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20/12/2002 | SUISSE | N°5C.180/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 décembre 2002, 5C.180/2002


{T 0/2}
5C.180/2002 /frs

Arrêt du 20 décembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Escher,
greffière Revey.

Dame X.________ (épouse),
défenderesse et recourante, représentée par Me Christine Gaitzsch,
avocate,
3, place de la Taconnerie, 1204 Genève,

contre

X.________, (époux),
demandeur et intimé, représenté par Me Anne-Marie Pellaz, avocate,
41, rue de
la Terrassière, 1207 Genève.

art. 125, 129 al. 3 CC: divorce, contributions d'

entretien

(recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice
du canton de Genève du 14 juin 20...

{T 0/2}
5C.180/2002 /frs

Arrêt du 20 décembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Escher,
greffière Revey.

Dame X.________ (épouse),
défenderesse et recourante, représentée par Me Christine Gaitzsch,
avocate,
3, place de la Taconnerie, 1204 Genève,

contre

X.________, (époux),
demandeur et intimé, représenté par Me Anne-Marie Pellaz, avocate,
41, rue de
la Terrassière, 1207 Genève.

art. 125, 129 al. 3 CC: divorce, contributions d'entretien

(recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice
du canton de Genève du 14 juin 2002).

Faits:

A.
X. ________, né le 14 septembre 1960, et dame X.________ née le 25
mai 1953,
se sont mariés à Genève le 21 août 1987. Deux enfants sont issus de
leur
union, soit J.________, né le 8 mai 1991, et A.________, née le 7
août 1993.

Le 8 novembre 2001, le Tribunal de première instance du canton de
Genève a,
notamment, prononcé le divorce des époux, attribué à l'épouse
l'autorité
parentale et la garde des enfants et réglé le droit de visite du père.
S'agissant des contributions d'entretien en faveur des enfants, il a
condamné
le père à payer, par mois et d'avance, par enfant, outre les
allocations
familiales ou d'études éventuellement versées au débiteur, moyennant
indexation, 1'400 fr. jusqu'à 10 ans, 1'600 fr. de 10 à 15 ans et
1'800 fr.
de 15 ans à la majorité, voire au-delà, mais jusqu'à 25 ans au plus,
en cas
de formation sérieuse et régulière. Il a en outre condamné l'époux à
prendre
en charge à concurrence de 50% les éventuels frais dentaires et
orthodontiques des enfants, ainsi que leurs frais de lunettes qui ne
seraient
pas couverts par une assurance, ces frais devant faire l'objet d'un
devis
préalablement accepté par les deux parents. Quant à la pension de la
conjointe, le Tribunal de première instance a condamné l'époux à
payer, par
mois et d'avance, moyennant indexation, 2'500 fr. tant qu'il aura les
deux
enfants à sa charge financière, 3'000 fr. dès qu'il en aura un seul
et 3'500
fr. dès qu'il en sera libéré. Enfin, le Tribunal de première instance
a
ordonné à la caisse de pension de l'époux de transférer le montant de
116'165
fr. plus intérêts à celle de la conjointe et condamné encore l'époux
à verser
à celle-ci 17'098.10 fr. au titre du partage de leurs avoirs
bancaires et de
la valeur de rachat de la police d'assurance-vie.

B.
Par arrêt du 14 juin 2002, la Chambre civile de la Cour de justice a
partiellement admis le recours interjeté par l'époux contre ce
prononcé, en
ce sens qu'elle a modifié les contributions d'entretien. Ainsi, elle
a fixé
la pension des enfants à 1'000 fr. jusqu'à 10 ans, 1'150 fr. de 10 à
15 ans
et 1'300 fr. de 15 ans à la majorité, voire au-delà, mais jusqu'à 25
ans au
plus, en cas de formation sérieuse et régulière. Sous cet angle, elle
a
encore annulé la participation du père aux frais dentaires,
orthodontiques et
de lunettes des enfants. S'agissant de la rente de l'épouse, la Cour
de
justice l'a arrêtée à 1'500 fr. jusqu'au 30 septembre 2025. De plus,
constatant qu'il n'était pas possible, en l'état, de fixer une rente
permettant d'assurer l'entretien convenable de la crédirentière, la
Cour de
justice a prononcé que l'épouse pourra, en application de l'art. 129
al. 3
CC, et dans un délai de 5 ans à compter du divorce, demander
l'augmentation
de la rente aux conditions prévues par cette norme. Enfin, la Cour de
justice
a compensé les dépens d'appel.

C.
Contre cet arrêt, dame X.________ dépose un recours en réforme. Sous
suite de
frais et dépens, elle requiert le Tribunal fédéral, principalement, de
condamner l'époux aux contributions d'entretien initialement fixées
par le
Tribunal de première instance, participation aux frais dentaires,
d'orthodontie et de lunettes y compris. Subsidiairement, elle
sollicite
l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à l'autorité
cantonale pour nouvelle décision après un éventuel complément
d'instruction.
Parallèlement au présent recours, elle a déposé un recours de droit
public
(5P.285/2002) qui, par arrêt de ce jour, a été rejeté en tant que
recevable.

D.
De son côté, l'intimé sollicite principalement, sous suite de frais et
dépens, le rejet du recours dans la mesure où il est recevable. A
titre
subsidiaire, et en cas de renvoi de la cause à la Cour de justice, il
demande
qu'il lui doit donné acte du maintien de ses conclusions prises en
appel et
requiert que l'épouse soit condamnée en tous dépens devant l'autorité
cantonale.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a; 128 II 66 consid. 1 et
les
arrêts cités).

1.1 L'arrêt attaqué tranche une contestation civile portant sur des
droits de
nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse atteint manifestement
8'000 fr.
Formé en temps utile contre une décision finale prise par le tribunal
suprême
du canton, le recours est recevable au regard des art. 46, 48 al. 1
et 54 al.
1 OJ.

1.2 Les conclusions actives subsidiaires de l'intimé sont
irrecevables, car
elles ne visent pas une modification de l'arrêt attaqué par le
Tribunal
fédéral, partant ne peuvent être qualifiées de recours joint (art. 59
al. 2
et 3 OJ). Sont également irrecevables ses conclusions tendant à ce
que les
dépens de l'instance cantonale soient mis à la charge de la
recourante, dès
lors que ceux-ci ne sont pas réglés par le droit civil fédéral. En
cas de
rejet du recours, il y aura toutefois lieu de tenir compte de l'art.
159 al.
6 OJ.

2.
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant
sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter
les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte
de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127
III 248
consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). En dehors de ces exceptions, il
ne peut
être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits
ou de
moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).

3.
La recourante dénonce une violation des art. 51 al. 1 let. c et 52
OJ, ainsi
que de l'art. 8 CC. Elle affirme à cet égard que les juges cantonaux
ont
retenu des faits contradictoires, dès lors qu'ils ont admis, d'une
part, que
l'intimé n'a pas, en quittant la fiduciaire qui l'employait,
volontairement
renoncé au revenu mensuel d'environ 11'000 fr. dont il bénéficiait et,
d'autre part, que ladite société aurait pu le garder à son service.

L'arrêt attaqué a retenu ce qui suit:
"[L'intimé] a travaillé comme employé salarié dans une société
fiduciaire
jusqu'au 31 octobre 2000. Il réalisait alors un revenu d'environ
11'000 fr.
par mois. N'ayant aucune chance de devenir partenaire dans cette
société, son
domaine d'activité a été peu à peu réduit et il a failli perdre son
emploi
suite à une restructuration.
Son ancien employeur a relevé que la société avait en vue de
développer
principalement la clientèle internationale de grande taille alors que
[l'intimé] s'occupait essentiellement des sociétés PME. Il a toutefois
affirmé qu'il aurait pu utiliser ses services dans la nouvelle
activité."
(partie en fait, p. 5 )
Il ressort ainsi de la décision incriminée que ce n'est pas l'intimé
qui a
abandonné son poste dans le domaine des PME, rémunéré à hauteur de
11'000
fr., mais la fiduciaire qui a supprimé ce secteur. Dans ces
circonstances, et
d'autant que l'on ignore quelles auraient été les conditions de cette
nouvelle activité, notamment le salaire proposé, il n'est pas
contradictoire
de ne pas qualifier de volontaire le départ de l'intimé tout en
constatant
que la société était disposée à l'employer dans le secteur
international. Le
grief tombe dès lors à faux.

4.
4.1De l'avis de la recourante, l'arrêt attaqué viole l'art. 8 CC en
retenant
sur simple affirmation de témoins, à l'exclusion de pièces, que
l'intimé
bénéficie actuellement d'un revenu mensuel de 5'000 à 6'000 fr. A cet
égard,
elle soutient encore que l'époux a refusé de produire les documents
qu'elle
avait requis.

De même, la recourante affirme que la Cour de justice a enfreint
l'art. 8 CC,
dès lors que l'intimé n'a pas démontré, alors que cette preuve lui
incombait,
qu'il n'avait pas volontairement, voire par malice ou mauvaise
volonté,
abandonné un emploi qui lui rapportait un revenu mensuel de 11'000 fr.

4.2 A teneur de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne
prescrit le
contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son
droit. Pour
toutes les prétentions relevant du droit privé fédéral, l'art. 8 CC
répartit
le fardeau de la preuve (ATF 126 III 315 consid. 4a; 122 III 219
consid. 3c)
- en l'absence de disposition spéciale contraire - et détermine, sur
cette
base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec
de la
preuve (ATF 127 III 519 consid. 2a et les arrêts cités). Cette
disposition
interdit notamment au juge de considérer comme établi un fait
pertinent
allégué par une partie pour en déduire son droit, alors que ce fait,
contesté
par la partie adverse, n'a pas reçu un commencement de preuve (ATF
114 II 289
consid. 2a). En revanche, l'art. 8 CC ne régit pas l'appréciation des
preuves
(ATF 120 II 128 consid. 3a). En particulier, la manière dont le juge
tire les
conséquences du refus d'une partie de collaborer à l'administration
des
preuves relève de l'appréciation des preuves, partant est exorbitante
de
l'art. 8 CC (cf. ATF 119 II 305; voir aussi art. 40 PCF et Max Kummer,
Commentaire bernois, 1962, n° 184 ad art. 8 CC).

4.3 S'agissant en l'espèce du montant du revenu effectif actuel de
l'intimé,
les juges cantonaux ne se sont pas fondés exclusivement sur les
déclarations
de l'intéressé, mais aussi, comme le relève la recourante, sur une
attestation du 5 juillet 2001 émanant de sa fiduciaire. Dans ces
conditions,
on ne saurait dire qu'ils ont considéré comme établi un fait contesté
n'ayant
pas reçu de commencement de preuve. Par ailleurs, le point de savoir
si la
Cour de justice a suffisamment tenu compte, dans l'appréciation des
preuves,
du refus supposé de l'époux de produire d'autres pièces, relève
exclusivement
du recours de droit public, partant est irrecevable dans le recours en
réforme. Le grief de violation de l'art. 8 CC est dès lors rejeté en
tant que
recevable.

5.
La recourante dénonce diverses violations de l'art. 125 CC.

5.1 L'épouse soutient que la Cour de justice aurait dû calculer la
contribution d'entretien en tenant compte d'un revenu hypothétique de
l'époux
de 11'000 fr., et non de son revenu réel.

Un revenu hypothétique supérieur au revenu réel peut être imputé au
débiteur
de contributions d'entretien lorsque celui-ci renonce volontairement
ou par
négligence à un revenu plus élevé. Encore faut-il qu'une augmentation
correspondante de revenu soit effectivement possible et qu'elle puisse
raisonnablement être exigée du débiteur (ATF 128 III 4 consid. 4), la
première condition relevant du fait et la seconde du droit (ATF 126
III 10
consid. 2b). La jurisprudence a toutefois laissé indécise la question
de
l'opportunité d'exiger de telles conditions lorsque le débiteur agit
dans
l'intention délibérée de nuire (ATF 128 III 4 consid. 4a in fine).

En l'occurrence, un tel dessein de nuire n'est pas en cause et l'arrêt
attaqué retient un revenu réel de l'intimé de 5'000 à 6'000 fr. sans
faire
état d'une possibilité pour l'intimé d'obtenir davantage. La Cour de
céans
étant liée par l'état de fait du prononcé incriminé, la question de
savoir si
l'on peut raisonnablement exiger de l'époux qu'il augmente ses gains
ne se
pose pas (cf. consid. 2 supra).

5.2 La recourante fait grief aux juges cantonaux d'avoir fixé la
contribution
d'entretien à 1'500 fr. En particulier, elle leur reproche d'avoir
omis, pour
déterminer ce montant, d'augmenter ses charges incompressibles de 20%
alors
qu'ils ont accordé une telle majoration à l'intimé.

5.2.1 Selon l'art. 125 CC, si l'on ne peut raisonnablement attendre
d'un
époux qu'il pourvoie lui-même à son entretien convenable, y compris à
la
constitution d'une prévoyance vieillesse appropriée, son conjoint lui
doit
une contribution équitable (al. 1). Pour décider si une contribution
d'entretien est allouée et pour en fixer, le cas échéant, le montant
et la
durée, le juge retient en particulier les éléments énumérés à
l'alinéa 2 de
cette disposition.

Sous l'angle de sa durée, l'obligation d'entretien ne subsiste que
pendant le
temps nécessaire à l'époux pour retrouver son autonomie financière, y
compris
du point de vue de la prévoyance vieillesse (Heinz Hausheer/Annette
Spycher,
Unterhalt nach neuem Scheidungsrecht, Berne 2001, n° 05.163 ss).

Comme sous l'ancien droit, la loi n'impose pas au juge de méthode de
calcul
particulière pour fixer la quotité de la rente (Thomas Sutter/Dieter
Freiburghaus, Kommentar zum neuen Scheidungsrecht, Zurich 1999, n°
118 ad
art. 125 CC; Message du Conseil fédéral du 15 novembre
1995, FF 1996
I 1 ss,
p. 119). La détermination de celle-ci relève du pouvoir
d'appréciation du
juge du fait, qui applique les règles du droit et de l'équité (art. 4
CC). A
cet égard, il n'y a violation du droit fédéral que si le juge a abusé
de son
pouvoir d'appréciation, en se référant à des critères dénués de
pertinence ou
en ne tenant pas compte d'éléments essentiels, ou bien encore si,
d'après
l'expérience de la vie, le montant arrêté paraît manifestement
inéquitable
(ATF 127 III 136 consid. 3a; 108 II 30 consid. 8 et l'arrêt cité).

5.2.2 Une des méthodes permettant de déterminer la contribution
d'entretien
due est celle dite du minimum vital avec répartition de l'excédent.
Elle
consiste à évaluer d'abord les ressources respectives des époux, puis
à
calculer leurs charges en se fondant sur le minimum vital de base du
droit
des poursuites, élargi des dépenses incompressibles, enfin à répartir
le
montant disponible restant à parts égales entre eux, cette égalité
étant
toutefois relativisée pour prendre en considération, notamment, la
participation d'éventuels enfants communs à l'excédent. Il en va
cependant
différemment en présence de situations économiques particulièrement
favorables ou, au contraire, serrées ou déficitaires
(Hausheer/Spycher, op.
cit., nos 05.88 ss; mêmes auteurs, Handbuch des Unterhaltsrechts,
Berne 1997,
n° 08.69; Hausheer, Der Scheidungsunterhalt und die Familienwohnung,
in: Vom
alten zum neuen Scheidungsrecht, Berne 1999, nos 3.55 ss; Ingeborg
Schwenzer,
Praxiskommentar Scheidungsrecht, Bâle 2000, nos 75 ss ad art. 125 CC;
Sutter/Freiburghaus, op. cit., n° 118 ad art. 125 CC; sur la
répartition du
solde disponible, voir ATF 126 III 8 consid. 3c).

Quant à la question d'une majoration de 20% des charges des parties,
il faut
notamment relever que le conjoint débirentier ne saurait être réduit
purement
et simplement au minimum vital élargi du droit des poursuites au sens
de
l'art. 93 LP. Ce seuil, qui vise à protéger les intérêts de
créanciers tiers,
ne permet normalement pas de mener une existence convenable. Or, on
ne peut
exiger du conjoint débirentier, en principe appelé à verser une
contribution
d'entretien pendant de nombreuses années, qu'il se restreigne à un
niveau de
vie à ce point modeste pendant une période aussi longue, alors que
l'art. 93
LP lui-même interdit de saisir les revenus du débiteur au-delà d'une
année
(Hausheer/ Spycher, op. cit. 2001, n° 05.93; arrêt non publié
5C.296/2001 du
12 mars 2002, consid. 2c/dd).

5.2.3 La Cour de justice a arrêté la rente à accorder à l'épouse en
appliquant la méthode précitée. Dans ce cadre, elle a évalué les
revenus de
l'époux à 6'000 fr. et ses charges à 2'200 fr. Compte tenu d'une
majoration
de 20%, celles-ci s'élevaient à 2'640 fr. (2'200 fr. x 20%),
auxquelles il
fallait ajouter les pensions dues aux enfants, de 1'000 fr. jusqu'à
10 ans,
1'150 fr. de 10 à 15 ans et 1'300 fr. de 15 ans à la majorité, voire
au-delà.
Quant à la recourante, ses revenus étaient nuls, tandis que ses
charges
ascendaient à 3'542 fr. Au vu de ces éléments, la Cour de justice a
décidé de
fixer la pension de l'épouse à 1'500 fr., relevant que ce montant
entraînait
pour l'époux, compte tenu des paliers relatifs aux pensions des
enfants, des
charges atteignant 6'140 fr. jusqu'au 7 mai 2001 pour augmenter
progressivement jusqu'à 6'740 fr. dès le 7 août 2008.

Dans ces circonstances, on ne discerne pas en quoi une augmentation
de 20%
des charges de la recourante aurait pu modifier le montant de la
contribution
d'entretien fixée par les juges cantonaux, pas plus qu'on ne voit en
quoi
ceux-ci auraient abusé de leur pouvoir d'appréciation en arrêtant
ladite
pension à 1'500 fr. Tel est d'autant moins le cas qu'ils ont
expressément
reconnu que ce montant ne suffisait pas à couvrir les besoins de
l'épouse,
mais que le minimum vital du débirentier interdisait d'aller au-delà,
la
recourante pouvant toutefois, en application de l'art. 129 al. 3 CC,
solliciter l'augmentation de la rente allouée dans le délai de cinq
ans à
compter du divorce, si la situation du débirentier devait s'améliorer.

5.3 La recourante reproche à la Cour de justice d'avoir limité la
durée de la
contribution d'entretien à l'accession de l'époux à la retraite, le 30
septembre 2025, alors qu'elle réclamait une rente à vie.

5.3.1 L'autorité cantonale a justifié la limitation litigieuse en se
référant
au partage entre les conjoints des avoirs professionnels de l'époux.
A cet
égard, elle a exposé qu'il n'y avait pas lieu, compte tenu de cette
répartition, "de considérer que l'épouse divorcée subira un déficit de
prévoyance à cause du mariage, mais bien plutôt à cause de son défaut
d'activité lucrative postérieurement au prononcé du divorce."
5.3.2Comme il a été rappelé ci-dessus (consid. 5.2.1), l'obligation
d'entretien post-divorce subsiste aussi longtemps que l'époux
bénéficiaire
n'a pas acquis son indépendance financière, étant précisé que
l'étendue de
cette contribution dépend des revenus du débirentier.

L'arrêt attaqué ne renseigne aucunement sur la situation économique
probable
de chaque conjoint au moment de la retraite de l'époux, le 30
septembre 2025,
date à laquelle la recourante aura elle-même 72 ans. On ne connaît ni
leurs
revenus, ni leurs charges incompressibles. Dans ces conditions, la
Cour de
céans n'est pas en mesure d'examiner si le prononcé incriminé viole
le droit
fédéral en supprimant dès le jour précité l'obligation d'entretien
imposée à
l'époux. Il sied dès lors d'annuler l'arrêt querellé sur ce point et
de
renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour complément
d'instruction et
nouveau jugement. Encore peut-on préciser que, dès lors que l'époux
n'a pas
recouru devant le Tribunal fédéral et que l'art. 63 al. 1 OJ interdit
la
reformatio in pejus, la Cour de céans est dispensée d'examiner si la
contribution d'entretien devrait prendre fin ou subir une diminution
lorsque
la recourante elle-même atteindra l'âge de la retraite et bénéficiera
des
rentes AVS et LPP.

6.
Enfin, la recourante affirme que la Cour de justice a violé l'art.
286 CC en
refusant d'astreindre l'intimé à prendre en charge, à certaines
conditions,
d'éventuels frais dentaires, orthodontiques et de lunettes des
enfants.

Les juges cantonaux ont considéré qu'il n'y avait "pas lieu de
prévoir le
versement d'une contribution spéciale au sens de l'art. 286 al. 1 CC
dans la
mesure où il n'est ni prouvé ni rendu vraisemblable que des
changements
déterminés (et nécessaires) interviendront dans les besoins des
enfants."

L'alinéa 1 de l'art. 286 CC permet de fixer, déjà dans le jugement de
divorce, des modifications de la contribution d'entretien fondées sur
des
changements "déterminés". Cette disposition n'est applicable qu'en
présence
de changements durables, notables et vraisemblables. Dans la
pratique, il
s'agit surtout de l'échelonnement des contributions en fonction de
l'âge de
l'enfant et de leur indexation au coût de la vie (Cyril Hegnauer,
Berner
Kommentar, 1997, nos 10 ss ad art. 286 CC). Quant à l'alinéa 3,
relatif à la
survenance de besoins extraordinaires imprévus, il ne tend pas à
modifier la
rente proprement dite, mais permet d'imposer un versement unique pour
une
nécessité particulière de l'enfant, limitée dans le temps, non prévue
lors de
la fixation de la contribution et qui ne peut pas être couverte par
cette
dernière. Tel est typiquement le cas des corrections dentaires, ainsi
que des
mesures scolaires particulières et de nature provisoire. Encore
faut-il tenir
compte à cet égard de la situation et des ressources du parent
débiteur
(Wullschleger, Praxiskommentar, op. cit., n° 18 ad art. 286 CC;
Micheli et
al., Le nouveau droit du divorce, 1999, nos 408 ss; Message, op.
cit., p.
165).

En l'occurrence, les frais en cause ne sont pas déterminables, ni
durables,
ni suffisamment vraisemblables. En effet, la recourante n'a pas
allégué la
probabilité concrète que des traitements dentaires, orthodontiques ou
de
lunettes seraient nécessaires à l'avenir, encore moins chiffré leur
coût.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que la Cour de justice a
refusé
d'appliquer l'art. 286 al. 1 CC. Si l'éventualité de tels soins
devait se
réaliser, il appartiendrait dès lors à la recourante de réclamer à ce
moment-là, en vertu de l'alinéa 3 de l'art. 286 CC, un versement
approprié.

7.
Vu ce qui précède, le recours doit être partiellement admis en tant
que
recevable, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité
cantonale, en application de l'art. 64 al. 1 OJ, pour qu'elle
complète l'état
de fait et rende une nouvelle décision dans le sens des considérants.
La
recourante n'ayant gain de cause que dans une certaine mesure, les
frais de
justice seront mis à sa charge et à celle de l'intimé, à hauteur de
trois
quarts et un quart respectivement (art. 156 al. 3 OJ). En outre, la
recourante versera à l'intimé une indemnité à titre de dépens réduits
(art.
159 al. 3 OJ). Par ailleurs, il n'y a pas lieu de modifier le prononcé
attaqué en ce qui concerne les dépens de l'instance cantonale (art.
159 al. 6
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis en tant que recevable, l'arrêt
attaqué est
annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour complément
d'instruction et nouvelle décision.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge des parties,
à
hauteur de 1'500 fr. pour la recourante et de 500 fr. pour l'intimé.

3.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 1'000 fr. à titre
de dépens
réduits.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 20 décembre 2002

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.180/2002
Date de la décision : 20/12/2002
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-12-20;5c.180.2002 ?
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