés lors
du
procès et sa responsabilité pénale très légèrement diminuée. Aucun des
éléments invoqués n'a été omis pour fixer la peine. A noter que les
bons
antécédents du recourant n'ont pas la portée qu'il leur prête, car,
quoique
favorable, cet élément n'est pas particulièrement méritoire mais
correspond à
ce que l'on doit pouvoir attendre de quiconque.

Dès lors que le recourant ne peut en réalité citer aucun élément
important,
propre à modifier la peine, qui aurait été omis ou pris en
considération à
tort, il ne reste plus qu'à examiner si, au vu des faits retenus, la
peine
infligée apparaît exagérément sévère au point de constituer un abus du
pouvoir d'appréciation.

En raison des infraction retenues, le recourant encourait une peine
maximale
de quinze ans de réclusion (art. 68 ch. 1 al. 1, 187 ch. 1, 189 al.
1, 197
ch. 1 et 3 CP). Les abus du recourant sur l'enfant, tels que décrits
dans
l'arrêt attaqué, apparaissent comme particulièrement graves. Ces
actes ont
été commis avec régularité sur une longue période, près de six ans, au
détriment d'une enfant âgée initialement de neuf ans. Le recourant a
abusé de
sa position de beau-père et s'est servi de divers moyens de pression.
L'absence d'antécédents et les autres éléments plaidés par le
recourant ne
contrebalancent que faiblement les éléments à charge. La peine
infligée de
cinq ans de réclusion n'apparaît pas sévère au point de constituer un
abus du
pouvoir d'appréciation. Elle ne viole donc pas le droit fédéral.

3.
Le pourvoi doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Les
frais de
la cause sont mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 278
al. 1
PPF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Procureur général du canton de Genève et à la Cour de cassation
genevoise.

Lausanne, le 16 janvier 2003

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.469/2002
Date de la décision : 16/01/2003
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-01-16;6s.469.2002 ?
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