La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/01/2003 | SUISSE | N°1A.218/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 janvier 2003, 1A.218/2002


{T 0/2}
1A.218/2002 /col

Arrêt du 9 janvier 2003
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et président du
Tribunal
fédéral,
Reeb et Féraud;
greffier Zimmermann.

la société N.________
recourante, représentée par Me Cyril Abecassis, avocat,
rue Général-Dufour 15, case postale 5556, 1211 Genève 11,

contre

Office fédéral de la justice, Office central USA,
Bundesrain 20, 3003 Berne.

Entraide judiciaire internationale en matière pénale

avec les USA

recours de droit administratif contre la décision de l'Office fédéral
de la
justice du 18 septembre 2002.
...

{T 0/2}
1A.218/2002 /col

Arrêt du 9 janvier 2003
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et président du
Tribunal
fédéral,
Reeb et Féraud;
greffier Zimmermann.

la société N.________
recourante, représentée par Me Cyril Abecassis, avocat,
rue Général-Dufour 15, case postale 5556, 1211 Genève 11,

contre

Office fédéral de la justice, Office central USA,
Bundesrain 20, 3003 Berne.

Entraide judiciaire internationale en matière pénale avec les USA

recours de droit administratif contre la décision de l'Office fédéral
de la
justice du 18 septembre 2002.

Faits:

A.
En février et en avril 2000, le Procureur général du canton de Genève
a
transmis spontanément aux autorités américaines, en application de
l'art. 67a
de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale,
du 20
mars 1981 (EIMP; RS 351.1), des informations recueillies dans le
cadre d'une
procédure ouverte notamment contre X.________, ancien Premier
Ministre du
Kazakhstan, pour blanchiment d'argent. Selon ces informations, le
ressortissant américain G.________, aurait, dans le cadre de l'octroi
de
concessions pétrolières au Kazakhstan, fait transférer des montants
importants provenant de compagnies pétrolières américaines sur un
compte
bancaire ouvert en Suisse et contrôlé par G.________. Ces fonds,
acheminés
par le truchement notamment de sociétés suisses, étaient destinés à
des hauts
responsables kazakhs.

B.
Le 12 juin 2000, le Département de la justice des Etats-Unis
d'Amérique a
présenté à l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'Office
fédéral) une
demande d'entraide fondée sur le traité conclu le 25 mai 1973 entre la
Confédération et les Etats-Unis pour l'entraide judiciaire en matière
pénale
(TEJUS; RS 0.351.933.6). La demande était présentée pour les besoins
de
l'enquête conduite contre G.________ et des tiers. Les autorités
américaines
soupçonnent que les fonds versés par ceux-ci à de hauts responsables
kazakhs
constitueraient des pots-de-vin payés par des compagnies pétrolières
américaines en échange de l'obtention de droits d'exploitation ou de
prospection de pétrole au Kazakhstan. Ces faits tomberaient sous le
coup des
prescriptions du droit américain réprimant la corruption et le
blanchiment
d'argent. La demande tendait au séquestre des fonds détenus en Suisse
ou
contrôlés par G.________, et à la remise de la documentation relative
aux
comptes bancaires détenus ou contrôlés par G.________ et les tiers
impliqués
dans l'affaire.

L'Office fédéral a déclaré la demande admissible et ordonné le
séquestre de
différents comptes. Cette décision a fait l'objet d'un recours de
droit
administratif, rejeté par le Tribunal fédéral le 25 juin 2001
(procédure
1A.94/2001).

C.
Le 26 avril 2001, le Département américain de la justice a présenté à
l'Office fédéral une demande complémentaire. Le Procureur pour le
district
méridional de New York conduisait une enquête contre G.________ et le
directeur d'une société dénommée M.________, en relation avec les
faits
évoqués dans la demande du 12 juin 2000. Etaient également soupçonnés
de
corruption et de blanchiment des employés de la compagnie pétrolière
américaine O.________, pour avoir déposé sur des comptes ouverts en
Suisse
des pots-de-vin reçus d'une société N.________. En mai 1996,
O.________ avait
acquis une participation de 25% dans une société kazakh dénommée
T.________.
M.________ avait servi d'intermédiaire dans cette opération. Elle
avait reçu
de O.________, en échange de ses services, un montant total de
51'000'000
USD. En juin 1995, M.________ était entrée en relation d'affaires avec
N.________, société immatriculée aux Iles Vierges britanniques avec
une
filiale à Genève. Selon un accord passé entre les deux sociétés,
N.________
devait recevoir la moitié des fonds versés par O.________ à
M.________.
L'enquête avait permis d'identifier les mouvements de fonds suspects
suivants:
1) le 6 novembre 1995, sur ordre de N.________, M.________ avait
transféré un
montant de 5'000'000 USD sur le compte n°xxx ouvert auprès de la
Banque
Nationale de Paris (ci-après: le BNP) à Genève (ci-après: le compte
n°1);
2) le 17 juin 1996, N.________ avait invité M.________ à lui verser
sa part
de ce versement sur le compte n°yyy ouvert auprès de la BNP à Genève
(ci-après: le compte n°2);
3) les 26 août, 17 septembre, 22 octobre et 19 novembre 1996,
M.________
avait fait virer un montant de 5'000'000 USD à chaque fois sur le
compte n°1;
4) le 19 juin 1996, M.________ avait transféré un montant de
4'000'000 USD
sur le compte n°zzz ouvert auprès de la Banque Indosuez à Lausanne;
5) le 19 octobre 1996, M.________ a viré le montant de 10'000 USD sur
un
compte ouvert auprès de la Banque Indosuez à Genève au nom de l'un de
ses
employés.

La demande tendait notamment à la remise de la documentation relative
aux
comptes n°1 et 2.

Le 23 mai 2001, les autorités de l'Etat requérant ont présenté une
nouvelle
demande complémentaire, portant notamment sur le séquestre des fonds
se
trouvant sur les comptes visés dans la demande du 26 avril 2001.

Le 25 mai 2001, l'Office fédéral a rendu une décision par laquelle il
a
considéré admissibles les demandes complémentaires des 26 avril et 23
mai
2001. Il a simultanément ordonné la saisie notamment des comptes n°1
et 2. La
documentation y relative porte sur les années 1993 à 1998.

N. ________ s'est opposée à cette mesure. Dans son mémoire du 6
juillet 2001,
elle a fait valoir que le principe de la proportionnalité et la
condition de
la double incrimination ne seraient pas respectés en l'espèce.

Le 18 septembre 2002, l'Office fédéral a rejeté l'opposition.

D.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, N.________
demande au
Tribunal fédéral d'annuler la décision du 18 septembre 2002 et de
rejeter les
demandes complémentaires des 26 avril et 23 mai 2001. Elle fait
valoir que
l'exposé des faits serait insuffisant et se plaint d'une violation du
principe de la proportionnalité et de la condition de la double
incrimination.
L'Office fédéral conclut au rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 L'entraide judiciaire entre les Etats-Unis d'Amérique et la
Confédération
est régie par le TEJUS et la loi fédérale y relative, du 3 octobre
1975
(LTEJUS; RS 351.93). L'EIMP et son ordonnance d'exécution demeurent
réservées
pour des questions qui ne sont pas réglées par le TEJUS et la LTEJUS
(ATF 124
II 124 consid. 1a p. 126; 118 Ib 547 consid. 1b p. 550).

1.2 La décision par laquelle l'Office fédéral comme office central
suisse
octroie l'entraide judiciaire en vertu de l'art. 5 let. b LTEJUS et
rejette
une opposition selon l'art. 16 de la même loi, peut être attaquée par
la voie
du recours de droit administratif prévue à l'art. 17 al. 1 LTEJUS
(ATF 124 II
124 consid. 1b p. 126; 118 Ib 547 consid. 1c p. 550). En
l'occurrence, la
décision attaquée porte sur la saisie notamment des comptes n°1 et 2.
Or, il
est apparu ultérieurement que ce dernier n'a jamais existé, du moins
pas sous
la rubrique désignée dans la demande américaine. Partant, l'objet du
recours
est circonscrit au compte n°1.

1.3 La recourante, titulaire de ce compte, a qualité pour recourir au
sens de
l'art. 103 let. a OJ, mis en relation avec l'art. 17 LTEJUS (ATF 118
Ib 547
consid. 1d p. 550 et les arrêts cités).

1.4 Les conclusions qui vont au-delà de l'annulation de la décision
sont
recevables (art. 25 al. 6 EIMP; art. 114 OJ; ATF 122 II 373 consid.
1c p.
375; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les
arrêts
cités). Le Tribunal fédéral examine librement si les conditions pour
accorder
l'entraide sont remplies et dans quelle mesure la coopération
internationale
doit être prêtée (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 118 Ib 269
consid. 2e
p. 275). Il statue avec une cognition libre sur les griefs soulevés
sans être
toutefois tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de
vérifier
d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des
dispositions
applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 119
Ib 56
consid. 1d p. 59).

1.5 L'autorité suisse saisie d'une requête d'entraide en matière
pénale n'a
pas à se prononcer sur la réalité des faits évoqués dans la demande;
elle ne
peut que déterminer si, tels qu'ils sont présentés, ils constituent
une
infraction. Cette autorité ne peut s'écarter des faits décrits par
l'Etat
requérant qu'en cas d'erreurs, lacunes ou contradictions évidentes et
immédiatement établies (ATF 126 II 495 consid. 5e/aa p. 501; 118 Ib
111
consid. 5b p. 121/122; 117 Ib 64 consid. 5c p. 88, et les arrêts
cités).

2.
Selon la recourante, l'état de fait joint à la demande serait
insuffisant.

2.1 Ni le traité ni la loi d'application y relative ne précisent la
manière
dont les autorités de l'Etat requérant doivent exposer les faits à la
base de
la procédure d'enquête. L'art. 29 al. 1 TEJUS exige néanmoins qu'elles
indiquent, dans la mesure du possible, l'objet et la nature de
l'enquête ou
de la procédure et, sauf s'il s'agit d'une demande de notification,
qu'elles
décrivent les principaux faits allégués ou à établir (let. a), ainsi
que la
raison principale pour laquelle les preuves ou les renseignements
demandés
sont nécessaires (let. b). L'art. 10 LTEJUS prescrit pour sa part à
l'office
central suisse de contrôler à titre préliminaire si la demande
satisfait aux
exigences de forme du traité et d'examiner - sur la base des faits
exposés
dans la demande ou dans les pièces à l'appui - si les infractions que
vise la
procédure américaine sont punissables en droit suisse. On peut en
déduire que
les exigences formelles de l'art. 29 al. 1 TEJUS impliquent
l'obligation pour
l'Etat requérant de présenter un bref exposé des faits essentiels et
d'indiquer, quand cela est possible, le lieu, la date et le mode de
commission de l'infraction (cf. art. 28 al. 3 let. a EIMP et 10 al. 2
OEIMP).
Les indications fournies à ce titre doivent simplement suffire pour
vérifier
que la demande n'est pas d'emblée inadmissible (ATF 116 Ib 96 consid.
3a p.
101; 115 Ib 68 consid. 3b/aa p. 77). Lorsque la demande tend, comme en
l'espèce, à la remise de documents bancaires et au blocage de fonds,
l'Etat
requérant ne peut se borner à communiquer une liste des personnes
recherchées
et des sommes qui auraient été détournées; il lui faut joindre à la
demande
des éléments permettant de déterminer, de manière minimale, que les
comptes
en question ont été utilisés dans le déroulement des opérations
délictueuses
poursuivies dans l'Etat requérant (arrêt 1A.211/1992 du 29 juin 1993;
consid.
6a non publié à l'ATF 125 II 356; consid. 3a non publié à l'ATF 126
II 258).

2.2 Selon la recourante, la demande ne contiendrait aucun élément
propre à
démontrer, même à première vue, que ses comptes auraient été utilisés
pour
effectuer les paiements à raison desquels l'action pénale a été
engagée dans
l'Etat requérant.

Les investigations conduites dans l'Etat requérant ont mis en
évidence que la
prise de participation de O.________ dans T.________, en vue
d'obtenir des
droits d'exploitation ou de prospection pétrolières au Kazakhstan, a
donné
lieu à une vaste opération de corruption: O.________ et ses
intermédiaires
ont corrompu des officiels kazakhs, qui ont eux-mêmes distribué des
pots-de-vin aux employés de O.________. G.________ et M.________ ont
joué le
rôle d'intermédiaires, le premier pour le compte des compagnies
pétrolières
américaines, la deuxième pour celui des officiels kazakhs corrompus.
Tout
laisse à penser que ceux-ci sont les ayants droit de M.________ et les
bénéficiaires des fonds versés par celle-ci à des tiers. Il ressort
implicitement des demandes des 26 avril et 23 mai 2001, lus à la
lumière de
la demande initiale du 12 juin 2000, que N.________, même si son
implication
dans l'affaire n'est qu'indirecte, aurait joué le rôle de relais dans
l'acheminement des fonds jusqu'à leurs ultimes destinataires. Ces
indications
sont suffisantes pour admettre que l'état de fait joint à la demande
répond
aux exigences de l'art. 29 al. 1 TEJUS.

3.
Selon la recourante, la condition de la double incrimination ne
serait pas
remplie.

3.1 Saisie d'une demande d'entraide américaine impliquant des mesures
de
contrainte, l'autorité suisse doit s'assurer, selon l'art. 4 al. 2
let. a
TEJUS, que les faits allégués réunissent les conditions objectives
d'une
infraction mentionnée dans la liste annexée au TEJUS et punissable
selon sa
propre législation. Elle statue sur l'existence de ces conditions en
appliquant uniquement le droit suisse (art. 4 al. 4). Sous l'angle de
l'art.
4 al. 2 let. a du TEJUS, il n'est pas nécessaire que la législation
suisse
donne aux faits de la demande la même qualification juridique que la
législation américaine, ni qu'ils soient soumis aux mêmes conditions
de
punissabilité ou passibles de peines équivalentes (art. 4 al. 4
TEJUS).

3.2 Aux Etats-Unis, G.________ et ses co-accusés sont poursuivis pour
corruption, parce qu'ils auraient participé aux transferts de montants
destinés à corrompre des agents publics kazakhs. Les faits qui leur
sont
reprochés, tels qu'ils sont établis de manière suffisante dans la

demande
(cf. art. 1 al. 2 TEJUS; ATF 118 Ib 111 consid. 5b p. 122, 547
consid. 3a p.
551/552), pourraient aussi tomber sous le coup des prescriptions
réprimant
les organisations criminelles selon le Chapitre 18 du Code des
Etats-Unis.
Des mesures de contrainte, tels que le blocage de comptes bancaires
et la
transmission de la documentation y relative, peuvent être ordonnées
en Suisse
au regard de la liste annexée au TEJUS (ch. 22 et 34), y compris pour
le
blanchiment d'argent. En Suisse, ces faits auraient pu tomber sous le
coup
des art. 322sexies ou septies CP, ainsi que de l'art. 305bis CP, comme
indiqué par l'Office fédéral. A cet égard, c'est en vain que la
recourante
objecte n'être (elle-même ou ses dirigeants) pas accusée aux
Etats-Unis parce
qu'aucun comportement de corruption d'agents publics étrangers ne
pourrait
lui être reproché. En effet, l'octroi de l'entraide n'implique pas
que la
personne soumise à une mesure de contrainte dans l'Etat requis soit
elle-même
accusée dans l'Etat requérant. Il suffit que dans cet Etat, une
procédure
pénale soit ouverte à l'encontre d'une personne sur laquelle pèsent
des
charges donnant lieu à l'entraide sous l'angle notamment de la double
incrimination, et que des investigations en Suisse soient nécessaires
pour
les besoins de cette procédure.

4.
La recourante se prévaut du principe de la proportionnalité.

4.1 Ne sont admissibles, au regard de l'art. 9 al. 1 TEJUS, mis en
relation
avec l'art. 64 EIMP, que les mesures de contrainte conformes au
principe de
la proportionnalité. L'entraide ne peut être accordée que dans la
mesure
nécessaire à la découverte de la vérité recherchée par les autorités
pénales
de l'Etat requérant. La question de savoir si les renseignements
demandés
sont nécessaires ou simplement utiles à la procédure pénale instruite
dans
l'Etat requérant est en principe laissée à l'appréciation des
autorités de
poursuite. L'Etat requis ne disposant généralement pas des moyens lui
permettant de se prononcer sur l'opportunité de l'administration des
preuves
déterminées au cours de l'instruction menée à l'étranger, il ne
saurait sur
ce point substituer sa propre appréciation à celle du magistrat
chargé de
l'instruction. La coopération internationale ne peut être refusée que
si les
actes requis sont sans rapport avec l'infraction poursuivie et
manifestement
impropres à faire progresser l'enquête, de sorte que la demande
apparaît
comme le prétexte à une recherche indéterminée de moyens de preuve
(ATF 122
II 367 consid. 2c p. 371; 121 II 241 consid. 3a p. 242/243; 120 Ib 251
consid. 5c p. 255). Le principe de la proportionnalité empêche aussi
l'autorité suisse d'aller au-delà des requêtes qui lui sont adressées
et
d'accorder à l'Etat requérant plus qu'il n'a demandé (ATF 121 II 241
consid.
3a p. 243; 118 Ib 111 consid. 6 p. 125; 117 Ib 64 consid. 5c p. 68,
et les
arrêts cités). Au besoin, il lui appartient d'interpréter la demande
selon le
sens que l'on peut raisonnablement lui donner; rien ne s'oppose à une
interprétation large de la requête s'il est établi que toutes les
conditions
à l'octroi de l'entraide sont remplies; ce mode de procéder évite
aussi une
éventuelle demande complémentaire (ATF 121 II 241 consid. 3a p. 243).
Sur
cette base, peuvent aussi être transmis des renseignements et des
documents
non mentionnés dans la demande. Il incombe à la personne touchée de
démontrer, de manière claire et précise, en quoi les documents et
informations à transmettre excéderaient le cadre de la demande ou ne
présenteraient aucun intérêt pour la procédure étrangère (ATF 126 II
258
consid. 9b/aa p. 260; 122 II 367 consid. 2c p. 371/372). Lorsque la
demande
vise à éclaircir le cheminement de fonds d'origine délictueuse, il
convient
d'informer l'Etat requérant de toutes les transactions opérées au nom
des
sociétés et des comptes impliqués dans l'affaire (ATF 121 II 241
consid. 3c
p. 244).

4.2 Les autorités américaines réclament la documentation concernant
le compte
n°1, afin d'éclaircir le rôle respectif de M.________ et de
N.________ dans
l'opération de corruption croisée entre les responsables kazakhs et
les
cadres de O.________. Selon l'exposé des faits joints à la demande du
26
avril 2001, ces deux sociétés seraient entrées en relation en 1995,
époque à
partir de laquelle des virements suspects auraient été effectués. Les
relevés
du compte n°1 confirment les versements suspects indiqués dans la
demande et
ses compléments (soit les virements des 6 novembre 1995, 26 août, 17
septembre, 22 octobre et 19 novembre 1996). En outre, la
documentation saisie
contient une note, établie le 4 novembre 1995 par une agence
spécialisée,
rendant compte de la prise de participation de O.________ dans
T.________.
Cette pièce accrédite la thèse de l'implication de la recourante dans
l'affaire qui est à l'origine de la procédure ouverte aux Etats-Unis.
Sur le
vu de ces éléments, la transmission de la documentation bancaire
s'impose, du
moins pour celle établie après le 1er janvier 1995. En effet, il
convient de
mettre les enquêteurs américains en situation de retracer le
cheminement des
fonds entre M.________ et la recourante, afin de pouvoir aussi
déterminer
leurs destinataires finals. A cet égard, la recourante n'allègue pas,
de la
manière précise et détaillée qu'exige la jurisprudence, pourquoi ne
devrait
pas être remise telle ou telle pièce de la documentation saisie.
L'examen de
celle-ci laisse à penser que le compte n°1 servait de passerelle entre
plusieurs intermédiaires: de gros montants perçus ont été
régulièrement
réacheminés sur d'autres comptes, la recourante conservant une
différence
appréciable (dont on peut supposer qu'il s'agissait de commissions)
pour ses
propres besoins ou ceux de son ayant droit.

4.3 Lorsque les faits à raison desquels l'enquête est ouverte dans
l'Etat
requérant s'étendent sur une période longue ou indéterminée et que
l'implication du détenteur de la documentation à transmettre ne peut
être
circonscrite dans une période précise, il peut se justifier
d'investiguer en
amont et en aval du complexe de faits décrits dans la demande et de
transmettre des documents antérieurs ou postérieurs à l'époque de
ceux-ci
(cf. arrêt 1A.212/2001 du 21 mars 2002, consid. 9.2.2). En
l'occurrence,
comme on vient de le voir, la remise de la documentation postérieure
au 1er
janvier 1995 est nécessaire. Tel n'est pas le cas, en l'état, de la
documentation relative à la période allant du 19 août 1992, date
d'ouverture
du compte n°1, jusqu'au 31 décembre 1994. La demande ne relate en
effet aucun
élément permettant d'établir un lien entre la recourante et les
personnes,
physiques ou morales, impliquées dans l'affaire, avant 1995.

4.4 Le principe de la proportionnalité ne fait ainsi pas obstacle à
la remise
de la documentation relative au compte n°1, du moins pour ce qui
concerne
l'époque postérieure au 1er janvier 1995. Si les autorités de l'Etat
requérant devaient prendre connaissance d'éléments justifiant la
remise de la
documentation antérieure à cet date, elles seraient libres de
présenter à
l'Office fédéral une nouvelle demande en ce sens.

5.
Le recours doit ainsi être admis partiellement au sens du considérant
4.3 et
rejeté pour le surplus. La recourante n'obtenant que très
partiellement gain
de cause, des frais réduits seront mis à sa charge (art. 156 OJ).
Compte tenu
de l'issue de la cause, des dépens, d'un montant également réduit,
seront
alloués à la recourante (art. 159 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis partiellement au sens du considérant 4.3. Il est
rejeté
pour le surplus.

2.
Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
L'Office fédéral versera à la recourante une indemnité de 1000 fr., à
titre
de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la
recourante et à
l'Office fédéral de la justice (B 109 695).

Lausanne, le 9 janvier 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.218/2002
Date de la décision : 09/01/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-01-09;1a.218.2002 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award