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20/12/2002 | SUISSE | N°5P.285/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 décembre 2002, 5P.285/2002


{T 0/2}
5P.285/2002 /frs

Arrêt du 20 décembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Escher,
greffière Revey.

Dame X.________, (épouse),
recourante, représentée par Me Christine Gaitzsch, avocate, 3, place
de la
Taconnerie, 1204 Genève,

contre

X.________ (époux),
intimé, représenté par Me Anne-Marie Pellaz, avocate, 41, rue de la
Terrassière, 1207 Genève,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
12

11 Genève 3.

Art. 9 et 29 Cst.; divorce

(recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de
j...

{T 0/2}
5P.285/2002 /frs

Arrêt du 20 décembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Escher,
greffière Revey.

Dame X.________, (épouse),
recourante, représentée par Me Christine Gaitzsch, avocate, 3, place
de la
Taconnerie, 1204 Genève,

contre

X.________ (époux),
intimé, représenté par Me Anne-Marie Pellaz, avocate, 41, rue de la
Terrassière, 1207 Genève,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

Art. 9 et 29 Cst.; divorce

(recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de
justice du canton de Genève du 14 juin 2002).

Faits:

A.
X. ________, né le 14 septembre 1960, et dame X.________ née le 25
mai 1953,
se sont mariés à Genève le 21 août 1987. Deux enfants sont issus de
leur
union, soit J.________, né le 8 mai 1991, et A.________, née le 7
août 1993.

Le 8 novembre 2001, le Tribunal de première instance du canton de
Genève a,
notamment, prononcé le divorce des époux, attribué à l'épouse
l'autorité
parentale et la garde des enfants et réglé le droit de visite du père.
S'agissant des contributions d'entretien en faveur des enfants, il a
condamné
le père à payer, par mois et d'avance, par enfant, outre les
allocations
familiales ou d'études éventuellement versées au débiteur, moyennant
indexation, 1'400 fr. jusqu'à 10 ans, 1'600 fr. de 10 à 15 ans et
1'800 fr.
de 15 ans à la majorité, voire au-delà, mais jusqu'à 25 ans au plus,
en cas
de formation sérieuse et régulière. Il a en outre condamné l'époux à
prendre
en charge à concurrence de 50% les éventuels frais dentaires et
orthodontiques des enfants, ainsi que leurs frais de lunettes qui ne
seraient
pas couverts par une assurance, ces frais devant faire l'objet d'un
devis
préalablement accepté par les deux parents. Quant à la pension de la
conjointe, le Tribunal de première instance a condamné l'époux à
payer, par
mois et d'avance, moyennant indexation, 2'500 fr. tant qu'il aura les
deux
enfants à sa charge financière, 3'000 fr. dès qu'il en aura un seul
et 3'500
fr. dès qu'il en sera libéré. Enfin, le Tribunal de première instance
a
ordonné à la caisse de pension de l'époux de transférer le montant de
116'165
fr. plus intérêts à celle de la conjointe et condamné encore l'époux
à verser
à celle-ci 17'098.10 fr. au titre du partage de leurs avoirs
bancaires et de
la valeur de rachat de la police d'assurance-vie.

Par arrêt du 14 juin 2002, la Chambre civile de la Cour de justice a
partiellement admis le recours interjeté par l'époux contre ce
prononcé, en
ce sens qu'elle a modifié les contributions d'entretien. Ainsi, elle
a fixé
la pension des enfants à 1'000 fr. jusqu'à 10 ans, 1'150 fr. de 10 à
15 ans
et 1'300 fr. de 15 ans à la majorité, voire au-delà, mais jusqu'à 25
ans au
plus, en cas de formation sérieuse et régulière. Sous cet angle, elle
a
encore annulé la participation du père aux frais dentaires,
orthodontiques et
de lunettes des enfants. S'agissant de la rente de l'épouse, la Cour
de
justice l'a arrêtée à 1'500 fr. jusqu'au 30 septembre 2025. De plus,
constatant qu'il n'était pas possible, en l'état, de fixer une rente
permettant d'assurer l'entretien convenable de la crédirentière, la
Cour de
justice a prononcé que l'épouse pourra, en application de l'art. 129
al. 3
CC, et dans un délai de 5 ans à compter du divorce, demander
l'augmentation
de la rente aux conditions prévues par cette norme. Enfin, la Cour de
justice
a compensé les dépens d'appel.

B.
Contre cet arrêt, dame X.________ exerce parallèlement devant le
Tribunal
fédéral un recours de droit public et un recours en réforme
(5C.180/2002).
Dans le premier, elle conclut à l'annulation du prononcé attaqué sous
suite
de frais et dépens. Elle se plaint d'une appréciation arbitraire des
preuves,
d'une violation du droit à l'administration des preuves et d'une
violation du
devoir de l'autorité de motiver les décisions (art. 9 et 29 al. 2
Cst.).

C.
Il n'a pas été requis d'observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
En vertu de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en règle générale à
l'arrêt sur
le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droit
public. Les
conditions d'une dérogation à ce principe ne sont pas remplies en
l'espèce
(cf. notamment, ATF 123 III 213 consid. 1; 122 I 81 consid. 1; 120 Ia
377
consid. 1 et 117 II 630 consid. 1a).

Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière
instance
cantonale, le recours est recevable au regard des art. 89 al. 1 et 86
al. 1
OJ.

2.
2.1La recourante affirme que la capacité de gain de l'époux dépasse
le revenu
mensuel effectif de 6'000 fr. retenu par la Cour de justice pour
calculer les
contributions d'entretien dues à elle-même et à leurs enfants.
D'après elle,
un revenu hypothétique de 11'000 fr. doit être imputé à l'époux et,
de plus,
son revenu effectif est de toute façon supérieur à 6'000 fr. A
l'appui, elle
invoque son droit à une appréciation non arbitraire des preuves, son
droit à
l'administration des preuves, ainsi que le devoir de l'autorité de
motiver
les décisions (art. 9 et 29 al. 2 Cst.).
2.2 L'arrêt entrepris a retenu ce qui suit, en fait et en droit:
"[L'intimé] a travaillé comme employé salarié dans une société
fiduciaire
jusqu'au 31 octobre 2000. Il réalisait alors un revenu d'environ
11'000 fr.
par mois. N'ayant aucune chance de devenir partenaire dans cette
société, son
domaine d'activité a été peu à peu réduit et il a failli perdre son
emploi
suite à une restructuration.
Son ancien employeur a relevé que la société avait en vue de
développer
principalement la clientèle internationale de grande taille alors que
[l'intimé] s'occupait essentiellement des sociétés PME. Il a toutefois
affirmé qu'il aurait pu utiliser ses services dans la nouvelle
activité.
En novembre 2000, [l'intimé] et C.________ se sont associés en tant
qu'indépendants à la suite d'un projet conçu en 1995 et ayant pris
forme en
1999. C.________, qui exerçait déjà cette activité en tant
qu'indépendant en
1998-99, réalisait alors un revenu annuel brut moyen de 82'500 fr.,
soit
6'875 fr. brut par mois.
[L'intimé] réalise actuellement un revenu mensuel net de 5'026 fr."
(partie
en fait, p. 5 s.)

"Après avoir examiné les dépositions des témoins, la Cour est d'avis
que,
contrairement à ce qui a été retenu par le Tribunal, [l'intimé] n'a
pas fait
preuve de mauvaise volonté ni renoncé volontairement à l'important
salaire
qui lui était servi auparavant.
Elle retient que les chiffres présentement fournis sont sincères, de
sorte
qu'il convient de tabler sur un revenu mensuel actuel de l'ordre de
5'000 à
6000 fr. qui ira augmentant au fur et à mesure du développement des
affaires
de la société, mais dans une proportion totalement indéterminable en
l'état.
Pour les besoins des calculs qui suivent, la Cour retiendra une
capacité de
gain de 6'000 fr. par mois, et non pas de 11'000 fr. par mois comme
retenu
par le Tribunal." (partie en droit, p. 12)

3.
Dénonçant une appréciation arbitraire des preuves, la recourante
conteste le
refus de la Cour de justice d'attribuer le changement d'activité de
l'époux à
une "mauvaise volonté" ou à une renonciation "volontaire" à un
important
salaire.

Un revenu hypothétique supérieur au revenu réel peut être imputé au
débiteur
de contributions d'entretien lorsque celui-ci renonce volontairement
ou par
négligence à un revenu plus élevé. Encore faut-il qu'une augmentation
correspondante de revenu soit effectivement possible et qu'elle puisse
raisonnablement être exigée du débiteur (ATF 128 III 4 consid. 4), la
première condition relevant du fait et la seconde du droit (ATF 126
III 10
consid. 2b). La jurisprudence a toutefois laissé indécise la question
de
l'opportunité d'exiger de telles conditions lorsque le débiteur agit
dans
l'intention délibérée de nuire (ATF 128 III 4 consid. 4a in fine). En
l'occurrence, un tel dessein de nuire n'est pas en cause et la Cour de
justice ne fait pas état de la possibilité d'obtenir une augmentation
de
revenu, de sorte que peu importe en l'espèce de savoir si le
changement
d'orientation professionnelle résulte de circonstances contraignantes
ou s'il
tient, comme l'affirme la recourante, à la négligence ou à un choix
volontaire. Le grief d'arbitraire est dès lors irrecevable, faute de
porter
sur un fait pertinent.

4.
La recourante se plaint d'une violation de son droit à
l'administration des
preuves. Estimant que le revenu effectif de l'époux dépasse la somme
de 6'000
fr., elle affirme que celui-ci a toujours refusé de produire des
documents
pertinents à cet égard (budget prévisionnel, comptabilité, etc.) et
prétend
que les juges cantonaux ont dès lors violé son droit d'être entendue
"en
retenant, en dépit de cette carence totale de l'intimé de fournir les
pièces
pertinentes en sa possession, que les chiffres allégués par l'intimé
étaient
sincères, pour conclure que la capacité de gain de celui-ci était de
6'000
fr. par mois et non point de 11'000 fr."

En réalité, la recourante ne se plaint pas du refus supposé de
l'intimé de
produire des pièces, mais reproche à la Cour de justice de ne pas
avoir tiré
les conséquences de ce refus prétendu dans l'appréciation de la
véracité des
allégués de l'intéressé. Elle ne dénonce dès lors pas une violation
de son
droit à l'administration des preuves - d'autant qu'elle n'allègue pas
avoir
formellement requis l'édition des documents en cause -, mais une
appréciation
arbitraire des preuves (cf. ATF 119 II 305; voir aussi art. 40 PCF et
Max
Kummer, Commentaire bernois, 1962, n° 184 ad art. 8 CC). Sous cet
angle
cependant, il ressort du dossier que le montant de 5'026 fr., élevé à
6'000
fr., ne découle pas exclusivement des dires de l'époux, mais d'une
attestation du 5 juillet 2001 émanant de sa fiduciaire. Or, la
recourante
n'expose pas en quoi cette pièce n'autorisait pas la Cour de justice,
en
dépit du refus prétendu de l'intimé de collaborer à l'administration
des
preuves, d'accorder foi aux dires de celui-ci. Dans ces conditions,
le grief
est irrecevable en vertu des exigences de motivation posées par
l'art. 90 al.
1 let. b OJ (ATF 125 I 492 consid. 1b; 117 Ia 10 consid. 4b; 110 Ia 1
consid.
2a et 107 Ia 186).

5.
Invoquant le droit à une décision motivée, la recourante reproche à
la Cour
de justice de s'être bornée à se référer aux "dépositions des
témoins", sans
autre précision, pour étayer son refus d'attribuer à l'époux une
"mauvaise
volonté" ou une renonciation "volontaire" à un important salaire.

Certes, dans la partie en droit de l'arrêt querellé, la Cour de
justice se
contente de justifier sa propre appréciation de la nouvelle
orientation
professionnelle de l'intimé par un renvoi aux témoignages. Cependant,
il sied
également de tenir compte de l'exposé détaillé, sis dans la partie en
fait,
des circonstances du départ de l'intimé (cf. consid. 2.1 ci-dessus).
Eu égard
à ces deux éléments, la motivation litigieuse satisfait aux exigences
de
l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. ATF 126 I 97 consid. 2b; 123 I 31 consid.
2c; 122
IV 8 consid. 2c; 121 I 54 consid. 2c; 111 Ia 2 consid. 4b), si bien
que le
grief est mal fondé. Au demeurant, conformément au consid. 3
ci-dessus, les
motifs du changement professionnel de l'intimé sont dépourvus de
pertinence
en l'espèce.

6.
Vu ce qui précède, le recours est mal fondé dans la mesure où il est
recevable. Succombant, la recourante devra supporter les frais
judiciaires
(art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens, l'intimé
n'ayant
pas été appelé à répondre (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Il est mis à la charge de la recourante un émolument judiciaire de
2'000 fr.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 20 décembre 2002

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.285/2002
Date de la décision : 20/12/2002
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-12-20;5p.285.2002 ?
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