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07/01/2003 | SUISSE | N°2A.262/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 07 janvier 2003, 2A.262/2002


{T 0/2}
2A.262/2002 /dxc

Arrêt du 7 janvier 2003
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler, Müller, Yersin, Merkli,
greffier Dubey.

X. ________ SA en liquidation,
recourante, représentée par Me Peter Schaufelberger, avocat, place
Benjamin-Constant 2, case postale 3673, 1002 Lausanne,

contre

Direction générale des douanes, Monbijoustr. 40, 3003 Berne,
Commission fédérale de recours en matière de douanes, avenue Tissot
8, 1006
Lausanne.

perception subséquente de droits de douane pour l'importation de vin

(recours de droit administratif contre la décisi...

{T 0/2}
2A.262/2002 /dxc

Arrêt du 7 janvier 2003
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler, Müller, Yersin, Merkli,
greffier Dubey.

X. ________ SA en liquidation,
recourante, représentée par Me Peter Schaufelberger, avocat, place
Benjamin-Constant 2, case postale 3673, 1002 Lausanne,

contre

Direction générale des douanes, Monbijoustr. 40, 3003 Berne,
Commission fédérale de recours en matière de douanes, avenue Tissot
8, 1006
Lausanne.

perception subséquente de droits de douane pour l'importation de vin

(recours de droit administratif contre la décision de la Commission
fédérale
de recours en matière de douanes du 23 avril 2002)

Faits:

A.
Par avis publié dans la Feuille officielle suisse du commerce du 14
octobre
1999, l'Office fédéral de l'agriculture a procédé à la mise en
adjudication
du contingent tarifaire n° 23 de 190'000 hl de vin blanc naturel. Le
chiffre
7 de la publication précisait qu'avant le paiement total du prix de
l'adjudication, il ne pouvait être procédé à l'importation au taux du
contingent (TC), les infractions à cette disposition étant réprimées
conformément à la loi sur les douanes. Par décision du 13 décembre
1999,
l'Office fédéral de l'agriculture a adjugé à X.________ SA
(actuellement en
liquidation; ci-après: la société) une part de contingent tarifaire
pour
l'importation de 105'000 litres de vin blanc naturel pour le prix de
35'000
fr. à payer dans les 60 jours dès l'entrée en force de la décision. La
décision précisait également que la part de contingent tarifaire
adjugée
pouvait être utilisée à partir du paiement total du prix de
l'adjudication.
Le prix a été versé par la société le 23 mars 2000.

Les 18, 26 et 28 février 2000, des lots de 12'500, 21'559 et 26'025
litres au
taux de contingent de 34 fr. par 100 kg brut, respectivement 8 litres
au taux
de contingent de 50 fr. par 100 kg brut de vin blanc ont été
dédouanés à
l'importation au nom et pour le compte de la société.

B.
Par décision du 13 novembre 2000, l'Administration fédérale des
douanes,
Service des enquêtes de Lausanne (ci-après: l'Administration fédérale
des
douanes), à qui le dossier avait été au préalable transmis par
l'Office
fédéral de l'agriculture comme objet de sa compétence, a condamné la
société
à payer la somme de 187'190 fr. 30 correspondant à la différence
entre les
taux de contingent tarifaire appliqués et les taux hors contingent
tarifaire,
les lots de vin blanc en cause, représentant 60'092 litres, ayant été
importés avant le versement du prix de l'adjudication fixé dans la
décision
du 13 décembre 1999.

Un recours contre la décision du 13 novembre 2000 ayant été rejeté par
décision du 10 septembre 2001 de la Direction générale des douanes, la
société a demandé à la Commission fédérale de recours en matière de
douanes
(ci-après: la Commission de recours) d'annuler les décisions des 13
novembre
2000 et 10 septembre 2001. Elle invoquait la violation du droit d'être
entendue, l'absence de base légale, en particulier la violation du
principe
de la légalité des délits et des peines, ainsi que la violation des
principes
de la bonne foi et de la proportionnalité.

Par décision du 23 avril 2002, la Commission de recours a rejeté le
recours.
La décision d'adjudication du 13 décembre 1999 avait fait dépendre
l'utilisation du contingent tarifaire du paiement total préalable du
prix de
l'adjudication. Cette décision étant entrée en force, le grief
d'illégalité
de la disposition fondant cette condition, respectivement son
application par
l'administration, était tardif et aurait au surplus dû être invoqué
devant la
Commission de recours du Département fédéral de l'économie. La
recourante
n'ayant payé le prix de l'adjudication qu'après avoir procédé aux
importations en cause, elle avait profité d'un taux réduit alors
qu'elle n'y
avait encore aucun droit, de sorte qu'elle n'avait pas versé à la
Confédération la totalité des droits de douanes dus (différence entre
le taux
hors contingent et le taux de contingent tarifaire) et avait enfreint
le
droit administratif fédéral. La perception subséquente de cette
différence
était donc justifiée, la maladie de l'un des responsables de la
société
n'étant au surplus pas de nature à modifier cette conclusion.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, la société
demande au
Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'admettre son
recours et de
réformer la décision de la Commission de recours du 23 avril 2002 en
ce sens
que le recours déposé le 11 octobre 2001 contre la décision de la
Direction
générale des douanes du 10 septembre 2001 est admis et que la
décision de la
Direction des douanes de Genève, Service des enquêtes de Lausanne, du
13
novembre 2000 est annulée. Elle invoque des violations de
l'obligation de
motiver une décision, du principe de la légalité, en particulier de la
légalité des délits et des peines, ainsi que des principes de la
bonne foi et
de la proportionnalité.

La Commission de recours renonce à présenter des observations. La
Direction
générale des douanes conclut au rejet du recours avec suite de frais.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Selon l'art. 97 OJ en relation avec l'art. 5 PA, la voie du
recours de
droit administratif est ouverte contre les décisions fondées sur le
droit
public fédéral, à condition qu'elles émanent des autorités énumérées
à l'art.
98 OJ et pour autant qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à
102 OJ ou
dans la législation spéciale ne soit réalisée. Ces conditions sont
remplies
en l'espèce. La décision attaquée, qui se fonde notamment sur la loi
du 1er
octobre 1925 sur les douanes (LD; RS 631.0), sur la loi fédérale du
29 avril
1998 sur l'agriculture (LAgr; RS 910.1, entrée en vigueur le 1er
janvier
1999), sur l'ordonnance du 7 décembre 1998 sur l'importation de
produits
agricoles (ordonnance sur les importations agricoles, OIAgr; RS
916.01),
entrée en vigueur le 1er janvier 1999 et sur l'ordonnance du 7
décembre 1998
sur la viticulture et l'importation de vin (ordonnance sur le vin; RS
916.140, entrée en vigueur le 1er janvier 1999), a été rendue par la
Commission de recours en matière de douanes (art. 98 let. e OJ) et ne
tombe
pas sous le coup des art. 99 al. 1 let. b et 100 al. 1 let. h et m
ch. 2 OJ).
En outre, déposé en temps utile (art. 106 OJ) et dans les formes
requises
(art. 108 OJ), le présent recours est en principe recevable au regard
des
art. 97 ss OJ ainsi que de la règle particulière de l'art. 109 al. 1
let. e
et al. 3 LD.

1.2 Le recours est toutefois irrecevable dans la mesure où il conclut
à
l'annulation des décisions d'instances inférieures, en l'espèce
celles de la
Direction générale des douanes du 10 septembre 2001 et de la
Direction des
douanes de Genève, Service des enquêtes de Lausanne, du 13 novembre
2000,
étant donné l'effet dévolutif du recours déposé auprès de la
Commission de
recours (ATF 126 II 300 consid. 2a p. 302/303; 125 II 29 consid. 1c
p. 33;
104 Ib 412 consid. 1c p. 416; cf. Ulrich Häfelin/Georg Müller,
Grundriss des
Allgemeinen Verwaltungsrechts, 3e éd., Zurich 1998, n. 1402 p. 356).

1.3 Conformément à l'art. 104 let. a OJ, le recours de droit
administratif
peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et
l'abus
du pouvoir d'appréciation (ATF 128 II 56 consid. 2a p. 60). Le
Tribunal
fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral qui englobe
notamment
les droits constitutionnels du citoyen (ATF 128 II 56 consid. 2b p.
60; 126 V
252 consid. 1a p. 254; 125 II 508 consid. 3a p. 509). Comme il n'est
pas lié
par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours
pour
d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au
contraire,
confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus
par
l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 127 II 264 consid.
1b p.
268, 8 consid. 1b p. 12; 125 II 497 consid. 1b/aa p. 500 et les arrêts
cités).

2.
2.1Aux termes de l'art. 1 LD, toute personne qui fait passer des
marchandises
à travers la ligne suisse des douanes est tenue d'observer les
prescriptions
concernant le passage de la frontière et le paiement des droits
prévus par la
loi fédérale du 9 octobre 1986 sur le tarif des douanes (LTaD; RS
632.10).
Toutes les marchandises importées ou exportées à travers la ligne
suisse des
douanes doivent être dédouanées conformément au tarif général
figurant dans
les annexes 1 et 2 (art. 1 al. 1 LTaD), dont les positions fixent les
droits
à l'importation en général ainsi que le contingent tarifaire. Par
contingent
tarifaire, on entend une certaine quantité d'un produit agricole qui
peut
être importée à un taux déterminé. Cette réglementation, mise en
place à la
suite de l'accord du 15 avril 1994 instituant l'Organisation mondiale
du
commerce (RS 0.632.20), permet d'effectuer des importations à
l'intérieur du
contingent tarifaire comme hors contingent, mais soumet les premières
à des
droits de douane réduits en subordonnant en revanche les secondes à
des
droits volontairement dissuasifs (ATF 128 II 34 consid. 2b p. 38;
Message du
Conseil fédéral du 26 juin 1996 concernant la réforme de la politique
agricole, in FF 1996 IV 1 p. 114).

Dans le secteur agricole, en vertu de l'art. 10 al. 4 let. b et c
LTaD, ce
sont les art. 20 à 22 LAgr qui règlent les principes et compétences
s'agissant de la fixation, la modification et la répartition des
contingents
tarifaires énumérés à l'annexe 2 LTaD.

2.2 L'art. 22 al. 1 et 2 let. a et b LAgr prévoit que le Conseil
fédéral
répartit les contingents tarifaires dans des conditions de
concurrence,
notamment selon la procédure de la mise aux enchères. Afin d'éviter
des abus,
le Conseil fédéral peut priver des importateurs du droit aux
contingents
tarifaires (art. 22 al. 4 LAgr). Il peut déléguer au département la
compétence de fixer les critères concernant la répartition du droit
aux
contingents tarifaires (art. 22 al. 5 LAgr). Le Conseil fédéral
arrête les
dispositions d'exécution nécessaires, à moins que la loi ne réglemente
autrement cette compétence (art. 177 al. 1 LAgr).

En vertu de l'art. 26 al. 1 de l'ordonnance sur le vin, le contingent
tarifaire de vin blanc est réparti, jusqu'au 31 décembre 2000,
conformément à
l'ordonnance du 23 décembre 1971 sur la viticulture et le placement
des
produits viticoles (ci-après: le Statut du vin; RO 1972 56 et 219,
1976 2042,
1980 355 ch. I 2, 1981 362, 1987 2498, 1993 1462, 1995 2002, 1996
3087 art.
16a à 16h, 1997 1182 art. 15). D'après l'art. 16d al. 1 du Statut du
vin, le
contingent tarifaire de vin blanc est mis aux enchères. Le versement
du prix
adjugé doit avoir lieu au plus tard 60 jours après l'entrée en force
de
l'adjudication (art. 16g al. 1 du Statut du vin). L'importation au
taux du
contingent est interdite avant le versement du prix d'adjudication
(art. 16g
al. 2 du Statut du vin). Dès le 1er janvier 2001, le régime des
contingents
tarifaires est réglé par les art. 10 à 20 OIAgr, dont la teneur est
identique
à celle des dispositions contenues dans le Statut du vin (cf. sur
l'importation du vin: Oliver P. Kronenberg, Die Regulierung von
Produktion,
Import und Verkauf des Weins im Schweizer Recht [Entwicklungen und
aktueller
Stand], in Communication de droit agraire 1999/33 p. 3 à 29).

2.3 En l'espèce, la recourante, à juste titre, ne critique pas la
procédure
de répartition des contingents tarifaires ni le principe du paiement
préalable de l'adjudication du contingent obtenu. Elle ne conteste
pas non
plus que les importations de vins auxquelles elle a procédé en
février 2000
ont eu lieu avant le versement du prix de l'adjudication de son
contingent
pour l'an 2000. Elle considère en revanche que l'interdiction
d'importer au
taux du contingent avant le versement du prix viole le principe de la
légalité, cette interdiction ne trouvant aucun appui dans la loi sur
l'agriculture.

Dans la procédure du recours de droit administratif, le Tribunal
fédéral
peut, à titre préjudiciel, examiner librement la légalité des
dispositions
d'application prises par le Conseil fédéral. En particulier, il
exerce son
contrôle sur les ordonnances (dépendantes) qui reposent sur une
délégation
législative (art. 164 al. 2 Cst.). Lorsque celle-ci est relativement
imprécise et que, par la force des choses, elle donne au Conseil
fédéral un
large pouvoir d'appréciation qui lie le Tribunal fédéral (art. 191
Cst.),
celui-ci doit se borner à examiner si les dispositions incriminées
sortent
manifestement du cadre de la délégation de compétence donnée par le
législateur à l'autorité exécutive ou si, pour d'autres motifs, elles
sont
contraires à la loi ou à la Constitution. Dans l'examen auquel il
procède à
cette occasion, le juge ne doit toutefois pas substituer sa propre
appréciation à celle de l'autorité dont émane la réglementation en
cause. Il
doit au contraire se borner à vérifier si la disposition litigieuse
est
propre à réaliser objectivement le but visé par la loi, sans se
soucier, en
particulier, de savoir si elle constitue le moyen le mieux approprié
pour
atteindre ce but. Ce contrôle se confond pratiquement avec le
contrôle de
l'arbitraire de la réglementation proposée (ATF 128 II 34 consid. 3b
p. 40
s.;
cf. Andreas Auer, La juridiction constitutionnelle en Suisse,
Bâle 1983,
p. 112 n° 196; ATF 127 V 1 consid. 5a p. 7; 126 II 399 consid. 4a p.
404, 522
consid. 41 p. 573; 126 V 48 consid. 3b p. 52, 363 consid. 3 p. 365,
468
consid. 5b p. 473 et les références).

Le grief de la recourante portant sur la légalité du Statut du vin
n'est pas
fondé. En optant pour l'interdiction d'importer au taux du contingent
avant
le versement du prix d'adjudication, le Conseil fédéral a décidé de
considérer ce versement comme une condition préalable de
l'importation du vin
au taux préférentiel du contingent. Ce choix s'inscrit clairement
dans la
délégation législative accordée au Conseil fédéral en la matière. En
effet,
d'après le Message du Conseil fédéral du 26 juin 1996 concernant la
réforme
de la politique agricole, la Confédération est en principe libre de
déterminer les modalités et les critères de répartition pour autant
que cela
ne restreigne pas l'accès au marché prévu par le droit international.
Dans
cette mesure, il appartient au Conseil fédéral de fixer les critères
de
répartition adéquats et conformes aux règles de l'Organisation
mondiale du
commerce pour chaque produit et pour chaque organisation de marché.
Le projet
de loi donne quelques indications d'ordre général à ce sujet. En
particulier,
l'attribution des contingents tarifaires peut être subordonnée à des
prestations en faveur de la production indigène. La prestation en
faveur de
la production du pays peut être conçue soit comme une condition, soit
comme
une charge. En tant que condition, elle constitue une contribution
préalable
à l'attribution d'une part du contingent tarifaire (Message du Conseil
fédéral du 26 juin 1996 concernant la réforme de la politique
agricole, in FF
1996 IV 1 p. 116/117). Certes, le versement du prix de l'adjudication
et la
prestation en faveur de la production indigène ne sauraient être
confondus.
Ils sont néanmoins deux aspects d'une même procédure, la répartition
des
contingents tarifaires (cf. art. 22 al. 2 let. a et b LAgr), de sorte
que
leur mise en oeuvre par le Conseil fédéral obéit à des règles
similaires.
Dans ce sens, s'il est admis par le législateur que la prestation en
faveur
de la production indigène peut constituer une condition formelle à
l'octroi
d'un contingent tarifaire, il est également admissible de soumettre
l'utilisation du contingent tarifaire à la condition formelle
préalable du
versement du prix de l'adjudication, sans violer la norme de
délégation
législative.

Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la recourante, le
paiement préalable du prix de l'adjudication en tant que condition
formelle
du droit d'importer du vin au taux du contingent, repose bien sur une
base
légale suffisante. Il s'ensuit que les importations effectuées avant
le
versement du prix d'adjudication sont soumises au régime douanier
ordinaire
et doivent être frappées d'un droit de douane au taux hors contingent
(cf.
dans le même sens pour l'importation du fromage: arrêt du Tribunal
fédéral
2A.452/2002 du 6 décembre 2002, consid. 2).

Reste à examiner si la différence entre les droits de douane hors
contingent
et ceux du contingent tarifaire devait être restituée.

3.
3.1En vertu de l'art. 182 al. 1 let. b LAgr, le Conseil fédéral peut
mettre
en place un système de répression des fraudes dans les domaines
relatifs
notamment à l'importation de produits agricoles. Il coordonne en
particulier
l'exécution de la loi fédérale sur les douanes et de la loi fédérale
sur
l'agriculture. Selon l'art. 74 ch. 15 LD, applicable aux violations
des
prescriptions relatives aux importations de marchandises agricoles en
vertu
de l'art. 175 al. 2 LAgr, se rend coupable de contravention celui
qui, dans
un ordre de dédouanement, indique une position tarifaire inexacte ou
désigne
la marchandise selon une telle position et provoque ainsi une
déclaration
inexacte d'une marchandise passible de droits. Le titre deuxième de
la loi
fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA; RS
313.0) est
applicable (art. 80 al. 1 LD). La poursuite est régie par la loi
fédérale sur
le droit pénal administratif. L'administration chargée de la
poursuite et de
l'exécution est l'Administration des douanes (art. 87 al. 1 LD). Les
attributions de cette dernière peuvent être déléguées aux directions
d'arrondissement et aux bureaux de douane (art. 87 al. 2 LD).

Sous la note marginale "assujettissement à une prestation ou à une
restitution", l'art. 12 al. 1 DPA prévoit que lorsque, à la suite
d'une
infraction à la législation administrative fédérale, c'est à tort
qu'une
contribution est réduite ou n'est pas perçue, la contribution non
réclamée,
ainsi que les intérêts, seront perçus après coup, alors même qu'aucune
personne déterminée n'est punissable. Est assujetti à la prestation
ou à la
restitution celui qui a obtenu la jouissance de l'avantage illicite,
en
particulier celui qui est tenu au paiement de la contribution ou
celui qui a
reçu l'allocation ou le subside (art. 12 al. 2 DPA). En matière
douanière,
les droits de douane sont dus par les personnes assujetties au
contrôle
douanier, par les personnes qui transportent des marchandises à
travers la
frontière et par leurs mandants, ainsi que par les personnes pour le
compte
desquelles la marchandise est importée (art. 9 al. 1 et 13 LD).
L'employeur
est responsable des actes commis par ses employés, ouvriers,
apprentis ou
domestiques dans l'accomplissement de leur travail, à moins qu'il ne
prouve
qu'il a pris tous les soins voulus pour faire observer les
prescriptions par
lesdites personnes (art. 9 al. 2 LD).

3.2 En l'espèce, la recourante n'a pas respecté la prescription qui
lui
interdisait d'importer du vin au taux du contingent avant d'avoir
versé le
prix d'adjudication d'une part du contingent pour l'an 2000. Elle a
profité
d'un avantage illicite dans la mesure où elle a payé un droit de
douane au
taux réduit alors qu'elle ne remplissait pas les conditions pour
bénéficier
d'une telle facilité. Elle n'allègue ni ne démontre avoir pris tous
les soins
voulus pour faire observer les prescriptions par ses employés (cf.
art. 9 al.
2 LD) et rien au dossier ne permet de penser que telle a bien été son
attitude. Elle ne critique pas la détermination de la quantité de vin
importée en février 2000 ni le calcul des droits supplémentaires. En
revanche, elle est d'avis que la restitution litigieuse constitue une
sanction pénale qui violerait le principe de la légalité des peines
et des
délits.

Cette opinion est erronée. En effet, l'art. 12 al. 1 DPA permet de
procéder
au rappel d'une contribution qui n'a pas été perçue à la suite d'une
infraction à la législation administrative fédérale même si aucune
personne
n'est punissable (cf. Jean Gauthier, La loi fédérale sur le droit
pénal
administratif, in Mémoires publiés par la Faculté de droit de
l'Université de
Genève, vol. 46, p. 23 ss, p. 43/44; le même, Les infractions fiscales
soumises à la loi fédérale sur le droit pénal administratif, in RDAF
1999 II
p. 56 ss, spéc. p. 59). Est assujetti au paiement de ce rappel celui
qui
était tenu de payer la contribution éludée - en vertu, par exemple,
des art.
9 al. 1 ou 13 al. 1 LD - ainsi que toute personne qui a retiré un
avantage
illicite de l'infraction commise (cf. art. 12 al. 2 DPA). Cet
assujettissement ne dépend pas de l'existence d'une faute ou, à plus
forte
raison, d'une poursuite pénale (ATF 106 Ib 218 consid. 2c p. 221; 110
Ib 306
consid. 2c p. 310-311; Kurt Hauri, Verwaltungsstrafrecht, VStrR,
Bundesgesetz
vom 22. März 1974 über das Verwaltungsstrafrecht, Motive - Doktrin -
Rechtsprechung, Berne 1998, n. 9 ad art. 12 DPA p. 37-38). Il suffit
que
l'avantage illicite procuré par l'absence de perception de la
contribution
trouve sa source dans une violation objective de la législation
administrative fédérale (arrêt du Tribunal fédéral 2A.452/2002 du 6
décembre
2002, consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 2A.215/1998 du 4 août
1999,
publié in Archives 68 p. 439 ss, consid. 2; ATF 115 Ib 358 consid. 3a
p. 360
et les références citées). Telle est bien la situation de la
recourante, qui
n'a au demeurant pas été condamnée au paiement d'une amende au sens
de l'art.
75 LD. Dans ces conditions, c'est en vain qu'elle se prévaut du
principe
nullum crimen sine lege.

En confirmant l'obligation de la recourante de restituer les droits
de douane
correspondant à la différence entre le taux réduit et le taux hors
contingent, l'autorité de recours a correctement appliqué l'art. 12
DPA.

4.
La recourante soutient encore que la décision de la Commission de
recours
viole les principes de la bonne foi et de la proportionnalité, dans
la mesure
où l'importation de vin au taux réduit avant le versement du prix
d'adjudication constituerait une règle de procédure mineure ne
mettant en
cause aucun intérêt privé ou public prépondérant, dont la sanction
serait, à
son avis, disproportionnée. Elle reproche également à la Commission de
recours d'avoir violé son obligation de motiver sur ce point.

4.1 Le principe de la bonne foi entre administration et administré
(cf. art.
5 al. 3 et 9 Cst.) exige que l'un et l'autre se comportent dans leurs
rapports réciproques de manière loyale. En particulier,
l'administration doit
s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et elle
ne
saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou
insuffisance de sa part (ATF 124 II 265 consid. 2a p. 269/270).
Ainsi, à
certaines conditions, le citoyen a le droit d'exiger de l'autorité
qu'elle se
conforme aux promesses ou assurances précises qu'elle lui a faites et
ne
trompe pas la confiance qu'à juste titre il a placée dans ces
promesses et
assurances (ATF 128 II 112 consid. 10b/aa p. 125; 118 Ib 580 consid.
5a p.
582/583; ATF 118 Ib 312 consid. 3b p. 316; cf. Jean-Marc Rivier,
Droit fiscal
suisse, 2e éd., Lausanne 1998, p. 132; Ernst Blumenstein/Peter
Locher, System
des Steuerrechts, 5e éd., Zurich 1995, p. 25).

Le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.) comprend
la règle
d'adéquation, qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre
le but
fixé, la règle de nécessité, qui impose qu'entre plusieurs moyens
adaptés
soit choisi celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts
privés,
ainsi que la règle de proportionnalité au sens étroit, qui exige que
la
gravité des effets de la mesure sur la situation de l'administré soit
mise en
balance avec l'impact attendu en fonction de l'intérêt public (ATF
125 I 474
consid. 3 p. 482 et la jurisprudence citée).

Selon la jurisprudence (relative à l'art. 4 aCst., respectivement à
l'art. 29
al. 2 Cst.), la motivation d'une décision est suffisante lorsque
l'autorité
mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur
lesquels
elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se
rendre
compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de
cause.
L'autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des
parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 126 I 97
consid.
2b p. 102/103; 125 II 369 consid. 2c p. 372; 122 IV 8 consid. 2c p.
14/15;
121 I 54 consid. 2c p. 57).

4.2 En l'espèce, les griefs de violation des principes de la bonne
foi et de
la proportionnalité se confondent avec celui de la violation de la
loi sur
l'agriculture et de l'art. 12 DPA et doivent également être rejetés,
dès lors
qu'il a été établi que la Commission de recours a correctement
appliqué le
droit fédéral. Au demeurant, la recourante n'a pas établi devant la
Commission de recours ni devant le Tribunal fédéral avoir reçu des
promesses
telles qu'elles auraient paralysé l'application du droit fédéral (cf.
à cet
égard, l'arrêt du Tribunal fédéral 2A.452/2002 du 6 décembre 2002,
consid. 3)
et ne conteste pas qu'elle aurait pu utiliser la part de contingent
tarifaire
adjugé en sus des importations dont l'imposition est litigieuse,
jusqu'à la
fin de l'année 2000. Ce dernier point lui a d'ailleurs été confirmé
par
l'Office fédéral de l'agriculture et la Direction générale des
douanes en
octobre 2000 (cf. réponse de la Direction générale des douanes à la
Commission de recours du 21 janvier 2002 et les références citées en
p. 2 in
fine). La Commission de recours a par conséquent répondu de manière
implicite
aux griefs de la recourante, qui ne saurait se prévaloir d'une
violation du
droit d'être entendue sur ce point.

5.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours, dans
la mesure
où il est recevable.

Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art.
156 al.
1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la
recourante, à la
Direction générale des douanes et à la Commission fédérale de recours
en
matière de douanes.

Lausanne, le 7 janvier 2003

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.262/2002
Date de la décision : 07/01/2003
2e cour de droit public

Analyses

Art. 74 ch. 15 LD; art. 10 al. 4 let. b et c LTaD; art. 20-22 et 175 al. 2 LAgr; art. 10-20 OIAgr; art. 26 al.1 de l'ordonnance sur le vin; art. 16d-16g du Statut du vin; art. 12 DPA. Droits de douane, adjudication du contingent tarifaire, condition du droit d'importer du vin au taux du contingent tarifaire. Perception après coup d'une contribution non perçue. Le paiement préalable du prix de l'adjudication est une condition formelle du droit d'importer du vin au taux réduit du contingent tarifaire. Cette condition repose sur une base légale suffisante. Par conséquent, les importations effectuées avant le versement du prix d'adjudication sont soumises au régime douanier ordinaire et doivent être frappées d'un droit de douane au taux hors contingent (consid. 2). L'importation du vin effectuée au taux du contingent avant le paiement du prix de l'adjudication tombe sous le coup de l'art. 74 ch. 15 LD par renvoi de l'art. 175 al. 2 LAgr. L'art. 12 DPA permet de réclamer le paiement du droit de douane correspondant à la différence entre le taux réduit et le taux hors contingent qui n'a pas été perçu. Cette perception constitue un rappel de contribution et non pas une sanction pénale (consid. 3).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-01-07;2a.262.2002 ?
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