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26/11/2002 | SUISSE | N°U.52/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 novembre 2002, U.52/02


{T 7}
U 52/02

Arrêt du 26 novembre 2002
IVe Chambre

MM. les Juges Rüedi, Ferrari et Boinay, suppléant. Greffière : Mme
Berset

Zurich Assurances, Direction générale, Talackerstrasse 1, 8152
Opfikon,
recourante, représentée par Me Pierre del Boca, avocat, Petit-Chêne
18, 1003
Lausanne,

contre

F.________, intimé, représenté par Me Joël Crettaz, avocat, place
Pépinet 4,
1003 Lausanne

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 28 août 2001)r>
Faits :

A.
F. ________ travaillait en qualité de directeur de l'entreprise
X.________ SA
, à B.________. A ce titre,...

{T 7}
U 52/02

Arrêt du 26 novembre 2002
IVe Chambre

MM. les Juges Rüedi, Ferrari et Boinay, suppléant. Greffière : Mme
Berset

Zurich Assurances, Direction générale, Talackerstrasse 1, 8152
Opfikon,
recourante, représentée par Me Pierre del Boca, avocat, Petit-Chêne
18, 1003
Lausanne,

contre

F.________, intimé, représenté par Me Joël Crettaz, avocat, place
Pépinet 4,
1003 Lausanne

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 28 août 2001)

Faits :

A.
F. ________ travaillait en qualité de directeur de l'entreprise
X.________ SA
, à B.________. A ce titre, il était assuré contre le risque
d'accident
professionnel et non professionnel auprès de la Zurich Assurances. Il
exploitait également, sous forme de raison individuelle, le Café
Y.________
et le restaurant Z.________, situés l'un et l'autre dans le même
immeuble que
X.________. La cuisine, dont il avait la responsabilité, était
commune aux
trois établissements.

Le 17 novembre 1994, il a été victime d'un accident de la circulation
qui a
provoqué une fracture ouverte délabrée supra-condylienne de l'humerus
gauche
distal avec perte de substance, une luxation radio-cubitale distale du
poignet gauche, des fractures de côtes ( 3ème et 4ème côtes gauches )
associées à une contusion pulmonaire gauche antérieure ainsi que des
plaies
au cuir chevelu et au pavillon de l'oreille gauche sans traumatisme
crânio-cérébral. Les lésions au membre supérieur gauche ont été
traitées par
réduction sanglante avec mise en place d'un fixateur externe, suivie
d'une
greffe de Thiersch au niveau du coude gauche. Le 9 février 1995, il a
été
procédé à une reconstruction du capitullum par greffe osseuse prise
sur la
crête iliaque gauche.

F. ________ a été examiné par le docteur A.________, spécialiste FMH
en
chirurgie orthopédique et traumatologique. Dans son rapport du 10
septembre
1996, le docteur A.________ a constaté des difficultés à obtenir une
évaluation exacte de l'activité ou des possibilités d'activités de
F.________
auprès de l'entreprise X.________. Selon l'expert, la préparation de
sandwichs paraît demeurer possible puisque, pour F.________ qui est
gaucher,
la force de la main gauche est suffisante pour exécuter ce genre de
travail.
Comme la répétition des mouvements peut engendrer une certaine
fatigabilité,
il a dès lors fixé la capacité de travail de F.________ à 50 % dans
l'activité liée à la sandwicherie. Sous réserve d'une étude plus
exacte du
travail à effectuer, ce taux doit être considéré comme minimum.
Ultérieurement, après adaptation ou organisation, une activité à 75 %
peut
être possible. Selon le docteur A.________, F.________ peut, à
l'avenir,
travailler à 75 % dans une activité appropriée, c'est-à-dire
comportant une
part de travail administratif et une part de travail de cuisinier,
cette
dernière ne devant pas nécessiter le port de lourdes charges. Les 25 %
manquants peuvent être expliqués par une certaine fatigabilité et une
faiblesse du membre supérieur gauche. L'expert a encore noté que,
avec le
temps, une certaine adaptation à l'effort peut se faire et la
situation
s'améliorer.

Par décision du 31 octobre 1996, la Zurich Assurances a fixé
l'indemnité pour
atteinte à l'intégrité à 15 %, a mis fin aux indemnités journalières,
ainsi
qu'au traitement médical dès le 30 septembre 1996; elle a également
constaté
que l'accident n'avait pas généré de diminution de la capacité de
gain de
l'assuré et, partant, nié tout droit à une rente d'invalidité.

Saisie d'une opposition, la Zurich Assurances l'a rejetée en ce qui
concerne
l'octroi d'une rente et l'a partiellement admise concernant le taux
d'atteinte à l'intégrité qui a été porté à 35 %.

B.
F.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des
assurances
du canton de Vaud. Il a conclu à l'octroi d'une rente d'invalidité
dès le 1er
octobre 1996, à un taux fixé à dire de justice.

Le Tribunal des assurances a ordonné l'édition du dossier AI, dont il
ressort
que le prénommé a bénéficié d'un reclassement professionnel dans le
domaine
du tourisme du 4 septembre 1997 au 31 juillet 1999. Cette mesure a été
prolongée du 1er août 1999 au 31 juillet 2000.

Par jugement du 28 août 2001, le Tribunal des assurances du canton de
Vaud a
admis le recours et renvoyé le dossier à la Zurich Assurances pour
qu'elle
alloue une rente d'invalidité à un taux de 25 % dès le 1er octobre
1996.

C.
La Zurich Assurances interjette recours de droit administratif contre
ce
jugement dont elle demande l'annulation en concluant, sous suite des
frais et
dépens, à sa réformation en ce sens que «le revenu de valide n'est pas
supérieur au revenu d'invalide et que, par conséquent, il n'y a pas
d'invalidité».

F. ________ a conclu au rejet du recours. L'Office fédéral des
assurances
sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
Le litige porte sur le taux d'invalidité de l'intimé.

2.
Les premiers juges ont correctement exposé les dispositions légales
et la
jurisprudence applicables en matière d'évaluation de l'invalidité, si
bien
qu'il suffit de renvoyer à leur jugement.

Il y a lieu d'ajouter que chez les assurés actifs, le degré
d'invalidité doit
être déterminé sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela,
le
revenu du travail que l'invalide pourrait obtenir en exerçant
l'activité
qu'on peut raisonnablement attendre de lui, après exécution
éventuelle de
mesures de réadaptation et compte tenu d'une situation équilibrée du
marché
du travail, est comparé au revenu qu'il aurait pu obtenir s'il
n'était pas
invalide ( art. 18 al. 2 LAA ). La comparaison des revenus
s'effectue, en
règle générale, en chiffrant aussi exactement que possible les
montants de
ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la
différence
permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ces
revenus ne
peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les
éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare
entre elles
les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de
comparaison
des revenus ; ATF 104 V 136 consid. 2a et 2b ).

Cette manière de calculer est également applicable lorsque la
détermination
exacte des revenus serait possible mais qu'elle occasionnerait des
frais
disproportionnés et si l'on peut supposer que l'estimation du revenu
conduira
à un résultat suffisamment sûr ( ATF 104 V 137 consid. 2b ).

3.
3.1Les premiers juges ont estimé que le revenu sans invalidité d'un
patron
cafetier-restaurateur, comme c'est le cas de l'intimé, pouvait
s'élever à
7500 fr. mensuellement pour la totalité de son activité.

Cette manière de voir est contestée par la recourante qui se fonde
sur une
estimation des revenus de l'intimé avant l'accident. L'argumentation
du
recours est basée sur le fait que la comptabilité des établissements
de
l'intimé démontre, selon elle, que ce dernier ne pouvait pas se
verser un
salaire mensuel de 7500 fr.

3.2 Selon l'art. 28 al. 2 OLAA, chez les assurés qui exercent
simultanément
plusieurs activités salariées, le degré d'invalidité est déterminé en
fonction de l'incapacité subie dans l'ensemble de ces activités. Si
en plus
d'une activité salariée, l'assuré exerce une activité lucrative
indépendante
non assurée en vertu de la loi ou une activité non rémunérée,
l'incapacité
subie dans cette activité n'est pas prise en considération.

Dans un arrêt du 16 mars 1998 (SVR 1999 UV n° 1 p. 1), le Tribunal
fédéral
des assurances a jugé que, lorsqu'un assuré exerce deux activités,
l'une
dépendante, l'autre indépendante, le revenu sans invalidité doit être
évalué
sans tenir compte de l'incapacité subie dans l'activité lucrative
indépendante.

Par ailleurs et selon les principes posés par l'arrêt ATF 119 V 481
consid.
2b, le revenu sans invalidité doit être établi sans égard au fait que
l'assuré mettait à profit entièrement, ou en partie seulement, sa
capacité de
travail avant l'accident. Il faut, autrement dit, rechercher quelles
sont les
possibilités de gain d'un assuré censé les utiliser pleinement.

3.3 Les premiers juges ont retenu - ce qui n'est pas contestable - que
l'ensemble des trois activités exercées par l'intimé (dont deux ne
sont pas
assurées) lui procure un salaire de 7500 fr. par mois. Dès lors qu'en
application des règles et principes précités, on doit prendre en
considération le revenu de l'activité salariée comme si elle avait été
exercée à plein temps, il y a lieu d'admettre que le montant de 7500
fr. peut
effectivement représenter le revenu que l'intimé aurait réalisé comme
directeur de la croissanterie, s'il avait exercé cette activité
salariée à
plein temps. Le fait que l'on puisse considérer, en l'absence d'autres
éléments, que l'intimé exerçait cette activité à raison d'un tiers
temps ne
joue pas de rôle lorsqu'il s'agit de procéder à la comparaison des
revenus
(cf. ATF 119 V 481 précité).

Dans ces circonstances, et par substitution de motifs, il y a lieu de
s'en
tenir au revenu sans invalidité de 7500 fr.

Par ailleurs, il ne se justifie pas de retourner le dossier à
l'autorité
cantonale pour faire procéder à une expertise comptable,
vraisemblablement
coûteuse, car le résultat auquel on parvient est suffisamment sûr.

4.
4.1Le revenu d'invalide a été estimé par les premiers juges à un
montant
mensuel de 5000 à 6000 fr., eu égard au reclassement de l'assuré dans
le
secteur des services. La possibilité de réaliser ce salaire n'est
contestée
ni par la recourante ni par l'assuré, qui conclut simplement au rejet
du
recours.

4.2 L'appréciation faite par la cour cantonale doit être confirmée,
car les
montants retenus correspondent au salaire qu'une personne telle que
l'intimé
est en mesure de réaliser, compte tenu de sa formation de base et de
celle
acquise dans le cadre du reclassement par l'assurance-invalidité.
Dans le
secteur des services, l'intimé n'a aucune limitation fonctionnelle de
son
bras gauche, si l'activité ne comprend pas le port de lourdes
charges. Il a
donc la possibilité d'occuper toute une série de postes de travail
dans ce
secteur dont la rémunération pouvait varier, en 1996, entre 7356 fr. (
moyenne des salaires pour un homme dans la catégorie la plus
qualifiée ) et
4949 fr. (moyenne des salaires pour un homme dans la catégorie
moyennement
qualifiée), selon les données de l'enquête suisse sur la structure des
salaires 1996 (tabelle A1), publiée par l'Office fédéral de la
statistique en
1998 .

Au regard de ces éléments et des principes exposés au consid. 2
ci-dessus, le
taux d'invalidité de 25 % retenu par les premiers juges n'est pas
critiquable.

Le recours se révèle ainsi mal fondé.

5.
La procédure porte sur l'octroi ou le refus de prestations
d'assurance, si
bien qu'elle est gratuite ( art. 134 OJ ).

L'intimé, qui obtient gain de cause, a droit à une indemnité de
dépens à
charge de la recourante ( art. 159 al. 1 OJ ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
La Zurich Assurances versera à l'intimé une indemnité de dépens de
1500 fr.
(y compris la taxe à la valeur ajoutée ) pour l'instance fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 26 novembre 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Juge présidant la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.52/02
Date de la décision : 26/11/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-11-26;u.52.02 ?
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